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Nous voudrions, par conséquent, qu’il subit un
examen sur les sciences positives, au moins, et peut-
être même sur la partie artistique.
Quant à la première partie, nous croyons qu’il n’y
a point de difficultés et chacun admettra que les con-
naissances que 1 on pourrait exiger à l’examen soient :
les mathématiques, les éléments de la physique, de
la chimie, de la statique ; la connaissance des sols ;
la construction ; l’archéologie, l’histoire de l’art ; la
rédaction des devis ; l’administration et la comptabi-
lité. J ajouterai que l’architecte devrait être à même
de dessiner la figure, l’ornement et même à un certain
degré connaître le modelage.
Quant à la seconde partie, ou la question du senti-
ment, elle est sujette à discussion.
. nmis dira probablement que le sentiment indi-
viduel n étant pas le même, il serait peu prudent de
le mettre à 1 examen et que les concours publics en
fournissent le meilleur exemple, puisque souvent le
jugement ne répond pas du tout à notre attente. D’ac-
cord ; mais quelle serait donc l’idée des jeunes gens
qui envoient des projets (leur sentiment) aux concours
publics ; veulent-ils que le jugement soit possible ou
non? Dans la première hypothèse, tous ces jeunes
architectes, qui sont les travailleurs, doivent être
partisans de l’examen, même pour la partie artistique,
s ils prétendent être conséquents. Dans le cas où ils
croient à l’impossibilité de la question, pourquoi sou-
mettent-ils leurs projets à un jugement et pourquoi
crient-ils à 1 injustice, ce que nous entendons souvent.
Nous devons assurément admettre qu’il y a diver-
gence d opinions, comme dans toute chose, mais ce
que nous accepterions plus difficilement, c’est qu’un
jury refuse le titre d’architecte à l’auteur de projets
traités avec raisonnement et intelligence, quel qu’en
soit le genre, sous prétexte qu’il n’entre pas dans
ses goûts. Il nous semble qu’en examinant un projet
quelconque, on peut immédiatement voir si l’auteur a
fait ou non des études suffisantes en architecture.
Notre avis est donc, que la chose est possible et
nous laissons à des hommes plus compétents et plus
autorisés que nous, le soin de l’étudier, à l’effet de
mettre en pratique une vieille idée rationnelle.
L’avenir décidera.
Un abonné.
Note de la Déduction. Nous laissons intact l’article qui pre'cède et
qui nous a paru intéressant; nous en laissons naturellement la respon-
sabilité à son auteur.
Œuvres publiées.
Maison de commerce, boulevard central à Bruxelles. —
PI. 18, 19, 20,21 et 22.—Architecte Monsieur A. Samyn.—Cette
construction, élevée à l’angle du boulevard Central et de la rue
de 1 Evoque est, bien que de dimensions assez restreintes, l’une
des plus intéressantes des nouveaux boulevards. Elle se compose
d un rez-de-chaussée avec trois magasins, d’un entresol, de trois
étages, d un étage-attique et d’un ctage-mansard. La distribution
assez simple est cependant intéressante par le parti qu’a su tirer
1 architecte d’un terrain irrégulier et très-exigu (environ 130 mè-
tres carrés) pour le nombre de locaux qu’il (allait y installer.
Les façades sont très—intéressantes tant par le style que par le
parti pris d’accuser franchement la construction ; composées do
pierre bleue, de pierre blanche et de briques rouges, elles com-
prennent une façade à trois fenêtres, un motif d’angle avec logia
à deux étages et balcon à la terrasse; enfin d’une façade plus pe-
tite avec indication franche, par une sorte de tour, des entrées,
escaliers et couloirs.
Ces façades, bien qu’elles n’appartiennent pas exclusivement à
un même genre architectonique, ont un beau cachet d’élégance ;
elles sont sobres d’éléments, mais ceux-ci sont bien ordonnés,
sont bien tenus et chacun d’eux concourt à l’efïet de l’ensemble
qui est très-heureux. — Cette construction a d’ailleurs été primée
par le jury nommé par l’administration communale : elle a reçu
la douzième des vingt primes.
Maison Avenue du bois de la Cambre. — Pl. 27.—Architecte
fonsiem E. Flanneau. — C’est une petite maison d’habitation,
dans laquelle 1 architecte a su réunir tout le confort désirable et
un oertain dcgié de luxe ; rien ne manque à cette jolie habitation
bien qu elle ne soit composée que de souterrains, d’un rez-de-
chaussée, d’un premier étage, d’un étage mansard et d’un pavillon
contenant les cabinets de toilette et de bain. La façade est conçue
dans un bon style Louis XVI et, mérite que l’on méconnaît trop
souvent, elle est sans prétention et répond parfaitement à sa
destination : elle ne pouvait manquer d’avoir un certain ca-
ractère.
Pavillons et grille de l’entrée du Jardin Zoologique à
Bruxelles. —PL 32 et 33. — Architecte Monsieur G. Bordiaux.—
Ce motif se compose d’une grille principale formant l’entrée du
milieu, dessinée par deux piliers portant les appareils d’éclairage •
de chaque côté les entrées accessoires et à chaque extrémité un
pavillon. Ce qui frappe d’abord dans cette composition, c’est
l’harmonie de l’ensemble et la juste valeur des trois membres
principaux qui le composent, séparés par les entrées accessoires
que l’auteur a traitées très-sobrement, conservant ainsi intact tout
l’effet des pavillons et de l’entrée principale. Les pavillons sont
composés d’un socle en pierre de taille portant deux pilastres que
couronne un entablement orné d’une acrolère à jour. Les pilastres
et l’entablement forment le cadre de la façade qui est 'construite
en belles briques dont la teinte s’harmonise parfaitement avec
celle de la pierre. La façade est percée d’une fenêtre qui descend
jusque dans le lambris en pierre, dessinant des panneaux, qui
protège encore le bas de la façade.
La grille d’entrée principale avec ses deux piliers ajourés est
d’un beau caractère ; son dessein est riche et élégant.
L’Eglise de Jésus à Bruxelles,Saint-Josse-ten-Noode. —PL 34,
35, 36, 37, 38 et 39. — Architecte Monsieur L. Pavot.— Cette
église se présente dans des conditions toutàfaitanormales;elleest
entourée de toutes parts par les habitations voisines qui la déro-
bent presqu’entièrement à la vue. Cependant le fragment formant
notre trente-septième planche est visible heureusement, car c’est
une très-belle partie, d’un beau caractère, joignant le pittoresque
à l’harmonie do l’ensemble ; le pignon surtout avec la tourelle
élégante qui lui est accolée est d’un très-bel aspect.
Cette église, conçue dans le style ogival du commencement du
XIV0 siècle, a la forme d’une croix latine formant le chœur, sans
collatéraux, les transepts, la nef avec ses bas-côtés. Le chœur est
relié directement au couvent par un couloir, vers la gauche ; de
l’autre côté se trouvent la sacristie et, des deux côtés du chœur,
un escalier conduisant aux tribunes.
Chaque transept est percé d’une superbe rose à meneaux for-
mant l’étoile à cinq branches reliées à leurs extrémités par des
cercles quintilobe's ; chaque branche, à son extrémité, contient un
trèfle. La nef, les transepts et le chœur ont la même élévation et
sont percés de fenêtres semblables, d’un beau dessin, s’appuyant
sur un glacis à hauteur des bas côtés. Un triforium interrompu
circule autour du chœur et vient ingénieusement indiquer les tri-
bunes. Ce triforium est formé d’arcatures géminées et encadrées,
ornées de deux trèfles inscrits dans le trilobé de l’arcature, d’un
quatrefeuille dans le tympan et de deux trèfles dans les écoinçons
du cadre.
L’ensemble est très-beau, surtout dans la partie supérieure ;
dans la partie inférieure nons regrettons un peu le décousu amené
par les interruptions du triforium ; c’est, quoi qu’il en soit, une
belle œuvre, qui fait honneur an talent de Monsieur Pavot.
Projet d’une Justice de Paix. — PL 40, 41, 42.— Monsieur
Joseph Naert, de Bruges, architecte. — Cette œuvre fut couronnée
au concours d’arrondissement de 1866 et obtint le prix dit de
mille francs. Cette composition est très-remarquable par son carac-
tère d’harmonie parfaite entre tous ses éléments ; le plan est très-
beau parce que, simple de lignes, il est composé de locaux bien
place's, heureusement disposés et possédant entre eux cette valeur
relative qui font et la science de l’architecte et la beauté d’un
plan. Les coupes sont assez sobres, on sent à leur aspect général
que l’artiste se préoccupait et était pénétré du caractère de
sévérité et de grandeur que doivent revêtir les salles d’assemblée
d’un temple élevé à la Justice.
Les façades, traitées en style classique, sont très-belles de pro-
portion; l’élévation principale surtout,composée de deux ailes assez
simples, mais d’une heureuse simplicité, appuyant de chaque côté,
l’avant corps principal, formé d’un grand ordre dorique à fronton,
encadrant un grand arc porté par deux colonnes appartenant au
petit ordre général de la façade est d’un beau caractère : elle est
simple et grande.
L’ensemble est porté par un stylobate assez élevé formant les
souterrains.
Maison Bculevard du. Nord à Bruxelles. 1re Prime. —
PL 44, 45, 46, 47 et 48. — Architecte, Monsieur Henri Beyaert.
Cette œuvre importante, non par ses dimensions, mais par son
incontestable beauté, a obtenu la première prime au concours
ouvert par l’administration communale de Bruxelles pour les
constructions des nouveaux boulevards. Cette distinction n’a pas peu
contribué à animer les contradicteurs ; l’on a beaucoup jasé, nous
avons lu même dans un journal de province que l’œuvre do
Monsieur Beyaert, n’était que la copie naïve d’un pignon de Vre-
deman De Vries, dont la sculpture et l’ornementation, de caractère
néo-grec (?) bien que le jury n’ait voulu y voir que du style flamand,
avaient été confiées à un débarqué d’outre-Quiévrain. Celui qui est
l’auteur de ces lignes, n’est cependant pas le premier venu ; archi-
tecte lui-même, il a une certaine réputation ; mais ce n’était pas là
la réponse qu’il devait faire au jury, parce que sa maison, mi-
renaissance, mi-classique (ô amour de l’art flamand !) n’avait pas
été primée.
Dans ce genre de conteste beaucoup dire et beaucoup écrire ne
prouvent rien : c’est produire une œuvre à mettre en parallèle
qu’il eût fallu faire.
Monsieur l’architecte Beyaert est d’ailleurs suffisamment connu
pour que nous nous dispensions do prouver qu’il crée, qu’il
cherche, que c’est un piocheur et non un vulgaire copiste ; que
beaucoup de bavards seraient plus habiles en copiant quelque peu
sa façon d’être architecte.
Notre avis, à nous, est que la maison du Chat est une belle
composition qui a cette brillante qualité,Monsieur X.,d’être l’ex-
pression d’une pensée flamande, du xvie siècle pour le caractère de
l’ensemble, mais revêtue du sentiment, de l’esprit de notre siècle
pour les détails, c’est-à-dire exprimée avec plus d’élégance que no
l’eût fait, sans doute,Vredeman De Vries (qui vient faire, je ne sais
trop quoi, dans cette galère).
Mais, j’y pense,le petit Mercure de la Logia n’est pas Flamand!
et les caryatides...?
Ce qui est incontestable pour tous ceux que leur savoir et leur
amour sincère du beau seul inspirent, c’est que l’ensemble de
cette composition est l’œuvre d’une imagination riche, éclairée
par un goût pur; c’est que, pour ceux qui l’étudient consciencieuse-
ment, s’y découvre le travail d’un chercheur opiniâtre, dont l’es-
prit n’est pas tourmenté par la recherche de la bizarrerie, mais
bien par la pensée d’une ligne vraie, d’une forme pure et serrée,
de l’esprit architectonique enfin.
Voilà ce que nous croyons de cette œuvre, de celle page que
Vredeman De Vries eût signée des deux mains.
NOS EXCURSIONS.
C’est à la fin de juin dernier qu’eut lieu l’excursion
à leglise et au château de Grimberghen. Partis de
la place des Nations à neuf heures du matin nous
nous dirigeons pédestrement vers le lieu de notre
excursion en passant d’abord par Laeken. Nous avons
l’occasion, en faisant un léger détour, d’admirer de
l’extérieur le splendide jardin d’hiver que notre sou-
verain s’est dernièrement fait construire dans le parc
de son palais et dont l’achèvement est presque com-
plet. La hardiesse et la légèreté de cette énorme
cloche en fer ouvragé surmontée d’une coupole et d’une
couronne royale en font une oeuvre de grand mérite.
Je crois inutile et du reste hors du cadre de mon récit
d’entreprendre la description de cet édifice, que nous
aurons, je n’en doute pas, prochainement l’occasion de
visiter.
Après un voyage des plus agréables favorisé par un
temps magnifique, nous arrivons vers midi au village
de Grimbergen et nous jouissons enfin de la vue de
l’église, dont les masses imposantes et l’élévation
frappent tout d’abord. Ledifice en forme de croix
latine dont les transepts sont circulaires, a sa tour
adossée au chevet du chœur. La nef inachevée n’a pas
permis de construire le portail et la façade principale
qui est remplacée par un affreux pignon en briques.
A l’intersection des transepts s’élève un dôme assez
peu apparent couronné d’une lanterne éclairant la
coupole. Les façades latérales et les transepts flan-
qués de contreforts se terminant en petites volutes
et percées à une hauteur assez élevée de grandes
fenêtres cintrées sont d’un style sévère et très sobre
d’ornementation eu égard surtout à la profusion d’or-
nements qui couvraient les façades à cette époque. La
tour, malheureusement inachevée quoique déjà d’une
grande hauteur, présente une silhouette très agréable
avec ses contreforts sur l’angle terminés en larges
volutes sur lesquelles viennent reposer des colonnes
ioniques isolées, d’un très-grand caractère, suppor-
tant un entablement. L’ensemble de cette construction
qui date de 1648, quoique d’une grande simplicité,
est d’un grand effet et plait par la justesse de ses
proportions.
En entrant à l’intérieur nous sommes frappés de la
hauteur des nefs et surtout de la coupole, qui prise en
grande partie dans les combles des transepts, s’accu-
sait si peu à l’extérieur. Les vastes proportions du
chœur étonnent et ne font que trop ressentir le peu
d’importance de la nef privée de deux de ses travées
et de son portail. De larges arcades en plein cintre
supportées par des colonnes à cbapitaux coniques lar-
gement sculptés séparent la grande nef d’avec les deux
autres. Le chœur et le transept sont ornés de larges
pilastres corinthiens. Le vaisseau de l’église est cou-
vert par une voûte en plein cintre ornée d’arcs dou-
bleaux formés d’enroulements assez tourmentés.L’en-
semble de l’ornementation plus riche et moins sévère
que celle de l’extérieur charme et séduit d’autant plus
qu’une décoration aussi sobre qu’heureuse vient tem-
pérer la lourdeur du style de cette époque et en fait
habilement ressortir les lignes. Le maître autel d’un
superbe agencement, les stalles avec leurs colonnes
torses isolées, les confessionnaux ornés d’admirables
sculptures et de statues allégoriques d’une grande
expression ajoutent encore beaucoup à la splendeur de
l’intérieur.
Grâce à la bienveillante, obligeance d’un des reli-
gieux Prémontrés qui desservent cette église, nous
pouvons pénétrer dans la sacristie, vaste salle carrée
dont les murs sont recouverts sur toute leur hauteur
de boiseries sculptées dans le même style. Au fond se
trouve un siège abbatial également très orné. Le
plafond est décoré d’une fresque magnifique due au
pinceau du peintre Janssens d’Anvers et représentant
le couronnement de S, Norbert. L’ornementation de
cette salle trop somptueuse pour sa destination se prê-
terait beaucoup mieux à un salon ou à une salle de
réception qu’à une sacristie.
Ici se terminait notre visite à l’abbaye de Grimber-
ghen. Après avoir, du haut de la tour, contemplé le
magnifique horizon qui se déroulait devant nous et
aperçu dans le lointain les tours de Malines et de
Bruxelles, nous allons visiter le château.
Cette ancienne demeure seigneuriale de la même
époque que l’église est dans un état d’abondon voisin |