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(Troisième Année)
ANVERS , Mercredi 84 J AA VIER 1888
(N. 84.)
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Pont toute la Hollande
élut lh. Lejeune Libraire
Editeur à laHaye.
A Paris , à l’office-Cor-
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CURS
JOURNAL POLITIQUE, COMMERCIAL, MARITIME ET LITTERAIRE
pbooa:
LIBERTÉ,
PAIX,
toutes les changes de sa dernière entreprise, s’établit sous les plus heu-
reux auspices.
— On lit dans le Journal de Smyrne du 22 décembre: Le vaisseau
français le Trident* fait voile le 19 pour Athènes. Lesaulresbàlimens
composant l’escadre de M. l’amiral Gallois sont toujours sur notre
rade, et on ne sait encore rien de positif ni sur l’époque de leur départ,
ni sur leur destination ultérieure. La santé de l’amiral conlinue à
s’améliorer de jour en jour.
WURTEMBERG.
Les délibérations des Etats de Wurtemberg ont commencé le 16 d«
ce mois. Dans la première séance, M. Fnerlein. le doyen des libéraux,
de Wurtemberg, a fait la motion, que la Chambre unit sa voix à celle
de la morale publique, du droit et de la politique en exprimant publi-
quement, devant toutéTAIIemagne, son regret, qu’on ait retiré arbi-
trairement sa constitution à une partie du peuple allemand, qui avait
tant contribué à ramener en 1815 et 1814 la dynastie de Hanovre sur
le trône de ses ancêtres. La délibération de celle motion fut résolue ,
mais, comme aucun ministre, par prudence sans doute , n'était pré-
sent à la séance, on décida qu’on la discuterait le lendemain et seule-
ment en présence des ministres.
RUSSIE. —St.-Pétersbourg, 10 janvier.
L’empereur a donné dés ordres pour la reconstruction immédiate
du palais d’hiver devenu la proie des flammes dans les journées des
29 et 30 décembre. Une commission a été nommée pour la direction
des travaux , et l’empereur a déjà destiné une somme considérable
pour les premières dépenses. Un assure que LL. MM. se proposent
d’habiter le nouveau palais à la (in de l’automne prochain. Un voit
dès-à-présenl plusieurs centaines d’ouvriers occupés à enlever les dé-
combres du bâtiment incendié.
a généralement paru considérer celle question, en reproduisant nos
réflexions. Cet assentiment que nous ne pouvions manquer de ren-
contrer, pour une pareille chose, nous engage à appeler, avec plus
d’instance encore, sur cet objet, l’attention de l'administration com-
munale, de l’administration provinciale et du gouvernement ; car,
nous le répétons , la Belgique entière est intéressée, sous tous les
rapports, tout aussi bien que la province et que la ville d'Anvers,
à la conservation de la Cathédrale.
Nous avions primitivement fait valoir les considérations d’argent,
mais ces considérations n’étaient que secondaires, car il y a telles
choses dont une somme d’argent, quelle qu elle soit, ne saurait com-
penser la perte, parce que ces choses une fois anéanties ne sauraient
être reproduites.Tels sont les objets d'art, tel est en particulier l’é-
difice dont nous parlons. Or, sous le double point de vue et de l’ar-
gent et de. l’art, cet édifice est d’un prix inestimable. Il semble donc
qu’à double titre, il devrait être le plus possible mis à l’abri des ac-
cidents qui peuvent le détruire.
Si la prudence humaine pouvait, à force de précautions, garantir
ce qui existe d'événements hélas inévitables, parce qu’ils dépendent
de causes placées au dessus des pouvoirs des hommes, ce -erait un
devoir sacré de ne négliger aucune de ces précautions: à plus forte
raison en est-il ainsi, lorsqu’il s'agit de précautions à prendre con-
tre d?s dangers que tout le monde prévoit et prédit, qui sont cha-
que jour imminents, et qu’il est facile d éviter.
La Cathédrale, comme tout ouvrage des hommes, a son exislence
limitée, et en outre est condamnée à courir ses propres risques.
Jusque là tout est dans l’ordre normal, surtout, si l’on s'applique à
diminuer les chances de ces risques. Mais que, par une inconceva-
ble imprudence on laisse la Cathédrale d’Anvers exposée à mille dan-
gers qui sont en dehors d’elle, qu’on la laisse livrée à tous les évé-
nements que peut entraîner la négligence de deux cents individus
peut-être, logés dans les maisons qui y sont attenantes, voilà ce qui
cesse d'être dans l’ordre normal et dans les règles d'une sage économie.
Pourquoi ne prendrait-on pas à l’égard de laCathédrale les mesures
que l’on prend aujourd hui par tout à l’égard des monuments publi-
ques? Pourquoi ne Tisoierait-on pas? Sous le rapport de l'art,
elle gagnerait à être débarrassée des maisons, ou pour mieux dire,
des bicoques qui l’obstruent, elle y gagnerait en outre sous le
rapport de la sécurité. Les dépenses que nécessiterait cette ré-
forme ne sauraient être considérables , et dans tous les cas, nous
le répétons , il y a des choses qui ne sauraient se mettre dans la
balance avec une poignée d’argent.
TURQUIE. — Constantinople, 21 décembre.
MM. les docteurs Bulard et Lago. sont.sortis aujourd'hui de l’éta-
blissement où ils viennent de se soumettre à une quarantaine de 21
jours, après avoir terminé leurs périlleux travaux à la Tour de Léan-
dre, au milieu de fatigues et de dangers sans nombre. La réputation
de M. Bulard, est forte et déjà il a commencé à eu recueillir les fruits.
Geilede son ollégue M. Lago, qui n’a pas craint de partager avec lui
SUISSE.
On lit dans le Nouvelliste vaudois : '
Une somme de 17,000 francs, dont la majeure parlic en or, avait été
expédiée dernièrement de Turin à Paris, à l’adresse de MM. Rotschild,
entreposée par le courrier sarde dans le bureau de correspondance des
messageries françaises à Genève, où elle dut rester vingt-quatre heu-
res jusqu’au prochain départ; celte somme y fut volée durant cet es-
pace de temps. Tous les efforts de la gendarmerie française pour dé-
couvrir les auteurs de ce vol étant demeurés inutiles, M. de Monte-
bello a écrit au vorort pour l’inviter à demander aux cantons de met-
tre leur police à leur poursuite, attendu qu’on a des raisons de croire
que c’est en Suisse qu’ils sont cachés.
Ge qu’il y a de fâcheux pour les propriétaires do ces 17,000 fr.,c’est
que le group qui les contenait n’availélé enregistré que pour 4000fr.,
et qu’en conséquence MM. Crottet. directeurs du bureau où le vol a eu
lieu, ne sont tenus que jusqu'à concurrence de cette dernière somme.
ANGLETERRE. — Londres, 22 janvier.
Samedi dernier, la reine a reçu en audience le comte de Durham,
nouveau gouverneur du Canada.
— Le bateau à vapeur arrivé samedi de Lisbonne à Soutamphton,
avait à bord comme passager un bey d’Egypte (général d’artillerie) et
seize personnes de sa suite.
— La rivière charrie une grande quantité de glaçons, et depuis sa-
medi, les portes des bassins n’ont pas été ouvertes.
AUTRICHE. — Vienne , 14 janvier.
Le banquier baron de Sina a obtenu depuis le commencement de ce
mois le privilège delà construction du chemin de fer de Vienne à Co-
morn.
Malgré la neige tombée ces jours derniers, on n’a cessé de faire trois
fois par jour le trajet sur le chemin d’ici à AVagram. Cette distance de
deux milles et demie d’Allemagne, est régulièrement parcourue eu 54
minutes, quoique le poids des convois puisse être évalué à plus de 20
mille quintaux.
L’activité des entrepreneurs de ce chemin, et leur zèle qui ne se ra-
lentit point, donnent la certitude de la réussite de cette communica-
tion nouvelle. Un accident arrivé à la grande locomotive a bien un jour
forcé le convoi de s’arrêter à Florisdoff, mais des mesures sont prises
pour que de pareils désagrérnens ne se renouvellent point.
ALLEMAGNE. — Coblentz, 9 janvier.
Aujourd’hui, à midi, on répandit soudain dans la ville un bruit
vague sur l’arrestation présumée du vicaire de la paroisse catholique;
aussitôt toute la ville fut en mouvement, et une foule nombreuse se
porta à la rue dite Leerstrasse, où réside ce vicaire. Malgré toutes les
représentations qui lui furent faites sur le peu de fondement de ce
bruit, le peuple demeura dans une altitude menaçante jusqu’à quatre
heures de l’après-midi, où il fut joint par des milliers de paysans des
environs. Des menaces, on en vint à des voies de faits , et une lutte
sanglante s’établit enlre les ca'«.cliques et les protestants. La foule ne
paraissait pas disposée à se séparer pendanT toute la soirée, le ministre
protestant de la ville, un chapelain catholique et un conseiller se ren-
dirent chez le vicaire el le conduisirent à la maison curiale où il passa
la nuit. La foule se porta aussitôt au presbytère, dont elle occupa tou-
tes lesavenues, et à dix heures el demiedu soir,par un froid rigoureux,
elle n’avait pas quitté le terrain , conservant toujours si position
menaçante.
— Ûn écrit de la Westpbalie à la Nouvelle Gazette de Wurtzbourg,
en date du 14 janvier :
« D’après ce que nous apprenons de source certaine . l’cvéque de
Paderborn, baron Frédëric-Clémenl de Ledebur, a rétracté, par suite
de l’allocution du Pape, l’adhésion par lui donnée à la convention se-
crète entre le comte de Spiegel et M. Bunzen, et a notifié sa rétraction
à qui de droit.
» D’heure en heure on attend une rétractation semblable de la part
de l’évêque de Munster, baron Gaspar-Maxi.inilicn baron de Droste de
Viscbcring, si toutefois elle n a pas déjà eu lieu.
» On met la démission du conseiller ecclésiastique. (le nom est
écrit d’une manière illisible) en rapport avec cette démarche de M. de
Ledebur. »
ESPAGNE. —Madrid, 13 janvier.
Il se fait en ce moment dans les esprits une révolution heureuse, indiquant
un retour aux idées d'ordre : mais il est difficile de prévoir les conséquence»
que pourrait avoir un vote de la chambre des députés de France, défavorable
aux vues el surtout contraires aux espérances du parti dominant.
Depuis plusieurs jours , de fréquentes réunions de sénateurs et de députés
ont eu lieu; et dans l’une de ces délibérations , auxquelles avaient pris part
les ministres eux-mêmes, il venait d’être à peu prés résolu qu’une manifesta-
tion formelle serait adressée au gouvernement français , dans le but d’en ob-
tenir l’assurance d’une franche coopération. Un des députés les plus influens
a pris la parole ; il a démontré la nécessité d’attendre au moins le vote de la
chambre française, avant de s’aventurer dans une semblable démarche.
L’assemblée a compris toute la puissance de ses arguments; elle s'est rangée
à son avis. Il a été résolu que l’on attendrait-
Les dernières dépêches du général Espartcro sont satisfaisantes. Il annonce
que son dévoûment à la cause de la reine est inaltérable , et d’accord avec la
ministère sur tout autre point, il critique seulement la proinot on de certains
officiers-généraux.
FRANCE. — Paris, 22 janvier.
CrIHONÏQUE ET BKXJITS 31i S Aï,ONT.
deux AweiExs sinistrés. — Le ministère a beau être fermement éta-
bli sur sa base , il y a un embarras dans la situation politique. Il y a
deux hommes d’un grand talent, qui oui été ministres et qui ne le
sont plus, et qui n’ayanl pas l’âge de la retraite, peuvent être supposés
assez enclins à rentrer en aelivilé de service. Ces deux rivaux s’ex-
cluent l’un l’autre. Eh bien! nous l’avouerons; cette situation, toule
personnelle , est un embarras politique. C’est ce même antagonisme
sercatenr de Trieste, 28 avril 1828 : l'Observateur Autrichien , la Gazette des
Théâtres de Vienne. Il y lut une lettre dans laquelle il déclarait publique-
ment et solennellement, a ne s’élre dans aucun temps de sa vie, ni dans aucun
pays quelconque, conduit autrement qu’en homme d’honneur qui respects le»
lois, et n’avoir jamais eu à subir de condamnation ni de prévention crimi-
nelle : que là-dessus il en appelait au témoignage des autorités de tous le»
états dans lesquels il avait vécu. » Certes, si Paganini ne se fut senti la cons-
cience nelte, il se fut bien gardé de provoquer par la voie des journaux uue
enquête où il eut été si facile de le confondre.
Dans un autre entretien de ce genre, il confia à son biographe que plusieurs
fois on l’avait confondu avec le violon polonais, au-si célébré que libertin.
DuranoxvsUy, qu’il avait souvent vu et entendu dans sa jeunesse.
Bien que le traitement de Paganini à la cour de Lucques fut des plus mes-
quins, une affaire de cour le retint long-temps dans cette ville. Son célèbre
jeu sur la corde G date de celte époque ; lui-même a raconté à Prague com-
ment l’idée lui en vint : « A Lucques, disait-il à Scbollry, outre la direction
de l’orchestre dont j’étais chargé toutes les fois que la famille régnante venait
à l’opéra, je jouais trois fois par semaine à la cour, et tous les 15 jours pour le
grand cercle ; j’y organisai un grand concert. où parut souvent la princesse
régnante. Elisa Bacciochi, princesse de Lucques et Piornbino, et lasteur bien-
aiméede Napoléon. J’ajouterai qu’elle avait pour habitude de ne jamais en-
tendre la fin de mon concerto ; quand j’en arrivai aux sons harmoniques, elle
sentait son système nerveux trop fortement ébranlé. Heureusement pour moi.
Ils faisaient éprouver une émotion plus doure à une autre personne fort ai-
mable, qui n’avait garde de quitter le cercle. Sa passion pour la musique lui
fit accorder quelqut attention au musicien, et je dus à cela sans doute qu elle
ne resta pas toujours insensible à l’admiration que depuis long temps j’avais
pour sa beauté.
Notre liaison faisait de jour en Jour des progrès, mais exigeait le plus pro-
fond mystère, et n’en était pour cela même que plus délicieuse.
Un jour, je lui promis de la surprendre au concert suivant par un tour dà
force musical qui aurait quelque rapportavec notre situation. En mêmelems,
j'annonçai à la cour une nouveauté comique, une scène d'amour La curiosité
fut si vivement exitéc quand je me présentai avec mon violon privé de deux
cordes au milieu, de manière qu’il ne restait plus que te G cl lé E. Lapre-
mière devail jouer te rôle de la femme. !a seconde celui de l'homme Elles
commencèrent une sorte de dialogue. destiné à produire les phases diverses
d’une liaison amoureuse, tes petites bouderies et les douces réconciliations Les
cordes devaient tantôt gronder, soupirer et gémir, tantôt badiner, rire, faire
éclater la plus folle ivresse. La réconciliation se terminait par una coda bril-
lante. i
Le morçeau plut, la personne en l’honneur de qui jé l'avais composé nje
récompensa par le plus doux sourire, et la princesse Elisa me dit : « Puisque
vous êtes parvenu à exécuter de si belles choses sur deux cordes, ne pôurricx-
vous maintenant nous faire entendre quelque merveille sur une seule ! r j en
fis en riant ia promesse ; et, quelques semaines apres, te jour de la .Salni-Na
II refusait de le croire; convaincu enfin par ses yeux ; « Mon petit ami, je n’ai
rien à vous apprendre, dit-il, allez à la garde de Dieu, chez Paer. »
Ce célèbre compositeur dirigeait alors le conservatoire de Parme. Ce fut
à l'homme qui lui avait servi de maître à lui-même, au vieux, mais si savant,
maître de chapelle Giretti, qu’il confia d'abord Nicolo. Pendant six mois, Gi-
retti lui donna trois fois par semaine des leçons de contre-point.
Paganini composa là, sans instrument et comme étude, 24 fugues à quatre
mains
Cependant l’intérêt que Paer prenait à ses progrès redoublait de plus en
plus; bientôt il le fit venir travailler sous ses yeux jusqu’à deux fois par jour.
Après quatre mois de cet exercice, il lui demanda un duo, que l’élève com-
posa à la parfaite satisfaction du maître.
Plus tard, lorsque Paer quitta Parme pour Vénise, le jeune artiste visita
avec son père les principales villes d’Italie du Nord, surtout Milan, Bologne,
Ferr.are, Pise, Florcnee et Livourne, donnant partout des concerts, et recueil-
lant partout d’unanimes applaudissements.
Il atteignit ainsi sa quatorzième année. L’excessive sévérité de son père,
qui n'allait pas en adoucissant.commençait à lui peser Enfin il obtint à grande
peine de se rendre à Lucques pour un concert, accompagné de son frère seu-
lement.Le sentiment de son indépendance donnant un nouvel essora son gé-
nie, il y obtint le plus beau succès qu’il eut encore merité. Il fit fureur.
Depuis il entreprit ses voyages seul. On cherchait à le fixer dans chaque
ville, mais tous les offres furent inutiles : la vieerrante avait trop de charme
pour cette tète ardente récemment affranchie.
Outre 1e violon, Nicolo s’exerçait aussi sur la guitare, il en jouait avec une
rare perfection. Pourtant cet instrument lui parut toujours d’un genre fort
inférieur. « Je n’aime pas la guitare, disait-il, mais je ia regarde comme un
conducteur de pensées, .te la prends quelquefois pour mettre mon imagina-
tion en verve, ou pour me rendre compte d’une difficulté que je ne puis pas
encore exécuter avec le viulon. »
Qu’un jeune homme fougueux, passionné, échappe tout à coup à un rigou-
reux esclavage, soit tombé dans quelques-uns de ces écarts que l’on n’apprend
à éviter que par l’expérience, ceia se concevra sans peine. Il aima 1e jeu. les
femmes, et ne vécut pas toujours dans la société la plus exemplaire. Le bio-
graphe allemand Scholtry a raconté quelques aventures qui ne dépareraient
point tes Mémoires de Casanova. Il venait d'atteindre sa vingtième année
quand il se décida cependant à accepter une position fixe à la cour de Luc-
ques.C’est immédiatement avant cette époque, et selon d'autres versions, en-
tre les années 1811 et 1814, que la malveillance a placé celte absurde histoire,
qu'il aurait subi une arrestation, soit à Gènes, illantoue ou Milan, comme
prévenu d'avoir assassiné sa femme.
Plusieurs années après, Scholtry , se trouvant à Vénise dans l’intimité de
Paganini, so hasarda à lui demander, si cette rumeur avait en effet quelque
fondement. « Per Baccho '. s’écria Paganini . ceci n'est pas une. petite affaire.
Il n'y a qu'un malheur ; ces gens là ignorent que je n’ai jamais été marié. »
En même temps il tira d'un portefeuille plusieurs numéros de journaux : t'Oi-
FEU1LLETON
NICOLO PAGANINI
Le» versions ont tellement varié sur la vie de Paganini que nous saisissons
ia première occasion qui se présente de faire connaître à nos lecteurs sa
biographie puisée à la meilleure des sources.
Nicolo Paganini, naquit à Gènes, en février 1784 ; il touche donc à sa cin-
quante-quatrième année.
Son père. Antonio Paganini. était un homme d’affaires, pauvre et sans
clientelle Assez bon musicien lui-même, il devina bientôt les brillantes fa-N
«ultés de son fils, et le mit. enfant, à l’élude du violon. La discipline paternelle
fut rude. L’homme d’affaires, peu occupé, restait presque continuellement
au logis, où il se complaisait à d’ingénieuses combinaisons pour gagner à la
lotterie. Pendant tout ce temps, le pelit Nicolo était tenu de ne point quitter
la chambre, et de s’exercer sur son instrument.
De ces deux travailleurs , celui qui courait le moins après la fortune était
pourtant dans le meilleur chemin pour l'atteindre.
En attendant, le moindre manque d’application était puni parte jeûne. Ce
fut au point que la santé de l’enfant s'altéra d’une manière sensible. Heureu-
sement sa passion pour l’art n’en souffrait pas ; il ne se sentait heureux que
lorsqu'il était parvenu à imaginer quelque difficulté extraordinaire. Dans le
cercle des amis de la famille , ce fut à qui prophétiserait déjà de ses hautes
destinées.
Une circonstance en outre était venue influer sur son imagination italienne,
«t ne fut pas le stimulant 1e moins actif. Sa mère Théresa,née Bocciardo, avait
"vu en songe un ange qui lui avait assuré que son fils deviendrait un grand
violon.
Il n’avait encore que huit ans lorsqu'il écrivit sous la direclion de son père
Hue sonate où il s’étnit amusé à réunir tant et de telles difficultés qu’il ne se
trauva personne en état de l'exécuter. Dés cette époque, il alla jouer à peu
près trois fois la semaine dans les églises, et se fil aussi entendre dans quelques
salons.
Son nom commença à faire du bruit à Gênes ; et enfin , à 9 ans, il figura
pour la première fois dans une solennité théâtrale. Ce fut au bénéfice du cé-
lèbre soprano Marchesi. Il exécuta des variations de sa composition sur l'air
républicain français de la Carmagnole.
Antonio, jugeant désormais son fils au-dessus des leçons paternelles, le plaça
sous la direction d’un maître plus habile, Corta, premier violon de Gènes.
L’enfant reçut environ 50 leçons en six mois, après quoi le père 1e conduisit
chez Kolla à Parme. Rolla était malade et au lit ; sa femme fit attendre les ar-
rivants dans une pièce contigue. Là. se trouvait sur une table le plus nouveau
concerto du maestro et un vio'on. Nico o prend l’instrument, el joue le mor-
ceau à la première vue. Le malade demande en riant qui joue son concerto
;de la sorte ? Grande fut sa surprise quand on lui apprit que célait un enfant.
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