154 LA BELCIQUE. lèrement encore chez les hommes d'affaires, si rares que soient leurs loisirs. Sans le négociant, le théâtre resterait vide, les sociétés chômeraient, les étalagistes demeureraient les bras croisés devant des rayons encombrés. C'est le « monde du négoce » qui donne à diner, organise les sauteries, prend l'initiative des grandes solennités artistiques, imprime partout à la vie l'impulsion. Les rangs de cette grande société anversoise organisée pour le travail et le plaisir, sont, du reste, divisés par de véritables murailles chinoises de préjugés et de traditions. On pourrait faire une étude bien curieuse sur la population, rien qu'à se promener dans Îles divers quartiers où elle est répartie. Les marchands, suivant la nature de leurs affaires, ont leurs bureaux et leurs magasins le long du fleuve, à proximité des bassins ou aux envi- rons de la Bourse, et leurs maisons dans les quartiers nouveaux, les avenues voisines du pare et les faubourgs. Le noble, lorsqu'il ne vit pas, hiver et été, sur ses terres de la Campine et des Polders, se relire dans un de ces froids hôtels patrimoniaux, fermés et muets comme un cloitre, qui bordent encore la rue de l'Hôpital, la place de Mer, la rue Neuve, la rue Saint-Paul, bien que la plupart des grandes demeures aristocratiques du passé tendent à s'industrialiser. Les descendants des vieilles familles bour- gcoises se claquemurent, d'autre part, dans les rues étroites ct sinueuses du centre de la ville, principalement du côté de l’ancienne église des Jésuites. Les petits détaillants ouvrent leurs boutiques et leurs débits Le long de cette artère qui part du Marché aux OEufs pour aboutir à la plane Falcon, tandis que leurs concurrents, plus ambitieux, installent des magasins et des bazars copiés sur ceux des capitales dans la vaste artère qui part de la rue Leys et aboutit au Marché aux Souliers. Enfin, les quartiers Saint- André, Saint- Dessin d'Al. Hubert. 3 à Amand, du Stuyvenberg, du Scheleke, et LE ZWANEGANG (ALLÉE DU CYGNE). Ô . les ruelles des centres bourgeois ou aristo- craliques, telles que le « Zwanegang », cette mal famée allée du Cygne, dérobée en plem cœur de la ville riche, avee ses amas de charrettes, le timon en l'air, son grouillement de petit peuple, son ramassis de marchandes d'oranges, de moules et de crevettes, le regard hardi, le geste cynique, sont dévolus à la plèbe et à la ribaudaille. Quant aux marins, AUX bateliers, aux portefaix, aux gens qui vivent exclusivement du fleuve et que leurs occupa- tions retiennent près de l'eau, « aan ‘t water », ils ont choisi la partie la plus ancienne de la métropole et se tassent dans le labyrinthe des pittoresques venelles entrelacées aux