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Les lots 8,4 et 5 par accumulation à Thomas Fran-
çois Markelbach, particulier à Anvers, moyennant
ii\ 12,800. . ,
En 1883 toute la propriété a été vendue moyennant
l'r 27 000
Par les notaires Eug. Van de Walle et Van der
Schoot, le lundi 29 décembre : Une grande maison avec
porte cochère et bâtiments en retraite, consistant en
magasins et fabrique pour la taille de diamants, située
à Anvers, longue rue des Images, n° 190, contenant 248
m. c., moyennant fr. 26,800, à M. Pierre Dyck, lapidaire
en diamants à Anvers.
Lot 2. Une maison-boutique, à côté du n° 192, mesu-
rant 62 m.. moyennant fr. 9,000, à M. Pierre Hendrickx,
bottier à Anvers.
Par le notaire Van de Zanden, le mercredi 31 déc.:
Une maison, Courte rue de Tournai, 6, près du Mar-
ché au Bétail, mesurant suivant cadastre 135 m., à M,
F. Verberne, pâtissier, moyennant fr. 28,500.
ROYAUME-UNI.
'. Un reporter de la Pall Mail Gazelle a eu hier
matin une entrevue avec le docteur sir Andrew
Clark, qui soigne M. Gladstone.
Le médecin a déclaré que le malade était dans le
môme état que la veille et qu’il souffre d’insomnie.
“ Jusqu’à présent, a ajouté sir Andrew Clark, je
ne puis dire quelle tournure va prendre la maladie,
je ne puis non plus dire que l’insomnie continuelle
pour uri homme qui a atteint soixante-quinze ans ne
soit pas grave, mais j’espère qu’une semaine à Ba-
waraen, où M. Gladstone doit se rendre aujourd’hui,
une semaine de repos et de liberté, amènera la restau-
ration complète de l’état du premier ministre.
- L’abstention de tout travail sera la meilleure
médecine pour un homme du tempérament de M.
Gladstone ; dans son cas, et dans chaque cas, enlevez
à un homme son travail, vous lui enlevez sa vie,
mais il est absolument nécessaire de le soustraire à
des travaux incessants. ADowning Street il est la tête
que chaque consulte.
» H devrait avoir au moins à heures de sommeil.
» — Il n’y a donc pas lieu de s’alarmer ? demanda
le (reporter.
« — Oh ! non, répond le médecin. Si une semaine
loin des affaires ne suffit pas, j’engagerai M. 'Glad-
stone à (quitter l’Angleterre pour quelque temps,
mais il n’est pas nécessaire qu’il se rende à Cannes-,
Hier soir, M. Gladstone est parti de Londres. Voici
les détails que l’on télégraphie à ce sujet au Malin :
« M. Gladstone a quitté Euston-Station hier soir,
pour se rendre à Hawarden. Il était pâle et s’est
étendu sur un large coussin, qui a été placé spéciale
ment pour lui dans le wagon-salon.
” Il y avait environ cinquante personnes àla gare;
le ministre a été acclamé.
•’ M. Gladstone est arrivé à Chester-Station à 7
heures 20 minutes
” Lor SqUe ie train s’arrêta, on voyait le ministre
coucLé dans le coupé.
» Une foule nombreuse attendait l’arrivée du train
et poussait des cris en cherchant à s’approcher du
wagon.
» !vl. Gladstone saluait sans changer de position.
» M. Herbert Gladstone a rejoint son pèreàClu-s-
ter-Siation, a pris place à ses côtés, et le wagon a
été immédiatement détaché du train express; il a été
accroché à une machine spèciale qui l’a conduit à la
station de Broughton hall, où une voiture attendait
M, Gladstone pour U, conduire à Hawarden. «
BELGIQUE.
Bruxelles, 5 janvier.
M. Lambermont est parti hier pour Berlin, par le
train quittant la gare du Luxembourg à midi 45. Il a
pris place à Namur dans l’express de Paris à Berlin.
Le baron Gofïinotet le comte de Lalaing avaient quitté
Bruxelles la veille, pour la même destination.
Lin escroc qui portait, à tort ou à raison, le titre de
baron, vient de se faire pincer dans des circonstances
assez curieuses; cet homme, âgé de 74 ans. avait pour
habitude de se faire héberger sans bourse délier : fer-
vent catholique, du reste, il servait tous les jours la
messe de 111/2 heures, à l’église de Saint-Nicolas. C’est
ainsi qu’il s’est glissé dans les bonnes grâces du clerc
chez qui il prenait sa table et à qui il avait même em-
urunté de l’argent. Le soi-disant baron avait vécu éga-
lement aux dépens de sa locataire principale à laquelle
il devait, outre Sa pension, trois mois de loyer.
C’est cette dernière qui l’a fait arrêter vendredi soir,
à la gare du Midi, où notre homme y était déjà, muni
d’un coupon de lro classe, et se disposait à prendre
place dans l’express de minuit en destination de Paris.
ANYBES, 5 Janvier.
Souscription scolaire.
A. S., instituteur à Anvers ..... fr. 2.—
Pourboire d’un porteur de malles au bal
du 3 janvier ....................» 1.—
Manifestation de la Garde-Civique en l’hon-
neur de M. Léopold de Wael. — M. Léopold de
Wael, bourgmestre d’Anvers, a été hier l’objet d’une
manifestation très-touchante. Le corps des officiers
de la garde-civique, les officiers des corps spéciaux
et MM. les officiers honoraires se sont rendus chez
l’honorable magistrat, pour.se faire auprès de lui
l’interprète des sentiments d’affection de la garde, à
l’occasion de sa nomination comme bourgmestre
d’Anvers pour une nouvelle période de six années.
M. le général-major David, commandant supérieur
de la garde, a le premier pris la parole, pour féliciter
par une de ces improvisations affectueuses et entraî-
nantes dont il a le secret, l’honorable bourgmestre,
au nom du corps d’officiers. M. de Wael, vivement
ému, a remercié par un discours chaleureux la
garde entière en la personne jtes officiers qui la
représentaient. MM. Jules Vrâncken, avocat, com-
mandant la batterie d’artillerie, et Monu, colonel de
la première légion, ont tour à tour présenté à M. de
Wael les félicitations respectives des corps spéciaux
et de l’infanterie.
Parmi les officiers honoraires présents on remar-
quait M. de Wael, ancien colonel de la garde. Un
moment particulièrement émouvant de cette solen-
nité a été celui où M. lq Bourgmestre serrant affec-
tueusement la main à toutes les personnes présentes,
a serré avec effusion celle de son parent, l’ancien
chef de la milice citoyenne.
Un détail à noter c’est que dans une réunion préa-
lable à la manifestation un membre du corps d’offi-
ciers, M. Ch. Baets, avait soulevé la proposition
très appuyée, d’offrir à M. de Wael un banquet en
commémoration de la solennité. Toutefois MM. le
général David, le capitaine Vrâncken, et quelques
autres officiers après avoir consulté l’honorable ma-
gistrat, ont déclaré qu’il avait décliné cet honneur et
qu’il considérait comme l’hommage le plus flatteur
la simple manifestation qu’on organisait en son hon-
neur.
Garde civique. — Le général-major, comman-
dant supérieur de là garde civique, président du con-
seil de recensement, porte à laconnaisance désinté-
ressés que le conseil se réunira :
1° Le samedi 17 janvier prochain, à 10 heures du
matin, à l’Hôtel de Ville, au premier étage, entrée
par la rue des Orfèvres, pour statuer sur les récla-
mations qu’auraient à présenter les personnes appe-
lées au service de la garde civique, nées en 1863
(nouvelle levée).
2° Le lundi 19 janvier, à la même heure et au
même local, pour statuer sur les réclamations des
personnes désignées, appartenant à des classes anté-
rieures et qui ne sont pas encore inscrites au con-
trôle.
3° Le mardi 20 janvier, à la même heure et au
même local, pour statuer sur les réclamations des
gardes déjà inscrits au contrôle appartenant à des
classes antérieures, et qui auraient acquis de nou-
veaux droits à l’exemption.
Tous les réclamants de ces trois catégories qui
n’ont pas encore reçu de cartes du bureau de l’état-
major, et qui demandent à être examinés dans ces
séances, devront à cet effet se faire inscrire préala-
blement au bureau de l’état-major supérieur de la
garde civique, rue des Serments, 9, ouvert tous les
jours de 10 heures du matin à 2 heures de relevée,
jusqu’au jeudi 15 janvier inclusivement.
A cette occasion il croit devoir rappeler, que ceux
qui changent de résidence ou de demeure, sans chan-
ger de commune, doivent en faire la déclaration dans
la quinzaine, au bureau susdit sous peine d’une
amende de cinq à quinze francs, conformément aux
articles 12 et 13 de la loi du 8 mai 1848. .
Art. Il de la loi du 8 mai 1848. — Un des doubles du
registre d’inscription est transmis dans les cinq jours
de la clôture au chef de la garde; l’autre est déposé au
secrétariat de la commune, où chacun peut en prendre
inspection et provoquer l’inscription do ceux qui au-
raient négligé de la requérir.
Ces séances sont, conformément à la loi, les seules
qui seront tenues en 1885; ceux qui auraient négligés
de s’y faire inscrire et examiner, seront en consé-
quence rigoureusement astreints au service actif.
Un nouveau confrère. — Le Nouvel An 1885
nous amène un nouveau confrère progressiste, heb-
domadaire, flamand, paraissant, Rue au Navet, 2, à
Anvers. Si jeune qu’il soit, il porte un nom de forte
taille, il s’appelle Antigoon. L’antique seigneur
d’Anvers ayant forcément doublé comme tout mor-
tel le cap de l’enfance, pour devenir le personnage
respectable qu’on sait, ce titre est une làçon assez
réussie de dire, que “ petit poisson deviendra grand.»
Pilotage.— Avis. — Différents avis publiés parle
dépôt des cartes et plans.à Paris, par les services hy-
drographiques à Pola et à Madrid; parles ministères
de la marine de Grèce et de Danemark ; par l’hydro-
graphie de l’amirauté à Berlin ; par le Trinity bouse
et par le département hydrographique du ministère
impéiral de la marine, à St-Pétersbourg et par
l’administration supérieure des fanaux et des pilo-
tages du grand-duché de Finlande, à Helsingîors,
sont déposés au bureau du pilotage, à Anvers, où les
intéressés peuvent en prendre connaissance tous les
jours ouvrables de la semaine de 9 1/2 à 111/2 du
matin et de 2 1/2 h. de relevée à 5 1/2 h. du soir.
On travaille activement, paraît-il, à l'arsenal de
Malines, à la construction d’un train composé de
cinq voitures à couloir comprenant chacune trois
classes, avec un wagon spécial, aménagé en café-
buvette, destiné à faire, pendant l’Exposition Uni-
verselle d’Anvers, le trajet aller et retour, trois fois
par jour, entre Anvers et Bruxelles.
L’après ce qu’on nous en a dit, ce train sera une
vraie merveille de luxe et de confort,qui ne le cédera
en rien aux trains similaires de l’Angleterre et de
l’Amérique. Ce train spécial roulera à une vitesse de
75 kilomètres à l’heure.
M, le docteur Deroubaix vient d’être nommé
- membre correspondant de l’Académie dç laédemp"
de France.
Abordage. — Hier, après le tirage du journal,
notre correspondant de Flessingue nous a envoyé la
dépêche suiyante :
» Le paquebot Willem Prins van Oranje est
entré en collision avec le bâteau de pêche français
Lucie Léonard, à hauteur du West Hinder.
» Le bateau de pêché a été coulé et l’équipage
sauvé par le paquebot, qui n’a rien souffert. »
Suicide — Hier matin à 11 heures et demie un
ouvrier forgeron âgé de 46 ans a tenté de se suicider,
dans le parc près du kiosque, en se tirant un coup
de pistolet dans la tempe. 11 a été transporté a
l'hôpital, gravement blessé, mais n’avait pas suc-
combé ce matin.
Chute grave. — Ce matin un entrepreneur de
travaux nommé Zech, demeurant au Quai Flamand
113, est tombé d’un échafaudage dans les locaux de
l’Exposition. Cet homme a reçu des blessures et
contusions graves.
Noyade par vengeance. — Ce matin on a retiré
— à temps, heureusèmënt, — de l’Escaut et trans-
porté au dispensaire, le 2e second du steamer Prin
cipia, nommé Jean Juncker. Au départ du navire,
il avait été jeté par dessus bord, par deux hommes
de l’équipage qu’il n'a pas reconnus dans l’obscurité.
Vol. — La police de la ville a arrêté samedi après
midi un nommé Charles La Caille, âgé de 23 ans,
demeurant chez sa tante, rue du Berger. Ce jeune
homme est prévenu de vol, au préjudice de cette
dame, d’une chaîne et d’une bague en or, et d’une
somme de 20 francs.
Navigation. — Nous apprenons par dépêche que
le steamer postal belge Noordland, de la Red Star
Line, est parti samedi de New-York pour Anvers.
Le clergé et la politique. — Nous savons qu’un
évêque français, l’évêque de Rodez, a publiquement
désavoué le vicaire général de son diocèse, qui s’était
permis de promettre à uù candidat le concours du
clergé et d’exercer ainsi une influence abusive sur les
électeurs. M. l’évêque de Rodez estime que le rôle
du prêtre est de s’appliquer à sauver les âmes et. que
ce n’est pas à luid’intervenir dans les débats politiques.
Tout autre est le sentiment de M. Freppel, évêque
d’Angers ; recevant son clergé à l’occasion de la nou-
velle année, le prélat-député lui a fait la profession
de. foi suivante :
Je ne puis m’empêcher de trouver à tout le moins
fort étrange la prétention récemment affichée de vou-
loir imposer au clergé une neutralité absolue entre les
partis qui divisent l’opinion. Ab ! si ces partis avaient
tous à l’égard de l’Eglise une attitude également bien-
veillante, et que la religion n’eût d’ailleurs rien à
redouter d’une issue quelconque des luttes politiques,
on comprendrait peut-être de notre part une Telle
impassibilité. Je dis peut-être, car, même dens ce cas,
des considérations d un autre ordre ne permettraient
pas une indifférence aussi déraisonnable a des hommes
qui, citoyens d’un pays libre et se croyant tels, ont
biën le droit d’exprimer leur sentiment sur tes condi
tlons de sa grandeur et de sa prospérité.
Voilà une déclaration pleine de promesses au dé-
but d’une année où doivent avoir lieu les élections
générales ! Si le clergé observe quelque part la neu-
tralité, ce ne sera pas dans le diocèse d’Angers.
On pourrait faire observer à M. Freppel que la
prétention * récemment affichée » dont il parle est
un peu plus vieille qu’il ne le croit. Elle remonte
jusqu’au fondateur du christianisme, qui disait:
-.Mon royaume n’est pas de ce monde », et qui disait
encore : » Rendez à César ce qùi est à César ». Il
faudra toujours donner à l’Evangile un fort torticolis
pour en faire sortir l’éloge des ligueurs anciens ou
modernes. Mais nous sommes aujourd’hui bien loin
4e l’Evangile !
Arnold Mortier. — M. Francisque Sarcey con
sacre à Arnold Mortier (le monsieur de l'orchestre
du Figaro) dont nous avons annoncé la mort hier
un intéressant article, dont voici quelques extraits
Il avait de l’esprit, mais un esprit qui ne se livrait
pas ; un esprit plus subtil, plus retors, où il semblait
que le calcul eût sa part.
Il pariait d’un ton bas et d’une voix douce, ne riant,
lui, que du bout des dents ; jetant sur toute chose un
regard fin et pénétrant, en homme qui garde pour
lui les pensées de derrière la tête.
C’est au Gaulois qu’il iuaugura, toujours avec
Armand Gouzien, cette manière de compte rendu
théâtral, que l’on appelle aujourd’hui la Soirée pari -
sienne, et qui forme un genre à part dans le journa-
lisme contemporain.
L’innovation eut du succès dès cette époque ; mais
elfe n’eut sa pleine efflorescence que bien plus tard
au Figaro où Villemessant, cet împressario incom-
parable, lui confia le soin de renouveler la tentative
....Tout cela (ses huit volumes de soirées) est
écrit d’une langue courante et simple ; la couleur en
est absente et le trait y est assez rare. Arnold Mor-
tier garde partout les habitudes du flegme de son
pays natal. Mais au moins ne s’ingénie-t-il pas à
faire du style. Jamais on ne mit dans un article de
journal moins d’apprêt et de recherche.
Il faut lui rendre encore cette justice qu’au rebours
de quelques-uns de ses confrères il ne cédait que
rarement au plaisir facile de dire, par-ci par-là, une
bonne méchanceté qui amusât le public. Il est aisé,
quand on parle tous les jours des acteurs et des ac-
trices, de faire, à leurs dépens, montre d’esprit et de
divertir la galerie en daubant sur eux. Il était en
général bienveillant, sans chaleur, mais toujours
correct.
Ce qùi lui a manqué, ce qui manque àses collègues,
c’est làflamme. Ils ne se doutent pas du plaisir qu'ils
feraient au public s’ils se laissaient aller, un beau
jour, à un accès de bonne, sincère et franche admi
ration; s’ils poussaient un cri (mais un vrai cri) d’en
thousiasme Ils sont presque tous pointus, par habi
tude de métier plus encore que par tempérament.
SPÉCIALITÉ DE BIÈRES DE MINAGE.
La meilleure bière de ménage, la
plus économique, celle fabriquée exclusivement de
malt et de houblon, se trouve a la brasserie anver-
sioisE scuujl et cie. — Prix : 12 centimes le litre. Bière
de ménage extra 15 centimes le litre, franco en cave,
to fûts de 50 à 60 litres. — Pour les commandes s’y
adresser par carte correspondance. 40
Chronique théâtrale.
THEATRE-ROYAL. — Le menu d’hier était assez
chiche pour un dimanche : Si j'étais Roi ! et le
Mariage aux lanternes. Aussi ne s’étouffait-on
pas dans la salle. D’ailleurs, 1 e Mariage aux lan-
ternes n’a pas été représenté, par suite de l’absence
de Ml,e Luce. Cette artiste était-elle indisposée, ou
bien s’est-elle éclipsée subitement, comme une étoile
filante ? Il y a eu à cet égard quelques explications
entre le public et le régisseur, arrivé sur la scène,
mais nous ne les avons qu’imparfaitement saisies.
Nonscroyons toutefois que, pour une raison ou pour
une autre, on ne reverra pas Mlle Luce.
Bref, on s’est décidé à écouter le joli opéra
4’Adam. Le rôle de Pifféar, qui a toujours été tenu
par M. Delersy, avait été confié au trial, M. Raoul
Nous devons rendre cette justice à ce dernier, qu’il
s’est honorablement tiré d’affaire. Quant à M. Marris,
sa voix s’esf affaiblie d’acte en acte, au point qu’à la
lin elfe avait quasi disparu.
En revanche, Mme Beretta a fait beaucoup de plai-
sir dans l’emploi de Neméa.où elfe a été par moments
très brillante. Mais il lui est arrivé de ne pas chanter
juste, ce que nous ne pouvons attribuer qu’à la
fatigue, car elfe est musicienne jusqu’au bout des
ongles et son oreille est des plus fines.
—Mme Pourret qui, soit dit entre parenthèses, n’est
pas une première dugazon, a fait une Zélide assez
gentille.
Enfin nous n’avons pas de mal à diredeMM.Maugé
et Pourret. Le premier a mis du mordant, un peu
trop pourrions-nous dire, dans le" rôle de Moussoul,
et le second a joué le prince Kadour avec cette
conscience et ce désir de bien faire qu’il apporte à
toutes choses.
Ah ! Nous allions oublier M. Minne, qui a donné
une physionomie pjaisante au magistrat Ijzel.
Pour compenser l'élimination forcée du Mariage
aux lanternes, le spectacle s’est terminé par le
Maître de Chapelle, où M. Maugé, dont c’est uh
des bons rôles, a été, comme d’habitude, très ap-
plaudi.
Les journaux de Paris sont pleins de détails
sur la reprise du Légataire universel au
Théâtre Français. Le Voltaire exhume à ce
propos une vieille histoire qui, malheureuse-
ment, est toujours d’actualité ;
On a repris hier, Théâtre-Français, la très curieuse,
très spirituelle - et très immorale Cômmédie de Fran-
çois Kegnard : le Légataire universel.
Cette pièce, qui est un des çbef's-d’teûVre Üê nbtfe
tobiîis comme que l'Avare
® ' U’ -• Tlu l’on connait moins, c’est l’his-
singulière et presque invraisemblable qui fournit
à l’auteur du Légataire l’idéô et le canevas a peu près
complet de son imbroglio. . .
Lafameu8e scène du testament fut en effet jouée—
mais iouêe « pbur de bon» —• longtemps avant que Ré-
gnant eût imaginé d'en faire une c.omédie. Lés jésuites
en avaient déjà, fait un draine. D'és bette époque, ils
étaient, comme la plupart des congrégations, passés
maitres dans fart de capter les beaux héritages. Ainsi
qu’on va le visa’, ils ne reculaient devant aucun moyen,
même devant les pires. C’était la mise en pratique de la
fameuse maxime ad augusta per augusta...
Voici l’histoire ; pour être un peu vieille, elle n’en
est pas moins édifiante ; , .
Il y avait une.fois, en FfancHe-Comtô, un sieur An-
toine François tiauthiot, seigneur d’Ancien C’était un
vieux garçon, très noble, très riche, ayant belle fortune
et mauvaise santé. C’était plus de titres qu’il ne lui en
fallait pour mériter l’attention des jésuites. Aussi ceux
de Besançon, où il demeurait, ne négligèrent-ils rien
pour gagner son amitié et sa sitèeession.
. A l’occasion d’un voyage que M. d’Aneier lit en Italie,
en 1626, ils recommandèrent beaucoup cet intéressant
voyageur à leurs confrères dé Rome, en les informant
des vues qu’ils avaient sur lui. Notre Franc-Comtois en
reçut donc le plus gracieux accueil.
peu de temps après il tomba malade et ne put alors
refuser d’aller prendre longement chez eux, dans la
maison du Grand-Jésus, habitée par le général même
de la Société. .
Mais M. d’Aneier mourut trop vite, àii gré de ses
hôtes. Hélas ! il mourait intestat.
(Intestat)!... Ce mot me perce l’âme !
Grande désolation, on le conçoit, parmi les compa-
gnons de Jésus. Iis en eussent été’ pour leurs espérance
et pour leurs frais, si la Providence, toujours pitoyable *
aux hommes d’Eglise, n’était venue les tirer de ce mau-
vaispas.
Ils avaient alors un frère qui était resté longtemps à
leur maison de Besançon. Voyant la douleur générale,
• ce modèle des Crispins entreprit de la calmer. Le digne
serviteur apprit à ses maitres qu’il connaissait en Fran-
che-Comté un paysan dont la voix ressemblaittellement
à celle du défunt, que tout le monde s’y trompait. A ce
coup de lumière fespérance des pères se ranima : ils
convinrent de cacher la mort de l’ingrat qui était, parti
sans payer son gite. et de faire venir l’homme provi-
dentiel dont l’existence venait de leur être si opportu-
nément révélée.
C’étaitun nommé Denis Eu vrat’d.fermierd’uncgrangc
appartenant à M. d’Ancier lui-même, et si tuée au village
de Montferrand, près de Besancon.
Le frère jésuite qui avait donné l’idée du projet fut
chargé de l’exécution.Il partit pour la Franche-Comté et
ramena notre homme, sans eependantle mettre au cou-
rant du rôle qu’on lui destinait. :
Denis Euvrard fut reçu à brasouVerts.Çe ne fut que le
lendemain, après un bon somme, qu’on l’inibrma de la
mort de M. d’Ancier : « Mon cher Euvrard. lui dit un père
jésuite, c’est Une grande perte pour vous et pour HOlis.
M. d’Ancier avait l’intention de vous donner par testa-
ment sa grange de Montferrand et de iaisser le surplus
de ce qu’il possédait à nos pères de Besançon. Vous
avouerez qu’il était maitre de ses biens ; onjpeut donc les
regarder comme nous étant déjà donnés devant Dieu.
» Il ne manque que la formalité du testament. Mais
je me suis aperçu que vous avez la voix entièrement
semblable à celle de M. d’Atieier ; aussi m’est-il venu
l’idée que vous pourriez facilement le représenter dans
un lit et dicter un testament conforme à ses intentions.
Surtout, vous n’oublierez pas de vous donner la grange
de Montferrand. »
Le bon fermier se rendit sans peine à l’avis du ea-
suiste. II fut mis dans un lit, et l’on manda le notaire
et deux hommes distingués de la Franche-Comté, de
passage à Rome et qui. plusieurs fois, avaient demandé
Vainement à voir M. d’Aneier.
Le soi-disant moribond, bien enfoncé dans son lit, son
bonnet sur les yeux, le visage tourné contre lé mur, dit
nuelques mots à ses compatriotes, puis .on s’occupa de
l’acte.
Après le préambule ordinaire, le testateur prit cer-
taines dispositions, dicta quelques legs, puis continua :
« Itéra, je donne et lègue à Denis Euvrard. mon fer-
mier, ma grange de Montferrand et toutes ses dépen-
dances . »
A ces mots, le jésuite qui était près du lit parut fort
étonné. 11 lit observer au testateur que ces dépendances
étaient considérables, puisqu’elles comprenaient un
moulin, un petit bois et des cens. Mais, sans rien vou-
loir entendre, Euvrard poursuivit :
« Item, je donne et lègue audit Denis Euvrard ma
vigue située à la côte des Maçons et de la contenance de
quatre-vingts ouvrées. (Nouvelle observation de la part
du révérend père ; même réponse de la part du testa-
teur.)
« ffem.je donne et lègue audit Denis Euvrard mille
écus à choisir dans mes meilleures constitutions de
rente, et tout ce qu’il peut me redevoir de termes arrié-
rés pour son bail de la grange de Montferrand. »
Le révérend père était resté sans voix, mais il étouf-
fait de colère. Enfin, le testateur déclara que, quant au
surplus de ses biens, il instituait les Pères jésuites de
Besançon pour ses légataires universels.
Comme on le voit. Regnard n’a eu, pour ainsi dire,
qu’à recopier, en la modifiant un peu, cette scène d’un
si bant comique. Le testament de Crispin, fait ainsi à la
barbe d’Eraste, n’en est que la réédition.
Mais M. d’Ancier ne lit pas comme Géronte ; il ne re-
vint pas, et ses héritiers furent bel et bien dépouillés.
Quelques années plus tard, Denis Euvrard, sentant
venir sa lin, avoua tout à son curé et restitua les biens.
Les héritiers de M. d’Ancier intentèrent alors un pro-
cès aux jésuites en nullité de testament. Ils gagnèrent
d’abord à Besançon. Les jésuites en appelèrent au Par-
lement de Dole. Là, les héritiers gagnèrent encore.
Une dernière ressource restait àla Société-et le pro-
cès fut porté au conseil suprême de Bruxelles, — la
Franche-Comté soumise à l'Espagne, dépendait alors du
gouvernement de Frandre.
Dans ce dernier tribunal, tes jusuites jouèrent si bien
de l’intrigue et de la corruption, que les deux premiers
jugements fbrent cassés et que les Pères furent main-
tenus dans la prossession des biens qu’ils avaient volés.
O Justice !
Quand, sur cette curieuse donnée, Regnard composa
sa comédie du Légataire, il se garda bien de citer la
source qui lui en avait fourni l idée. C’était en 1708,
Louis XIV était adonné à la dévotion la plus étroite et
les jésuites étaient tout-puissants.
Le poète eut donc la prudence de cacher ce que sa
pièce leur devait, et ces pères tirent preuve, cette Ibis,
de désintéressement : ils ne réclamèrent pas de droits
d’auteur, _______....
FAITS DIVERS
Les tremblements de terre en Espagne. —
Une nouvelle secousse a été ressentie à Malaga, sa-
medi. Les dégâtscausésauxmaisonset autres édifices
sont assez sérieux : les bâtiments de l’Université sont
ébranlés, les cours sont suspendus. Il n’y a aucune
victime ; mais une grande panique s’est emparée de
la population ; beaucoup de familles riches quittent
la ville.
Le tremblement de terre a été plus fort à Yefez et
à Alhama, où on signale quelques victimes.
Des secousses de tremblement de terre continuent
à se faire sentir à Algarrobo et Casavermeja.
La faim, la misère et le manque d’asiles rendent la
situation plus difficile.
A cause de la panique, les maires sont obligés
d’employer les prisonniers à l’extraction des cadavres
et à l’enlèvement des décombres.
Le maire de Nerja (province de Malaga) a télégra-
phié que les tremblements de terre ont continué à
causer la destruction des édifices.
L’ermitage de Saint-Sébastien s’est écroulé; les
vases sacrés ont été ensevelis sous les décombres. Il
y a de nombreux dégâts. La misère et la consterna-
tion augmentent. Des secours sont urgents.
Des télégrammes privés rapportent qu’à Albunue-
las, province de Grenade, il y a eu 420 victimes.
On travaille partout à retirer les cadavres. -
La ville de Competa, province de Malaga, a été
complètement détruite par les tremblements de terre.
La famille royale a envoyé 55,000 francs pour les
victimes des tremblements de terre en Andalousie.
Une dépêche de Madrid signale une grande crue
de l'Ebre, qui cause des dégâts sérieux sur les rives
et à l’embouchure du fleuve.
Vendredi dernier, il y a eu à Tolède un décès cho-
lérique et un nouveau cas. La ville continue à être
isolee.
La mère de MMe Louise Michel est morte avant-
hier matin, à cinq heures, en son domicile, boulevard
Ornano, 45 ans, à l’âge de soixante-neuf ans.
‘ Il y avait un mois qu’elle gardait le lü Affaiblie par
une maladie d’estomac, elle ne pouvait absorber que
desaliments liquides. Depuis longtemps tout espoir de
guérison était perdu.
M. Clémenceau* qni .lui a prodigué ses soins; pré-
voyant vendredi soir une issue fàtale, avait demandé au
ministère de l’intérieur l’autorisation, pour Müo Louise
Michel, de passer la nuit près de sa mère. Cette per-
mission fut accordée, et la pauvre femme, dont là
santé est aussi très ébranlée, a pu rendre les derniers
devoirs à sa mère.
Les obsèques auront lieu aujourd’hui, lundi.
Les anarchistes se proposent de l'aire une manifes-
tation le jour de l’enterx'ement de la mère de Louise
Michel*
Des affiches ont déjà été apposées avant-hier, à ce
sujet; sur différents points de Paris.
Le pick pocket Siüis n’est pas heureux dans ses
opérations.
Se trouvant, il y a quelques jours, prés du bureau des
omnibus de la Màdeleiile, à Paris* Sims volait à M. A....
négociant, un porte-monnaie contenant cent dix francs ;
malheureusement, en retirant sa main de la poche de
la victime, une fort belle bague qu’il portait, ayant
glissé de Son doigt, était restée dans cette poche.
Sims. qui ignorait où il avait laissé sa bague, et qui
croyait l’avoir perdue dans la rue, s’empressa d’aller
faire la déclaration de sa perte au commissaire de
pblic-ç;
Malheureusement, Je volé l'avait précédé chez le
magistrat, et en remettant à ce dernier la bague, lui
avait déclaré le vol dont il venait d’être victime.
Sims, pris sur le fait, a été arrêté séance tenante.
Lé rëvélver èóntintie à, PîtfcU. — Saihedi; à Mbtti-
martre, une mère a tiré trois coups de revolver sur sa
fille.
Mme Perron, âgée de soixante ans. veuve d’un armu-
rier, est depuis longtemps en procès avec ses enfants
qui sont au nombre de sept trois du premier lit. quatre
du second* Elle réclame des sommés assez élevées qui
lui seraient dues et cette obsession ne la quitte pas.
. Depuis trois mois elfe était venue habiter avec sa tille,
Mn,° L , artiste dramatique.
Samedi soir, une scène plus violente que de coutume
avait lieu entre la mère et la fille. Toujours au sujet du
vieux procés. La mère reprochait â sa filledela laisser
manquer de tout et s’exaltant do plus en plus, la me-
naça de lui jeter du vitriol à la figure. "
fout à coup elle s’empara d’un revolyer qu’elle te-
nait, .de son mari et visa sa fille. Celle-ci; jetant un cri
terrible, se sàiiva vers l’escalier ; mais la mère fit feu à
trois reprises différentes. Heureusement les coups
étaient mal dirigés, les balles allèrent se loger dans la
muraille.
Les locataires de la mâlson accôtirurerit et remirent
la veuve Pefrdn entre les mains des agents en Même
temps qu’on prodiguait des soins à sa fille.
Autre exploit du revolver, le même jour. Jusqu’à
présent, c’était le mari trompé qui avait le privilège de
jouer du revolver. M. Falon attaqué ce monopole à Dout
pdrtatit. .
Depuis six mois, il vivait avec la femme d un sieur
Bénier, ferblantier d’Amiens.
Celui-ci, ayant enfin retrouvé la piste de l’infidèle,
l’avait accostée à la sortie du bal Tivoli, tandis qu’elle
était au bras de son amant, et avait voulu l’emmener
avec lui.
C’est alors que M. Falon tira de sa poche un revolver
et fit feu à deux reprises sur le mari.
Celui-ci a été atteint au bras.
Un suicide dramatique. — La commune de Saint;
Hilaire (France) vient d'être le théâtre d'un suicide par-
ticulièrement drâmatiijùë;
Une veuve Chauriau, âgée de 43ans. qui vità Avesnes
avec un ouvrier nommé Gosset, et qui se disait ensor-
celée par une voisine, avait, à plusieurs reprises,
pendant la nuit, manifesté l’intention d’aller se jeter
dans la rivière. Ou avait dû l’enfermer, mais vers
dix heures et demie, elle rétissit à sortir, portant
sur le bras sa petite fille âgée de deux ans et condui-
sant par la main le plus jeune de ses garçons, qui a
cinq ans Elle se dirigea du côté de Saint Hilaire et.
arrivée à la cinquième pâture, elfe voulut s’attacher au
bras le petit garçon; celui-ci s’enfuiten devinant l’inten-
tion de sa mère, qui s’approcha de la rivière où élie se
laissa glisser avec la petite fille.
Deux enfants de 8 et 13 ans. Clovis Gosset et Fernand
Finard, qui l’avaient suivie à distance depuis la maison,
se mirent à crier, et l’ainé, malgré le froid, se mit à
l’eau jusqu’aux épaules pour sauver la petite fille qui,
lâchée par la mère, avait suivi le cours de la rivière et
s’était arrêtée Contre une grosse pierre. ’
Quant à la femme Chauriau, elle a été retirée après
une recherche pénible par M Payen; elle avait cessé
de vivre.
Suicide et mystère. — M. "Percha, commissaire de
police à Paris, vient d’ouvrir une enquête sur un
double suicide entouré de circonstances assez mysté-
rieuses.
Vendredi soir, à 8 heures, ce magistrat était appelé à
constater le suicide d’une dame, veuve Chevreuil.
Cette dame s’était tiré deux coups de revolver dans
la bouche.
En pénétrant dans la chambre à coucher, le commis-
saire trouva étendu sur un lit le corps du fils de la vic-
time, mort également. Le Malheureux s’était tiré dans
la bouche deux coups de la même arme dont s’est ser-
vie plus tard sa mère.
La mort du jeune homme remonte au 31 décembre ;
celle de sa mère est du 1 janvier.
L'acharnement de la guigne. — Il y a des maisons
ue la guigne semble positivement marquer du doigt.
De ce nombre est, â coup sur, celle qui porte le n° 52,
avenue Wagram, à Paris. C’est un immeuble magni-
fique. Les locataires y sont très bien, seulement, il leur
arrive toutes sortes de drames.
Il y a trois mois, on y volait trente mille francs à un
tailleur du rez de-chaussée ; en novembre, un négociant
en perles, domicilié à l’entresol, était obligé de rembour-
ser une traite fausse de 15,000 francs. Voici, aujourd’hui,
une aventure plus grave encore, et qui prouve, une
ois de plus, qu on rencontre souvent le grotesque dans
fe terrible.
Au premier demeurait un locataire des plus honorés
et des plus honorables. M. Rosenber. Ses affaires pa-
raissaient marcher le mieux du monde. Il était marié
à une femme charmante et il avait une petn fille, qu’il
conduisait lui-même a la pension tous -les matins.
Le 31 décembre, M. Rosenber apprit, parait-il, que,
par suite d’une faillite, il perdait une somme considé-
rable. Il ne dit rien à personne, mais* dès ce moment, il
résolut de mourir, et il a accompli son suicide dans des
circonstances véritablement très étranges.
S’étant levé vers quatre heures, avant-hier matin, il
a pris un revolver, est sorti en chemise de sa chambre,
est allé s’enfermer dans les water-closets. Là, avec le
plus grand sang-froid, il a hermétiquement calfeutré
toutes les jointures de la porte et de la fenêtre, afin que
les détonations ne fussent pas entendues, et- s’est logé
deux balles dans la tête.
Il ne s’est pas tué net. Un peu plus tard, sa femme,
inquiète de ne pas le voir dans son lit. s’étant levée, se
mit à sa recherche dans l’appartement. Elle finit par
ouvrir la porte du water-closet, dont il n’avait pas
poussé le-verrou, tout en le calfeutrant. Et alors elle
aperçut son mari à demi replié sur lui-même, couvert
de sang, et ralant encore. Elfe jeta un cri terrible et
s’élança sur lui, La tonne, en accourant au bruit, la
trouva évanouie sur le moribond.
On se figure cette scène lamentable : cet homme qui
est mort et cette femme sans connaissance, gisant en
chemise tous deux, au milieu d’une mare de sang, dans
cet endroit ridicule, tandis que la pauvre petite fille,
attirée par le tapage, sanglotait à la porte h..
N’y a-t-il pas, dans ce lugubre tableau de quoi tenter
la plume d’un écrivain réaliste.
M. Rosenber est mort dans ia matinée. C’était, nous
le répétons, un fort honnête homme, qui laisse beau-
coup de regrets.
Si-El-Had Abd-el-Kader, envoyé du Tombouctou,
qui vient d’arriver à Paris, est âgé de 30 ans, il porte
le costume national, composé (Tune longue tunique
bleue brodée de soie, appelée boubou, etd’un large pan-
talon écarlate, dont la partie inférieure, ornée de bro-
deries, descend sur le mollet. Il est chaussé de bottines
en soie bleue, attachées avec des lacets dorés, et coiffé
d’un turban.
Avant de venir en France. Si-El-Had-Abd-el-Kader
s’est arrêté à Saint-Louis du Sénégal, où il avait été en-
voyé en mission auprès du gouverneur; c’est sur les
instances de ce dernier qu’il c’est décidé à venir à Paris,
après avoir consulté son chef, pour négocier un traité
de commerce avec le gouvernement français.
Ël-Khaer-Ibrahim, cheick dé Tombouctou, n’est pas,
d’apres la déclaration de son envoyé, le chef territorial
du pays. C’est une sorte de prévôt des marchands qui
ne pourrait passer des traités qu’au point de vue pure
ment commercial.
C’est à la suite des travaux exécutés par les Français
dans le haut Sénégal et sur les bords du Niger qu’KI-
Khaer a conçu le projet d’entrer en relations avec eux
Pendant son séjour à Paris, l’ambassadour de Tom
bouctoù entrera en relations avec les ministres des af-
faires étrangères, de la marine etdu commerce.
Il ne retournera dans son pays que vers la fin de
janvier.
Une visite fatale. — Aller chez une voisine pour lui
souhaiter une heureuse année, une parfajte santé et
tout ce qui 'peut lui être agréable,puis ajouter aussitôt :
« Mais vous êtes une voleuse etje vais vous faire arrê-
ter ! » — c’est là, on en conviendra.une scène de vaude-
ville qu’on ne voit pas tous les ans. Or, c’est ce qui
vient de se passer à Jemappes. Voici l’histoire :
Une nommée Virginie Quévy, âgée de 22 ans.de
meurant Grand’Route, reçut vendredi la visite d’une
de ses connaissances, à l’occasion du jour de l’an. Au
cours de sa visite, celle-ci remarqua sur la tablette de
la cheminée des garnitures appartenant à l’une de
ses amies, à qui elles avaient été volées. Eile fît sem-
blant de rien, mais elle alla immédiatement prévenir
cette amie en lui conseillant d’aller à son tour pré-
senter ses souhaits à Virginie, chez qui elle retrouve-
rait ses objets. Ce qui fut fait.
L’amie souhaite une heureuse année dans toutes les
règles, une année tout à fait heureuse et tout ce qui
peut lui être agréable, puis s’avance vers la cheminée
et empoigne les garnitures en disant: «Ça, ça m’ap-
partient! Vous me l’avez volé ét je vais vous faire
arrêter !» Voilà l’autre aux cent coups, suppliant .-a
visiteuse de ne rien die-' devenir accompagnée il' sa
mère avec un grand Lanier et qu’elle lui remettrait tout
cequ’elle lui avait enlevé — et peut-être davantage.
Mais cette proposition fut énergiquement repoussée, et,
Eeu d’instants après, la voleuse était entre les mains de
i police de la commune.
Les drames de la jalousie. — Il y a trois mois, un
sieur Amédée Laisné' fondeur en suif) demeurant 140,
rue de Crimée, s’était brouillé avec sa maitresse, la
femme Hortense Havard. Le premier motflefit d’humeur
passé, Laisné qui, parait-il, avait une véritable passion
pour cette femme* essaya un racommodemeiit ; mais il
fut .repoussé. Une seconde, une troisième tentative
Meurent pas de meilleur résultat!
— Ne me pousse pas à bout, dit I.aisné, je finirai par
faire quelque mauvais coup: Je ne veux pas que tu sois
à un autre qu’à moi.
Hortense Havard haussa les épaules à ces menaces et
continua de vivre à part.
L’avant-derniére nuit, elle se trouvait avec plusieurs
autres personnes, à passer la soirée chez les époux
Desmet, 16, passage du Sud. Laisné, qui l'épiait, se
rendit à cette adresse et, vers minuit, vint frapper a la
porte en demandant à parler à Hortense.
Celle-ci, croyant à Ufïe nouvelle tentative de rap-
prochement, s'avança. Mais, sans dire ùft mot, Laisné
bondit sur elle et lui porta un coup de trancTiet au-
desscius du sein gauche.
Les personnes présentes s’élancèrent sur le meurtrier
et le maintinrent jusqu’à l’arrivée des gardiens de la
paix qui l’arrêtèrent. Quant à la victime, malgré les
soins que lui ont été donnés; elle a succombé au bout
d’une heure.
Conduit au bureau de M. Pajot, commissaire de po-
lice,! Laisné a déclaré qu’il avait agi sous l’empire de la
jalousie, mais qu’il ri éprduvait arec an regret, il a été
envoyé au Dépot.
Le corps de la victime a été porté à la morgue.
Arrestation d’un assassin. — On écrit de
Caén i
On vient d’arrêter, à Lion-sur-Mer, et d’amener à
Caen le nommé Georges Auvray, domestique, âgé de
quarante ans, qui. la semaine dernière, a tenté d’assas-
Siner son beau-père en lui tirant deux coups de fusil
L’une des balles entra par le côté gauche de la bouche,
toucha tin peii la langue et alla se loger sous l’oreille ,
droite, La blessure est très grave. La balle n’a pu être
extraite. _ _
Un généreux centenaire. — Une maison, de vins
de Champagne, la maison Heindsleèk et C°* fondée
depuis un siècle, vient de remettre au maire de Reims
TOn.OÔÛ francs, dont elle Mtdon aux ouvriers de la
ville pour fêter son centenaire.
Voilà qui est royal et humain. C’est au Petit Journal
que nous empruntons cette nouvelle.
_a neige tombe dans certaines parties de.Ia France,
assez abondante pour ralentir la circulation. Dans la
Haute-Loire,par exemple,(la neige a été accumulée en si
grande quantité sur certain - points, qu’il a fallu percer
dessWrtosde tunnel pour rétablir la circulation.
(in raconte qn’un voyageurarrivé vendredi de Tence
adù passer sous un de ces souterrains factices.
M. Gabriel, instituteur à Espiantas, s’était rendu au
dernier marché de Saugus ponr ses emplettes du jour
de l’An, et samedi il quittait la ville à 8 h. du soir après
avoir serré la main à ses amis.
Le temps était clair et la neige criait sous 1e pied.
Mais bientôt, le vent s'eif mêlant, la tourmente devint
affreuse.
Egaré, suffoqué, le malheureux instituteur appelait
au secours. . ...
Trois paysans qui rentraient a cheval le recueillirent
et le transportèrent chez lui à moitié môrt.
Quelques heures après il expirait.
M Gabriel, qui était fort estimé dans son entourage,
était âgé de quarante-six ans. il laisse une veuve et
trois jeunes enfants
Dimanche, un jeune homme de vingt-trois ans, le
nommé Montferrand* du village d’Aubépino. com-
mune de Saint-Just-Malmont, a été trouvé mort sur la
neige, à 300 mètres de son domicile.
il s’était, attardé avec des camarades, et malgré la
tourmente qui était épouvantable, il s’entêta à rentrer
chez lui.
Saisi, sans doute, par le froid et perdant haleine, il a
été renversé par l’ouragan et n’a pu se relever.
On écrit de Mende, 2 janvier ;
Depuis plusieurs jours, les courriers1 de I.angogne et
d'1 Neussargues sont obligés de Jaire leur service à che-
val, par suite de l’amoncellement des neiges sur cer-
tains points de la montagne.
La diligence ne peut se rendre de Villefort à Mende.
La correspondance sur cette ligne se fait également à
cheval.
Entre Chàteauncufot Langogne. un certain nombre
de voyageurs ne peuvent ni avancer ni reculer depuis
la semaine dernière. Les vivres manquent ainsi que
les couvertures de lit. Les voyageurs sont obligés de
passer la nuit dans les greniers à foin pour se garantir
au froid.
Le bruit a couru que des facteurs ruraux et des
paysans téméraires auraient été trouvés ensevelis dans
ia neige ; cette nouvelle n’a pas encore été confirmée.
Les anarchistes allemands. — On écrit de
Cologne, 3 janvier, 1 heure 48 : :-
Hier, la police de notre ville a fait une capture à
laquelle on attribue une importance extréme.
Uii ouvrier, habitant le faubourg de Nippes,recevant
de Belgique une caisse déclarée a la douane comme
contenant des habits hors d’usage, on a constaté qu’une
poudre noire ettrès fine s’échappait par une fissure de
l’emballage.
Par curiosité, un fonctionnaire approcha son cigare
allumé de cette poudre qui immédiatement fit explo
sion.
C’est alors qu’on a examiné de près cet envoi suspect
qui,-en effet, se composait de poudre de mine, de dyna-
mite, de fulmicoton et de mèches.
L’ouvrier à qui étaient destinées ces matières explo-
sibles a été arrêté. Les explications qu’il a fournies a la
police semblent de nature à confirmer le soupçon qu’on
vient d’èrre mis sur la piste d’une nouvelle conspiration
d’anarcliistes, semblable à c.-Ile qui fut révélée l’autre
jour par le grand procès de Leipzig.
Un incendie considérable a éclaté dans les mines de
houille de Villanueva (province de Séville), appartenant
àla compagnie du chemin de fer de Madrid à Alicante.
Il n’y a pas eu de victimes. Le feu dure depuis quatre
jours.
Tout gîte est bon pour ceux qui n’en ont pas. —
Les uns vont sous les portes-coclières. les autres sous
les ponts, d’autres encore dans les bateaux. Mais dans
tous ces endroits-là, il fait bien f oid; aussi, depuis
quelque temps, les vagabonds ont-ils préféré adopte
las salles d’attente des gares et surtout les églises, où
l’on trouve d’excellents bancs pour dormir et surtout où
personne ne vous dérange.
Malheureusement l’excès en tout est un défaut Un,
deux, trois locataires bien cachés dans l’église, peuvent
passer inaperçus. Quand on est quinze ou vingt, on se
fait remarquer.
C’est ce qui est arrivé à Saint-Germain-TAuxerrois.
Le curé, voyant son église envahie, a demandé le se-
cours d la police, et l’avant-dernière nuit une rafle a
été faite. On a cueilli dans la chaire, dans les bancs
d’œuvre, dans les confessionnaux une vingtaine de
vagabonds, installés là pour passer la nuit et parmi les-
quels se trouvaient de nombreux récidivistes.
Tout ce monde est allé achever la nuit au Dépôt.
M Stuart Cumberland.—Le « liseurdè pensées »,
M. Stuart Cumberland, qui a amusé Paris, il y a quel
ques mois, par ses expériences d’hyperesthésie tactile,
vient de rentrer à Londres après un fructueux voyag
en Allemagne et en Russie, lt a immédiatement reçu lu
visite d’un certain nombre de reporters et leur a donné
de curieux détails sur sa tournée. C’est surtout en
Russie qu’il a été bien-accueilli, comme il fallait s’y
attendre, après son succès parisien. Le grand-duc
Alexis et le générai Gourko, entre autres, sont désor-
mais au nombre de ses « sujets » les plus dociles. —
spécialement le général. M. Cumberland a joué avec lui,
dans un salon de Saint-Pétersbourg, une scène qui
diffère notablement du programme quelque peu mono-
tone de ses exercices ordinaires, il a prié le général
de se figurer qu’il était sur le champ de bataille et
qu’il avait à commander' une série 4e manœuvres.
On est convenu qu’un canapé représenterait une
redoute, que des chaises figureraient des corps d’ar-
mée. des tables et des banquettes les retranchements
avancés de l’ennemi On a alors bandé les yeux du
devin, qui — les doigts serrés sur le poignet du straté
giste — a procédé à l’attaque avec une décision parfaite,
exécutant tous les mouvements pensés par le général,
obliquant à droite, obliquant à gauche, faisant avancer
tel corps, emporter telle position, — jnsqn’à ce qu’enlin
le drapeau russe (un magnifique mouchoir garni de Va-
lenciennes) se trouvât arboré sur la redoute de satin.
A Varsovie, M. Cumberland est devenu le héros d’un
drame plus émouvant. Deux hommes s’y trouvaient
emprisonnés sous prévention de soustraction d’un tré-
sor de 2ÜÛ.0u0 roubles en or. .qui aurait été enterré, lors
de l’insurrection de 183 , dans une grande propriété du
pays. Les maitres de la propriété savaient par tradi-
tion de famille l’existence de ce trésor, mais n’en
connaissaient pas exactement le gisement. Quant aux
deux ouvriers russes accusés de l’avoir trouvé et enlevé;
ils se refusaient à tout aveu En désespoir da cause,
le magistrat chargé de l'instruction s’adressa â M
Cumberland, et, de concert avec le propriétaire du
trésor, lui offrit un quart de la somme s’il parvenait à
la faire retrouver. M. Cumberland déclara qu’il ne ga
rantissait nullement le succès, mais qu’il était prêt à
tenter l’aventure. Les deux prévenus furent alors
amenés en sa présence dans le cabinet du gouverneur
Aussitôt, il plaça sous leurs yeux quelques pièces d’or,
leur apprit qu’ils Jes avaient laissées tomber en route,
dans leur précipitation, au moment où ils emportaient
la caisse contenant le trésor, et qu’il dépendait de lui.
Cumberland, de retrouver ces pièces d’or, où qu’ils les
cachassent présentement.
Les deux hommes accueillirent naturellement cette
déclaration d’assez mauvaise grâce et parurent d’abord
assez peu disposés à se pi-é or a I expérience. Mais, sains
attendre qu’ils se fu -sont décidés, M. Curaberl nd en-
veloppa les pièces d'or dans du papier, les mit dans la
mai • de celui des prévenus qui lui païut. le plus naïf,
et s’éclipsa en lui disant dé cacher 1e paquet où il vou
drait. Cinq minutes plus tard,il rentrait dans le cabinet,
se faisait bander les yeux, saisissait poignet de son
sujet, et marchait droiO au poêle, où il retrouvait k
pièces d’or cachées sous les cendres..
sionu-' do, ce qui lui paraissait un acte de diviuaiin
surnaturelle, qu’il tomba à g-'noux et avoua qu’en effi
il avait, avec ton camarade, trouvé puis enlevé le 11*<
sor, ajoutant qu’il ne pouvait malheureusement pas
d re où la caisse était actuellement enfouie, par la
raison que son camarade avait eu soin de se relever la
nuit pour aller la changer de place, et avait toujours
refusé de lui indiquer la nouvelle cachette.
L’autre homme confirma alors l’exactitude de cet
aveu, mais en déclarant qu’il ne voulait pas dire son
secret et refusait absolument de se prêter aux expé*
i-iences de M. Cumberland.
— Puisque ce monsieur est si malin, ajouta-t-il iro-
niquement. il n’a qu’à trouver Ja cachette I... Mais ce
n’est pas moi qui l’y aiderai.
L’affaire eli est là. Elle semble à peu près insoluble,
et les deux prévenus sont toujours en prison.
M. Cumberland va maintenant ouvrir une campagne
coi tre les médiums de profession. II s’est ente îdu avec
M Labouchère, le député de Nortliampton, qui cumule
la qualité de membre du Parlement avec celles d’homme
d’esprit, de rédacteur en chef de Trulh et de blanchis-
seur. . à la vapeur. — pour parier de reproduire par
des moyens! naturels les prétendues » maniiestations »
spirites d’un c ertain Eglinton, qui lit tes yeux bandés
tout ce qu’on écrit sur une ardoise.
L’enjeu du pari proposé par MM. Cumberland et La-
bouchère s élève à 50,000 francs.
Prudence est mère de la sûreté. — Ce proverbe est
surtout vrai quand il s’agit du choix d’un médicament,
mais lorsque celui-ci se recommande par des preuves
journalières et irréfutables, comme celle que nous
transcrivons ci-dessous, son choix s’impose : « Beveren-
Waes (Flandre orientale). Je souffrais depuis cinq ans
de maux d’estomac et de mauvaises digestions ; voyant
le succès qu’obtiennent tous les jours vos Pilules Suisses,
j’ai commencé a en faire usage etàu bout de quel-
que temps, je me suis trouvée parfaitement guérie.
(Signé) augusta Gillis, rue du Sable. » Légalisation de
la signature par M. le bourgmestre de Beveren.
Le dépôt pour la Belgique se trouve à la Phie Pelerin,
12* rue de l’Ecuyer, à Bruxelles. Envoi franco poste
contre 1 fr. 50 la boite. 162
Lettres, sciences et arts.
Le succès obtenu à Anvers par les séances de
magnétisme de M. Donato fera bre avec beaucoup
d’intérêt les lignes suivantes consacrées par M. Fran-
cisque Sarcey, dans 1e XIXe Siècle, aux piiénomènes
de suggestion* dont il a été tant parlé dans ces der-
niers temps :
Nous avons déjà, dans ce journal, parlé des expé-
riences curieuses faites à Nancy par MM. Bernheim et
Ces expériences tendaient à démontrer que l’on peut,
par l’hypnotisation. substituer à la volonté propre d’un
individu une volonté étrangère, qui le dirige à son insu,
même lorsqu’il a cessé d’être sous l’influence de l’byp-
motisation, et qu’on peut ainsi l’obliger à faire les actes
' plus bizarres ou les plus criminels, sans que sa vo-
lonté y soit pour rien.
Ces étonnantes expériences n’avaient pas beaucoup,
à vrai dire, surpris les médecins, car les gens du mé
tier connaissaient depuis longtemps des faits analogues.
Mais les hommes du monde, et surtout les femmes du
monde, en avaient été inquiets et même effrayés.
On le serait bien davantage enbore si Ton se tenait &a
courant des progrès que fait cette science nouvelle. Au-
jourd’hui le principe de la suggestion est admis comme
incontestable. Mais à ce principe on cherche des appli-
cations de toute sorte, et il s’en présente de très inat-
tendues. La théorie était déjà fort extraordinaire; les
conséquences que Tonen tire sont plus étranges encore,
M. Auguste Voisin, qui est, médecin à la Salpêtrière,
se pique de trouver dans la suggestion un agent mora-
Usateur, ce sont les termes dont il se sert, par l’intro-
duction, dans la conscience, d’une volonté étrangère
qui domptera la volonté malsaine du sujet.
Je trouve dans la Revue sociale et économique, des
détails très intéressants sur ce point.
M. Auguste Voisin, dit la Revue, emploie la méthode
suggestive pour modifier l’état moral et le caractère de
ses malades, pour les rendre sociables, comme elles
l’avaient été autrefois, et faire renaître en elles l’affec-
tion à l’égard de leurs parents. Il est arrivé ainsi, no-’
tareraient, à rendre pariàitement disciplinées; et même
parfaitement polies, les malades les plus grossières et
jes plus rebelles. Les plus paresseuses se sont mises
courageusement à des travaux de couture.
Pour obtenir ces résultats vraiment merveilleux, M.
Auguste Voisin se contente de suggérer à ses malades
des idées convenables; par exemple, l’idée de se rendre
à telle heure, chaque jour, à l’atelier des malades et d’y
ester deux heures. Elles obéissent sans résistance à
toutes suggestions, et sous l’influence des habitudes de
calme et d’ordre qu’elles amènent, leur tenue est abso-
lument transformée.
Et n’attribuez pas ceSfn’ôdiges à une faculté surnatu-
relle que posséderait M. Voisin, ou plus simplement à
une habileté qui lui serait particulière. L’interne de
service obtient absolument les mêmes effets, en procé-
dant de la même manière.
Un procédé qui est àla portée de tout le monde.—
Jadis M. Voisin hypnotisait le sujet à l’aide du regard
fixé sur lui ; il obtient, à cette heure, l’hypnotiésation à
l’aide d’une petite lampe à magnésium qni projette un
très vif rayon de lumière sur les yeux.
11 suffit donc d’avoir une lampe et d’en posséder le
maniement.
Tout dernièrement l’interne de service suggéra à
une malade qui tenait la plus mauvaise conduite l’idée
d’écrire au docteur Voisin une lettre où elle le remer-
-ciait de ses soins et lui promettait de se conduire doré-
navant en honnête fille. Elle le fit exactement te lende-
main, et elfe croyait agir sous une impulsion de sa
volonté propre.
M. Bernheim, qui a été amené à s’expliquer sur les
expériences nouvelles du docteur Voisin, croit certain,
d’après ce qu’il a vu chez les sujets hypnotisables, que
Ton peut modifier chez eux les instincts, les penchants,
les habitudes. M. Liébaut, de Nancy, lui racontait qu’une
mère lui amena un enfant paresseux qui ne pouvait pas
travailler. Il l’hypnotisa et parvint, après suggestion, à
en faire un enfant laborieux, qui devint le premier de
sa classe. Cela dura quelque temps ; puis l’enfant re-’
tomba dans sa paresse et ne voulut pas être hypnotisé.
~M. Bernheim connait un docteur-médecin, artiste de
valeur, qui est dans un cas bien curieux. M. Liébaut
Ta débarrassé, en même temps que d’une sciatique
ancienne, d’une malheureuse passion pour la boisson
qui avait amené un délirium tremèns. Une autre
personne contracta, grâce à la même médication sugges-
tive, une répugnance prononcée pour 1etabac et pour la
bière.
La suggestion n’est pas toujours aussi efficace ; elfe a
besoin d’être répétée, variée, adaptée à chaque indivi-
dualité.
Les hystériques se font quelquefois à eux-mêmes des
auto-suggestionsqui neutralisentceiles de l'hypnotiseur.
Il faut alors user de subterfuge. M. Bernheim nous
en a donné un exemple vraiment étonnant :
11 avait cette année, dans son service d’hôpital, une
femme hystérique, insensible d’une moitié .-ntère du
corps et sujette à d'horribles attaques convulsives. De
plus, son caractère était fort capricieux. Un jour, elle
se refusa tout à fait à manger son bouilli :
— C’était de la saleté, disait-elle, et elle vomirait si
elfe le prenait.
La sœur infirmière essaya en vain de lui faire en-
tendre raison. M. Bernheim eut alors l’idée de la mettre
en état dè somnambulisme pour lui suggérer de l’appé-
tit et la décider à manger son bouilli. Vains efforts t
Elfe résistait obstinément à la suggestion.
— Je n’en mangerai point, répétait-elle obstinément;
je fe vomirais, car je n’ai aucun appétit.
M. Bernheim essaya en vain d’user d’autorité; la
personne restait réfractaire.
M. Bernheim s’avisa aloi’3 d’un moyen bien singu-
ier : la faire changer de personnalité.
— Comment vous appelez-vous ? lai dit-il,
— Marie M.... répondit-elle.
— Mais non, lui répliqua M. Bernheim, vous n’eteg
pas Marie M..., vous êtes Joséphine Durand, la tanta
de Marie M...
Elfe finit par en convenir.
— Eh bien ! lui dit alors M. Bernheim, faites la leçon
à votre nièce qui est là. Montrez lui comment il faut
manger la viande, dites-lui qu’elle est très bonne, etc.
Et aussitôt, voyant par hallucination sa nièce (c’est à
dire elle-même), elle l’admoneste, la gronde, la ser-
monne, l’encourage à manger sa viande, et, prêchant
d’exemple, la malade ^récalcitrante avale son bœuf,
qu’elle trouve excellent. A son réveil, elle ne voulut
jamais croire qu’elle l’avait mangé et ne l’cn digéra pas
moins, bien.
M, Bernheim a jépété plusieurs fois l’expérience chez
cette malade, et toujours avec le même succès.
Ces dédoublements de la volonté nous étonnent sans
cesse, nous qui ne sommes pas encore, comme fes
médecins, familiarisés avec ces expériences. Elles ren
versent tout ce que Ton nous avait appris en philo-
sophie sur l’irnitè do moi. sur la volonté, qui est te tout
de l’homme.
Que devient le fameux argument que faisait valoir
M. Cousin, d’un geste si imposant et d’une voix si
retentissante :
— Je veux mouvoir mon bras et je je meus* |