LA LA BELGIQUE. de la Vierge et du bambino, lénifie les graves harmonies du clair-obseur, avec je ne sais quoi des soupirs, des haleines tièdes, des oraisons tendres d'hommes soudainement amollis par la contemplation de l'enfant frais comme une rose. Même sous Les patines qui petit à petit ont encrassé la peinture exposée à la fumée des cierges et des encensoirs, le tableau a gardé sa belle jeunesse immortelle; une musique séraphique semble sortir de ses profondeurs, accompagnant les respectueuses oralions dés rois ; do il est comme une messe à grand orchestre par laquelle le peintre aurait voulu glorifier la naissance du Sauveur, entremélant aux basses solennelles des fonds, comme aux grandes voix des orgues, le chant ailé, le joyeux épithalame des tons assoupis, chatoyants et nacrés. ailé, le joyeu: Le génie de Rubens contient la vie toute entière ; l'horreur tragique s'y confronte avec la grâce la plus riante ; les ailes blanches y frémissent sous le vol des ailes noires; le jour y succède aux lourds cerépuscules ; et tantôt c'est Ezéchiel, Dante et Shakespeare, tantôt Virgile, Anacréon et Théocrite. À peine a-t-il fini de faire fleurir les tendresses et les sourires de l « Adoration ». qu'il trempe ses pinceaux dans du sang fumant. L'un des volets qui accompagnent le panneau central représenie la « Décollation de saint Jean-Baptiste » : le corps est couché à terre, comme celui d'une bête; à un pas, la tête, martyrisée, a roulé; des carotides bouillonne un fleuve rouge. Ainsi un morceau de boucherie effroyable fait antithèse à la fête radieuse de la maternité : la mort contraste avec la vie. L'autre volet nous montre saint Jean l'Évangéliste dans les gloires et les ignominies du supplice; la chaudière bout, léchée par les flammes, sous le corps du martyr que des bourreaux main- tiennent assis. Un fond d'apothéose, cette fois, encadre les affres de l’agonie; là-haut, dans les nuées, apparaissent des anges blonds, balançant des palmes; et, convulsé, blème, les yeux à demi sortis de la tête, mais heureux, serein, souriant, Jean les contemple, comme la promesse des félicités futures. L’allégresse sacrée de mourir pour sa conscience rayonne ici plus haut que la douleur et lépouvante ; le corps du saint lui-même, éclatant de jeunesse lumineuse et rosée, a déjà comme le reflet des paradis; et, tandis que les froids tourmenteurs activent sans hâte les souffrances suprèmes, la chair, rôtie, saignante, ouverte, glorifie inépuisa- blement le Dieu triomphant. Tel est ce beau monument de peinture. On sait que Rubens lacheva rapidement. Commandé le 26 décembre 1616 par l'administration paroissiale de Saint-Jean, le tableau et ses vantaux furent installés en septembre 1617 : le maitre, il est vrai, se rendit à plusieurs reprises à Malines par la suite pour donner les dernières retouches et sans doute pour accorder les tons du tableau à la destination qu'il avait reçue; personne plus que lui n'avait le souci des harmonies décoratives. Mais moins d'un an avait suffi pour jeter tout pantelant sur la toile, dans sa grâce et son horreur, le sujet compliqué où le sang du martyr et le lait de la femme concourent à magnifier le Fils de l’homme. Cest au fond d'une vieille église délabrée, aux toits moussus, aux pierres effritées, que repose le chef-d'œuvre : rien au dehors n'annonce la gloire de cette possession magnifique : mais, quand on a pénétré dans le temple, la sévérité des nefs, l'abondance des sculptures et des tableaux, la belle enfilade d'ogives qui se trouve à la gauche du maïitre-autel prédisposent à la contemplation de ce morceau d'art triomphant. Notre-Dame, au contraire, où trône la « Pêche miraculeuse », développe un bel aspect extérieur ; deux portails latéraux, en style ogival flamboyant, lui font une entrée glorieuse, el ses statues, ses autels, ses stations de croix, ses bancs de communion dont l'un, taillé en 1618 par Antoine de Flo aux frais de la corporation des Bateliers, s'ornemente d'attri- buts mythologiques, avee accompagnement de neptunes, de tritons et de sirènes, son buffet