Full text |
LÉ PlCÆCUttSEITK , Luim» S Jauvter 1S4*
lU'te|)iisiuit (lu jour «te i flii.
Samedi, à l'occasion du renouvellement de l’année, le roi et la reine,
ayant auprès d eux MM. les ministres, les officiers et dames de leurs mai-
sons. ont reçu successivement le corps diplomatique, les députations
du sénat et de la chambre des représentants, la cour de cassation, la
cour des comptes, la haute cour militaire, la cour d appel, le conseil des
mines, l’académie royale des sciences et belles-lettres de Bruxelles; l’a-
cadémie royale de médecine, les fonctionnaires supérieurs des minis-
tères, le gouverneur et les directeurs de la société générale pour (avo-
. riser 1 industrie nationale,le gouverneur et la députation delà province,
le tribunal civil, le corps communal, le clergé catholique, le consistoire
de l’Eglise évangélique, le rabbin et les membres du consistoire Israé-
lite, le tribunal et la chambre de commerce, le corps des pouls-et-chaus-
sées et des mines, le conseil d’administration de l’université libre, l’é-
cole de médecine, le conseil central de salubrité publique, l'école vété-
riuaire et d’agriculture de l’Etat, le conseil général des hospices, etc.
A 5 heines et demie ont été reçus par le roi les états-majors et les
officiers des gardes civiques et de l’armée; à 4 heures les personnes
présentées, parmi lesquelles plusieurs étrangers de distinction. •
Discours prononcé par M. le comte f'ilain XIIJl, vice-président
du sénat.
Sire, Madame,— il y aujourd’hui dix ans que le sénat a eu pour la
première lois l’honneur de présenter au roi les vœux qu’appelle le re-
nouvellement de l’année; en nous reportant à cette époque, sire, nous
avons des grâces à rendre a la Divine Providence qui a daigné les exau-
cer; une alliance avec la maison de France, qui donne à la Belgique une
reine modèle de vertu et de bonté ; la naissance de princes bien aimés,
espoir denos enfants, la paix conclue avec les Pays-Bas, la reconnais-
sance de notre nationalité par les puissances; l'ordre a l’intérieur per-
mettant aux diverses opinions de se développer paisiblement dans les
limites de la constitution , la création d un réseau de chemin de fer qui
enlace presque tout le royaume, des finances prospères malgré des dé-
penses immenses, la renaissance la plus brillante de nos anciennes éco-
les des beaux-arts, tels sont quelques-uns des faits qui, sous vos auspi-
ces. sire, ont signalé ces dix années , en sanctionnant la conquête de
notre indépendance.
En nous félicitant de cette heureuse situation, nous aimons à en re
porter l'honneur à la sagesse éclairée du roi qui, dans des temps diffi-
ciles, a su conquérir l'estime et la confiance de tous les cabinets étran-
gers à sa haute impartialité qui lui a fait dominer toutes les phases de
la politique intérieure.
Eu entourant de notredévouement le trône et la dynastie de Léopold,
nous sommes tiers de pouvoir prouver à l’Europe aujourd'hui, comme
i.u temps d'Albert et d’Isabelle, comme au temps de Marie-Thérèse, que
le Belge sait aimer et respecter ses souverains.
Le sénat a l’iionneur d’offrir au roi. à la reine, à nos princes, l'hom-
mage de son profond respect, ainsi que ses vœuxdelongue prospérité.
Discours de M. Isidore Fallon, président de la chambre des représentants.
Sire, Madame! — En venant faire hommage à vos majestés de ses féli-
citations respectueuses, en venant renouveler ses vœux pour le bonheur
de la famille royale, la chambre des représentants se conforme à un
usage parlementaire, auquel elle attache d’autant plus de prix, que cet
acte de la session législative est toujours entouré du plus parfait accord.
Il y a toujours unanimité dans le Palais de la Nation, lorsque l’heu-
reuse occasion se représente d’exprimer les sentiments profonds de
vénération, de fidélité et d'attachement que le pays a voués à son roi,
les protestations d’admiration et d’auiour que nous inspirent les quali-
tés élevées. les vertus si touchantes, eL la bienveillante affabilité de
noire auguste reine, la tendreatfeetion etle vifintérétque nous portons
à ses illustres rejetons.
Sire, celte unanimité éclate également lorsqu'il s'agit de proclamer
la gratitude nationale pour la sollicitude et le dévouement de Votre Ma-
jesté au bien-être et à la prospérité de la Belgique; pour ses soins con-
stants. afin d’entretenir et de conserver, entre les grands pouvoirs de
l’Etat, l'union et la concorde, éléments si nécessaires au maintien de la
paix intérieure, à la consolidation du crédit public et à l’affermissement
de nos institutions; pour leglorieux avenir que nous prépare votre ma-
jesté, par la haute protection et les encouragements qu’elle accorde aux
lettres,aux sciences et aux arts, et par sa persistance dans la recherche
des moyens d’étendre le cercle de nos relations commerciales et d’élar-
gir la voie des débouchés aux produits de noire industrie.
Enfin, Sire, c’est toujours par acclamations d’enthousiasme, et Votre
Majesté en a reçu naguère, à l’ouverture du parlement, les témoignages
les plus éclatants, que la chambre des représentants invoque les béné-
dictions du Ciel pour la conservation d’une dynastie d’adoption, dont
la haute illustration vient de recevoir tout récemment encore un bien
brillant accroissement, et dont le digne cbef, s’associant à l'œuvre de
notre régénération, est venu poser les fondements de notre nationali-
té, dont il sera toujours le plus ferme appui.
A la suite de ces deux discours, le Moniteur, auquel nous les emprun-
tons, publie encore ceux de SS. E. C. de Gerlache, président de la cour
de cassation; de M. le président delà haute-cour militaire; deM. Théo-
dore Fallon, président de la cour des comptes et de M. le président de
la cour d’appel de Bruxelles.
ANVERS, 3 J.4STIEU.
Par arrêté royal du 31 décembre : Sont nommés administrateurs de la
commission de l’entrepôt général du commerce à Anvers :
41A1. F. Loos; .
J.-F. Cateaux-Wattel;
Auguste Ceulemans;
Jean Key;
Ch. Pecher.
Ils entreront en fonctions à partir du janvier prochain.
— Nous avons annoncé l’affreux malheurqui est arrivéen Angleterre
sur le chemin de fer du Great-Westerri. Bien qu’il n’y eût pas absolu-
ment de la faute delà compagnie, elle n’en a pas moins été condamnée
àuneamendede mille livres sterlings (25 mille francs). Lejugequia
prononcé la condamnation, a appliqué le principe qui se retrouve dans
le règlement d’exploitation de nos chemins de fer et d’après lequel '
tout accident implique une faute.
— Ont été nommés récemment dans l’ordre Léopold, sur la pioposi-
tiou du ministre des affaires étrangères : comte Gustave de Lannoy,
officier; le baron Théodore Vanderstraeten de Ponthoz, le baron Denis
Eskeles, consul général de Danemark, et le sieur Phasis, drogman de
la légation belge àConstantinople, chevaliers.
mul» ni ■ijwwubi—if
fait prendre un bain d’eau froide; et puis, pour donner de la vigueur à
leurs membres, on leur irotle la tête, les cuisses et le dessous des ailes et
du ventre, trois fois par jour, avec du rhum. Ces malheureux volatiles
sont tenus perpétuellement à ce régime inflammatoire; aussi leurs chairs
seut-eiles d’une couleur d’écarlate, et la moindre contrariété les met-elle
eu fureur.
On a construit, à la Basse-Terre , un amphithéâtre couvert pour les
combats des coqs : on le nomme le Dit. Les combats ont lieu tous les
dimanches, à une heure. On voit alors arriver de tous côtés des nègres
portant des caloges remplies de coqs, et leur chant lait un tintamarre
à se faire entendre des morts. Kien ne se fait avec plus de gravité que
les préparatifs de ces combats. Les commissaires du Pit président à
tous les détails avec un sang-froid imperturbable, pendant que le pu-
blie admis au spectacle se range sur les gradins. Ce public est formé
par portions à peu près égales de blancs et de mulâtres. Tout le monde
est égal devant les coqs. Celui qui veut engager un combat annonce
un coq , en l'appelant par son nom, car ces volatiles héroïques portent
des noms, comme les chevaux de bataille d’Achille, les valeureux Xan-
tljos, B.ilios et Podasos. On demande alors de quel poids il est, car on
n’engage guère de combats qu’entre coqs d’un poids égal. Il y a des
coqs célèbres, dont le nom terrifie les assistants ; mais enfin, lorsqu’un
rival est trouvé, on extrait les deux champions de leurs caloges, et on
les pèse dans une balance. Il n’y a pas de bouldogue ou de loup affamé
qui soit léroce comme deux coqs de combat qui se sont aperçus. Ils se
mettent touslcs deux à chanter à tue-tête; et comme s’ils comprenaient
parfaitement de quoi il s'agit, ils se laissent manier, peser, armer sans
obstacle, rouis en chantant toujours.
Une lois les coqs pesés, on les arme comme Bayard. Ils ont tous l’é-
peron coupé, à six lignes environ de la jambe; et ce tronc sert précisé-
ment a attacher un éperon d’acier, aigu comme une aiguille, et de près
de deux pouces de longueur. Cet éperon d’acier a une douille, comme
la baïonnette; l’on y fait entrer, en l’enveloppant d’une compresse de
toile, le tronc de l’éperon naturel; et puis ou assujétit le tout avec un
cordon solide, nouéautonr de la jambe. Cette opération est fort délicate
et veut un homme exercé. Lorsque les coqs sont armés, chacun passe
le sien à son adversaire, lequel visite le bec, les ailes, les éperons, afin
de s’assurer qu’il n’y a ni armes cachées, ni maléfices C'est alors que
s ouvrent les paris. Un homme pourchaque coq tient une liste ouverte,
et inscrit le nombre des gourdes engagés et les noms des parieurs.
Les sommes jouées sur ces coqs montent d’ordinaire à plusieurs centai-
nes de francs; et lorsque les listes sont closes,les coqs sont mis en place
et le combat a lieu.
Je ne m’efais pas fait une idée de ces batailles d’oiseaux, sur ce que
ison
— On écrit de Rome, 21 décembre.
Sans compter Mgr. de Corsi, les prélats suivants ont été informés par
le cardinal secrétaire d’Etat que le St.-Père avait daigné les revêtir de
la pourpre , 1» Mgr. Francesco Saverio Massimo, préfet du Sacré palais
apostolique, et majordome de Sa Sainteté; 2“ Mgr. Carlo Acton, audi-
teur général ; et 5u Mgr. Luigi Vaiinicelli-Cusom, gouverneur de Rome,
vice-cuuierlingueel directeur général de la poiice. (Caz d’Augsb.)
— Ou écrit de Darmstadt, 2s décembre.
La Société du Chemin de Fer. qui s’était formée eu 1856, a décidé dans
son assemblée générale d'aujourd'hui qu'elle serait dissoute et qu’on
rembourserait aux actionnaires le versement de un pour cent qu’ils ont
fait. Ou a l’espoir que te gouvernement fera exécuter ce chemin de 1er
aux frais de i Etat. (Journaux allemands.)
On paiera dans le courant de ce mois les billets de logement, émis en
1841, ci qui n’avaient pas été présentés en liquidation en temps utile.
Varié taras.
LA FEMME A LA MODE.
Les femmes à la mode se divisent en deux classés qu'il faut bien se
garder de confondre,
La femme à la mode arec préméditation.
La femme à lu mode sans le savoir.
Cette dernière rend à la divinité capricieuse un culte involontaire,
sans combat, sans inquiétude, et qui pourtant n’est pas sans charme;
c’est le culte que la jeune tille rend à l'amour, et la inode comme l'amour
se garde bien d’avertir son esclave; elle se p.ire d’elle en silence; elle suit
que son nom l’allarouelierait Eu effet, la femme qu’un instinelde co-
quetterie rend élégante fuirait en reconnaissant, l'idole qu’elle encense
malgré elle; si on lui disait : « Vous êtes une femme à la mode, » elle s’a-
larmerait, et la crainte des prétentions et d’un ridicule lui ferait bientôt
cela devait être affreux... — Eh bien ! non, c’était bizarre, mais elle était
fort jolie.
Quand une fetnmeà la mode est malade, son existence estsuspendtie,
car c’est un faible dédommagement pour elle que d’appeler le médecin
en vogue, que d’élrenner un système nouveau, que d’avoir les prémices
de riiomœopalhie.
Elle ne reprend un peu à la vie que par l’avenir des toilettes de la con-
valescence.
Un deuil ne l’afflige qu’au tant que le noir lui sied mal; elle compte avec
impatience les jours qui amènent le demi-deuil, pour lequel elle pré-
pare d’avance une foule de petits ornements tristes, gris et noirs, qui
Serviront à égayer sa toilette, qui seront, pour aiusi dire, les consola-
tions de sa parure.
Une femme à la mode, armée de sa frivolité, défendue par l’idée fixe
de plaire, gardée par l’élégante sécheresse de son cœur, pourrait toute
sa vie rester irréprochable.... Si le premier devoir d’une femme àlamo-
de n’élait pas d’attacher à son char ['homme à la mode; malheureuse-
ment le premier devoir de cet homme est à son tour de compromettre
la femme à la mode, et de là résulte une suite de troubles, de scandales,
qui, quoique tousà la mode, n’en sont pas moins de grands malhevreux
qui font le désespoir desgensà la mode...et la consolation des envieux.
MADAME E.MILE DE CIRARD1N.
(Musée des familles.)
Chreniaue inihnitrielle et fommefeia’e.
Relevé des navires marchands
dernières années :
AXMÉES. NAVIRES.
1832 2246
1833 2374
1854 2158
1855 1956
1856 1694
liés à Amsterdam durant les dix
ANNÉES. NAVIRES.
1837 1933
1838 2074
1839 2375
1840 2198
1841 2036
rechercher une modeste obscurité.
Une femme à la mode sans le suçoir veut que sa toilette, sa démarche
ressemblent à celles de toutes les autres femmes; elle croit que ceia est
naturel ; elle ne sait pas que cette ressemblance vient du travail que
font les autres femmes pour lui ressembler ; et comment pou irait-elle
imaginer que l’on imite en elle ce qu’elle n’a copié de personne !
Il lui échappe parfois des naïvités dont l’observateur s’amuse ; lors-
qu’elle voit, par exemple, une femme vive et moqueuse changer subi-
tement de caractère, se faire sentimentale et rêveuse, pour imiter sa
langueur, pour singer son maintien nonchalant, cette démarche sans
vivacité et pourtant si légère, toutes ces grâces enfin délicieuses parce
qu’elles sont inimitables , elle s’afflige de bonne foi ; eile ne comprend
rien à cette métamorphose; et, loin de féliciter son amie sur les nou-
veaux attraits qu’elle emprunte, ne la voyant plus rire, elle la croit ma-
lade ou malheureuse, et vient lui due avec bonté : « Vous avez l’air bien
triste ? qu’avez-vous? »
Mais ne nous appesantissons pas plus long-temps à dépeindre/a femme
à la modesans le savoir; peul-êtreà ce portrait quelquesjeunes beautés
se reconnaîtront-elles; peut-être, une fois éclairées, reuonceront-elies
au rôle qui leur sied si bien, et ce serait dommage.
Les femmes à la mode avec préméditation nous inspirent moins de crain-
te, et nous allons sans égard dévoiler leurs prétentions.
Les femmes à la mode ne sont presque jamais très jolies.
Les femmes très régulièrement belles sont rarement les plus élégan-
tes; la très grande recherche de la toilette est presque toujours une
réparation; elle sert à cacher un défaut, soit un peu de maigreur, soit
un teint dont la fraîcheur est douteuse. L'art de se bien mettre sait pa-
rer tout cela; il s’inspire des obstacles. Les gens qui ii’otil point d’idées
font mieux les vers que la prose, les nécessités de la rime leur amenant
parfois une idée. Il en est ainsi des défauts de la taille ou de la figure;
ils inspirent une quantité d’otnemetws qui font effet, qui séduisent,
parce qu’on n’a pas le secret de leuf origine, et qui bientôt deviennent
la mode universelle.
Les femmes, au contraire, dont la beauté est sans reproche, n'enten-
dent rien à toutes ces malices; elles sont belles tout bêtement; de là vient
qu’elles ont moins de charmes.
L’esprit d’une femme à la mode est «n général borné, bien qu’il soit
universel. Son regard s'étend sur tout, mais il ne pénètre rien
Le premier ridicule d’une femme à la mode est de regarder comme
nulle toute existence qui ne ressemble pas à la sienne;pour elle, une fem-
me qui a passé sa jeunesse sans être au jour à la mode, est une femme
quia manqué la vie, expression que M"»- de Staël employait pour plain-
dre une femme qui n’avait jamais aimé.
Mme de X ", qui est à la mode cette année, a une sœur retirée à la
campagne; cette sœur est fort heure use, son mari l’aime , ses enfants
sont beaux et bien élevés; toute cette famille uièue à soixante lieues de
Paris une existence agréable que rien netroubie. Eh bien ! MmedeX'"
ne peut se consoler de l’affreuse destinée de sa sœur; elle ne peut s'ima-
ginerque l’on supporte une vie si morteUemeiilennuyeusejelle necorn-
prend pas que l’on soit heureux du bonheur. D’abord, elle a plaint « sa
pauvre Caroline, sijeiuie, si belle,ensevelie vivante; * mais, quand etle
s’est aperçue que la pauvre Caroline, loin de languir dans la retraite et
de maudire son destin, s’en arrangeait à merveille, sa pitié s’est chan-
gée en indignation ; eile abandonne sasœur; elle est incorrigible, se dit-
elle ; elle aime à s’ennuyer.
De l’autre côté, il faut en convenir, la pitié n’est pas moins risible.
Lorsque par hasard, la pauvre Caroline vient à Paris et quelle voit sa
sœur lancée dans un tourbillon de plaisir, spectacles, diners, concerts,
partie de campagne, et., etc.
— Pauvre sœur, dit-elle à son tour, il faut bien qu’elle cherche à se
distraire, une femme est Si malheureuse de n’avoir pas d’enfants !
Al“» deX’" regrette en effet de n’avoir pas d’enfants, mais non pas
par l’idée que sa sœur lui supposé ; elle ne verrait point dans sa famille
l’avertir de sa vieillesse et l’occupation de son cœur.
— Ah ! je voudrais avoir deux jolies petites filles, dit-elle; je les habil-
lerais toujours en blanc, toutes les deux de même, avec de jolies petites
capotes bleues; je ne connais rien de si joli sur le devant d’une calèche
que de beaux enfants, etc.
Voilà pour elle ce que serait la maternité.
Une femme à la mode n’aime véritablement rien, ni la musique, ni la
danse, ni la poésie, caries beaux-arts ne sont un plaisir pour elle qu’à
de certaines conditions; elle n’aime la danse que dans une grande fêle;
pour que la musique lui plaise, il faut qu’elle ait une loge aux premières
aux Bouffes, et que deux élégants la distraient. Jamais il ne viendra à
l’idée d’une femme à la mode d’aller écouter Rtibiui dans une loge de
rez-de-chaussée — avec un vieil oncle.
Le premier soin d’une femme à la mode est de produire de l’effet:
pour cela, elle doit souvent manquer de goût dans sa toilette, mais il
faut toujours que ce soit avec art. Le secret est de choisir des parures
extraordinaires qui soient avantageuses, une toilette jolie à l’œil, mais
ridicule à raconter, dont le récit fasse scandale ; il faut que l’on s’écrie :
j’en avais lu ou sur ce que j’en avais entendu dire. Les chroniqueurs
anciens, qui rapportent les combats de cailles et de coqs, auxquels les
Grecs et les Romains se passionnaient comme aux courses de chars,
n’ont pas donné de détails précis. J’ai donc été supris de voir un véri-
table duel à l'épée dans lequel l’un des combattants est toujours tué en
moins de cinq minutes. Les deux coqs s’avancent l’un sur l’autre, le
cou tendu et les plumes hérissées; puis, quand ils sont à se toucher, ils
s’élèvent perpendiculairement et se renversent en arrière, pour lan-
cer horizontalement leur coup d’éperon. Ils se frappent bien avec le
bec; mais ce n’est que pour s’accrocher. Mais pendant que les coqs se
portent des bottes savantes, les spectateurs sont en proie aux angoisses
les plus incroyables, et changent vingt fois de visage avant le coup fa-
tal. Il s’agirait de leur propre duel, à eux, qu’ils ne feraient, certaine-
ment pas le quart de ces contorsions et de ces grimaces.
J’ai assisté à l’un des plus terribles combats qui se soient livrés à la
Basse-Terre. 11 s’agissait d’un coq redoutable, nommé Canelle, qui ap-
partenait à un homme de couleur. Canelle avait déjà tué dix-sept coqs;
son nom seul faisait frémir, et il n’était à plusieurs lieues à la Tonde ni
homme, ni femme, ni enfant qui ne le prononçât avec respect.^.'adver-
saire qu'on lui opposait était uu gaillard matois, assez inconnu,et nom-
mé Spingle. Il appartenailà un blanc. Dès qu’il parut, les mauvais plai-
sants retinrent chacun un bol du bouillon qu’on ferait avec sa chair,car
c’est à cet usage profane qu’on réserve les coqs morts au champ d’hon-
neur. Canelle eut de prime-abord deux cents francs sur sa liste ; le pau-
vre Spingle n’avait pas dix écus.
Les habitués dti Pit, gens de tactique, discutaient sur les résultats
probables de la lutte. Canelle était un ouragan ; c’était toujours du pre-
mier au troisième coup qu’il tuait son coq. « Si Spingle évite ces trois
coups, disait-on, il a quelque chance. Alais la difficulté est là. a Enfin, les
listes des paris furent closes ; Spingle trouva huit ou dix gourdes témé-
raires; son maître compléta la somme, et l'on en vint aux prises.
Ni Ajax, ni Patrocle, ni Marcellus, tué dans une embûche, ni Murat,
ni aucun guerrier immortalisé par sa fougueuse audace, ne sauraient
donner une idée de Canelle chargeant son ennemi. Ses deux terribles
épées d’acier étaient toujours en l’air, frappant d’esloc, fouillant dans
le vide, et de nature à percer une armure de chevalier. Spingle, dans
celle grave circonstance, temporisait comme Fabius Maximus, évitait
les bottes, laissait passer l’orage, et se préparait pour des temps meil-
leurs. Au bout de quatre minutes, Canelle, ébahi de ne pas voir son enne-
mi mort, ne savait plus ce qu’il faisait; ses épées frappaient toujours
avec la même furie, mais elles n’atteignaient rien. C’est alors que Spin-
gle. qui avait supporté les railleries des spectateurs, prit la défensive et
attaqua vivemenl. La peur gagna visiblement les amis de Canelle, les
COMMERCE
Plarr tl AmerH «**» 3 dniiviei'.
Notre marché de ce jour a été sans itnporb.nce; aucune affaire mar-
quante n’a été citée dans les principaux ai ticles.________.
-mum - - —mmaàtmmmmmm — —g* gg>jmmi ■hbjomwo—wgày—pg
""parti e ma rit m e.'
(EXTRAIT DES REGISTRES DU LLOYD-BELGE.)
Na«r»eHett de suer.
Li Marie-Antoinette, c. Ocket. est partie de Liverpool p. Anvers le 51
décembre en compagnie du Looebristv. c. Cornelisse, p. Oslende.
— La Vierge-Marie, c. ***, a fait voile de Aiessine le 17 décembre pour
Hambourg.
OSTENDE, 2 janvier. V. E.-S.-E. Petite brise. — Arr.: du 51 décembre,
le steamer angl. de Douvres, avec la malle, 2 pass.;du l'rjanvier, id. id.,
5 pass.; du 2. le steamer angl. Earl of Liverpool, c. Loruax. de Londres,
ch. de 9 passagers; le sloop belge Neptune, c. Block, de Londres, ch. de
diverses marchandises. .
Dép.: du 51 décembre, la goël. belge Frances, c. Delpierre, p. Liver-
pool, ch. d’écorces et lin; la goël. belge Commerce, c. Degraeve, p. Li-
verpool, ch. d’écorces et lin; lekoffholl. Clasina Margaretha. c.Schippers;
de Trepôrt. ch. degraine de lin; du l«r janvier, le steamer angl. Alenai,
c. Philips, de Londres, 15 pass.; le steamer angl. à Douvres, avec la
tnalle. 2 pass.; du 2, id. id., 7 pass.
Navires entrés en décembre: Belges, 10; Anglais, 9; Français, I;
Hanovrien, 1 ; Hollandais, 1. Total. 22. — Non compris les steamer»
anglais avec les malles. — Nombre des passagers entrés, 182.
TEXEL. l« janv. — Arr.: Juff.Vrouw-Styntje, c. Bol, de Londres.
TERSCHELLING, 30 déc., v. N.-E. Arr. : Neptunus, c. lhuken, de
Bordeaux et Alaria, c. Ebes, de Cockenzil.
Le capitaine Ebes de la Maria, rapporte que le 25 décembre le navire
Joneta, c. Bonjer, était arrivé sur cette rade venant de Dantzig; tout
était bien à bord. . .
Dép. de Terschelling, 30 déc : Vrouw-Vrouwke, c. Huizinga, p. An-
vers.
HAVRE, 31 déc. V. E. — Arr. : du 50, le steamer Hambourg, c. Mar-
silly, de Rotterdam ; du 31, Marie, c. Boufon, de Calais ; et le steamer
Grand-Turc, c. Whightson, de Southampton.
Suite des départs du 30 : Fortuna, c. Lemarié, p. la Pointe-à-Pitre ;
Bnieldieu, c. Exmelin. et Marie-Caroline, c. Malhenx, p. .Marseille ; le
steamer Nord, c Coudère, p. Dunkerque ; du 50. L’Y, c. Alazzin. p. Vat-
paraiso ; Ville-de-Rochefort. c. Digard, p. la Vera-Cruz ; Trouville, c,
Larousse, p. Para ; Jumeaux, c. Beusclier, p. Cayenne; Flora, c. Smith,
p. Boston; John-Jay, c. Lambert, p. .Mobile ; Caroline,c. p. Port-
au-Prince; lntrépide-Corse,c. p. La Gonaive, et Louise, c. Gilles, p«
St -Domingtie.
MARSEILLE, 29 déc. — Expédiés en douane : Henry, c. Bichon, pour
Dunkerque; Elisabeth, c. Laren, p. Londres, et Hélène; Sopliia ,c. Er-
fland. p. Falmouth, à ordre. .
En charge : Zépliir, c. Witteveen. p. Anvers; Pétersbourg, c. Midel,
p. Dordt et Amsterdam; David, c, Sjogren. p. New-York.
BORDEAUX. 30 déc. - Départ : Artnande, c DeNis. p. Dunkerque:
ROYAN . 27 déc. — Dép. du 26 : le 3 mâts Lion. c. Bonnet, p. Bour-
bon ; le 27 venl du N.-E. Imperator, c. Drews, p. Anvers: Château-Bril-
lant. c. Godisseau, allant au passsage et à Montevideo ; Créole, c. Fer-
nandez, p. Valparaiso ; Aigrette, c. Pugibet, et Océan, c. Techotiard,
p. Montevideo ; Eulalie, c. Thon, et Talma, c. Cayol, p. la Nouvelle-Or-
léans; Nouvelle-Constance, c. Maitre, p. la Martinique; llda.c. Pinson,
p. St.-Thomas; Edouard, e. Laroque, p. Bourbon; et Ville de Dunker-
que , c. Guezenee, p. le Havre.
HAMBOURG. 50 déc. V. E. temps couvert. — Dép. : Sophie, c. Ketels,
p. Batavia; Cesar-et-Hélèna, c. Tiedemart, p. la Havane; Wilhelmine, c.
Regenburg, p. Rio-Janeiro.
BRE.ViEN-HAVEN, 28 déc. —Arr. : Herm-Wilhelm,c. Nodop, d’Anvers.
Mouirnient «!*• l’orl <1 Anïér».
ARRIVAGES.
Du 3. — Lesteamer angl. Cily ol'Edinburgh.c.Hast.deLondres, ch.de
diverses marchandises, ayant à bord 5 passager.
Le koffhan. Ellina, c. Lucht.de Liban, ch. d’orge.
Du 3, après-midi. - Lesteamer belge Princess Victoria, c. Jackson,
de Londres, ch. de diverses marchandises, ayant à bord 15 passagers.
La Princess a été échouée dans la Tamise.
AU BAS DE I.A RIVIÈRE.
Le 3 mâts amér. Henry Leeds, c. Jones, de Charleston, ch. de d’.v.
march., à la cons. de MM. frères Nottebohn.
La goël. angl. Britannia. c. Bradfeld, de Naples, ch.dediv. mare .
Le pleit belge François, c. Muys, d’Amsterdam, ch. de div. march.
chances étaient devenues égales: l’un était furieux et fatigué, l’autre
était reposé et calme. Tout à coup, les hommes de couleur poussèrent
un cri: Canelle venait de recevoir un coup qui l’avait jeté à terre ; ma,-,
entre coqs, l’honneur n’est pas satisfait sans qu’il y ait un mort, et le
combat continua. C’était devenu lamentable; Canelle, les ailes traînan-
tes cl les yeux fermés, chargeait encore vaillamment, comme le roi de
Bohème à la bataille de Crécy; mais Spinglele frappa encore de ses deux
épées, et alors le blessé tomba de nouveau et ne se releva plus. Son maître
le releva avec désespoir; on chercha sa blessure,on fit jouer ses membres
on le saigna ; rien n’y (U. Il était mort. Je n’ai jamais vu de consterna-
tion semblable à celle du mulâtre, maitre de Canelle, et il aura vérita-
blement fallu le bouillon qu’il en aurait fait, le soir, pour se remettrede
sa douleur. ,
Il se passa, le dimanche suivant, an Pit, une scene incroyable, eu
égard au sérieux avec lequel elle fut résolue, et à l’enthousiasme avec
lequel elle fut accomplie. Il y avait un vieux coq, célèbre dans les an-
nales de la Guadeloupe, et qui ne se battait plus. On le nommait Plume
aux pattes. 1! était borgne, comme Annibal et comme Sertorius, et il
avait tué Irente rivaux en combat singulier. Un blanc, le maitre de
Spingle. l’acheta trentre francs, et le lit battre. Comme on ne trouvait
pas de rivaux à chances égales. Plume-aux-pattes se battit contre des
coqs qui pesaient une livre de plus que lui. Il en tua trois. Alors, le pu-
blic intervint en masse, en faveur du gladiateur emplumé, et demanda
avec cris qu’il ne courût plus les chances de la lutte C’était juste, son
maître accorda la demande: mais comme I’henthousiasme s en était
mêlé; une voix demanda que Plume-aux-pattes, qui avait tué trenle-
trois-eoqs, fût décoré; et l’on n’entendit plus qu’un cri : la croix . la
croix ! On alla sur le champ chercher une croix de la Légion-d’llonneitr,
oû il y avait honneur et patrie, et on bipassa au cou du coq, avec un
ruban rouge. En même temps onfit venir une belle cage en bois d’acajou,
dans laquelle Plume-aux-pattes fut placé; tons les au 1res coqs, portés par
des nègres, défilèrent devant lui, en chantant son triomphe, ce qui dé-
termina, parmi les spectateurs, un rire olympien. Plume-aux-pattes fut
confié à un célèbre amateur. M. Mégy; et depuis lors on le voit, orné
du cordon ronge, boire dans l'oisiveté le meilleur vin de Madere, et man-
ger le millet le plus doré. Il a assez fait pour la gloire, et il est l’image
embellie du soldat laboureur.
Ce n’est qu’à la Basse-Terre qu’ont lieu ces combats de coqs. Les mü-
lâtres s’y livrent avec passion, et il y en a qui en vivent. A la Pointe-à-
Pitre, la classe des mulâtres est bien moins riche et bien moins consi-
dérée. Son oisiveté la rend turbulente, etelle occasionne des nxespres-
[Là suite au prochain numéro.) A. GRAN 1ER DE CASSAGNAG, |