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JLMYEKS, lîliÈMMicSic 13 OMre
(Huitième Ajtàîèe.1
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4 sroctobre.
X ST AU G U R ATI OU? MIT CIIF.IffllV DE FER
KKl,CE-K16î:%.4V. — 13 OCTOBRE.
f"Nous allons remplir nos engagements et continuer l'intéres-
sante revue de toutes les parties de la belle fête du 13 octobre.
Comme nous le disions hier, après que tous les discours eus-
sent été prononcés sur l’estrade élevée devant l’entrée princi-
pale de l’Entrepôt et au fond de laquelle on apercevait l’immense
intérieur des bâtiments rempli de marchandises de toutes sortes,
le cortège officiel s'est rendu à l’endroit où la première pierre
de la porte du Rhin ainsi que celle des magasins généraux qui
doivent euvoisiner l'Entrepôt, devaient être posées. De là, il a
été conduit, en longeant les bassins, jusque près du nouveau
quai de l’Escaut, où une superbe tente avait été dressée, sous
laquelle M. le bourgmestre a offert le vin d’honneur aux auto-
rités prussiennes. Ce nouveau quai était décoré de deux gigan-
tesques obélisques, portant sur l’une des faces, ces mots : Loi
du 1er mai 1834. — Pareil obélisque se trouvait également au
bout de la rue des Tanneurs, formant le coin de la Place du
Spectacle. —C’est desBassins, et avant de venir au banquet pré-
paré à la Bourse, que le cortège est allé visiter le Musée, ou il a
longtemps admiré les innombrables chefs-d’œuvre que cet éta-
blissement renferme. — Après une heure de retard à peu près,
les convives sont arrivés à la Bourse.
Pendant que tout le monde choisit sa place à l’une des onze
tables (une douzième avait été réservée pour les autorités) qui
circulent tout le long de l'immense carré voûté de la Bourse,
nous allons jeter un coup d’œil sur la splendide transformation
que cet édilice, déjà si beau, a subi par les soins de M. Bourla,
architecte de la ville, assisté de M. Durand, chef-éclusier des
bassins. .
Le centre de la Bourse qui est à ciel ouvert, comme on sait,
est tout-à-fait couvert par de la toile à voile. Ce dôme est sup-
porté par trois mâts d’une hauteur considérable. La base de ces
mâts forme une espèce de monticule de verdure et de fleurs, et
vers le milieu ils supportent des lustres d’une dimension colos-
sale ; ces lustres seuls sont d’un arrangement des plus pittores-
ques avec leur couronnement formé de médaillons sur lesquels
on lit les noms de la plupart de nos anciens grands peintres, et
avec leurs triples cerceaux gothiques auxquels on a accroché
une infinité de quinquets. Le haut des mâts porte uu trophée
de pavillons de diverses nations. — Chaque pilastre, du côté
du centre, est surmonté d’un écusson aux armes soit d’un
pays, soit d’une cité importante. Ces écussons sont au nom-
bre de 33 et représentent la France, l’Autriche, l’Angle-
terre, la Hollande, le Portugal, la Prusse, l’Inde, le Brésil,
le Mexique, l’Espagne, le Danemarck, Suède et Norwège,
le Maroc, les Etats-Unis d’Amérique, les villes de Londres,
Liège , Ostende, Aix-la-Chapelle , Amsterdam , Rotterdam ,
Wybourg, Brème, Oldenbourg, Lubeok , Meckle ni bourg ,
Hambourg, Paris, Bordeaux, Bruxelles, Hanovre, Francfort,
Rome, Riga et Dantsick. — A l’ouest, une peinture allégorique
représente les villes d’Anvers et de Cologne ; la Cité flamaude
est debout et inscrit l’alliance des deux populations sur les ta-
bles de la Renommée. — Du côté opposé, une autre peinture
allégorique, figure le Rhin et l’Escaut qui mêlent leurs eaux en-
semble ; au-dessus, on aperçoit le dieu Mercure avec des gé-
nies marins.
Tout à l’entour du centre, des pavillons, au nombre de 87,
surmontent les écussons dont nous venons de parler, et dérou-
lent leurs longs plis entre les fenêtres des galeries qui sont oc-
cupées par une multitudes de dames. Ce coup d’œil est des
plus magiques; il y a quelque chose de moresque dans tout cet
arrangement. — Autour du grand mât du milieu, est une es-
trade portant la musique du 10° régiment d’infanterie, qui ne
cesse de se faire entendre, pendant toute la durée de la fête.
— Tous les pilastres de la Bourse ont aussi reçu leur trans-
formation: ce n’est plus le sale badigeonnage de la veille;
celui-ci a disparu sous une couche bariolée de bleu , de
jaune, de rouge, d’or et d’argent, imitant assez le goût byzantin.
A la lumière qui resplendit de toutes parts, ces pilastres pro-
duisent un effet charmant. •— Tout le parterre est couvert de
mousse, et dans les quatre coins du centre ouvert, un grand
bec de gaz s’échappe de la gueule d’un serpent sortant avec ses
anneaux en spirale d’un buisson de verdure.
Entrons dans la salle du banquet. Ici les parois sont décorées
avec des draperies blanches et rouges et relevées par des ara-
besques en or qui brillent dans l'ogive de chaque arcade. —
Dans lesencoignures de lasalle sont de vastes étagères de fleurs,
et aux rectangles d’immenses glaces réfléchissent l’aspect
d’un ensemble féérique et qui reporte la pensée aux somptuo-
sités sybarites de quelque festin de Ballhazar. — Cent becs de
gaz et une cinquantaine de lustres en cristal, projettent leur
éclatante lumière sur la tête des nombreux convives, et huit
énormes étoiles formées par une multitude d’échappées de gazet
placées au-dessus des glaces,ajoutent encore à cetw lumineuse
profusion. C’est réellement éblouissant, merveilleux! — La
table est somptueusement servie; les mets sont délicats, recher-
chés ; les vins du meilleur crû. — La joie, l’animation ont rem-
placé ici la froideur guindée du banquet officiel ; c’est un festin
auquel deux populations viennent fraterniser. — Les étrangers
sont dans le ravissement; un accueil aussi fraternel les émeut.
Ils sont fiers de nous tendre la main !
Il est près de six heures ; le service a commencé. Comme il a
été dit plus haut, il n’y avait de places réservées qu’à la table
d’honneur; les onze autres tables avaient été abandonnées au
choix des convives dont le nombre approchait de 500. La pre-
mière table était naturellement présidée par M. le bourgmestre,
qui avait à sa droite M. le baron d’Arnim, ministre de Prusse à
Bruxelles, et M. Rogier, ancien ministre des travaux publics et
député d’Anvers; à sa gauche, M. Deschamps, ministre des tra-
vaux publics, et M. Steenberger, premier bourgmestre de Colo-
gne.— M. H. de Brouckere, gouverneur delà province, était
en face du bourgmestre, ayant à sa droite M. Mercier, ministre
des finances, et M. Ilelmenstad, directeur-général des douanes
des provinces rhénanes; à sa gauche, M. de Gerlach, président
de la régence à Cologne, et M. Teichman, inspecteur-général
des ponts et chaussées. — A cette table, on remarquait encore
MM. Ilauchecorne et Ilanseman, et plusieurs membres du con-
seil d’administration du chemin de fer rhénan; M. Bartels, con-
seiller de régence à Aix-la-Chapelle; M. Van Gulpen, président
du tribunal de commerce d’Aix-la-Chapelle, et M. Hermans,
président du tribunal civil; M. le baron deStarch,secrétaire de
la légation de Prusse à Bruxelles, et quelques autres Allemands
de distinction. Ensuite on y voyait MM. le baron Evain, minis-
tre d’Etat ; le comte de Baillet, sénateùr ; le baron Dubois, an-
cien sénateur d’Anvers ; MM. Smits, Ösy, Cogels, Dedecker,
Mast-de-Vries, d'Hollschmidt, représentants; MM.-Houyet, au-
diteur-général; de Bavay , secrétaire-général du ministère
des travaux publics ; de Crassier, secrétaire-général du minis-
tère de la justice ; Tiltnan, bourgmestre de Liège ; le général
Brialmont; le général Vandamme ; les colonels de Puydt, Wis-
singer, Capiaumont, Dens, de Nieulant ; M. Deswert directeur
de la Banque de Belgique; tous les membres de la députation
permanente; M. Masui, directeur du chemin de fer; M. T. de
Coek, président de la chambre de commerce d’Anvers; M. Van
de Rerckhove, président du tribunal de commerce; M Cateaux-
Wattel, président de la commission de (’Ëntrepôt-géuéral du
commerce; M. De Rie, commissaire de district, etc., etc.
Les autres tables étaient présidées par MM. de Bakker, Pié-
ron, Van Pelt, Loos, échevins, et parMM.d'IIanis-Van Cannaert,
Oostendorp, J. Van Havre, Jacobs, David, Werbrouck-Pieters,
conseillers communaux. — Nous devons faire remarquer le zèle
que tous ces messieurs ont déployé dans ces fonctions et com-
bien ils ont eu soin que tous les honneurs de la table revins-
sent aux étrangers qui y assistaient; tout le monde, au reste, les
secondait dans cette tâche ? c’était à qui fêterait de son mieux
les hôtes que l’Allemagne nous avait envoyés.
Bien que nous ayons fait mention hier des toasts qui ont été
portés, nous reproduirons aujourd’hui leur expression exacte.
M. le baron d’Arnim, illustre guerrier dont la poitrine est cou-
verte des témoignages éclatants de sa valeur, portant le premier
toast, s’exprime ainsi i
« Messieurs, la belle fête internationale que nous commençons à célé-
» brer ici, appelle à l'honneur de porter le premier toast celui qui re-
• présente en Belgique la nation voisine qui vous tend aujourd'hui sa
» main de fer pour serrer la vôtre dans une étreinte amicale et sincère,
• et pour unir les deux pays par un lien indissoluble.
» Le toast que j’ai à vous proposer, messieurs , le premier toast re-
* vient au Roi de votre choix, à ce souverain éclairé, qui sut inspirer à
» son peuple le noble esprit d’entreprise, dont nous célébrons aujour-
» d’hui un des plus beaux résultats ! •
Au bont de quelques instants, M. Deschamps, ministre des
travaux publics, se leve et dit :
« Au Hoi Frédéric Guillaume de Prusse !
• Ce toast porté avec acclamation par la Belgiquele lendemain même
• des fêtes données à la Reine delà Grande-Bretagne.révèle,messieurs,
» d’une manière significative, la position de neutralité sérieuse, indé-
ii pendante, que la Belgique s’est faite et qu’elle veut conserver.
• Que ce toast soit accueilli par le Boi à Berlin avec les mêmes senti-
» ments qui nous animent en le portant; qu’il soit un gage de l’amitié
• durable que se sont vouée deux nations dignes l’une de l’autre; qu’il
b soit le signal pour Anvers et Cologne d’une alliance commerciale aussi
» prospère dans l’avenir qu’elle Je fut dans le passé. F ire le Hoi / »
Le toast porté par M. Legrelle , bourgmestre d’Anvers, est
conçu dans les termes suièauts :
h Messieurs, ta ville d’Anvers aurait porté le toast au Roi, si, par une
» déférence bien naturelle en ce jour, elle n’eût cédé cet honneur, au
» représentant d’un Roi, ami du nôtre, au ministre d’une nation avec
» laquelle nous avons des relations qui deviendront de plus en plus
» intimes. Cette fête est d'ailleurs une fête internationale. Qu’il me soit
» permis. Messieurs, de vous proposer un autre toast, non moins cher
» à nos cœurs: à la Reine et à la famille Royale, à notre excellente Reine,
» qu’il suflitde connaître pour l’aimer; puissent ses enfants lui ressem-
n bler, et la Belgique continuera d’étre heureuse !
« Fire la Reine ! »
Enfin, le gouverneur de la province, M. Henri de Brouckere,
se lève à son tour pour prendre la parole. Voici comment ce
fonctionnaire s’exprime :
« Messieurs, il est un dernier toast pour lequel je voudrais apporter
» toute la chaleur de mon cœur, toute la puissance et toute l’énergie de
» ma volonté : A nos convives allemands, à la fraternité des nations!..
b (Applaudissements).
» Elles tombentenûn, ces lignes de douanes qui élevaient des bar-
• rières hostiles entre des peuples faits pour s’aimer.
b Us ne sont plus,ces temps où la richesse et le bonheur d’un peuple
» ne pouvaient s’obtenir qu’au détriment de la richesse et du bonheur
» d’un autre peuple ;où l’on fondait sa fortune sur le malheur de son
» voisin !
» Ces changements heureux, nous les devons en partie aux deux rois
h qui gouvernent les deux pays, à ces deux rois qui seraient encore les
» premiers de leurs nations si l'on décernait la couronne au mérite.
« Les bienfaits des chemins de fer sont incalculables, ils rapprochent
n les peuples__en se voyant souvent on apprend à s’aimer. Les Belges
» et les Prussiens surtout sont faits pour s’entendre. . ils sont frères,
» frères par leur origine, frères par leurs tendances, frères par leurs
» besoins et par leurs intérêts.
b Bientôt se réalisera le rêve des poètes , des philosophes et de tous
» les hommes de bien, la fraternité universelle des peuples.. .et comme
• le dit l’immortel Schiller... (ici une citation en allemand qui nous est
• échappée.)
b Si les avantages moraux du chemin de fer sont immenses,ses avan-
» tages matériels sont incalculables-
» Dans le commerce tout se réduit à une question de transport...etc.
» — A nos convives allemands! aujourd’hui nous leur donnons l’hospi-
• talité, demain nous irons la leur demander chez eux.»
Il est impossible de décrire l’enthousiasme avec lequel ces
divers toasts ont été accueillis; celui de M. le gouverneur sur-
tout a été à plusieurs reprises interrompu par les applaudisse-
ments des assistants.
Hier, nous avons fait connaître la brillante ovation qui a
été faite à M. Charles Rogier, avant la fin du banquet. Au sor-
tir de la Bourse, les vivats poursuivaient encore l’ancien minis-
tre des travaux publics et le député de la ville d’Anvers.
Dans les intervalles qui s’écoulaient entre les divers toasts,
des chœurs de soprani, chantés par près de 500 enfants appar-
tenant aux Ecoles communales, se sont fait entendre et pro-
duisaient un effet délicieux qui paraissait plaire surtout aux
Allemands. — Le premier chœur qui a été exécuté, était
l’air si connu et si cher à tous les Belges : Où, peut-on cire
mieux, etc. — Ces chœurs étaient habilement conduits par
MM. Bessems et Aerts, qui consacrent tous leurs soins à l’édu-
cation musicale de ces enfants.
En quittant la Bourse, les convives se sont rendus aux bords
de l’Escaut pour assister à la Nuit Vénitienne. — Demain,
nous poursuivrons notre récit.
Voici le discours prononcé par M. le bourgmestre d’Anvers ,
au pavillon de réception devant l’Entrepôt, après l’arrivée du
double convoi allemand et belge remorqué par le Rhin et le
Sanglier des Ardennes :
MONSIEUR LB MINISTRE ,
Moins de dix ans se sont écoulé9 depuis que la Belgique, au sortir d’une
commotion politique, et à peine entrée dans la grande famille des na-
tions, décréta qu’un chemin de fer reliant ses Ports aux plus importantes
cités de l’Allemagne, serait construit aux frais de l’Etat.
Elle était grande et noble celte pensée, par laquelle la jeune Belgique
osa, pour remplacer les moyens naturels de transport que lui offraient
antérieurement les eaux de la Hollande, dont elle venait d’être séparée,
entreprendre de créer une voie de communication rapide et écono-
mique avec le Rhin. La portée de celte conception fut immense, et ses
résultats doivent exercer la plus grande influence sur la prospérité des
deux nations, ainsi à jamais réunies.
Honneur au roi et à son gouvernement, honneur à la législature, qui,
comprenant ainsi les besoins et la dignité du pays, ont consolidé, par
l'exécution de cette grande œuvre, l’Indépendance de la Belgique !
Aujourd’hui que nous sommes appelés à inaugurer la dernière section
de ce vaste réseau de chemins de fer, aujourd’hui que nous touchons
au but de tant de travaux, de tant de sacrifices, soyez. Monsieur le mi-
nistre,le bienvenu parmi nous1. Anvers est fiére et heureuse d'èlre, en
celte occasion, l’interprète de la Belgique entière pour vous adresser les
félicitations que commanded’exécution decette entreprise nationale,si
grandiose et si difficile et cependant si heureusement terminée. Soyez
les bienvenus aussi, vous tous nobles étrangers, qui venez représenter
l’Allemagne à cette fête; venez vous réjouir avec nous de l’achèvement
de cette œuvre merveilleuse, qui suffirait, elle seule, pour illustrer un
siècle, et que n’ont pu arrêter les obstacles de tous genres dont elle
était environnée. A dater de ce jour, la grande ligne du Rhin à la Meuse,
à l’Escaut et à la Jler du Nord, est complète; les intérêts de l’Allemagne
sont désormais étroitement liés à ceux de la Belgique, et le commerce
rhénan peut considérer comme siens nos Ports, si avantageusement si-
tués, nos superbes Bassins, nos vastes entrepôts. Les marchandises dé-
barquées le malin sur nos quais peuvent le soir être livrées à vos fabri-
cants, à vos consommateurs. De tels résultats, si quelqu’un les eût pré-
dits il y a vingt ans, n'auraienl-ils pas été regardés comme fabuleux ?
Honneur donc à tons ceux qui ont contribué à réaliser ce prodige ! Le
besoin de débouchés lointains pour les produits de tous genres de la
confédération germanique est identique avec le nôtre ; comme nous
sans colonies, comme nous repoussée des centres de consommation, au-
tres que ceux des deux Amériques, l’Allemagne a un intérêt vital au dé-
veloppement de nos relations transatlantiques; son commerce, son in-
dustrie devront, comme les nôtres, leur prospérité à l’accroissement de
ces rapports. Le chemin de fer Beige-Rhénan sera non-seulement un
lien plus intime entre deux peuples voisins, mais assurera encore la
prospérité de tous les deux.
A la place où vous vous trouvez. Monsieur le ministre, un de vos pré-
décesseurs, dont le nom se rattache si glorieusement à cette grande
conception, vint, il y a trois ans, au nom du Roi, inaugurer solennelle-
ment notre station eommèrciale; il nous disait dans celte circonstance:
° Que ce n'était Jà que le commencement d’un travail plus complet, et
» que rien ne serait négligé pour mettre la station d’Anvers en rapport
» avec l'importance actuelle et la grandeur future de la Métropole du
» Commerce Belge et de l’un des plus beaux ports du monde. »
Ces paroles . nous ne les avons pas oubliées, et nous devons à votre
haute intelligence d’en voiraujourd’hui assurél'entièreexécution. C’est
grâce à vous que la station sera bientôt appropriée aux besoins du
commerce, et que l’achèvement complet des bâtiments dont vous po-
sez en ce moment les premières pierres, se poursuivra désormais sans
interruption ou retard. Recevez-en, Monsieur le ministre, nos sincères
remerciments.
Le pays attend de la voie nouvelle la restauration de sa fortune com-
merciale. Il y voit le moyen de renouer des anciennes: relations avec
l’Allemagne, jadis si actives ; mais pour qu’elle soit réellement utile au
commerce et à l’industrie, il faut indispensablement qu’aux avantages
de la célérité elle joigne ceux de l’économie ; il faut, sous peine de man-
quer Je but, que les péages soientextrèmement modérés, et permettent
aucommerce des deux pays de soutenir la concurrence des autresvoies
de communication. Ce n’est qu’à cette condition essentielle qu’il est
permis d’espérer un brillant avenir ; ce n’est que par l’économie et la
facilité des transports , que le chemin de fer pourra faire marcher de
front les intérêts du commerceet ses propres intérêts.
Confiants dans votre sollicitude éclairée pour la prospérité du com-
merce, à laquelle est si intimement liée celle de notre cité et de la Bel-
gique entière, nous comptons, Monsieur le Ministre, sur votre puissant
appui et sur l’intelligente coopération de MM. les administrateurs de la
Compagnie Rhénane, pour réaliser les espérances qu’a fait naître cette
grande œuvre nationale, qui immortalisera le règne du Prince auquel
la Belgique a confié ses destinées. Vire le Hoi !
M. Deschamps a répondu en ces termes :
« Monsieur le bourgmestre!
» Je vous remercie de ce que vous venez de dire d’obligeant pour
moi, mais je comprends que ces remerciments doivent vous être adres-
sés surtout au nom de mes prédécesseurs et des ingénieurs qui ont
donné leurs soins intelligents à l’œuvre de nos chemins de fer.
» Ce jour, Messieurs, n’est pas une solennité ordinaire; il forme une
de ces dates qui restent imprimées dans l’histoire des nations.
» Cette fête beige-allemande à laquelle nous voyons deux peuples
concourir; celle triple inauguration qu’Anvers, Liège et Cologne ou-
vrent sur l’Escaut, la Meuse et le Rhin, ont une grandeur qui émeutet
acquière toute la valeur d’un événement.
» Oui, et vous venez de le dire, chacun a compris quecette pose de la
première pierre à la porte du Rhin était la consécration du port d'An-
vers comme port du Zollverein et du centre de l’Europe.
» Ce jour est pour le commerce belge ce que fureut les événements
de 1850 pour notre nationalité : notre indépendance politique sortit vi-
vante, il y a 15 ans, d’une sujétion de plusieurs siècles, nous fondons en
ce moment notre indépendance commerciale asservie tant de fois depuis
le traité de Munster.
» Il fallait à la prospérité d’Anvers la liberté de l’Escaut et le facile ac-
cès du marché allemand.
» La liberté de l'Escaut, la domination espagnole ne parvint pas à la
maintenir, l’administration autrichienne la sacrifia, l’empire la rendit
nulle et la Hollande a pu la subir mais non la vouloir.
» Le projet d’une communication directe vers le Rhin a été conçu et
repris de siècle en siècle, depuis C'nmrles-Quint jusqu’à Napoléon, mais
ces tentatives toujours échouèrent.
» C’est aujourd’hui que cette double et grande conquête est enfin as-
surée.
• Notre chemin de fer garantitàjamais la liberté de l’Escaut, et nous
conduit au cœur même de l’Allemagne.
» Les antiques liens commerciaux.qui réunirent pendant SOOans An-
vers et Cologne, ne sont pas les seuls titres que ces villes peuvent in-
voquer pour être appelées sœurs. L’art les a ennoblies toutes les deux
et si Cologne se glorifie d’avoir été le berceau de Rubens, Anvers s’en-
norgueillil de garder son tombeau.
» Permettez-moi, messieurs, d’introduire près de vous et de vous
présenter les autorités prussiennes, les délégués de Cologne etd’Aix-la-
Chapelle qui viennent recueillir les témoignages de sympathie qu’eux-
mêmes uous ont accordés.
» Vivent Anvers, Liège et Cologne ! »
Nous croyons devoir reproduire ici les lignes suivantes pu-
bliées par le Journal de Ferviers, la veille de l’inauguration du
chemin de fer beige-rhénan. De trop belles pensées sont ren-
fermées dans ces lignes, pour que nous les passionssous silence:
«Demain, deux éclairs rapides,formidables,jailllissanl de deux granos
fleuves, viendront se confondre aux frontières de deux peuples, un.s
désormais par un lien fécond, indissoluble.
Demain, les portes de l’Allemagne s’ouvriront hospitalières aux accla-
mations de deux nations amies.
Demain, la cité de Charlemagne et la cité de Rubens salueront 1 au-
rore de ce jour qui promet aux deux pays des relations si prospei es !
Demain enfin, la vaste chaîne que, les premiers sur le continent,nous
avons en la gloire de forger, sera soudée, et le vieux Rhin embrassera
l'Escaut. . . ..
Cotes, il est grand ce jour, où deux nations sœurs par les goûts, par |