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1843. - I.“ 4
MVERS, mercredi 4 Janvier
(Huitième Année.)
LE PRÉCi l&SEl EU
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du PRÉCURSEUR, Bourse Anglaise
N.o 1040; en Belgique et à l’étranger
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insertions 25 oentimvs la ligue
Réclames 50 • ■
4 Janvier.
DK LA CIVILISATION EN FRANCE , EN
ANGLETERRE ET EN ALLEMAGNE.
Dans une de ces belles leçons que donnait M. Guizot au col-
lége de France avant qu’il eut échangé la paisible carrière du
professorat pour de hautes fonctions dont l’éclat se paie au
prix du bonheur, l’illustre historien fait un tableau comparatif
de la civilisation en Europe, et se décide enlin à adjuger la pal-
me à sa patrie. L’Angleterre, tel est son raisonnement, excelle
dans tout ce qui a rapport au bien-être matériel ; elle abonde
en inventions qui augmentent la richesse publique en écono-
misant le travail des hommes, et les établissements grandioses
de son commerce et de son industrie ont laissé toute rivalité en
arrière. Mais en appliquant toute son énergie au perfectionne-
ment de la vie sociale, elle a oublié l’idéal et u'embrasse qu’une
moitié et encore la moitié la moins noble de ce qui constitue la
civilisation. Ainsi, chez elle, le développement de la société est
plus glorieux que celui de l'humanité, et le bien-être matériel
n’est pas accompagné d’un progrès analogue dans les esprits.
L’Allemagne de son côté a donné dans l'extrême opposé; occu-
pée de recherches abstraites, son activité intellectuelle s’est
principalement portée sur l'idéal; dans aucun paysonn’a creusé
plus avant dans les abitnes des temps passés, jeté un regard
plus perçant sur les voiles qui nous cachent l’avenir; et si pro-
fondément médité sur la nature de l’homme et de Dieu ; mais
les progrès de son état social n’ont point marché du même pas
que l'activité de son esprit en philosophie, en histoire, en litté-
rature et en poésie. De sorte qu'ici encore nous voyons une ci-
vilisation incomplète, diamétralement opposée à la civilisation
anglaise; ce sont deux mondes différents, dont l’un est riche
de tout ce qui manque à l'autre. De même que le génie pratique
éclate partout en Angleterre, de même la pure activité intel-
lectuelle est le trait dominant de la civilisation allemande.
Ce n’est qu’en France que l'homme et lasociétéontmarché et
grandi, à peu de distance l’un de l’autre. Rien ne s’y est passé
dans le monde réel, dont l’intelligence n’ailtiré pourson compte
une nouvelle richesse ; rien dans le monde de l'intelligence qui
n’ait eu dans le monde réel son retentissement et son éclat.
Aussi la civilisation française reproduit plus fidèlement qu’au-
cune autre l'idée fondamentale de la civilisation. C’est la plus
complète, la plus vraie, la plus civilisée pour ainsi dire. Ce
raisonnement de M. Guizot a quelque chose de brillant qui
séduit au premier coup-d’œil, mais il a le malheur de pécher
par la base. D’abord on peut nier que l’Allemagne soit arriérée
dans tout ce qui a rapport à la vie sociale. Un pays où les gou-
vernements donnent tant de soins à l’éducation morale et intel-
lectuelle de leurs sujetselà l'accroissement de l’industrie et du
commerce ; où les arts sont cultivés avec passion et un succès
qui n’est point surpassé ailleurs; où , enfin, les belles letttres
étendent leur douce influence sur toutes les classes de la
société, peut, sous tous les rapports, soutenir la comparai-
son avec l’étranger. Pour ne pas proclamer tout haut ses
progrès, l’Allemagne ne cesse cependant pas d’en faire de très
grands et quoique le motde civilisation ne soi t pas prononcé chez
elle aussi souvent qu'ailieurs, elle n’en est pas moins à la tête delà
civilisation.Chez elle les lumières ne se concentrent pas dans un
seul foyer qui absorbe toute l’intelligence du pays et laisse tou-
tes les autres parties dans une déplorable pénurie ; mais elles
brillent dans les petites capitales comme dans les grandes, et
dans trente universités qui les font rayonner jusque dans les
cantons les plus reculés. Par la promptitude avec laquelle
elle s’est mise à construire son système de chemins de fer et à
couvrir ses grands fleuves de bateaux à vapeur, l’Allemagne a
prouvé qu'elle ne néglige point ses intérêts terrestres autant
qu’on le prétend, et qu’elle s’occupe d’autres choses que de
rêveries mystiques. Ne pourrait-on pas avec une plus grande
apparence de justice adresser ce reproche à la France, chez
laquelle les chemins de fer les plus importants sont encore à
l’état de rêve, et où il en est de même de tant d’autres amélio-
rations? On sait dans quel triste état s’y trouvent toutes les
branches de l'agriculture, et que M. Thiers, lorsqu’il voulut
conquérir l’Allemagne, il y a deux ans, fut obligé d’y aller ache-
ter les chevaux nécessaires à l’exécution de son plan. La haute
civilisation de l’Allemagne se prouve encore par le respect
qu’elle porte aux autres nationalités; ainsi nous ne la voyons
pas proclamer ouvertement la spoliation de ses voisins, ni faire
d'un zèle affecté pour la marche de l’humanité, le manteau de
son ambition intéressée.
Il n’est pas étonnant que la Belgique qui prend pres-
que exclusivement ses idées en France, qui ne parle et ne
lit que le français, ait en général une idée très fausse de
la puissance et de l’état social des Etats qui l’avoisinent. Car
elle n’entend qu’une seule voix que les préjugés nationaux ren-
dent nécessairement partiale. Pour agrandir son horizon intel-
lectuel, rien ne lui serait plus utile que de favoriser l’étude de
la littérature allemande et de s’approprier le vaste trésor de
pensées et d’observations que celle-ci renferme. Elle cesserait
alors d etre l’humble vassale de la France, dans tout ce qui a
rapport à la littérature et aux sciences, situation la plus dan-
gereuse pour un peuple qu’on puisse concevoir ; car une nation
qui se résigne à une dépendance littéraire et scientifique, est
déjà à moitié conquise, et. quoiqu’en possession d’une indépen-
dance apparente, elle l’a déjàabdiquée par le fait.Si la Belgique
croit devoir tomber tôt ou tard au pouvoir de la Frauce, elle
fait bien de se préparer d’avance à la servitude ; mais si elle a
foi dans l’avenir et quelle est bien persuadée que l’Europe
réunie est là pour garantir son indépendance, que le glaive de
l’Allemagne et le formidable trident de l’Angleterre se laisse-
ront briser plutôt que delà voir devenir une province française;
alors il faut qu’elle sorte de son inertie intellectuelle et qu’elle
fasse voir au monde qu’elle est digne de siéger dans l’aréopage
européen. Il est vrai que depuis la révolution de septembre elle
a fait des progrès étonnants et que ses historiens luttent avec
ses artistes à retracer aux yeux de la génération actuelle l’anti-
que gloire de ses ancêtres ; mais ce ne sont là encore que des
efforts individuels qui n’ont pas pénétré la masse de la nation,
dont l’éducation,et par conséquent les pensées sont encore trop
exclusivementfrançaises. Cependant nous ne doutons pasqu’un
heureux changement dans les esprits n'ait lieu bientôt par la
force des circonstances. Lorsque du haut des tours des super-
bes cathédrales d’Anvers et de Cologne on pourra voir les lignes
de fer qui aboutiront à ces deux villes si riches en souvenirs ;
alors le nombre des Belges qui iront grossir la liste prodigieuse
des voyageurs, qui vont annuellement admirer les antiques ci-
tés du Rhin, et les beaux sites de ce fleuve magnifique qui porte
sur ses deux rives tant de monuments de l'ancienne splendeur
de l’Allemagne, sera si considérable qu’un rapide échange d’i-
dées s’en suivra nécessairement, et que dans quelques années
les sympathies de la Belgique prendront une direction plus
naturelle et plus conforme à ses véritables intérêts.
ENCORE LE MONUMENT DE RUBENS.
Le langage sévère que nous avons tenu à l’égard de nos édiles
a été approuvé par les uns, désapprouvé par les autres. Il en
est de tout comme cela; aussi n’avons-nous nullement la pré-
tention d’un assentiment général. 11 nous suflil de savoir que
les hommes compétents ayant du tact et du discernement,
pensent tout-à-fait de la même manière que nous.
On s’étonne de ce que nous nous scandalisions de l’élévavion
d’un monument sur une Place qui a été choisie de préférence
à la Place-de-Meir, parce que, pour se trouver à l’endroit le
plus convenable de cette dernière place, ce monument aurait
dû occuper l'emplacement d’une croix qui a été supprimée et
à la réection de laquelle on ne peut cependant plus songer.
Mais nous ne sommes pas moins scrupuleux que ceux qui
ont été guidés par ce dernier motif pour repousser le projet
d'élever la statue de Rubens sur la Place-de-Meir, car nous
rougissons devoir prendre aussi légèrement la détermination
de remuer encore une fois la terre d’un lieu aussi sacré que la
Place-Verte. Quel est, en effet, l’Anversois qui peut voir avec
indifférence remuer les cendres de ses pères, et l’irrévérence
avec laquelle on les foule aux pieds dans ces fâcheuses circon-
stances ? — Nous poussons si loin le scrupule à cet égard, que
nous souffrons chaque fois qne nous voyons la Place-Verte
transformée en promenade publique ; mais il faut savoir faire
taire ses scrupules et les sacrifier aux idées du jour; car de
scrupules en scrupules, on flairait par ne plus rien pouvoir
faire.
A la Place-Verte, on se fera scrupule de faire tourner le dos
de Rubens du côté du Temple Divin , de manière qu’il faudra
compléter l’acte de vandalisme projeté en tournant la face du
monument vers le Nord, et les étrangers qui nous arrivent en
masse dans la belle saison devront attendre le crépuscule pour
pouvoir considérer l’image de notre grand concitoyen, sans être
éblouis par les rayons du soleil; à moins qu’il n’y ail là à poste
fixe des loueurs de lunettes noircies du genre de celles dont on
se sert pour pouvoir observer les éclipses.— En un mot, la statue
de Rubens paraît être destinée à prolonger indéfiniment la risée
à laquelle les Anversois sont exposés depuis 1840 , de la part
des artistes, de la part de tous ceux qui ont voyagé, et qui ont
un peu observé et comparé. — Si telle est la destinée de cette
Statue, autant la laisser dans sa cachette, jusqu’à ce qu'une
nouvelle génération ait le temps d'arriver pour réparer des fautes
qui sont irréparables aujourd’hui, et qui le seront aussi long-
temps que les questions d'amour-propre seront mises en jeu.
Nous terminerons par faire observer qu’en mettant la statue
de Rubens à la Place-de-Meir vis-à-vis la rue des Tanneurs, on
ne verra plus alors, dans nos solennités religieuses, dresser
l'autel dans le sens inverse de celui qui est exigé par les lois de
l’église. C’est une considération qui n’aurait pas dû échapper à
la partie la plus scrupuleuse de nos édiles, celle-là même qui
n’a pas le moins contribué à la détermination contre laquelle
nous ne cesserons de protester.
ALLEMAGNE.
Berlin, 28 décembre. — Il paraît se confirmer que le mode d’après le-
uel l’Etat s’intéresse dans les entreprises de cheminsde fer n’est guère
e matière à encourager les capitalistes à y engager de fortes sommes.
De plus on se demande partout si la garantie que le gouvernement est
décidé àdonner sera restreinte aux actions encore à émettre des che-
mins de fer projetés.ou si elle s’étendra aux chemins de fer dont les pro-
duits ne sont pas suffisants pour couvrir les intérêts. C’est à ces inquié-
tudes qu’il faut attribuer i'étonnanle baisse qui s’est plus ou moins
manifestée à notre bourse dans les actions des compagnies de chemins
de fer. La baisse de ces actions des chemins de fer déjà existants a con-
sidérablement nui aux souscriptions pour le chemin de fer de la Basse-
Silésie, et pour celui de Berlin à Hambourg. Les souscriptions au pre-
mier de ces chemins ne seraient pas encore avancées au point de pou-
voir annoncer officiellement que le moitié des actions du capital est prise.
On lisait dernièrement, il est vrai, dans une correspondance de Berlin,
adressée à la Gazette de Cologne que le comte de Nassau avait pris pour
quatre millions d’actions. Ce serait excellent, si c’était vrai; mais il n’en
est pas ainsi, et S. M. ne s’y est intéressée que pour une somme très
minime. Il en est de même des autres millions dont parle la même cor-
respondance. (Francfurtei Journal.)
Hambourg, 22 décembre. — La première expédition pour la Nouvelle-
Zélande est partie hier d’ici. C'était le navire S.-Pauli, de cette ville, à
bord duquel se trouvaient 120 émigrants dont une centaine se trouve
dans l’entrepont, et le reste et entre autres la nombreuse famille de
l’agent, les missionnaires et le médecin, dans les cajutes.
[Gazette d'Jugsbourg.)
ESPAGNE.
Perpignan, 28 décembre.
« Zurbano est enfin arrivé, le 26, à Figuières, où il était attendu depuis
long-temps. Il a ordonné aussitôt le désarmement de la milice.Toute la
Basse-Catalogne se trouve maintenant garnie de troupes ; on en dirige
aussi sur ie Lampourdan; tous ses mouvements accroissent les vexations
qu’on a à subir journellement. Le bataillon de Salamanque, à son pas-
sage à Malaro, insulta plusieurs habitants; des scènes aussi désagréa-
bles se sont répétées sur divers points.
» Barcelone est toujours sur le pied de guerre. Une députation des
propriétaires s’est présentée au général Seoane pour réclamer con-
tre ie mode de répartition de la contribution de guerre. La seule réponse
que cette députation ait pu obtenir, est que le versement complet de-
vait être réalisé le 51 décembre.
» Le régiment d’Almansa, qui assista au massacre de la rue de la Plac-
teria, a reçu l’ordre, dit-on, de quitter la garnison de Barcelone: cette
sage mesure n’a pas peu étonné les habitants, alors surtout que les réac-
tions sont à l’ordre du jour.
» Un banquet a été offert au consul de France et au commandant de la
station française par les officiers du régiment d'artilleriequi se trouvait
en garnison aux Atarazarius lors de la capitulation de ce fort. »
— Dans les chambres françaises qui vont s’ouvrir, seront évoquées
toutes les pièces relatives à l'affaire de Barcelone. Dans les corlès, cer-
tains députés se proposent de produire des éclats et des fragments de
projectiles qui ont frappé Barcelone, afin de remonter à la source et de
signaler la fabrique d’où sortaient ces bombes. Tous les jours on nous
confirme la nouvelle que les Anglaisent fourni les munitions à Mônjouy,
et l’on dit même qu’un navire français avait menacé de faire feu sur la
marine anglaise si elle continuait à fournir des munitions.
Comme la plupart des projectiles se perdaient en l’air sans produire
d’effet, le régent envoya demander an commandant du Rodney de vou-
loir bien fournir quelques officiers pour constater d’où pouvait prove-
nir cet insuccès du bombardement; plusieurs officiers anglais se rendi-
rent alors à Monjouy. Nous rapportons ces faits sans les garantir, mais
tôt ou tard, la vérité sera connue. (El Heraldo du 26 décembre.)
Barcelone, le 26 décembre.
Le capitaine-général du 2« district et général en chef de l’armée de
Catalogne, Antonio Seoane, a fait prévenir le corps municipal qu’il fal-
lait que, dans un bref et improrugeable délai, fût opéré le versement au
trésor de 12 millions de réaux,imposés à la capitale à raison des événe-
ments qui s’y sont récemment passés. En conséquence l’ayiititamiento
avise les contribuables que, dans le délai de trois jours, ils auront à payer
les cotes fixées. Dans le cas où cette requête ne serait pas suivie d'effet,
l'ayuntamiento aurait le regret de faire passer à l’autorité supérieure
les listes de récalcitrants, provoquant des mesures que l’ayuntamiento
voudrait éviter.La corporation municipale melen action tous les moyens
imaginables pour arriver au remboursement de ladite somme en faveur
de ceux qui s'empresseront de la fournir.
Barcelone, le 25 décembre.
Du consentement de l’ayuntamiento constitutionnel,
(El Conslilucional.) Marcieno Pons, secrétaire.
FRANCE.
Paris, 2 janvier. — L'Orléanais annonce que M. le duc de Nemours
vient d’acheter le magnifique château de Beilegarde.
—Il est maintenant certain que le roiferale9,en personne, l'ouverture
des Chambres.
Aujourd'hui une vingtaine d’ouvriers étaient occupés dans la salle des
séances à faire tous les préparatifs que nécessitent les grandes séances
royales. D’un antre côté les chariots du garde-meuble ont apporté les
escaliers, les plate-formes, les ta pis, les fauteuilsainsi que les tabourets.
L’ordre a été donné de terminer ces travaux pour le 8 janvier au soir.
— On prend dans la cour principale de l’abattoir de Grenelle les me-
sures pour la construction du château d’eau qu’op doit y élever pour la
distribution des eaux provenant du puits artésien.
— On vient d’appliquer, pour la première fois, t’éclairage par le gaz à
l’une des églises de Paris, à St.-Nicolas-du-Chardonnet, rueSt.-Vicloire.
— Les répétitions de Don Pasquale se poursuivent avec une grande
activité au théâtre royal italien. Cette fois, paratt-il, la muse de M. Do-
nizetti avait été si féconde, que l’on est obligé de faire çà et là de nom-
breuses coupures pour que l'ouvrage marche plus vite et ne finisse pas
trop tard. La partition a déjà été achetée au prix de 6,000 fr., et il est
probable qu’elle procurera de larges bénéfices aux acquéreurs.
— Il a été question un instant d’organiser, dans la brillante salie des
Bouffes,des bals masqués à 15 ou 20 fr. le billet. Nous ne savons s’il sera
donné suite à celte idée qui ressusciterait l'ancienne étiquette des bals
de l'Opéra, et où l’on ne serait admis qu’en domino et en habit noir.
L’orchestre serait placé au milieu de la salle, comme jadis à l’Académie
royale de musique, et cet orchestre, formé de musiciens choisis, exécu-
terait pour les menus plaisirs des promeneurs, caron ne danserait pas,
des quadrilles nouveaux, sans accompagnement de grosse caisse ni d’o-
phicléide. Le deuil de la cour et la suppression des bals aux Tuileries
favoriseraient peut-être une semblable combinaison.
— L’exécution du Stabat Mater dans la salle de M. Henri Hertz a été
remarquable en plusieurs parties. Géraldy a fort bien dit le bel air de
basse Pro pcccatis, et l’on a beaucoup goûté l'air de ténor, l'introduction
et la fugue finale.
— De grandes améliorations vont être introduites dans le personnel
chantant et dansant de l’Opéra. La décadence du ballet a surtout attiré
les regards de l’administration, et d’importantes réformes auront lieu,
si déjà elles ne s’exécutent. Les conditions nécessaires pour être admi-
ses dans le corps intéressant des danseuses et des comparses seront d’ê-
tre jeune,et, à défaut de la beauté.de posséder au moins figure humai-
ne. Il est bien naturel que les femmes que l’Etat subventionne pour por-
ter des maillots de soie et faire des ronds de jambe, jouissent de la prin-
cipale qualité de leur sexe. 11 est entendu que ni les tibias, ni les jarrets,
ni la voix, ni l’intelligence, ne seront négligés pour cela. En tous cas, le
public sera toujours plus enclin à l’indulgence pour des jeunes filles ac-
cortes et riantes,que pour ces matrones qui n’ont d’autre fraîcheur que
celle que leur procure chaque soir l’emploi du rouge végétal. M. Léon
Pillet ne saurait trop persévérer dans son système de restauration; il
aura pour lui tous les amis de l'artet. toutes les lorgnettes sentimentales.
— On lit dans la Gazette des Tribunaux :
« D’après des bruits qui se sont accrédités depuis quelques jours au
palais, une nouvelle enquête serait faite en ce moment sur l’assassinat
demeuré impuni du sieur Guibert, célèbre par le procès des cartes bi-
zeautées. On parle d'arrestations qui auraient eu lieu, et qui se ratta-
cheraient indirectement à l’instruction à laquelle donne lieu à l'étran-
ger la mort de M. Aimé Sirey.»
On ne conçoit guère le rapport qu’il pourrait y avoir entre l’assassi-
nat de Guibert et la mort de M. Sirey. L’assassinat de Guibert remonte
à trois ou quatre ans. Il fut tué , un soir, dans la rue Richelieu,
d'un coup de pistolet qui lui fut tiré dans les reins et qui lui brisa la co-
lonne vertébrale. Il mourut sur le coup. Guibert était un beau cavalier,
mais d’une conduite plus que suspecte. Dentiste et oculiste de profes-
sion, il s’était, fort jeune encore, livré à l’usure et avait été condamné
plusieurs fois de ce chef. Le procès des cartes bizeautées dont il est
parlé ci-dessus, lui fut intenté ainsi qu’à plusieurs de ses complices, à
la suite d’une descente de la police faite dans son appartement oii il atti-
rait des jeunes gens pour jouer à l’écarté. On remarquait qu’il jpuait
avec des cartes pinées, et il fut condamné à l’emprisonnement. C’est
bientôt après qu’il fut tué. Le nom de son assassin est toujours resté
un mystère.
— Bulletin de la hour.se. — La liquidation des rentes françaises a
été mauvaise. De nombreuses offres ont eu lieu avant l’ouverture du
parquet ; aussi la rente a perdu son report pendant la bourse, et à la
clôture elle était aux mêmes prix pour fin janvier qu’on la cotait en li-
quidation. La position des joueurs en liquidation semble être l’unique
cause de ce mouvement de baisse. Cependant on répandait des bruits de
toutes sortes pour expliquer la faiblesse de la rente. On disait qu’ilexis-
tait un refroidissement entre la cour des Tuileries et celle d'Autriche,
parce que M. d’Appony n'avait pas adressé le discours au roi au nom
du corps diplomatique.
La rente 3 p. c. a ouvert à 79 et elle a fléchi à 78-75 en liquidation ;.elle
a fléchi pour fin janvier de 99-25 à 79-15. La rente 5 p. c. a fait en liqui-
dation 119-0 et 110-55 et pour fin janvier 120-20 et 120-05. — L'actif esp.
n’est pas coté. — Le 5 p. c. belge 104 5|8.
Réceptions du jour de l’an.
Hier, à l’occasion du nouvel an, M. ie marquis de Brlgnôle-Sàle, am-
bassadeur de Sardaigne, a adressé au Roi le discours luivant au nom
du corps diplomatique:
» Sire,
» Je m’acquitte de nouveau avec bonheur de la tâche si honorable de
présenter à Vôtre Majesté les hommages et les vœux du corps diploma-
tique. |