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LE PRECURSEUR, Vendredi 11 Août 1843
Dalmatte, nommé en 1804; le duc de Reggio, nommé en 1809; le comte
Molitor, en 1823; le comte Gérard en 1850 ; le marquis de Grouchy, que
l’Empereur avait nommé en 1815 et à qui le Roi Louis-Philippe a recon-
nu cette hauledignité en 1831 ; le comte Valée, nommé en 1837; le com-
te Sébasliani, en 1840 ; le comte Drouet d’Erlon en 1843, cl enfin le lieu-
tenant-général Bugeaud.
— Les travaux relatifs au monument consacré à Napoléon avancent
rapidement; déjà toutes les fondations de la crypte sont creusées ; dans
quelques jours on commencera le revêtement.
» — On parle toujours dans nos foyers de la grande querelle qui s’est
élevée entre l'auteur des Demoiselles de Saint-Cyr et le feuilletoniste du
Journal des Débats. L’auteur est, assure-t-on, décidé à avoir une ren-
contre avec le journaliste.Hier il envoya deux témoinsà son adversaire.
« Ma foi, je n’ai pas le temps de me battre, répondit ce dernier, je suis
à la campagne ! » — Une affaire dont tout le monde s’occupe aussi gaî-
xnent ne saurait avoir un résultat bien tragique.
— Bulletin de la bourse. — Les cours ont été très fermes à 80-20
et 122-70 et des opérations à primes assez importantes ont été engagées
fin du mois et fin du mois prochain; la Banque de France a mon-
té à 3,282-50. L’actil a fléchi à 28 5;8 ; le passif à 4 3|4 sans affaires. La
rente de Naples a monté à 100-80. Les belges anciens ont été cotés 105
5(8 ; l’emprunt de 1840,107 5]8. Le 5 p. c. porlugais40 1|2 p. c. hollandais
54 1)2. Peu d’affaires sur les chemins de fer; l'Orléans 002-51'; le Rouen
686-25.
On répandait des bruits de mauvaises nouvelles d'Espagne qui onL
fait baisser l’actif de 1|4 p. c. à 28 3|4, 5|8. On annonçait qu’un vaisseau
anglais aurait été coulé devant Barcelone par les batteries espagnoles,
d’autres annonçaient la prochaine entrée d’Espartero en Espagne par
la frontière de Portugal, etc., etc. Les suites des opérations financières
,$e Mendizabal commencent à inquiéter les spéculateurs en piastres,
parce que nécessairement elles entraveront les projets financiers qui
pourront se présenter.
M, le général Bugeaud.
Quelle que soit la bravoure reconnue du général Bugeaud, quels que
puissent être ses mérites militaires, l’une n’est pas assez célèbre, les au-
tres ne sont pas assez éminents pour justifier les honneurs suprêmes
que l’on vient de décerner au gouverneur actuel de l’Algérie.
Il faut bien se persuader que le litre de maréchal de France, si rare-
mentaccordé, exige une de ces réputations incontestées quise fondent
surquelque grand nom de victoire ; pour être historiquement l'égal des
Turenne, des Maurice de Saxe, des Masséna, il faut mieux que les litres,
tout honorables qu’ils soient de M. Bugeaud. Quelques brillants combats
remportés sur les Arabes peuvent-ils se comparer aux batailles décisi-
ves gagnées par les héros que nous venons de citer ? Pourquoi ensuite
combler si hâtivement d’honneurs un général qui peut trouver un jour,
en Algérie même, des rivaux supérieurs à lui ?
Nous concevons jusqu’à un certain point que la prise de Conslantine
ait justifié la création du maréchal Valée,mais qu’esl-cequi pouvaitjusti-
fier la création du maréchal Bugeaud ? Un seul (ail. nous le croyons : la
prise d’Abdel-Kader; grâce à M. Bugeaud, Abdel-kader vaut à lui seul
une province. Avant donc de devenir maréchal, que M. Bugeaud aurait
dû réparerai! moins le mal qu'il a causé, nous délivrer de notre dernier
ennemi redoutable, détruire la puissance qu’il a si maladroitement
créée.
Évasion des prisonniers de la Force.
Nous avons parlé hier de l’évasion tentée par un certain nombre de
prisonniers détenus à la Force. La Gazette des Tribunaux donne à ce
sujet les détails suivants :
Depuis une semaine environ , le chauffeur des bains Sainte-Cathe-
rine, dont la façade et le jardin prennent issue sur la rue Culture, mais
dont les bâtiments sont presque contigus avec ceux de la Force, enten-
dait chaque nuit le retentissement sourd et régulier d’un travail souter-
rain. Sachant que des travaux de vidange s’étaient opérés dans la pri-
son, il pensa que ce bruit provenait de quelque infiltration, et il ne fit
part à personne de son observation. Ce matin, vers six heures, ce chauf-
feur était occupé dans la pièce du premier étage oû est situé l'appareil
d’ébullition, lorsqu’il entendit un grand bruit causé par la chute du ca-
lorifère d’un cabinet du rez-de-chaussée. Il descendit en tonte hâte,
entra dans le cabinet, et demeura d’abord immobile de surprise en se
trouvant face à face avec un individu de haute taille qui venait de s’é-
lancer d’un souterrain creusé sous le parquet et aboutissant à l’endroit
même où se trouvait le calorifère. « Tais-toi ! ou tu es mort, dit d’une
Voix menaçante cet individu que l’arrivée du chauffeur ne paraissait
pas surprendre. Nous sommes de malheureux prisonniers de la Force,
ajouta-t-il , nous ne voulons faire de mal à personne ; mais il faut que
nous nous évadions. Ainsi donc, silence !
Tandis que cet individu parlait ainsi, d'autres surgissaient un à un par
la même voie, et déjà plus de dix se trouvaient dans le cabinet, lorsque
le chauffeur, prenant la fuite et tirant la porte derrière lui, se précipita
dans le jardin en criant : t Au secours! au voleur! »
Mais la porte n’opposant qu’une faible résistance, en moins d’une mi-
nute elle fut brisée, et les prisonniers, qui étaient alors au nombre de
quinze, se ruèrent dans la rue Culture-Sainte-Catherine, renversant la
portière qui tentait de s'opposer à leur passage, et cherchant à gagner
la rue Sainte-Antoine, avant que l’éveil eût pu être donné aux postes
des sapeurs-pompiers et de la garde municipale.
Une fois hors de rétablissement, ils se croyaient, sauvés; mais ils se
trouvèrent bientôt en présencede plusieurs habitants du quartier, déjà
réunis aux premiers cris d’alarme, et bien décidés à s’opposer à la fuite
de ces redoutables captifs, bien qu’ils les vissent armés de couteaux, de
poinçons, et qu’à leur alliLude ou pût reconnaitrequ’ils ne reculeraient
pas devant le meurtre pour consommer leur projet.
Le premier qui se jeta au devant des prisonniers fut M. Pons, proprié-
taire, dont la maison fait face à la grille des bains. S'élançant sur celui
qui paraissait le chef de la bande et marchait en tête, il le’saisit à bras-
le-corps et le renversa. Mais bientôt des voisins accourus pour prêter
main-forteà M. Pons, virent que ses vêtements élaientensanglanlés, et
l’on reconnut qu’il avait reçu au côté gauche de la poitrine un coup de
couteau pénétrant profondément. Tandis qu’un chirurgien était appelé
ep toute hâte pour donner à M Pons les premiers secours, on recondui-
sit les prisonniers à la Force.Ce misérable,loin de manifester le moindre
regret, semblait au contraire faire parade de son nouveau crime : « Un
de plus ou de moins, disait-il, je ne devais pas moins aller à la barrière
Saint-Jacques. »
En même temps que M. Pons s’était emparé de ce prisonnier,d’autre,
citoyens faisaient preuve du même dévouaient et du même courage
M. Morel, marchand, rue du Val-Sainle-Callierine, accouru aux pre-
miers cris se précipitait sur un prisonnier d'une force herculéenne, et
qui venait de renverser un garde municipal. M. Morel engageant avec
cet homme une lulle désespérée, avait pu le renverser sous lui, mais
malgré ses efforts il allait être frappé d’un coup de couteau, quand des
voisins, accourus à temps, purent se rendre maîtres de l’assassin, sur
d’autres points, plusieurs autres citoyens dont nous regrettons de ne
pouvoir citer les noms, ont été blessés en prêtant leur généreux con-
cours aux agents de la force publique.
Averti, dès le premier moment, de cet événement qui pouvait avoir
de si déplorables conséquences, M. le préfet de police s’était rendu sur
les lieux, où arrivèrent bientôt les magistrats du parquet.
Un procès-verbal a été dressé, et, après la constatation matérielledes
faits opérés tant dans les bâtiments de la Force que dans l’établissement
des bains, on reçut les déclarations des détenus, qui ont fait connaître
le complot et son exécution dans tous leurs détails.
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Timon le misanthrope pour trouver son pareil. M. de Bornstadt (c’est
son nom), issu d’une famille riche et noble, occupant de hauts emplois
dans l’armée, avait reçu une éducation distinguée ; non-seulement il
avait la tournure et les manières d'un homme du grand monde, mais
encore des connaissances très étendues dans les langues etla littéra-
ture. Pendant ses voyages, cet homme, jadis si aimable et possédant
une instruction si variée, avait été en relation avec les personnages des
classes les plus éminentes, et ce sont ces relations qui semblent avoir
rembruni son caractère. Il s'aperçut que le vernis dont on s’efforce de
se couvrir extérieurement,ne servait qu’à voiler le vide des sentiments
elles vices extérieurs de l’âme; de malheureuses expériences l’avaient
convaincu que l’amitié sincère, la bienveillance, l’amour delà vérité,
étaient presque généralement bannis du monde et ne faisaient plus
partie des attributs de l’homme. La lecture de quelques ouvrages, em-
preints de celte sombre philosophie allemande, qui conduit au dégoût
de la vie réelle, acheva dele déterminerà cacher sa viedans lesderniers
rangs de la société.
M.de Bornstadt rejeta loin de lui les vêtements qui annoncent l’aisance.
Le rasoir et les ciseaux ne touchèrent plus ni à sa barbe, ni à sa cheve-
lure; ses cheveux, devenus démesurément longs, couvrirent bienlôt les
traits expressifs de son visage et ombragèrent son œil vif et intelligent.
C’est ainsi que cet homme apparut dans nos environs, il y a une tren-
taine d’années et qu’il choisit pour sa résidence la petite ville de Hella,
située à une assez grande distance de Dantziek, dans la presqu’île de ce
nom, et qui était encore dans ce temps-là presque entièrement séparée
du monde civilisé.
Une femme appartenant à la population grossièredes pêcheurs devint
son épouse et la compagne de sa vie; mais il professait déjà tantde mé-
pris pour toutes les institutions de la civilisation moderne, qu’il ne put
jamais se résoudre à faire bénir son union par un prêtre. Sa femme lui
donna une fille; et la mère et l’enfant ont passé leurs jours auprès du
misanthrope avec uneconslanceet un dévouement inébranlables.Toutes
les deux lui ont survécu.
Mais quelque Isolée que fût la petite ville de Hella, elle était trop
Un complot avait été organisé de longue main parmi les détenus, la
plupart sous le coup des accusa lions les plus graves, de vol, de meurtre,
d’assassinat, et tous enfermés dans la partie de la prison appelée la bosse
aux Lions. Etant parvenus à détourner une conduite d’eau, ils avaient
rempli la fosse d’aisances, et avaient ainsi nécessité une vidange sur la-
quelle ils comptaient pour mettre leur projet à exécution. La fosse étant
vide, on avait laissé la partie supérieure entr’ouverte avant d’y sceller
la pierre. .
Xj’est par cette ouverture que les détenus se seraient introduits pour
percer le mur de communication d’un des cabanons. Us auraient en-
suite ouverL un souterain sous le chemin de ronde, et seraient ainsi
parvenus jusqu’à la maison des bains. Mais au lieu d’aboutir dans le
jardin,le souterain vint prendre issue, ainsi que nous l’avons déjà dit,
dans un cabinet dont le calorifère fut renversé quand le parquet se sou-
leva sous les efforts des fugitifs.
Ouze prisonniers sur les quinze évadés ont pu être arrêtés.
HOLLANDE.
La Hâte, 9 a oui.—I,e gouvernement devait présenter hier aux Etats-
Généraux les budgets biennaux pour les années 1844 et 1845.Cette pré-
sentation n’a pas eu lieu. En attendant, le mémoire du gouvernement
en réponse aux observations qui lui ont été adressées par les sections
sur le projet de loi relatif au droit sur les successions en ligne directe,
préoccupe vivement l’attention publique. Il est dit dans ce mémoire
que pour couvrirles besoins du trésor,legouvernement considère com-
me inévitable la nécessité d’augmenter les impôts existants ou d’en
établir de nouveaux.
Legouvernement pense que l’établissement d’une taxe sur le revenu,
à laquelle beaucoup de membres des sections donneraient la préféren-
ce. serait sujet à tous les défauts que l’on reproche à tort au droit sur
les successions en ligne directe. Le mémoire dit en terminant : Qu’eu
égard aux propositions plus spéciales qu’il se propose de faire, le gou-
vernement a cru devoir retrancher du projet de loi relatif au droit sur
les successions tout ce qui avait rapport à l’assiette du droit sur les
fonds et effets publics nationaux. (Handelsblad.)
— On parle beaucoup en ce moment d’un procès qu’un spéculateur
en fonds publics, autrefois notable.se propose d’intenter au gouverne-
ment pour frais et pertes sur spéculations en fonds, faites dans le temps
en commun. Il parait que sous le ministère des finances de M. Tets, tou-
tes les fois qu’il y avait un nouvel emprunt (et Dieu sait s’il y en avait)
et lorsqu’on entrevoyait quelque bénéfice à obtenir de l’agio, on an-
nonçait au public que l’inscription était complète, tandis que tout ce
qui restait encore était négocié à Amsterdam et à Londres par l’inter-
médiaire du spéculateur en question.
De cette manière, le gouvernement (à ce que prétend ce spéculateur)
serait resté débiteur envers lui de sommes énormes. Dans le temps,
déjà, ce dernier avait manifesté le désir de faire valoir sa créance en
justice, el M. Rochussen avait eu la faiblesse d’acheter son silence. M.
Van der lleim, ministre actuel, paraît n’avoir fait aucun cas des mena-
ces du spéculateur; il ne reste plus à ce dernier d’autre moyen de ren-
trer dans ce qu’il prétend lui être dû, qu’un procès en règle. Cette af-
faire scandaleuse est aujourd’hui le sujet de toutes les conversations.
(Corresp. des journaux français.)
— Le 6 de ce mois, est arrivé au Vlie, le baleinier Spitsbergen, capi-
taine J. Both, avec une baleine et 3100 chiens de mer, ou 100 quarts de
graisse.
— La Société de médecine à Anvers, vient d’admettre au nombre de
ses membres, comme correspondant, M. R. A. Verlegh, médecin de la
ville de Breda.
— Bulletin «le la bourse d’Amsterdam, du ÎO août. — Les fonds
hollandais se maintiennent aux derniers prix par suite de quelques af-
faires en Intégrales.
En Portugais il y a eu beaucoup de mouvement. Le prix ouvert à
42 5[8. est monté rapidement à 42 7i8, et bien que par suite de réalisa-
tions de bénéfices, il ne se soit pas maintenu à ce taux,le cours a fermé
3|8 p. c. plus élevé qu'hier.
Les mexicains au commencement de la bourse étaient en faveur; le
cours cependant a clôturé comme hier.
BELGIQUE.
ANVERS, 11 AOÛT.
Hier,à 4 heures de l’après-midi, la nouvelle société colombophile,
établie à YHôtel Rubens, a fait partir pour Compiègne 290 jeunes pi-
geons, qui y seront lâchés dimanche 13 août, à 7 heures du matin. Ce
concours auquel prennent part plusieurs autres sociétés, sera un des
plus intéressants qui aient eu lieu jusqu’ici. Un Prix d’Hoxkeir, offert
parla Société et 49 Prix, consistant en plusieurs objets d’argenterie,
seront à gagner par les premiers arrivants.
— On payera jusqu’au 20courant, les billets de logement émis durant
le mois de juillet dernier.
— On lit dans Y Ami de l’Ordre, de Namur :
Nous lisons dans un journal de cette ville les étonnantes lignes que
voici :
« Est-il vrai, comme on nous le rapporte,que les employés de la mai-
» son du roi, n'ont pas voulu payer le droit d’octroi sur les comestibles
» et vins qui ont été amenés à Namur pour le dîner qu’y adonnés. M.,
n et que l’autorité communale persiste dans sa demande de soumission
» à la loi communale. »
Il est vrai, en effet, que les voitures du Roi ont subi la visite de l’oc-
troi, mais il ne l’est pas que les employés de la maison du Roi aient re-
fusé de payer le droit. Au contraire, nous savons qu’aussitôt que l’octroi
eût élevé ses austères prétentions, des ordresfurent donnés pour qu’on
acquittât les droits ; et s’il ne fut pas donnésuite à ces ordres, c’est que
l’octroi ou la ville passa outre à ses exigences.
Quant à savoir si l’autorité communale donne suite à son procès-ver-
bal contre la maison du Roi, nous ne pouvons dire ni oui, ni non. Nous
déclarons même n’étre pas en mesure d’affirmer que le fait manque de
probabilité morale.
— On Ut dans la Feuille d’Ostende :
La 5“' liste des étrangers que nous donnons aujourd'hui est une des
plus considérable que nous ayons encore publiées. Elle renferme 258
noms, parmi lesquels on en remarque des plus distingués. Presque
la moitié de ces personnes et de celles qui se trouvent déjà ici depuis
quelque temps, sont accompagnées de leurs familles et domestiques,
et l’on sent que cela doit produire une masse extraordinaire, puisque
nous connaissons des familles composées de 15 à 20 personnes.
Cetteannée, les Russessonten'plusgrand nombre que les années pré-
cédentes; nous avons en ce moment parmi nous deux princes et une
princesse russes : les princes César et Darius Poniatowski etla princesse
Poniatowski.
L’arrivée des Allemands, des Anglais et des Français suit une progres-
sion toujours croissante et celle des Belges augmente d’une manière
surprenante. C’est surtout Bruxelles et Liège qui fournissent la plus
grande part de ce contingent de beau monde.
Malgré cette foule les logements ne font pas défaut, car chaque année
le total des appartements garnis augmente considérablement ; vers
l’époque des bains, chacun s’empresse d’arranger quelques chambres
pour pouvoir héberger un plus grand nombre d’étrangers.
— On iit dans Y Industriel de Deniers :
On sait que l’exploitation de la section de la Meuseà Verviers,a com-
mencé le 18 juillet dernier. Depuis cette époque jusqu'à ce jour, il y a
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bruyante encore pour notre misanthrope, et il y a peu près vingt ans
que, pour éviter entièrement tout commerce avec les hommes, il se re-
tira sur un banc de sable près de Zoppot. Une petite pension qu’il s’était
réservée suffisait amplement à l’exiguilé de ses besoins. Il méprisait
tous les objets mobiliers les plus en usage et les considérait comme un
luxe inutile. Un tas de paille, répandu sur un sol nu, lui servait de lit.
Au milieu de celte solitude, l’esprit poétique dont il étaitéminemment
doué, triomphait quelquefois de son apathie; il y a quelques années,
une feuille de Dantziek accueillit de lui diverses productions que lejo'ur-
nal lui paya même assez cher.
Entre les habitations assez propres de Zoppel et quelques champs
bien cultivés aux alentours, se trouve un lieu désert, qui a été autrefois
habité, mais qui ne présente plusaujourd’hui que l’image del’abandon
et de la destruction. On aperçoit au milieu de ce désert un bâtiment
isolé, construit en bois, sans aucun plâtrage pour garantir de la pluie
et du vent. La façade du bâtiment est percée de plusieurs ouvertures
qui ont été bouchéesavec des chiffons, de la paille, des écorces d’arbres.
Sur l’un des côtés on voit une croisée en ruines, ayant encore quelques
rares carreaux de viLres, mais étant en grande partie fermée comme
les trous de la façade. Du côté de la mer, cette chétive barraque a une
élévation en forme de tour, fantastiquement décorée de bizarres dra-
peaux. Des squelettes d’oiseaux, entremêlés de loques vertes, rouges,
de toutes couleurs, sont suspendus par une corde tout autour de cette
| espèce d’observatoire. C’était là l’habitation du misanthrope de Born-
stadt.
Lorsqu’un passant, surmontant le dégoût et l’effroi que lui inspirait
la vue d’une pareille demeure, s’approchait de la porte d’entrée, il voyait
encore il y a quelque temps un vieillard , semblable à un spectre, à
barbe et cheveux de sauvage, couvert d'un seul vêlement grossier et
ceint d’une grosse corde de chanvre; ses regards étaient pleins de feu.
C’est en grommelant qu'il accueillait toujours le visiteur, et il l’invitait
bien vile à s’éloigner par un mouvement brusque et menaçant de sa
main osseuse.Mais il est des milliers de personnes, de celles qui habitent
le voisinage, qui n’ont jamais vu cet homme, tellement il évitait tous
eu, terme moyen, un mouvementdeS à 600 voyageurs par jour, ce qui,
en prenant le chiffre de 550, donne un total, jusqu’à ce jour, de 11,550
voyageurs.
Ce résultat nous parait très satisfaisant, si l’on considère que l’on
n’est pas encore bien habitué à se servir du chemin de fer,et si l’on fait
attention qu’autrefois le mouvement des voyageurs, par diligences, ne
dépassait pas, terme moyen, le chiffre de 30 à 40 par jour, on doit être
même surpris d’un pareil résultat.
Il faut remarquer que dans ce chiffre de 11,550 ne sont pas com-
pris les voyageurs qui ont pris leurs couponsaux stations intermédiai-
res, ni ceux qui sont partis de Liège pour Chaudfonlaine,Pépinsters et
Spa.
La section de Verviers à la Meuse n’est pas encore bien connue. Plus
tard lorsque les récits des voyageurs qui ont parcouru cette admirable
roule, auront pénétré plus loin, l’affluence des curieux augmentera in-
évitablement.
— Le Journal de Louvain nous a appris que M. Dubus était décidé-
ment nommé professeur de droit à l’Université catholique» Mais il no
nous dit pas si le président du tribunal de Tournai entend abandonner
la carrière de la magistrature, et, d’après ce qu'on nous rapporte, it
n’en serait rien; la position de M. Dubus à Louvain serait toute provi-
soire, il ne ferait qu’un intérim et le parti clérical aurait obtenu de M.
Van der Beien, l’une des notabilités muettes de la chambre des repré-
sentants. qu’il donnerait sa démission pour fournir à l’auteur de la fa-
meuse proposition de la main morte l’occasion de siéger de nouveau au
Palais de la Nation, au nom d’un district où il auraitl’apparence d’avoir
établi son domicile. Uournalde Liège.)
— Si Marie-Christine, dit un journal, est fondée à se plaindre d’Es-
partero, Espartero n’est pas moins fondé à se plaindre de Marie-Chris-
line ; quand elle ne lui aurait rendu que le mauvais service de le nom-
mer duc de la Victoire, elle peut se vanter d’avoir attaché à son nom,
le ridicule le plus ineffaçable qui se soit jamais vu. Quelle ironie san-
glante et quelle raffinement de supplice pour un orgueilleux ! s’appeler
duc de la Victoire et se voir réduit à chercher dans l’obscurité une pe-
tite barque de sauvetage pour s’y accrocher ! Connaissez-vous une ex-
piation plus rude infligée par la justice distributive à l’ambition et à
l’orgueil humain ? ^
— Ces jours derniers, au hameau de Gietel, commune de Voorst,
dans la Gueldre, un cultivateur a recueilli un épi de seigle qui, dépouillé
en présence de quatre témoins, a donné 76 bons grains, tandis qu’il y
avait encore de la place pour bon nombre d’autres.
— On écrit de Fribourg, 28 juillet :
« Jamais peut-être on n’a vu une atmosphère aussi variable que cette
années ; aujourd’hui la pluie, demain le beau temps, tandis que le bé-
tail broute une belle herbe sur une montagne, on le voit sur une autre
piétiner dans une épaisse couche de neige, un soleil brûlant et les fri-
mas se succèdent à de courts intervalles; il y a peu de jours nous avons
eu vingt et quelques degrés de chaleur ; hier matin il a gelé dans plu-
sieurs endroits de notre canton. »
— L’empereur de Russie a rendu, il y a plusieurs mois, un décret par
lequel il est défendu de fumer sur le chemin de fer de Tsarskoé-Sélo,
d’abord parce qu’il pourrait en résulter des incendies, ainsi que la chose
a eu lieu (dit le décret) en France, en Belgique et en Allemagne ; en-
suite parce que la fumée des pipe» et des cigares (dit encore le décret)
peut incommoder les dames.
Malgré les observations réitérées du conducteur, un ex-secrétaire du
gouvernement, M. Alexandre Netchaïeff, ayant contrevenu à ce décret,
le czar a ordonné qu’il fût détenu durant quinze jours dans un corps-
de-garde, et que la relation de sa conduite fût publiée dansles journaux
de l’empire, afin que ce sévère exemple prévint le retour de semblables
désobéissances.
— Le départ presque simultané des deux rapides steamers Hibernia
et Great-bVestern, partis, le premier pour Halifax et le second, le lende-
main, pour New-York directement, a donné lieu, en Angleterre, à de
nombreux paris. Eu égard à l’intervalle d’un jour qui sépare les deux
appareillages, on se demande quel est celui des deux steamers dont les
dépêches atteindront le plus tôt New-York. Les uns tiennent pour la
voie indirecte, soit pour Y Hibernia avec un jour d’avance, les autres
pour la voie directe ou pour le Great-fVestern, malgré son retard d’un
jour. -
La commission rhénane de navigation vers l’Allemagne a été instal-
lée lundi dernier. Elle se compose de :
M. le gouverneur de la province, Président.
MM. Cateaux-Wattel ; \
Fuchs; J
Jos.Kreglinger; [ Membres.
F. Loos ; /
G. J. Moll; 1
G. Noltebohm ; /
Outendirck, secrétaire.
Cette commission tient ses séances à l’hôtel du gouvernement.
La distribution des prix aux élèves de l’Athénée aura lieu, avec la
plus grande solennité, dimanche prochain à midi, dans le local actuel
du Musée, rue de Vénus. La cérémonie sera annoncée la veille par le
son des cloches et le carillon.
La commission mixte de navigation est convoquée à Anvers, pour
lundi prochain à 10 heures du matin, à l’effet de procéder à l’échange
des ratifications dessepts réglements qu’elle a arrêtés dans sa séance du
20 mai dernier.
Ces réglements concernent : 1° la navigation de l’Escaut et de ses
embouchures; 2» le pilotage et la surveillance commune ; 3° les fanaux;
4° la pêche et le commerce de la pêcherie ; 5° la navigation du canal de
Terneuzen ; 6° celle delà Meuse; 2» celles des eaux intermédiaires entre
l’Escaut et le Rhin.
De tous ces réglements, le plus important, est, sans contredit, celui
des eaux intermédiaires, qui ouvre une nouvelle ère à nos relations
commerciales avec l’Allemagne.
Relations internationales.
On lit dans Y Indépendance :
Nous avons dit quelques mots des difficultés qu’a soulevées le régle-
ment pour la navigation de la Meuse arrêté par la commission mixte
néerlando-belge. Il s’agissait de savoir si des restrictions pouvaient être
apportées au transit par cette rivière, l’une des voies d’eau europeenni-
sées par l’acte général du congrès de Vienne et sur lesquelles le transit
ne peut être interdit pour les riverains. Ces difficultés naissaient de l'é-
tal de nos rapports avec la France, des droits différentiels établis à l’en-
trée de certains de nos produits dans ce pays. Le droit sur les houilles
belges est de 11 centimes par la Meuse, tandis qu’il est de 30 à 50 centi-
mes à l’entrée des houilles anglaises; le droit sur les fontes, de 7 francs
par mer, etde4 francs par la frontière de terre depuis Blanc-Misseron.
Pour les fils et les toiles, il n’y a pas seulement un droit différent pour
les provenances de Belgique, le transit de ces articles vers la France est
en outre prohibé par la convention du 16 juillet. La France a établi ces
droits différentiels sur nos produits, en partie parce qu’elle obtenait de
nous des avantages équivalents, en partie parce que ses industriels re-
doutent .moins les nôtres qu’ils ne redoutent les producteurs anglais.
Ouvrir la Meuse au transit sans aucune réservent sans restriction d’au-
cune espèce eût mis la France dans le cas d’élever les droits à l’entrée
les regards.
Ce n’était que par une sombre nuit d’orage, quand la pluie et la tem-
pête lui donnait l'assurance que tous les habitants étaient retirés dans
leurs demeures, qu’il montaità son frêle observatoire, et que, la têtedé*
couverte, les bras étendus, son vêlement flottant au gré du vent, mon-
trant presque son corps nu, il déclamait en couplets dithyrambiques
des malédictions contre le genre humain. Il abhorrait, comme nous
l’avons dit, la civilisation ; il détestait les hautes classes de la société de
toute la force de son âme, et c’était en vers qu’il aimait à exhaler cette
haine profondément enracinée chez lui.
Le misanthrope de Kotzebue n'était qu’une ombre près de celui-ci.
Dans les dernières années de sa vie, il n’était absolumentaccessible
qu’aux gens de la basse classe. Aux plaintes que lui faisaient quelquefois
sa femme et sa fille, il ne répondait que par un doux et timide: Taisez-
vous, ma chère. Contraste bien bizarre dans un homme d’un carac-
tère si allier et d’habitudes si sauvages.
Il avait établi sa misérable habitation hors de Zoppot, éloigné de tou-
tes les chaumières des habitants. Il voulait y passer sa vie dans une
profonde solitude, bien loin du bruit du monde ; mais il éprouva le mê-
me sort que les premiers colons établis dansles forêts vierges de l’Amé-
rique; après quelques années, ils se trouvèrent au milieu de la place
publique, des affaires et de la vie bruyante du monde ; la civilisation
les avait envahis.
Lorsqu’il y a quelques années on commença à étendre les habitations
de Zop-pot. on ditque notre misanthrope, effrayéde ces travaux, se pré-
sentait aux ouvrierset leur tenait des discours en vers pour les détour-
ner de leur projet. Son langage était alors noble, son accent très mar-
qué, sa voix cadencée, sa tournure et sa mise toujours pittoresques et
bizarres; et lorsqu’enfin le flot social l’enveloppa, pour ainsi dire, il se
blottit dans sa sombre demeure, où, fidèleà sa résolution, constamment
couvert de haillons et couché sur la paille, il a rendu le dernier soupir.
De Bornstadt fut un héros dans son genre. Peu d'hommes ont mon-
tré une constance et une fermeté aussi inébranlables dans la poursuite
’ et l’exécution d’une idée. |