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1882.
8e ANNEE.
ABONNEMENTS
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BRUXELLES
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A FORFAIT
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BRUXELLES
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Boulevard du Hainaut, 139
Bruxelles
L'ÉMELATION
PUBLICATION MENSUELLE DE LA SOCIÉTÉ CENTRALE
D'ARCHITECTURE
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Bruxelles
DE BELGIQUE
— DÉPOSÉ —
BUREAUX : RUE DE LA POMPE, 3, BRUXELLES
— DÉPOSÉ —
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SOMMAIRE
A nos abonnés. — Société Centrale d'Architecture de
Belgique ; Rapport sur l'utilité d'instituer un diplôme
d’architecte et les conditions d'obtention de ce diplôme.
— Excursion. — Concours de Schaerbeek. — Œuvres
publiées.—Faits divers.—Le goût.— Concours de Liège.
A NOS ABONNÉS
Nous remercions ceux de nos abonnés qui oui bien voulu
nous signaler les retards subis par les livraisons 7 et 8 du
Journal et nous mettre à même de sévir contre notre éditeur.
— Nous les prions instamment d’avoir l’obligeance de nous in-
diquer les dates auxquelles ils recevront la 9e livraison et les
suivantes. Nous voulons absolument forcer notre éditeur à plus
de régularité dans la publication.
Le Directeur Gérant,
V. DumOrtier,
Boulevard du Hainaut, 139.
Société centrale d’Architecture de Belgique
Dans sa dernière assemblée générale, la Société centrale
d’Archilecture a abordé l’étude des questions relatives à la fon-
dation d’un diplôme d’architecte et à la nécessité de le rendre
obligatoire. Elle a étudié également les moyens d’arriver à créer
en Belgique une école spéciale d’architecture, où l’on puisse
acquérir ce diplôme.
Voici le rapport présenté dans cette assemblée, au nom de la
commission des droits et devoirs de l'architecte, par M. V. Du-
mortier, rapporteur, pour servir de base à la discussion de ces
intéressantes questions :
RAPPORT
sur l'utilité d'instituer un diplôme d'architecte et les
conditions d'obtention de ce diplôme
Messieurs,
A la dernière assemblée générale, nous nous sommes occupés
du tarif des honoraires et vous avez voté, à défaut d’une
meilleure solution de cette question difficile, l’adoption du tarif
rédigé par la Société des Architectes de la province de Liège
sanctionné l’année dernière par le groupe d’architectes affilié à
l’Union syndicale de Bruxelles.
Depuis cette assemblée, la question du tarif des honoraires
n’a pas fait un pas, aucune nouvelle proposition ne nous est
parvenue; force nous a donc été de l’abandonner provisoire-
ment.
Il nous semble tout naturel, d’ailleurs, que cette question soii
secondaire et dépendante de cette autre que nous considérons
comme primordiale : Quelles sont les connaissances requises
pour obtenir le diplôme d'architecte ?
En effet, Messieurs, l’utilité d’un tarif minimum n’existe que
pour autant qu’on puisse avoir certaines assurances sur le res-
pect dont il sera l’objet, et il est certain que, dans l’état actuel
des choses, nous ne pourrions parvenir à le faire respecter;
le seul moyen, selon nous, de forcer les architectes à exiger
des honoraires sérieux et justement tarifés, c’est de rendre
leurs études sérieuses, de leur donner plus d’importance et
d’empêcher surtout les ignorants d’exercer une profession qui
nécessite des aptitudes multiples, spéciales et la connaissance
profonde d’un grand nombre de sciences humaines.
C’esl donc en relevant le niveau des études d’architecture
que vous parviendrez à exclure peu à peu de la corporation
ces parasites auxquels, à cause du faible temps qu’ils ont con-
sacré à des études embryonnaires, il est impossible de com-
prendre l’importance de la mission qu’on leur confie et, par
conséquent, la nécessité de réclamer lin salaire en rapport
avec celle-ci.
L’attention de votre commission étant appelée sur ce point,
elle a cru devoir subdiviser la question comme suit :
1° Quelles sont actuellement, en Belgique, les études de
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l’architecte, et comparer ces éludes avec celles de nos confrères
des pays voisins?
2° Quelles sont les connaissances nécessaires pour exercer
dignement la profession d’architecte?
3° Quelles sont les réformes à apporter à l’enseignement
de l’architecture pour le rendre complet et le mettre en rap-
port avec l’importance de notre profession et, s’il y a lien,
rédiger le programme d’une école d’architecture, ainsi que les
conditions des examens à subir pour l’obtention d’un diplôme
d’architecte?
Nous nous sommes entourés, Messieurs, pour résoudre ces
divers problèmes, de tous les renseignements que nous avons
pu nous procurer.
Nous avons parcouru attentivement les programmes d’études
des écoles belges appelées à former des architectes; nous
avons constaté que dans les unes on consacre trop de temps à
la science et peu à l’art; dans les autres nous avons vu que, si
l’on s’occupe beaucoup de la partie artistique, la science élait
laissée dans l’oubli le plus complet.
A l’Ecole polytechnique de Bruxelles appelée à conférer le
diplôme d’ingénieur-architecte, les études sont de quatre années
dont le temps est réparti de la manière suivante :
En lre année, sur 700 heures de cours, 200 heures seule-
ment sont consacrées an dessin, soit un peu plus des
3/10es.
En 2me année, sur 900 heures de cours, 280 heures seule-
ment sont consacrées au dessin, soit un peu plus des 3/10es.
En 3ine année, sur 900 heures de cours, 60 heures sont
affectés à la théorie architecturale et 100 heures au dessin,
soit un peu plus des 2/10CS.
En 4me année, sur 850 heures de cours, 24 heures à la
théorie architecturale et 100 heures au dessin, soit environ
2/10CS.
Ces chiffres sont bien concluants : dans une école appelée à
former des artistes on consacre en moyenne, 190 heures par
an aux choses de l’art!
Dans tout ce programme, on ne parle de projets d’architec-
ture qu’en 3"’e année où ces études, gratifiées du nom de tra-
vaux graphiques, se font sous la direction du chef des travaux
graphiques qui n’est pas architecte.
Et on forme, dit le programme, des ingénieurs-architectes;
il est vrai qu’on n’en a formé qu’un seul, m’a-t-on affirmé,
depuis cinq ans que l’école existe.
Dans le corps professoral, il n’y a qu’un architecte, au talent
duquel nous rendons volontiers un légitime hommage; le reste
se compose d’ingénieurs, de mathématiciens, de physiciens et
de chimistes.
Ce n’est donc pas là, nous semble-t-il, qu’on peut étudier
Y art architectural.
Si nous examinons le programme de l’école du génie civil
de Gand (annexe à l’Université), nous trouvons :
En lre année, sur 50 heures de cours, 6 heures sont consa-
crées à l’architecture et 7 heures au dessin, soit 3/10"5.
En 2me année, sur 50 heures de cours, 10 heures sont
consacrées à l'architecture et au dessin, soit 2/10OS.
En 3me année, sur 50 heures de cours, 12 heures sont
consacrées à l’architecture et au dessin, soit 2/10es.
En 4“c année, sur 50 heures de cours, 15 heures sont
consacrées à l’architecture et au dessin, soit 3/40CS environ.
Cela vaut un peu mieux, mais le temps accordé à l’art nous
paraît encore plus qu’insuffisant.
Nous pouvons, du reste, bien nous dire entre nous qu’il est
universellement reconnu que les architectes sortant de cette
école sonl peut-être très-forts sur la théorie de la construc-
tion, mais paraissent pour la plupart complètement étrangers
à l’art.
Nous ne leur en faisons pas un reproche, ils n’en peuvent
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rien, puisqu’on ne leur a pas donné l’occasion de s’v initier;
nous constatons simplement un fait patent.
* +
Si d’autre part, nous jetons les yeux sur le programme
d’études de nos académies, nous y rencontrons l’excès contraire.
Tous, ou presque ious, nous y avons passé les plus belles années
de notre jeunesse, et pour la plupart ces souvenirs ne sont pas
trop éloignés ; ne devons-nous pas avouer que si nous y avons
appris à dessiner, la partie scientifique est restée lettre morte
pour le plus grand nombre?
Nous y avons étudié, il est vrai, des projets de vastes monu-
ments idéals que les plus privilégiés n’auront peut-être jamais
l’occasion d’exécuter, même réduits, au lieu de nous familia-
riser avec des créations plus réalisables; en un mot, dans les
études académiques l’art tient, tant bien que mal, une très
large place, il accapare si bien le tout, que le côté scientifique
est complètement négligé.
C’est à peine s’il y a un cours de construction, de géométrie
descriptive ou de coupe des pierres, et encore ; dans la plupart
des cas, ces cours n’élant pas obligatoires, ne sont fréquentés
que par quelques rares élèves.
D’ailleurs, comment voudriez-vous qu’il en fût autrement
dans des écoles d’art dont les cours sont, limités à 2 ou 3 heures
par jour et ne sont donnés qu’en hiver?
C’est cependant de ces académies que sortent presque tous
les architectes ! Quelques-uns d’entre eux peuvent parfois se
rendre à l’étranger plutôt pour y faire de nouvelles études que
pour compléter la faible somme des connaissance acquises;
d’autres peut-être et plus rares encore s’efforcent, au prix d’un
travail et de sacrifices inouïs, d’acquérir par eux-mêmes la
science qui leur manque soit dans des ouvrages, soit en fré-
quentant certains cours spéciaux, publics ou privés.
Nous le répétons, c’est là l’infime minorité.
La plupart se contentent des études faites à l’Académie, et
s’intitulent bravement architectes au lendemain du jour où ils
en sont sortis.
Jls finiront certainement bien, si la chance les favorise, s’ils
sont chargés de quelques travaux, par acquérir quelque expé-
rience; ils étudieront plus tard la science de construire, ils
apprendront à connaître les terrains, les matériaux, etc.,
mais ce sera le plus souvent au prix de bien des déboires,
aux frais de bon nombre de leurs clients, et quelquefois leur
expérience coûtera la vie des ouvriers.
Et voilà, Messieurs, comment, en Belgique, on devient (?)
architecte. Il n’y a pas de milieu : Ou l’école polytechnique qui
forme des constructeurs connaissant la théorie sans la pratique,
n’ayant aucunes notions artistiques, sachant, souvent, à peine
dessiner. Ou bien, l’académie qui produit des artistes dessina-
teurs ne connaissant, eux, ni la théorie, ni la pratique de
la construction.
Ni ics uns, ni les autres, à notre avis, ne peuvent être sérieu-
sement appelés architectes.
Quand on compare cette situation à ce qui se passe en Alle-
magne et en France, on doit avouer que nous sommes loin de
marcher à la tête des peuples chez lesquels l’enseignement
artistique est sérieusement organisé.
Nous avons eu sous les yeux les programmes de l’Ecole des
Beaux-Arts et de l’École centrale d’Architecture de Paris;
nous ne croyons pas devoir vous les développer ici ; beaucoup
d’entre vous, Messieurs, ont eu occasion d’examiner ces pro-
grammes que nous tenons du reste à votre disposition.
Il nous suffira de vous rappeler l’intéressant article publié
sur l’École des Beaux-Arts, coi. 13 à 16 de l'Émulation,
8e année.
Nous avons aussi examiné avec soin le nouveau programme
des hautes écoles techniques d’Allemagne, programme uniforme
pour toutel’Allemagne. Dans ces dernières, les études sont aussi
beaucoup mieux entendues quoique la partie scientifique occupe
une très large place; il est juste de dire qu’on est très studieux
en Allemagne et que les journées de travail sont de 11 et
12 heures. |