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1*45. — jtf.KâO.
Om «'«tmiif >
A Anvers au bureau du Précur-
seur , Bourse Anglaise, N» 1040;
en Belgique et A l’étranger chez
tousle8 Directeurs des Postes.
Samedi & D^ceisiftre.
(BMaléme iiiüiéc.)
LE PRÉGURSEU
JOURNAL POLITIQUE, COMMERCIAL, MARITIME ET LITTERAIRE.
PAIX. — LIBERTE, — PROGRÈS.
iftottitemenf jtaf
Pour Anvers, iüfr ; pour li'qiho-
vince 18 fr.; pour Itétranger j'"' "
Insertions 25 ceâtimesd
Réclames 50
nger p fr.
■S la
O décembre.
A propos des débats parlementaires actuels.
Les débats, auxquels donne lieu actuellement le projet de loi
relatif aux entrepôts francs, nous fournissent une preuve nou-
velle de l’incapacité de la plupart des membres du parlement,
lorsqu’il s’agit des intérêts commerciaux et industriels.
Qu’est-ce, en effet, que le projet de loi dont la Chambre s’oc-
cupe aujourd’hui ? Kien de neuf. C’est la consécration à peu
près pure et simple de ce qui existe déjà, en vertu de lois et
d’arrêtés royaux. Il n’y avait guères qu’un principe qui fût posé
pour la première fois en Belgique, celui des Warrants ; on l’a
disjoint, écarté pour longtemps peut-être, peut-être pour tou-
jours. Quant au reste, tout se réduit en quelque sorte à ce qui
existe, et la nuance de l’entrepôt franc à l’entrepôt libre est si
légère, qu’elle est presque imperceptible.
Cette loi n’exercera qu’une minime influence sur la fortune
du pays, et cependant, si l’on écoutait certains députés, elle se
rait conçue dans l’intérêt allemand, dans l’intérêt anglais, dans
l’intérêt Anversois, dans nul autre ; elle devrait être une cause
de ruine pour tout ce qui ne tient ni à l’Allemagne, ni à l’An-
gleterre, ni à Anvers.
C’est la singulière thèse qu’ont soutenue et M. Delehaye, et
M. Manilius el M. l’abbé De Haerne.
M. Delehaye ne veut pas d’entrepôts francs en Belgique,
parce qu’il n’y en a pas en Russie. C’est un modèle on ne sau-
rait mieux choisi en vérité que celui de la Russie. Quelle simi-
litude de coutumes, de mœurs, d’institutions, il y a entre les
deux pays ! Depuis quand M. Delehaye a-t-il des idées Mosco-
vites ? Depuis quand croit-il que le soleil ne se lève plus à
l’Orient et que la lumière nous vient du Nord ?
Al. Manilius n’en veut pas pour un autre motif. Il n’en veut
pas, parce qu’il n’y en avait pas sous le régime hollandais. Cet
argument fait beaucoup d’honneur à celui qui a eu l’esprit de
l’imaginer. Comment, il n’y avait pas d’entrepôts francs du
temps où nous étions soumis à la Hollande, où la Hollande di-
rigeait notre fortune à son gré, et nous voudrions, aujourd’hui
que nous ne lui appartenons plus, faire ce qu’elle ne lésait pas
pour nous ! A-t-on vu pareille énormité ?
Cela nous rappelle l’histoire d’un Manilius quelconque du
temps où les pantalops ont succédé aux culottes courtes de
nos pères. Ce Manilius, fidèle à la culotte courte, parce qu’elle
employait moins de drap, disait à ses enfants qui sollicitaient
des pantalons : des pantalons! Votre père, votre grand père,
votre trisaïeul ne connaissaient pas les pantalons, et ils ont
très bien vécu sans cela. Vivez en culotte courte.
JM. Manilius a émis des idées qui ne sont pas de notre siècle.
Quant à M. de Haerne, il en a émis qui lui appartiennent. Per-
sonne ne lui en contestera, ne lui en disputera la propriété.
L’abbé de TIaerne aime beaucoup le développement commer-
cial, mais c’est à la condition que ce développement ne pourra
nuire ni à l’industrie ni à l’agriculture. M. de la Palisse n’eût
pas eu plus de bienveillance et n’eût pas mieux parlé, avant
qu’il fut mort de maladie. Mais, de. grâce, M. l’abbé, dites
nous en quoi, comment et quand, la prospérité du commerce
pourrait porter préjudice à l’industrie et à l’agriculture ? Jus-
qu’à présent nous avions eu la bonhomie de croire que la pros-
périté du commerce rejaillissait sur le travail industriel et agri-
cole ; l’expérience de tous les siècles l’avait prouvé dans tous
les pays; n’en serait-il donc plus ainsi? Auriez-vous négligé
les leçons que vous devriez donner au collége de Courtrai pour
nous donner celle-là ? En vérité, M. l’abbé, vous pouviez-vous
en dispenser, car vous ne nous convaincrez que d’une chose,
c’est que vous êtes un excellent homme, mais un très mauvais
économiste. Brûlez.... nous allions dire vos vaisseaux....vos
fuseaux, M. l’abbé, croyez-nous, et au lieu d’être l’apôtre de la
routine, faites-vous celui du progrès, là où vous exercez de
l’influence.
En somme, toutes les raisons de MM. Delehaye, Manilius et
de Haerne se réduisent à ceci : les entrepôts francs ne seront
profitables qu’à Anvers; ilsseront nuisibles à l’industrie belge,
parce que l’industrie étrangère enverra ses produits dans ces
entrepôts, et qu’on les exportera, au lieu d’exporter les nôtres.
C’est là une double erreur.
De toutes les villes qui seront dotées d’un entrepôt franc, la
ville d’Anvers est peut-être celle qui en retirera le moins d’a-
vantages, parce qu’elle ne possédera guères que ce qu’elle pos-
sède déjà, tant sera mince la différence des institutions, tandis
que d’autres villes acquerront ainsi ce qu’elles n’ont pas encore.
L’intérêt anversois, dont on fait, en cette question, comme
toujours au reste, une sorte de Gargantua, est un nain micros-
copique. Celui qui l’a découvert à l’œil nu et qui l’a trouvé si
gros, devrait remplacer M. Quetelet, que dis-je M. Quetelet ?
à l’Observatoire. Ce serait une grande économie pour l’Etat et
une gloire incommensurable pour la Belgique qui aurait pro-
duit un homme—télescope.
Quant à ce qui est de l’industrie, on se trompe singulière-
ment, si l’on croit que la facilité de rencontrer dans un entre-
pôt assez de marchandises étrangères, pour former une car-
gaison de pacotille, puisse porter préjudice à l’écoulemeDt
des produits belges. C’est tout le contraire, parce que beau-
coup de navires, qui aujourd’hui quittent, sur lest, nosports, où
ils ne trouvent pas à bon marché ce dont ils ont besoin, et vont
chercher ailleurs un chargement, le prendraient chez nous, s’il
y avait abondance. Les produits belges seraient achetés à l’aide
des produits étrangers, au lieu d’être délaissés, comme ils le
sont trop souvent. Puis, les moyens de comparaison stimule-
raient nos fabricants,et ce ne serait là ni un médiocre enseigne-
ment, ni un médiocre avantage. On se déciderait peut-être en-
fin à travailler, suivant le goût des consommateurs, au lieu de
travailler suivant le sien et suivant la routine. Mais que devien-
draient les fuseaux et les rouets de M. de Haerne ?
Dans la lettre d’un négociant publiée hier, il est dit que le
moyen de sauvetage indiqué, celui d’approvisionner les chalou-
pes, est tellement simple qu’il est inconcevable que le gouver-
nement n’ait pas encore songé à le prescrire aux marins, pour
prévenir les calamités auxquelles donne souvent lieu le manque
de vivres, lorsqu’après un naufrage les équipages se sauvent
dans les chaloupes.
Ce n’est pas notre gouvernement seul,mais ceux de toutes les
nations maritimes qui devraient, dans l’intérêt de l'humanité, ,
adopter un mode aussi simple de pourvoir sûrement aux be-
soins des naufragés.
ITALIË.
On écrit de Rome, le 25 novembre : Voici les passages les plus remar-
quables de l'allocution prononcée hier par le pape au sein du consistoire
secret, allocution qui n’est autre chose que l’éloge funèbre du défunt
archevêque de Cologne : de même qu’autrefois les devoirs de notre
charge nous ont obligé à parler dans cette enceinte de noire révérend
frère Clément Auguste, archevêque de Cologne, ainsi nous croyons
aujourd’hui convenable de vous parler encore de lui à l’occasion de sa
mort, dont la nouvelle nous a profondément affligés ; car il ne serait
pas juste de taire aujourd’hui les louanges, puisque la fin desa vie a si
bien répondu à la première partie desa carrière, que l’église catholique
a le plus grand droit de se réjouir des exemples qu’il a donnés el qui
peuvent être salutaires, non-seulement à ceux qui sont avec nous,
mais encore à ceux qui sont hors du giron de l’église.
Donc mes révérends frères en vous adressant aujourd’hui cette allo-
cution. nous ne répétons pas seulement les élogesque nous avons déjà
accordés à ce prélat distingué, mais nous voulons encore exalter par
de nouveaux éloges sa vertu peu ordinaire. Car à une connaissance
toute particulière de la théologie, à la piété la plus profonde et la plus
vive, il joignait le plus grand zèle pour la religion, la plus haute con-
stance et le plus souverain mépris des choses temporelles Tout le
monde connaît l’invincible force d’âme avec laquelle même dans les
temps les plus difficiles, il s’est efforcé de conserver intacte la pureté
de la religion catholique et de la discipline de l’église. Dans le même
consistoire le pape a fait 15 nominations d'archevêques et d’évêques et
a nommé cardinaux MM. Sanguinelti (ou Simonetti) et Piccolimini.
Deux nominations de cardinaux ont été réservées in petto. Le saint
pallium a été conféré aux archevêques de Naples, Lisbonne, Monréal
et Cologne.
— D’après les nouvelles officielles, l’empereur de Russie arrivera à
Rome le 29. M de Butenieff s’est concerté avec le cardinal Larobru-
schini sur tout ce qui est relatif à l’acceuil à faire à S. M On prétend
que quelques cardinaux auraient conseillé au pape de ne pas toucher
à la question religieuse dans ses conversations avec l’empereur, mais
le St-Père a, dit-on, répondu qti’il croit de son devoir le plus sacré de
prendre sous la protection vis à vis de l’empereur , les intérêts des ca-
tholiques en Russie , mais qu’il saura observer strictement toutes les
convenances. On attend avec une vive anxiété le résultat de ces con-
féi •ences. L’encyclique aux évêques allemands relativeau nouveau schis-
me doit paraître sous peu , si toutefois, le pape ne préfère pas parler
des dissidents dans une allocution au prochain consistoire qui se
tiendra lé 15 décembre. (Gas. d'dugsbourg.)
FRANCE.
Paris, i décembre.— Voici, dit-on, ce qui a été arrêté en conseil des
ministres, au sujet de Madagascar, dit le Courrier français :
«L’Angleterre interviendrait à Madagascar conjointement avec la
France; les deux puissances intervenantes, après avoirchàtié lesOvas,
réclameraient purement et simplement pour les traitants de toutes les
nations le droit de s’établir sur les côtes, de posséder des terres et de
faire le commerce. Le seul avantage que se réserveraient les puissan-
ces intervenantes serait l’exemption pour leurs nationaux respectifs
de tous droits de douane et de navigation; les deux gouvernements
s’engageant du reste, l’un vis-à-vis de l’autre, à intervenir au même
titre el à traiter sur les mêmes bases. »
— L’ambassadeur d’Angleterre lord Cowley. qu’on sait êlre d’une
très grande taille, sorti à pied, a fait hier une chute assez grave. Son
chapeau a pu amortir le choc de la tête, mais on craignait qu’une
épaule ne fût démise.
— Par suite des déconfitures qui ont affligé la Bourse de Paris,
depuis quelque temps, un mandat d’amener a été décerné par M. le
préfet de police contre un sieur X. qui avait été activement mêlé à
plusieurs grandes opérations. Dans le cours des perquisitions dont la
personne du sieur X... était l’objel, on a découvert qu’il avait plusieurs
domiciles dans Paris, mais il n’a été trouvé dans aucun d’eux.
— Voici, au 30 novembre, quelle était la situation exacte du change,
commencé le 16 août dernier, pour le retrait des pièces de six liards et
de dix centimes à l’N :
Il a été reçu au ehange 58 261.268 pièces; il a été reçu au poids 1,579,141
pièces étrangères et 2.039.771 pièces fausses ont été coupées
— Nous trouvons aujourd’hui dans le Times un article dans lequel
ce journal exprime une profonde horreur pour ce qu’il appelle la guerre
barbare que nous faisons en Afrique. Aux détails que nous donnions
sur les affaires de la Nouvelle-Zélande nous en ajouterons un qui a été
commenté déjà dans la presse anglaise de Sidney. II paraîtrait que
dans les combats livrés aux naturels, le commandant anglais avait
donné l’ordre de passer à la baïonnette et d’achever tous les blessés
tombés sur le champ de bataille. On raconte même qu’un des chefs
zélandais avait sauvé sa vie en se couchantsous le corps d’un des siens,
« ce qui est très-surprenant, dit le rapport d’un officier anglais, car nos
« hommes exécutaient très-ponctuellement l’ordre qui avait été donné
» de ne faire aucun quartier, ces sauvages ayant l’audacieuse coutume
n de se relever pour tirer encore sur l’ennemi après qu’il est passé. »
Nous ne ferons aucun commentaire sur ce fait, pour deux raisons :
d’abord parce que nous admettons que la guerre peut avoir certaines
nécessités, cruelles, mais forcées, et ensuite parce que nous crain-
drions de rester au-dessous du blâme et de l’indignation que ne peu-
vent manquer d’exprimer à cette occasion les feuilles anglaises aux-
quels quelques-uns des actes de notre armée d’Afrique ont arraché de
telles clameurs. (Journal des Débats.)
— Bulletin de la bourse. — Bourse très animée avec continuation
de hausse , Le 3 p. c. Je 83-85 premier cours a été fait à 85-20 , pour
finir à 85-15 fin courant; en hausse de 50 c. sur hier. Le 5 p. c. moins
élevé que le 3 p. c. a fait 118 au plus haut et reste à 117 85 fin courant,
117-95 au comptant; en hausse de 5 c. au comptant et 55 c fin courant.
La liquidation se fait bien; on n’a pas parlé de nouveaux sinistres; seu-
lement le bruit courait qu’une des grandes maisons de banque se serait
trouvée gênée et aurait demandé et obtenu des secours de la banque
de France. On disait que le chiffre avancé par la banque était de deux
millions de francs
Chemins de fer. — Opérations très animées, hausse générale. Le Nord,
sur lequel les affaires sont les plus engagées, finit à 720 au 13 décembre.
Il y a eu hausse de de 10 fr. sur le Saint-Germain , 12-50 rive droite, 10
fr. rive gauche, 20 fr Orléans, 20 fr. Rouen,22-50 Havre, 15 fr. Avignon,
2-50. Strasbourg; Fampoux, 5 fr.; Vierzon, 20 fr.; Bordeaux, 5 fr.; Bou-
logne, 10 fr., Montereau, 5 fr.
Promesses. — Ces valeurs reprennent de la fermeté ; plusieurs sont
en hausse ; on parlait comme d’une chose définitivement arrêtée, de la
fusion des compagnies de Creil à Saint-Quentin.
Fonds étrangers. — Toujours négligés ; hausse de 1/4 sur le 5 p. c.
belge (1842) à 101, et de 1/2 sur i’ergprunt romain. Sans variation : le 3
p. c. belge (1840) 99 1 4. — Le 3 p. c. espagnol qui n’avait pas été côté
depuis huit jours, a été traité à 58. Diff. iiouv. 16. L’emprunt de Pié-
mont a monté de 2-30, à 1,245. Les autres valeurs étrangères n’ont pas
eu de cours.
KOLIiAADf:.
nnllelin de I» bourse d’.tmsterdnni, du 3 décembre. — Quoique
l’argent est en général encore rare, le marché des fonds hollandais
montrait en général une meilleure tendance et tant au comptant qu’à
terme il se montrait de nombreux acheteursà des cours en hausse.
Pour les fonds Espagnols il y avait aussi un peu plus de demande ;
les Ardoins et les 3 0/0 de l’intérieur se plaçaient à des prix améliorés.
BELGIQUE.
CB.tNBRK DES II3',l>HHSEATA\TS.
Séance du 5 décembre.
PRÉSIDENCE DE M. LIEDTS.
A 1 heure et demie, la séance est ouverte par l’appel nominal et
l’adoption du procès verbal de la séance précédente.
Les sieurs Piéton, Lebrun et autres délégués des maîtres de poste,
demandent une loi sur la poste aux chevaux.—Renvoi à la commission
des pétitions.
Le sieur Degeest. propriétaire à Roulers. réclame l’intervention de
la chambre, pour obtenir le paiement de ce qui lui revient du chef
d’une emprise faite par l’état pour l’établissement du chemin de fer
vers la frontière de France. — Même renvoi.
Les facteurs de la poste rurale de Jemeppe, demandent une augmen-
tation de traitement. Môme renvoi
m. de haerne. M le ministre a déposé sur le bureau le dossier des
avis des chambres de commerce sur les entrepôts francs, mais dans ce
dossier je n’ai pas trouvé l’avis de la chambre de commerce de Cour-
trai, qui, comme on le sait, est défavorable au projet des entrepôts
francs.
si. malou, ministre des finances, a déposé cet avis avec les autres, il
pense qu’un membre l’aura pris pour le consulter. Au reste, la cham-
bre de commerce de Courlray a fait publier son avis sous forme de
brochure et M. le ministre va eu faire prendre chez lui un exemplaire
qu’il joindra au dossier.
m. de corsvvarem présente le rapport sur diverses pétitions relatives
aux chemins de hallage delà Meuse. La commission conclut au renvoi
FEUILLETON BU PRÉCURSEUR.
Théâtre royal d’Anvers.
Le Cheval de Bronze est un opéra que l’on revoit toujours avec plaisir:
l’allure musicale en est vive, légère, pétillante ; c’est une des bonnes
pièces d’Auber. Cet opéra, joué la semaine dernière, n’a pas marché
comme on s’y attendait eu égard aux moyens de nos artistes. La faute
en était un peu au défaut d’étude : nous ne douions pas qu’il n’aille
mieux à une seconde représentation. L’ensemble toutefois n’en a pas
déplu, surtout sous le rapport de la mise en scène, et, si ce n’est quel-
ques costumes qui ont paru un peu mesquins, on n’aurait aucun re-
proche à adresser à personne de ce chef.
Le goût de l’opéra-comique ne devrait pas se perdresnr notre scène,
sites pièces de cette école étaient rendues avec plus de scrupule. La
plupart de ces pièces appartenant à la musique française, tiennent le
milieu entre les deux genres extrêmes, celui de la facture allemande
qui fait quelquefois une fatigue de ce qui ne devrait être qu’un diver-
tissement pour l’oreille, et celui de l’école italienne dont le génie tou-
jours exclusif, malgré ses transformations successives ne saurait êlre
approprié au drame lyrique français. Si néanmoins la musique fran-
çaise pêche par le manque d’originalité propre, sa mission consiste à
assimiler dans les deux écoles rivales les éléments avoués par la raison,
d’accord avec la vérité d’expression. C’est dire assez que ce genre re-
pose agréablement l'âme du dilettante au milieu des grandes composi-
tions qu’on offre à ses émotions en même temps qu’il allège la rude lâ-
che des exécutants. Il importe donc que ce genre ne soit pas sacrifié et
reste au niveau qu’il doit tenir, tant par les soins qu’on doit y appor-
ter, que par le choix des acteurs qui y remplissent les personnages
marquants, trop souvent abandonnés à ce qu’on appelle des doublures.
Monsieur Thomas, l’auteur de l’opéra le Panier Fleuri, donné cette
semaine, ne ressemble guèreà son patron qui doutait de tout. Quant
au Monsieur Thomas du Panier Fleuri , il ne doute de rien , à ce qu’il
parait, pour s’étra avisé de publier une œuvre musicale aussi dépour-
vue d’idées , aussi farcie de réminiscences de toute espèce que cet
opéra, dont tout le mérite réside dans quelques mots assez heureux
et plusieurs situations passablement plaisantes Ce petit opéra a du
reste été bien chanté par Haly . chargé du rôle du hussard et par M"»
Théodore. Bougnol et surtout Breton, ont bien secondé les principaux
acteurs dans plusieurs scènes empreintes d’un bon comique.
Le drame de Don César de Hazan, sujet espagnol, est une pièce qui a
fait plaisir, et après laquelle Hadingue et M«' Cossart ont été rappelés,
ce qui ne se voit guère ici. lorsqu’il s’agit d’une pièce de cette nature.
C’est assez dire qu’ils se sont, l’un et l’autre, acquittés de leurs person-
nages d’une manière toute remarquable. Quant à la pièce, elle offre des
situations intéressantes, amenées toutefois d’une manière un peu for-
cée, grâce au privilège qu’ont acquis les auteurs du jour de sauter à
pieds joints sur les convenances théâtrales et les lois de la vraisem-
blance. Le dialogue présente quelques mois bien placés et des détails
assez piquants, c’est là le principal mérite de cette œuvre. Ce drame a
été joué avec beaucoup d’ensemble : il fera diversion, s’il n’est pas trop
prodigué, à la monotomie qui commençait à régner dans ce genre sur
notre scène. On nous en annonce, il est vrai, plusieurs autres qui
doivent raviver nos représentations.
Plusieurs semaines s’étaient écoulées depuis la dernière représenta-
tion des Huguenots : aussi cet opéra , donné jeudi, avait-il attiré passa-
blement de monde; le public a paru satisfait de la manière dont il a été
rendu. On peut pardonner quelques tâches par-ci , par-là . dans l’exé-
cution d’une œuvre aussi grandiose et aussi difficile. On aurait, ce
nous semble, dû le répéter plus consciencieusement M™<' Jacoby a fait
quelques coupures dans son air du second acte, M™ Muller a attaqué
quelques notes au-dessous de la mesure , Duprat a fait entendre plu-
sieurs notes qui déviaient un peu de la parti tion.mais ces imperfections
n’ont pas empêché qu’ils n’eussent tous trois bien mérité du public.
Le duo du quatrième acte a été chanté et joué avec ame et entraine-
ment , et de nombreux applaudissements l’ont couvert. Belval qui
gagne de jour en jour, a été ce qu’il est presque toujours dans le rôle
de Marcel, chanteur grave , sévère , scrupuleux. — Haly a bieu posé le
rôle du comte de Nevers et l’a rendu d’une manière distinguée. Garras
n’a pas tin rôle bien important dans cet opéra , mais il compense ce
désavantage par un second personnage , celui du capitaine qu’il rem-
plit au troisième acte dans le chœur des soldats . où il fait preuve de
complaisance et de talent, ce chœur a été fort bien rendu et vivement
applaudi. Les danses ne nous ont pas manqué dans cet opéra : trois
pas. celui des Baigneuses . du Bolero et du Menuet sont venus , comme
d’ordinaire, embellir la représentation, et les artistes exécutants y ont
fait assaut de force, de grâce et de légèreté.
Les représentations successives de Noirma ont continué à attirer le
public, et son empressement est bien justifié et par la beauté de l’ou-
vrage et parla manière dont il est représenté. Cependant on pput tou-
jours regretter une chose, c’est qu’il n’y ait pas eu interversion dans
la distribution des rôles, et que celui de iVorma ne soit pas tombé eu
partage à Mme Jacoby. Ni le jeu. ni la voix de M™» Muller, qui en est
chargée, ne peuvent rendre cette expression, ce grand mouvement
dramatique qui est dans le caractère de Norma. caractère bouillant,
impétueux dans ses desseins, ne connaissant ni crainte ni obstacle.
On a dit el écrit que l’ilme de M"* Muller semble trop tendre H sa bouche
trop petite, pour laisser échapper les accrus d'une personne violente. C’est
possible, nous ne connaissons pas assez M»>e Muller pour savoir si son
âme est trop tendre pour le rôle de PÏtrrma. Mais à l’égard de sa bouche,
nous ne la jugeons ni trop yelite ni trop grande, si l’artiste qui s’en
sertavait seulement pour auxiliaires une plus grande habitude de la
scène, plus de méthode et plus d’expérience ou d’étude musicale.
Une âme trop tendreetune bouche Irop petite sont sans doute d’ex-
cellentes choses, mais de pareilles fadaises conviennent mieux dans
une idylle que dans un jugement porté sur un sujet d’art et de science
dramatiques. Le public semble du reste partager cette opinion, et il l’a
nettement indiqué à la dernière représentation de N or ma, où M“' Ja-
coby a de nouveau chanté avec tant de goût,d’expression et de sûreté,
qu’il était bien difficile de se méprendre sur la valeur qu’eût eu le per-
sonnage de Norma, s’il lui avait élé confié. Au surplus, et quoi qu’il en
soit de cette nuance, l’opéra de Bellini n’en est pas moins bien rendu-
et le directeur, avec son habileté ordinaire, saura sans doutç l’exploi,
ter avec discernement. |