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ANVERS, LUNDI 21 DECEMBRE 1835.
PREMIERE ANNEES' ’ ■ M.
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JOTONAIa ^Ols^ïÇ'a’S. COMMEB.SÏJÆ, MiwB.miô te LITïfeAIBÆ.
FAIX.
X.IBEBT3.
FROGE2S.
METEOROLOGIE.
Thermomètre: — 5°. glace
Baromètre. — Beau temps.
Pleine mer. — 51 ]2 h. du soir.
Lever du soleil. 7 h. 44. m.n
Lever de lu lune. 11 h. 50 m. s.r
P. L. le 5 à 5 h. 45 m. matin.
N. L. le 19, à 9 h. 25 m. soir.
Vents. — N. L'
Etat du ciel.— rime. Neige,Grêle
Basse mer, — 11 lj2 h. du matin.j
Coucher.du soleil. — 4 h.
Coucher de la lune. — 5 h. 10 m.
T). Q. le 13, à 4 h. 55 m. matin.
P. Q. le 2ô, à 7 h. 45 m. soir.
Le Journal parait tous les Jours , et porte la date du
Jour de sa publication.
MM. les Abonnés du Précurseur sont prévenus que leur
abonnement ne commencera à courir qua dater du 1er Jan-
vier prochain et qu’on leur enverra néanmoins exactement
les Nos. publiés jusqu’à cette époque.
21 Récetoüe.
(Correspondance d’Allemagne
BU MOUVEMENT Z5J3 i’iLIiÏjSMAGM’E.
En s’occupant de l’état de l’Allemagne, les publicistes
d’Angleterre et de France prouvent qu’ils ont trop formé
leur érudition sur les livres anciens, et pas assez d’après les
nouveaux traités. Ne vous étonpez pas dès-lors de ne trou-
ver que calme parfait là où ils rêvaient esprit de conquête,
indifférence où ils rêvaient protection.
L’idée que l’on se fait de l’Allemagne à Londres et à Pa-
ris représente ce pays comme un territoire morcelé, dont
chaque partie, jalouse de son indépendance, serait encore
plus éprise d’une réunion générale, d’une réalisation d’unité
que repoussent et qu’empêchent deux grands états, l’Autri-
che et la Prusse. Les petits états étant libéraux,et les grands
états des monarchies absolues, on en conclut que les esprits
dévoués au système constitutionnel chez les petits princes
doivent abhorer les souverains de l’Autriche et de la Prusse
dont la puissance menaçante est sans cessesuspenduesur eux
comme un vieux rempart qui menace ruine. Et les étrangers
(v compris les diplomates), croient avoir fait merveille lors-
qu'ils ont choisi de l’œil le point où, dans un petit état, ils
pourront, le'cas échéant, poser le levier de la politique occi-
dentale qui doit ébranler les grandes monarchies allemandes.
FJi bien! cette idée que l’on se fait à l’étanger de l’état inté-
rieur de l’Allemagne est fausse au dernier point.
L'indépendance des souverainetés diverses et l’amour de
la liberté politique dans chaque localité est chose si étrange
aux mœurs populaires, si évidemment empruntée à des hom-
mes et à des écrits extérieurs; si concentrée par conséquent
entre quelques individus et quelques sociétés qui sont seuls
an courant de cette mode constitutiomnelle qui travaille l’Eu-
rope, que les populations sont presque partout indifférentes
à l'iraplilsion que vaudraient leur donner quelques savans
et quelques professeurs. L’unité allemande seule n’est pas
un rêve; mais ce vœu réel, ce désir d’avoir une patrie grande
cl puissante n’est point tel que l’ont conçu, il y a une ving-
taine d’années, des poètes lyriques et des élèves d’université.
Les unitaires allemands de nos jours n’exhalent leur enthou-
siasme qu’à la bopr.se; leur dithyrambe favori c’est une loi
sur les douanes, et les poèmes sont des canaux et des che-
mins de fer.
Oui, liberté politique, garanties représentatives, formes
FEUILLETON DU PRÉCURSEUR.
SCÈNES SSE BIVAC
A des choses nouvelles, des mots nouveaux. Les anciens, dans leurs
marches militaires, allaient de villes en villes ou de campements en
campements. Les camps des Romains étaient les forteresses et les places
d’armes,des légions ; ceux des Barbares étaient des cités mobiles, les
seules qu’ils eussent. Bans les temps-féadaux , la guerre, étant partout,
n’entraînait que peu de grands déplacements d’hommes : caravanes
d’exacteurs ou pèlerins terribles, les compagnies trouvaient dans les
Abbayes et les châteaux leurs quartiers. Avcg la guerre régulière,
la guerre tactitiennc et savante des deux derniers siècles, les camps
reparurent, séjours de plaisance de l’armée, où tout le luxe de la cour
et de la ville suivait, dans la carrière frayée par les Coudé, par les
Turen ne, par les Luxembourg, par les Villars, par les Broglio, par
les Richelieu», les importants de Paris, les petits maîtres des châ-
teaux, les roués de Versailles, tranformés à la vue dés périls en Héros.
Quand vinrent nos guerres prime-sautières de la révolution, et nos
guerres géantes de l’empire, adieu le luxe des tentes innombrables et
l’appareil des camps méthodiques ! C’était les pèlerinages guerriers du
moyen-âge avec quelques cent mille hommes de plus, et Dieu de
moins ; c’étaient les invasions des Bellovèse et des Brennus par les
enfants armés du peuple le plus policé de l’univers. Le moyen de met-
tre des tentes dans nos bagages, quand nous étions 500 mille, et qu’on
Pouvait partir des colonnes d’Hercule pour les confins des Tartares!
he moyen dé planter des tentes quelque part aux temps de nos prospe-
ctés, quand nous courions comme la victoire! Le moyen encore dans
flos revers quand nous ne cheminions que de bataille en bataille et ne
couchions que sur le champ d’honneur ! D’un autre côté, quelles villes,
'îuels villages eussent contenu ces masses formidables? A de telles
ON S’ABONNE
A Anvers y au bureau du Précurseur f rue Aigre, N° 528. où se
trouve une boîte aux lettres et où doivent s’adresser tous les avis.
En Belgique et à Vétranger 9 chez les directeurs des postes.
La quatrième page consacrée aux annonces, est affichée à la
bourse d’Anvers, et à la bourse des principales villes de commercé.
Le prix des annonces est de 25 centimes par ligne d’impression ;
Un soin tout particulier sera porté à les rendre exactes, claires et
très-visibles.
Portes de la Ville.
Ouverture: 0 heures du matin. - Fermeture 9 du soir.
constitutionnelles, élections et lois de la presse, tout cela que
vous croyez sur le premier pian est sur le second et même
sur le dernier. Les théories libérales passent ici pour des
systèmes aussi creux que les philosophiques. Et les masses ,
déjà saturées de grands projets commerciaux, de vastes en-
treprises industrielles, ne considèrent les institutions locales
que comme un bariolage incommode, formant obstacle à
l égalité législative en matière de commerce, à l imité admi-
nistrative en matière de douanes, qui occupent plus les es-
prits que ne l’ont fait tous les droits de l'homme et du ci-
toyen, depuis la république de Sparte jusqu'à celle de Saint-
Marin.
L’unité des intérêts commerciaux, voilà la seule unité au-
jourd'hui demandée par l’Allemagne. Et l'entrainement vers
cette idée est si profond et si rapide, que dans tous les pe-
tits états représentatifs, tous les souverains se convertiraient
aux idées libérales, après avoir été témoin tout au plus
des applattfiissemens de quelques professeurs et de quelques
écolière, on entendrait la grande voix du peuple dire : Que
nous importe ces fadaises ? nos opinions potitiques sont nos
intérêts. La véritable constitution de l’Allemagne, c'esl la
loi ou l'ordonnance qui établira un tarif général.
Et bientôt ce vœu sera exaucé. La Prusse, jadis si {1ère de
sa philosophie et de ses lumières, a résolu d’abdiquer le
commandement des idées pour prendre le commandement
des intérêts.
Il n'y a pas un spéculateur, un banquier, un commer-
çant qui n aît les yeux tournés vers Ta Prusse et qui n’attende
d’elle d’immenses avantages dans cette route ouverte exclu-
sivement aux intérêts matériels. Les comptoirs se remplis-
sent de jeunes gens qui aspirent à devenir riches, comme
autrefois les universités se remplissaient d’élèves qui aspi-
raient à devenir savans. Cette unité allemande se réalise
donc sous le patronage de la Prusse, qui chaque jour aug-
mente ses partisans ou les rend plus dévoués, et vous com-
prenez que les populations des petits états libéraux, plaçant
le roi de Prusse au-dessus de leurs souverains, et les lois
commerciales de Prusse au-dessus de toutes les législations
libérales qu’on voudrait leur faire, ne demandent aux gou-
vernemens représentatifs de leur pays que de ne pas les em-
pêcher de faire fortune dans la grande affaire qui se prépare
sous leurs yeux.
Elle est donc bien vieille d’idée d’opposer de petits états
aux grands, et de compter sur l’esprit libéral des localités
pourpoint d’appui contrcune grande puissance oppressive!
( Industrie. )
FRANCE.
Paris, 19 décembre.
On a été surpris do la nouvelle du retour du duc d’Or-
léans , au moment même où commence l’expédition à la-
quelle il devait prendre part. La première résolution du
jeune prince avait séduit, on y voyait les élémens d’une
bonne éducation militaire , mais on redoutait pour lui des
dangers réels et sans utilité manifeste; on n’a pas le cou-
l’xiIX DE L ABONNEMENT
Posa Anvers
Pour la Belgique.
A l’année.
Par semestre
Par trimestre
\ 1 année
Par semestre.
Par trimestre
fr. 00
30
1.J
. . . fr. 72
36
18
Pour 1 etranger 20 francs.
W'"VW-iW.'ï W -WW..
armées il fallait pour couche la terre, et pour tente le firmament.
Lorsque nous serons courbés sous le poids des années, et que les jeunes
générations regarderont comme des monuments et comme des tro-
phées, les derniers témoins de la longue et magnifique odyssée de nos
campagnes, nous raconterons à nos enfants étonnés cet abri, ce
repos, ces joies du bivac, quand à la fin de journées remplies par des
marches surhumaines et charmées seulement par des périls renaissants,
un signal de l’Agammenon, de l’Ajax de notre épopée nous permettait
de faire halte où nous étions, de nous jeter sur un sol détrempé par les
pluies ou chargé de frimas, de fermer la paupière sous le ciel brûlant
des Castilles ou sous des neiges glacées de la Moscovie! On avait che-
miné tout le jour. tantôt pour atteindre l’ennemi qui fuyait, tantôt
pour dépasser ces colonnes dispersées, quelquefois en combattant, la
bayonnette au bout du fusil, mèche allumée, au pas de course des
canons , comptant les bataillons prisonniers et non pas les lieux fran-
chis 5 d’autres fois aussi, car toute médaille a son revers, toute prospé-
rité une revanche, toute conquête une réaction, d’autres fois, ai-je-
dit, nos aigles repliées, le cœur brisé, ayant derrière nous l’étranger,
devant nous la patrie ! « Allons donc conscrits, disait le vieux sergent,
vous n'allez] pas. Tu tires la semelle, l’enfant, parce que tu es venu de
Lisbonne en Silesie par Moscou ! Belle misère! c’est pour ton bien ce
qu’il en fait cet autre. Au moins avec lui on ne moisit pas» Le cons-
crit l’enfant marchait douloureusement : c’était un enfant en effet,
il n’avait pas 20 ans sonnés, et on voyait ses yeux se remplir d’une
grosse larme quand ii lui fallait , pliant sous le poids de son sac et de
son fusil, courir une demi-lieue durant, afin de suivre le mouvement de
la colonne qui se serrait. « Ile-bien ! conscrit, reprenait le vieux gro-
gnard, qu’est-ce qui t’arrive ? tu fais le clampin , parce que tu as
couru 14 lieues aujourd’hui pour n’en pas perdre l’habitude. Tu sauras!
mon ami, qu’un Français ne compte pas les étapes de la gloire. » Le
rage de blâmer aujourd’hui la mesure qui soustrait l’héri-
tier du trône constitutionnel à une aussi périlleuse ten-
tative. ’ i
— On sloccupe beaucoup dans la causerie politique de
l’expédition de Mascara; Voici ce que Ton a reeuiîii de la
bouche de quoique:; amis intimes du maréchal Clàuzéi.
Lorsqu’il alla prendre le commandement de notre Côloni i
d’Afrique , sous le patronage de plusieurs députés du cen-
tre gauche, ses amis disaient hautement qu’en se rendant
à Alger, il avait pris la route la plus longue, mais la plus
sûre, pour arriver de sa maison de la rue Cadet, à i’hôtei.
du ministère de la guerre, rue Saint-Dominique. Pour ob-
tenir ee résultat, il faut que le maréchal fasse, dans sa
nouvelle administration, preuve d’un haut talent; il faut
qu’il exécute avec habileté et avec bonheur un plan ca-
pable d’étonner la foule. Toutes ses vues sont tournées
vers un système d’émigration colonisante. Des arrange-
nt®»* «ont pris avec des paysans suisses et allemands; on
va dirigers vers la partie septentrionale de l'Afrique, ees
populations qu’on envoyait autrefois dans les solitudes du
nord de l'Amérique. Pour doter ees nouveaux habitàns,
le maréchal veut s’emparer de toute la Mitidia, dont il
distribuera Tes terres; il est résolu, aussitôt que l’expédi-
tion de Mascara sera terminée, à procédera la conquête
dès immenses terrains qui s’étendent jusqu’au pied de
l’Atlas. 11 va aussi hâter l’établissement d’une banque co-
loniale algérienne; déjà les actions de cette entreprise
; sont négociées par les dévoués satellites de la fortune fu-
ture du mareehftl. On croit fermement à la complète réus-
site de ces projets.
— On lit dans le Courrier français :
Depuis quelques jours on a cessé d’employer des soldats
aux travaux du chemin de fer de Saint-Germain; ils sont
momentanément remplacés par les simples manœuvres.
S’il faut en croire les bruits qui circulent, cette mesureau-
ruit été prise pour prévenir une collision entre lès militai*
res et les ouvriers. Ceux-ci ont représenté, dit-on, que
dans cette saison rigoureuse où il n’v a point d’ouvrage
pour tous les bras, ce serait leur ôter leurs moyens d’exis-
tence <[ue de partager ce peu de travail entre eux et des
soldats dont la subsistance et l’entretien sont assurés. Cette
objection n’était pas sans fondement, et les entrepreneurs
du chemin de fer en ont tenu compte. En établissant la
concurrence à une autre époque de l’année, ils avaient
voulu donner une idée de tous les avantages qu’on peut
retirer de l’emploi des troupes aux grands travaux pu-
blies. L essai avait été fait déjà plus eu grand et avec un
égal succès, dans les départemens de l’Ouest, pour la con-
fection des routes stratégiques. Nous ne doutons pas, au
reste, qu’il ne soit renouvelé encore lorsque le beau temps
reviendra et que les ateliers auront repris toute leur ac-
tivité.
— Le bruit court que M. Roederer, l’auteur de la
brochure : Adresse dSm constitutionnel aux constitution-
nels , est mort avant-hier.
conscrit répondait souvent pour son excuse qu’il était blessé , et si <m
lui répondait pourquoi il ne restait pas à l’hôpital à se faire guérir : «
Ah ! bien oui ! repondait-il sans se douter d’être un héros, pour qu’o <
dise que je suis un feignant!» Puis la colonne reformée entonnait
quelques chants de guerre, quelques airs de caserne, qu’officiers et
soldats répétaient en chœur, en s’interrompant par un long éclat de
rire si le refrain parlait aux soldats des ennemis ou des belles , en lan-
gage fait pour eux. Ainsi se faisait la route d’Icna à Friedland , ou de
Mojaisk à Champ-Aubert. Cependant, uri frémissement a couru dans
les rangs. Ils se sont ouverts pour laisser passage. Une voix cric au
conscrit affaiscé qui se débat dans la boue profonde sans rien voir et
rien entendre : « Gare donc, ami ! » — Cette voix , d’un mot elle rem-
plit le monde : c’est l’empereur ! il fend au galop les colonnes 5 ses
officiers ont un air affairé 5 on a vu des aide-de-carnp courir en avais t 5
d’autres étaient allés et venus 5 un maréchal s’installe déjà avec son
état-major , dans le château prochain, et voilà deux généraux qui vont
se loger dans une abbaye qu’on appereoit plus loin. — «C’est bon!
dit le grognard , nous ne tenons pas le septième jour , car- nous ne
sommes pas près de nous reposer comme Dieu le Père j mais celui-ci
toujours est fini : c’est un de moins. Allons, conscrit . ton lit de plume
et ton traversin sont-ils prêts ? Tu peux faire ta prière , mon ami, ut
dire bonsoir à madame ta mère : nous allons nous coucher.» — F.t
comme il raillait, on traversait une ville, un hameau, un bourg,
suivant les temps. Ici, à la fenêtre du plus beau des hôtels , là , sur la
porte de la moins étroite des chaumières , la troupe voyait déjà arrivé,
déjà habilité , avec son uniforme de chasseur à la place de la redhi-
gotte grise , la culotte courte . les bas de soie blancs, les souliers à
boucles, toute la toilette des Tuileries enfin . l’empereur qui prenait
son tabac, montrait sa blanche main , donnait ses ordres au prince de
Ncufchutel pour les opérations suivantes et souriait ù la grande armée. |