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Le Précurseur.
La même feuille publie l’invitation de M. le chancelier aux
membres de la cour des pài/s de se réunir lundi prochain, 13
janvier, pour l’ouverture'des débats sur les accusations pro-
noncées par arrêt des 12 et 18 décembre 1839.
PAYS-BAS.
(correspondance particulière.)
La-IIay*, 10 jamier. — Par un arrêté, le roi vient
d’autoriser tous les officiers qui voudront en profiter,
à prendre un congé indéfini de deux ans, pendant les-
quels il leur sera alloué, aux grades supérieurs a celui
de capitaine, les deux tiers de leur traitement. Les ca-
pitaines et grades inférieurs ne recevront quela moitié
du leur.
Le roi a daigné accepter la démission qui lui a été
offerte par M. Beelaerts Van Blokland, ministre des fi-
nances, et voulant lui donner une marque de sa bien-
veillance, l’a nommé ministre d’état et membre du con-
seil d’état.
Par un arrêté royal, S.M. a approuvé le budget nou-
veau pour la partie du Limbourg qui est rentrée sous
sa domination.
BELGIQUE.
Bruxelles , 11 janvier. — Hier le roi a reçu une dé-
putation de la regence deSt-Trond.
Ensuite S. M. a reçu successivement M. le baron de
Rothschild el M. Jules Le Chevalier.
— Encore une victime de l’imprudence des parents:
hier après-midi, vers deux heures, on a trouvé rue du
Paradis, un enfant horriblement brûlé, que sa mère
avait laisser seul. Malgré le zèle de deux médecins qui
sont venus sur le champ, ce petit malheureux a suc-
combé une heure api ès aux douleurs les plus atroces.
— Il manquait une chose importante aux pianos pour
en faire un instrument obligé de tous les orchestres.
C’était de pouvoir le mettre d’accord avec les autres
instruments qui sont sujets les uns de mouler, les autres
à descendre pendant l.ejtéculion, en suivant les varia-
tions de la température.
Grâce à l’invention de M. Sax fils, le piano sera dé-
sormais l’instrument le plus aisé à faire monter et des-
cendre; on ne cherchera plus à se mettre d’accord avec
lui, c’est lui qui se mettra d'accord avec les autres in-
struments et les suivra dans toutes leurs nuances pen-
dant l’exécution même, rien ue sera plus aisé désormais
que de mettre au même tou deux, trois, dix ou vingt
pianos et de former ainsi d’admirables concerts.
Déjà sur le seul bruit de cette importante découver-
te, plusieurs facteurs deErance se sont adressés à M.
Sax.
ANVERS , f ft JfANVflEK.
Hier soir, vers 9 heures,un commencement d’incendie
a eu lieu dans une cheminée du bazar de M. De ftaedt,
canal au beurre. La police, de garde à la permanence,
prévenue à temps s’y est reudue et le feu a été éteint
aussitôt sans le secours des pompes d’incendie.
— Parmi les 17 passagers arrives hier à o heures de
l’après-midi par ie bateau à vapeqr Soho se trouvaient
M. Coetlojon, chargé de dépêches pour le ministre plé-
nipotentiaire de la Grandé-Brelagpe en Bavière, et M.
Nixon,courrier charge de dépêches pour notre gouver-
nement.
— Ce matin,lescinq canonnières qui selrouvaient en
rade devant la ville sont entrées dans le premier bassin.
Le bateau à vapeur du passage continue toujours à
faire son service, mais demain matin si la gèlee conti-
nue, il entrera dans le bassin.
— Ce matin à 7 heures, le thermomètre marquait 11
degrés au-dessous ue 0.
—On nous écrit de Pleymouth, 7 janvier :
Le navire Entreprise, c. Maxy, parti d’Amsterdam
pour les fies Berbices, vient d’eutrer eu relâche par suite
de la révolte de quatre hommes de son équipage qui ont
été condamnés par le magistrat à 50 jours de travaux
forcés. Le capitaine compte faire voile demain avant
pourvu déjà au remplacement des matelots révoltes.
— Un procès, soulevant une double question de
droit, a été plaidé hier devant la ô“° chambre de la
cour d’appel de Liège.
mità dessiner sur uo carnet élégant... San petit pied, ehaussê
d'un brodequin rouge, dépassait la paroi du mur. Un doux
vent jouait dans ses cheveux dorés par un rayon de soleil, et
le torrent qui roulait au-dessous d'elle faisait entendre an
eourd mugissement. Api ès avoir contemplé ce tableau su-
blime et délicieux, digne d’inspirer Chàteaubriand ou Lamar-
tine, je songeai à me demander ce que pouvait èjre mon in-
connue, et une nouvelle découverte vint aider mes conjec-
tures. A l’entrée des ruines du temple, au pied d'un fragment
de colonne, j’aperçus une femme âgée avec deux nègres, et
quatre chevaux attachés l’un près de l’autre. Je reconnus l'es-
corte habituelle des jeunes Grecques de distinction, et je ne
doutai pas que ma belle artiste n’appartint a quelque grande
famille d’Athènes. J’étais bien tenté d'interroger au moins
sur son nom, ou sa vieille duègne ou l'un de ses noirs, lors-
qu’on accident, aussi terrible qu'imprévu, vint me mettre en
rapport direct avec elle-même... Le pan de mur sur lequel
elle était assise s'écroula lout-à-coup sous ses pieds; elle poussa
un cri perçant qui me fit tressaillir d'effroi et elle disparut du
côté du torrent au milieu d'un nuage de poussière La sui-
vante et les nègres n eurent que le temps d’accourir, et moi
de me précipiter derrière la muraille... Après avoir cherché
la malheureuse sans la retrouver, un nouveau cri me la fit
enfin découvrir...Elle était suspendue à la pente du précipice,
accrochée par une main à des branches prêtes à rompre, et
touchant déjà l'eau du torrent du bout de ses brodequins rou-
ges...
— Sauvez-moi ! sauvez-moi ! s’écria-t-elle eD m'aperce-
vant.
Et, prompt à un appel dont Je u'avais pas besoin, je fus
près d'elle en quelques secondes. Je la saisis fortement par
la main qu'elle avait libre, je cramponnai la mienne aux pier-
res et aux broussailles du sol, et je remontai ainsi la pepte es-
carpée du ravin. Au moment de toucher le bord, le pied me
manqua sur uo point glissant, et j'aurais perdu celie que je
voulais sauver si elle ne m’eût soutenu à sod tour. Par bon-
heur, un des noirs eut la présence d’esprit de me jeter sa lon-
gue ceinture, et je parvins, avec ce nouveau secours, à nous
mettre en sûreté tous les deux. En se voyant arrachée à i»
mort, la jeune inconnue tomba évanouie, mais sa suivante la
fit promptement revenir à elle, et son premier regard fut ma
récompense.
— Ah! monsieurI me dit-elle avec émotion, comment re-
connaître un tel bienfait?
— fin m'apprenant à qui j'ai eu le bonheur 4e le rendre,
Une dame de Maeseyck, âgée de 85 ans, ordonna par
testament que tous ses biens seraient partagés entre ses
parents du côté paternel et ceux du côté maternel, jus-
qu'au sixième degréiuclusivément. Elle voulut en outre
que ce partage se lit par parts égalés entre tous les pa-
rents appelés, avec exclusion de ceux plus éloignés.
Morte peu de jours après, une foule de parents se
présenta, mais aucun de ceux appartenant â la li-
gne paternelle n’était au 6me. degré, le plus proche
était au 7me.
Se fondant alors sur ce que la testatrice avait mani-
festé l’intention de laisser une moitié de ses biens à la
ligne paternelle, les parents de cette ligne soutinrent
que la testatrice avait entendu suivre la computation
canonique d’après laquelle deux degrés de la computa-
tion civile ne comptent que pour un, et d’après laquelle
il existait des parents paternels au degré voulu.
Subsidiairement, les parents paternels prétendirent
que le legs fait à leur ligne devenait caduc, puisqu'il
n’existait aucun parent du 6mo degré et que les biens
formant ce legs devaient être partagés d’après les règles
des successions ab intestat :
Les parents maternels, se trouvant au 5“' degré de
parenté avec la testatrice, et prétendent que celle-ci a
voulu suivre la computation ordinaire, et que l’exclu-
sion des parents paternels au-delà du 6“* degré, devait
avoir pour effet de leur attribuer la totalité de la suc-
cession.
La cour ne prononcera son arrêt que dans quinze
jours ; nous le ferons connaître à nos lecteurs.
Une lettre d’Odessa du 21 décembre, affirme que le
but des armements considérables qui se font depuis long-
temps dans la Russie méridionale, est de créer des
moyens de résister au besoin à Ibrahim-Pacha, dans le
cas où il pénétrerait avec l’armée égyptienne dans l’A-
sie-Minenre. On évalue appruximalivemeut à 40,000
hommes les troupes qui, dans ce cas seraient débarquées
sur les côtes de l’Anatolie. La réserve est aussi considé-
rable. Les régiments qui font partie de cette réserve
sont cantonnes dans la Russie méridionale; mais on a
placé leurs cantonnements un peu loin delà côte,parce
que leur entretien en est devenu plus facile. Les bâti-
ments de transport pour ces troupes se trouvent dans
le port d’Odessa. Une escadre qui est prête à sortir du
port est destinée à protéger et à seconder ces troupes.
A cela il faut ajouter que la flotte russe qui croise dans
la mer Noire n’a point désarme cet hiver, ce qui dans
les circonstances ordinaires ne manque jamais d’arri-
ver.
Arrêt
Rendu le 7 de ce mois par la cour d'appel de Garni
( chambre des appels correctionnels ), dans l'affaire
de l'éditeur du Belge.
» Ouï M. le conseiller Peeters en son rapport ;
» Ouï 11. Colinez, avocat-général, en son réquisitoire;
« Ouï .11° Le Paepe, avocat du sieur Poot, en ses
moyens et conclusions ;
» Vu l’arrêt de la cour de cassation du 9 août 1859.
» Attendu que d'après l’arrêt prérappelé l’unique ques-
tion déférée à la décision de la cour, est celle de savoir,
si l’amende comminée par l’art. 15 du décret sur la
presse du 20 juillet 1851, doit être prononcée seulement
pour le temps écoulé depuis le jour où l’insertion de la
réponse du major Stiooykens aurait dû être faite dans
le journal le Belge jusqu’au jour des poursuites inten-
tées par le ministère public, ou si elle doit l’être pour le
temps même à écouler depuis ces poursuites et jusqu’au
jour où i’insertioii en aurait été faite ; qu'il ne lui ap-
partient pas d'apprécier les circonstances atténuantes
qui se rencontrent dans la cause, et l'applicabilité de
l'article 465 du code pénal.
» Attendu qu’aux leripes de l’art 15 précité, toute
personne citée soit nominativement, soit indirectement
dans un journal, a le droit d’y faire insérer une réponse,
pourvu qu’elle n’excède pas mille lettres d’écriture ou
le double de l'espace occupé par l’article qui l’aura
provoquée, et que celte réponse devra y être insérée, au
plus lard, le surlendemain du jour où elle aura été dé-
posée au bureau du journal, à peine, contre l’éditeur,
de vingt florins d’amende, pour chaque jour de retard;
» Attendu que celte disposition, quoiquejd’inlérêt
répondis-je.
El pour l'encourager à me dire son nom, je m'apprêtais à
décliner le mien...
Elle m’interrompit en rougissant, et me dit : — Demain,
monsieur, demain !...
— Prenez cette bague, poursuivit elle avec un doux embar-
ras El elle détacha de ses doigts uti de ses plus fiches an-
neaux : — Ce sera pour vous le gage de ma reconnaissance ,
et le moyen assuré de savoir qui je suis. Je fais partie de la
maison du roi de Grèce, ajouta-t-èlle , et son palais est ma
demeure. Vous pourrez vous présenter demain à la porte de
ce palais avec la bague dont je vous ài fait présent. Vous la
remettrez aux gardes, qui vous introduiront, et vous connaî-
trez. à sa gratitude, celle dont vous avez sauvé les jours...
Ayant parlé ainsi, elle fit un signe aux deux nègres ; fis lui
ameuèrent le plus petit des quatre chevaux, et elle s’élança
lestement en sellé! La suivante et les noirs en firent autant,
et la petite caravane partit au galop.
— A demain, monsieur, me dit encore l’ineonnue en me
saluant de la main.
Et maniant son cheval comme une amazone, elle disparut
dans la voie Mystique
— Eb bien? s'écria l’étranger tout ému... Et le lende-
main ?...
— Le lendemain , repris-je froidement, j’étais é cent lieues
de la Grèce, et la belle Athénienne m’était inconnue , autant
qu’elle me l’est encore aujourd'hui...
— Comment ! s'écria le superbe Jeune homme; vons eûtes
le courage de partir sans la révoir I
— J’y fus contraint le jour même, une heure après mon
aventure. Le commandant dé la frégate que je devais suivre,
avait reçu, pendant ma courte absence. Tordre de mettre im-
médiatement à la voile. Quand je repartis à bord, on q'ai-
tendait que moi pour lever l’ancre. et placé entre mon devoir
et ma curiosité, je n'hésitai pas à préférer mon devoir.
Et vous n otes pas retourné fen Grèce pour retrouver cette
femme I demanda l'étranger avec une surprise ipêlée d'indi-
gnation.
— J'avoue, répliquai-je bd souriant, que j'ai eu quelquefois
cette velléité : mais j’ai passé depuis long-temps l'âge des fo-
lies, et c’est déjà beaucoup pour moi d'avoir gardé l'anneau
de TAlhcnienne.
— Ab ! vous l'avez encore, dit le beau jeune bomme d upe
YOix singulière. - /"
LcTOiei, repartisse an I? inootrant à mon doigt.
général, a spécialement pour oly'et d’offrir une garantie
à la personne citee dans un journal, et que pour attein-
dre ce but d’une manière efficace, la législature a com-
tniné non une peine unique et déterminée, qui dans cer-
tains cas peut èlre illusoire, mais une peine successive,
qui s'accumule à raison du retard mis à l’exécution de
l'obligation que la loi impose ;
» Attendu que c’est le défaut d’exéulion de cette obli-
gation dans le délai fixé par la loi, qui constitue le délit
à charge de l’éditeur, et que ce délit continue à peser
sur lui, non-seulement jusqu’au jour des poursuites du
ministère public, mais jusqu'au jour même de l’inser-
tion de la réponse dans le journal , et que c’est cette
continuité du délit qui emporte l’aggravation succes-
sive delà peine !
» Attendu qu’il résulte de ces considérations, que la
peine fixée par jour par l’arrêt de la cour d'appel de Bru-
xelles aurait dû être prononcée, npn-seulernenl pour le
passé et jusqu’au jour des poursuites du ministère pu-
blic, mais aussi pour ie fuluret jusqu’au jourde l’inser-
tion de la réponse déposée au bureau de l’éditeur du
journal.
» Par ces motifs :
« La cour déclare que la peine prononcée par l’arrêt
de la cour d’appel de Bruxelles du 8 juin 1859, à char-
ge du sieur Poot, éditeur du journal le Belge, continue-
ra à courir contre lui, jusqu’au jour de l’insertion
dans ledit journal de la réponse du major Slrooykens,
condamne le sieur Pool aux dépens.
Nous avons annoncé, il y a quelques jours, qu’on
venait de faire à Constantinople l’essai de la guillotine.
Voici, d’après l'Audience, à quelle occasion cette fatale
machine a été inaugurée:
« Un crime avait été commis il y a quelques mois. Dans le
carrefour du grand cimetière était établi un raseur de tru-
ques qui tenait en même temps une salle de bains située dans
un petit jardin planté de lauriers et de cyprès. Ali-Kaf, c’est
le nom de ce barbier, était en réputation aux alentours ; il sa-
vait dérider la gravité ordinaire de ses pratiques par une
causticité fine et raisonneuse : son nez d’aigle, ses yeux noirs
et perçants surmontés d’un sourcil mobile comme celui d'un
chat, sa bouche mince encadrée dans une barbe noire et touf-
fue. formaient une physionomie gaillarde et heureuse qui
n’était cependant pas exempte d'un caractère de méchanceté.
Parmi ses pratiques les plus assidues, on citait Arzouf-men-
Bed, homme riche, qui comptait à peine quarante ans. mais
que là perle de son épouse favorite avait si vivement affecté,
que le moral et le physique en avaient reçu une rude atteinte.
» Daus le principe Ali-Kaf se rendait tous les trois jours
chez Arzouf pour conduire sa toilette, mais bientôt ce fut le
maître qui prit la peine de se rendre chez le serviteur. Etait-
ce habitude, était-ce amitié ? il allait assidûment offrir sa
tête au rasoir du gaillard qui lui racontait la grande nouvelle,
la petite chronique, assaisonnait sou débit de petites variétés
orientales; c'était une nouvelle pâte de senteurs combinées,
c’était uue nouveauté à la Saadi sur les roses et les étoiles en
amour, enfin Ali Kaf était pour le bon Arzouf uoe gazette
complète, avec la polémique, le fait quotidien, le feuilleton,
l’annonce. Sa longue pipe glissant sur ses jambes croisées,
tranquillement installé dans un petit salon de laurier, Arzouf
écoutait ie babillage de son barbier eu appuyant son bras
gauche sur l'épaulé de son petit Hafiiz, âgé de onze ans. L’en-
fant, loin d’avoir la même sympathie pour notre barbier,
éprouvait même comme de la terreur rien qu'à sa vue ; aussi,
quand son père voulait le réprimander, il le menaçait en riant
du grand rasoir cl'Ali-Kaf.
» Il y a quelques mois. Arzouf. ennuyé de la haute Cons-
tantinople, désirait se retirer dans an coin de TArchipel : à
ce sujet il avait consulté son favori qui s’était opposé à ce
projet de misanthrope, mais il avait vaillamment combattu
les conclusions d’Ali Kaf, et le lendemain il devait lu: appor-
ter une partie de ses joyaux pour en faire de l'or prés d'un
Arménien ami du barbier.
» Le lendemain donc, vers le soir, il arrivait avec Hafiiz
chez Ali-Kaf: Ce dernier n’étant pas dans sa boutique, fi tra-
'«wa le jardin et entra dans la salle basse des bains, où les
baignoires eu marbre vert, fort profondes, étaient disposées
au milieu d un labyrinthe de petites colonnes. Ne (routant
pas encore là Ali-Kaf, il s’installa devant un petit réchaud
où brûlait un reste de beDjoin. Haffiz ayant déposé près
de lui le coffret qui renfermait les pierreries, alluma la
pipe de son père , puis s'assit à ses côtés en épluchant
du bout des dents uoe grenade dont il semait l'écorce
autour de lui. « Hafiiz, dit Arzouf, vous salissez le tapis
avec votre grenade ; voilà Ali, gare à votre cou. » L'en-
fant se leva tout tremblant et, s'élançant vers une bai-
gnoire, sauta légèrement dedans et se tapit au fond. Arzouf
riaitde cette peur, quand le barbier eutrasuivi de l’Armé-
nien.Le coffret fut ouvert, et pendant quôndiscutaitdu prix,
Ali-Kaf se préparait à raser le chef ti'Arzoaf, Un cri affreux
Il le dévora d'un regard qui semblait vouloir l'arracher de
sa place, et suivit avec une jalousie inquiète l'examen que cha-
cun en faisait à sou tour.
Il fut convenu, sur la foi de mon récit, que la plus belle
femme du monde était en Grèce, et la conversation tomba sur
un autre sujet, taudis qu’une partie du groupe se dispersait
dans le jardin.
L'étranger profita de ce moment pour me prendre â part et
m'adressa d'une voix troublée les paroles suivantes :
— L histoire que vous venez de raconter, monsieur, m'a
intéressé plus quo vous ne sauriez cruire : perinettez-moi de
vous demander l'heure et le lieu où je pourrai vous en repar-
ler sérieusement.
— Ce soir même, monsieur, répondis-je; et je fin indiquai
le numéro de mon appariement dans l'hôtel.
— A ce soir donc,*reprït-il en se rètirânt, — après m'a-
voir laissé une carte ornée d'arabesques d'or, au milieu de la-
quelle je lus : LOOD GEORGES ELLIS.
— Lord Georges Ellis ? me dis-je, intrigué plus que ja-
mais.
Et je questionnai tous les habitants de l’hôtel sur le per-
sonnage qui portait ce nom.
L'un me dit que c’était un touriste, amateur foj-céné do
tableaux; l’autre que c'était un rêveur dévoré du spleen ;
celui-ci déclara qu'il le croyait homme de génie; celui-Jà
prétendit qu'il avait le cerveau fêlé. Tous furent d’accord sur
un seul poim : la haute distinction et l’immense fortune de
lord Eilis.
Cela me suffisait, à la rigueur, pour recevoir le personnage
avec confiance, et je ne fus pas plutôt rentré dans mon ap-
partement, qu'il se fit annoncer par mon valet de chambre.
H.
Lord Ellis entra lentement et s'assura qu'on refermait la
porte ; sa figure était pâle, «l sa démarche un peu incertaine.
Tout en lui iudiquait un homme qui fait une action décisive
et qui a besoiu de s’entourer du plus profond mystère. Cçlte
circonstance ajouta quelque sympathie à l’étonnement qu’il
m’inspirait, et je lui fis signe que nous étions entièrement
seuls, qu'il pouvait s'ouvrir a moi sans ia moindre inquiétude.
— Je vais, en effet, m'ouvrir à vous, monsieur, dit-il àvçe
hésitation , au risque de vous amuser aux dépens de (ça
bonne foi.
La gravité mélancolique avec laquelle 11 prononça ces mots
fut loin de me disposer au sentiment qu’il redoutait ; et, bïèq
mieux que mon nouvel appel à sa confiance, mon sérleçx et
se fit entendre : Haffiz se leva, pois soudain se laissa glisser
au fond du bain... L’Arménien tenait la tête de son père ren-
versée, en appuyant fortement une serviette sur sa bouche,
pendant qu’Ali-Kaf, les mains inondées de sang , se penchait
avec violence sur lui. Voila ce que l’enfant vit comme un éclair.
Il croit entendre les assassinss'éloigner. alurs il s’.elauce hors
dubain. et saute dans le jardin parune croisée basse. Quel-
ques instants après il vicies deux hommes chargés du cadavre
du pauvre Arzouf, se diriger versie fond du jardin. Tapi en-
tre les cyprès serrés, le ventre contre terre , il entendit Ali-
Kaf qui passait prés de lui , dire à l'Arménien : « qui aurait
mangé cette grenade, si le petit n’était venu ? Il aurait eu
peur et crié, répondit l’Arménien. L’enfant passa lanuit dans
le jardin, et ce ne fut qu'avec le grand jour , quand les prati-
ques arrivèrent, qu'il put sortir.
» Ce fut grâce â ses révélations qu’on découvrait je crime,
et qu’Ali-Knf et l’Arménien furent conduits sur la place du
Marché, pour faire l’essai du nouveau supplice. La foule était
immense et tournait ses mille regards sur la machine qu’on
venait d’installer. Les deux bras delà guillotine soutenaient
une sorte de corniche, aux deux coins de laquelle brillaient
deux boules d’etain surmontées d’une aiguille de fer. Le cou-
teau, delà forme d’un monstrueux yatagan tronqué au-des-
sous de la poignée, avait presque le double delà longueur de
l’affreux triangle. Dans la cuvette de granit rouge, suspendue
au-dessous de la planche à bascule, était placé un panier fait
de rubans d’écorce.
Les deux condamnés, les poings liés au dos. pieds nuds, la
tête et la face entièrement rasées, parurent sur l'échafaud
avec le bourreau et deux nègres. Tous les yeux se dirigèrent
sur Ali Kaf, dont la physionomie offrait en ce moment un mé-
lange atroce de terreur et de curiosité sardonique. Ayant
examiné l’ensemble de la machine, il hocha la tête légèyé-
nicnt, semblant dire : J’y suis ! Puis, ayant levé ses regards
vers le couteau, il haussa les épaules avec un sourire fauve,
qui se traduisait facilement par : Ce n'est que cela ! Bientôt
ia planche fatale, sur laquelle on venait de l'attacher, faisait
jouer son horrible bascule, le couleBu glissait avec rapidité,
précipitant obliquement de haut en bas son extrémité la plus
épaisse, et la tète tombait dans le panier. De suite ce panier
fut enlevé par un des nègres qui en lira la tête, et montant
sur une échelle, fut la ficher au bout de l’aiguille d'une des
deux boules d’airain.
Alors, tout-à-coup l’eau jaillit d’un bouton de cuivre et
remplit la cuvette, où bientôt plongea la tête de l'Arménien,
et d’où elle fut aussitôt retirée pour faire pendant à celle
d’Ali-Kaf Le supplice du pal. qui ne présente d’ordinaire la
mort instantanée que lorsque l'eau a été approchée de la bou-
che du patient, a fait établir celte différence de la cuvette ou
du panier. L’Arménien, qui avait été moins chargé qu'Ali-
Kaf, avait obtenu la grâce de l’immersion. La foule, stupéfaite
et silencieuse, resta long-temps à remuer autour de la guillo-
tine, et sur sa physionomie, comme sur celle d’Ali-Kaf a son
apparition sur l'échafaud, on pouvait lire : a Ce n’est que ça.»
Cancans.
Si on écrivait l’histoire complète de l’humanité, lors-
qu’on en serait à l’examen des petites choses, à (a revue
des menus détails, il y aurait un bon article à faire sur
le cancan, qui, à force de s’occuper des autres, mérite-
rait bien qu’on s'occupât un peu de lui, et qu’on le mit
à son tour sur la sellette, devrait-il sortir un peu mal-
traité, un peu houspillé des mains de l’historien etlaissar
au traquenard d* la critique quelques poils de sa queue.
Voici, en attendant, quelques documents que je me suis
procurés sur son compte; je me fais un devoir et un
plaisir de les mettre à la disposition du public:
Le cancan est fils du désœuvrement et de la malice.
Il naquit un soir d’hiver, daps une veillée, aune époque
déjà si reculée qu’elle se perd dans la nuit des temps.
On ne connaît pas non plus exactement le lieu desa
naissance. Je ne serais pas surpris qu’il eût vu le jour
en France, dans un des quatre yingt-six départements
de la tfrance, plutôt au Midi qu’au JNord, et que ce fût
avajtl la Révolution, peut-être jnème avant le Deluge.
Quoiqu’il en soit, le cancqo était né yiabje, le cancan
n’est pas mort, car il vit encore ; le cancan a survécu à
tous les cataclysmes des sociétés et du globe ; que dis-
je? le cancan est plus frais, plus dispos, mieux portant
que jamais; le cancan est (importe), il vivra du moins
autant que le monde.
Il ne faut pas confondre le cancan avec la médisance et
la calomnie. Le cancan participe de l’une et de l’autre:
il emprunte quelque fois à celle-ci, plus souvent à celle-
là ; mais il a les manières plus agréables, les dehors plus
gracieux, les formés plus polies. Pour (pieux dire, c’est
un petit traître, un petit hypocrite que le cancan. Il n’a
pas l’air d’y loucher, il se fait mignard, il sourit, il
minaude, caril cache des griffessqussa patte de velours,
le petit scélérat, et ne les évite pas qui veut.
C’est daps les petites villes de 5 à 4,000 âmes, qu’il
moo attention le décidèrent à parler.
— Vous savez mon nom. monsieur, dit il en rougissant;
c’est uo des plus grands noms de l'Angleterre , et je le crois
cependant le moindre de mes avantages. Mon père m’a an-
noncé en mourant que j’avais cent millions de fortune, mon
miroir me répète tous les jours que la nature o'a rien refusé
â ma personne, et mon ambition vous convaincra peut-être
que l'originalité de mon esprit n'est pas sans grandeur. Celte
façon de parler de moi-même vous surprend sans doute,
monsieur ?
— Vous vous rendez justice, mylord . répondis-je, je vous
prie de croire que je vous la rends de mon côté.
— C'est que je ne saurais trop me relever d'abord à vos
yeux pour ne pas vous sembler bientôt ridicule!... Jugez de
l'importance des avantages dont je vous parle, en apprenant
que j'ai la prétention d’épouser la plus belle femme du monde!
Je dois dire qu’à cet aveu étourdissant ma surprise faillit
se déclarer par un éclat de rire;mais, pour réprimer ce mou-
vement fâcheux, ii mpsjuflUde regarder lord Ellis. C'eo'ètait
plus le même bomme que je venais de voir hésiter et rougir
en m’adressant la parole. C'était, avec quelque chose de plus
ad mirable et de plus étrange encore, l’étrange et ('admirable
personnage dout l’aspect m'avait capturé au jardin. Sur son
mâle et noble visage, dans sa prestance altière et gracieuse,
dans l’expression de son regard et de sa physionomie , jusque
dans la richesse extraordinaire des moindres détails de sou
costume, tout était à la hauteur de ses prétentions romanes-
ques, et rien ne pouvait Prêter è la plaisanterie ou à la défian;
ce. Je ne pus m’empécher dele comparera èes héroïque»
paladins du mpyeo-âge, qui n'entreprenaient jamais que l’im-
possible et qui ne manquaient point d'en venir à bout ! Tout
ce qui m'avait d'qilleurs intrigué en lui m'était expliqué dé-
sormais, et j’y reconnaissais une de ces volontés inébranla-
bles qui caractérisent les hommes de génie ou les fous. Je
n'hésitais point à le classer dans la première catégorie, lors-
qu'il reprit ainsi sa confidence :
— Oui, monsieur, celle femme-là seule aura mon cœqr et
ma main, qui effacera toutes celles dont j'aurai 'l'image (j?**
l’ame. C’est (à la conquête que je veux faire, moi,' comme
César ei Napoléon .voulaient faire celle du monde ! De même
que Carliste et l'écrivain poursuivent la réalisation dé leur
rêve .daps |a création de leur pinceau él de'léur plume ; de
Jiièmp Jg poursuis la réalisation du mien dans la plus parfaite
créajure du Tout-puissant ! J'en ai tant vu a mes’pieds, des
plus hautes et des plus Gères ; j’en ài tant remarqué au-dessous
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