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VI
a lieu, que de s’encombrer d’une car-
gaison. La culotte de soie noire et les
six chemises de Sterne constituaient
peut-être une valise un peu mince pour
un touriste de sa force. Je connais un
homme de lettres fort distingué qui ne
voyage jamais, dit-il, qu'avec une che-
mise : celle qu’il emporte sur Je dos.
«Est-elle sale, je la donne aû garçon
pour boire, ajoute-til, et j'en achète
vite une autre.» C’est l’exagération du
système opposé à celui que nous pro-
scrivons. Rien de trop ni de trop peu.
En règle générale, quinze ou vingt kilo-
grammes, condensés, s’il se peut, en un
seul colis, pour moins de vigilance et
d'embarras, peuvent et doivent suffire
en voyage à tout réel besoin de l’hon-
nêle homme.
L'ulilité de cette légèreté d’allure
ressortira surtout en Belgique de la
réglementalion des chemins de fer,
dont les prix sont très-modérés, mais
qui ne passent aucuns bagages aux
yoyageurs.
Une autre recommandation que nous
ferons à nos lecteurs est celle de des-
cendre de préférence, si toutefois l’é-
lat de leur bourse n’y forme pas le
plus dirimant des obstacles, dans les
premiers hôtels et les plus famés (ils
seront indiqués ci-après pour chaque
ville). La dépense n’y est pas en géné-
ral beaucoup plus forte que dans les
hôtelleries de second plan, et la supé-
riorité du seryice y compense large-
ment la triste et d’ailleurs assez mi-
nime économie que l’on pourrai réa-
liser. Dans ces grands hôtels, qui se
recommandent en Belgique par une
tenue parfaite, il convient de préférer,
à moins d'empèchements privés, le
Succulent communisme de la table
d'hôte à tout autre mode, nécessaire-
ment plus cher, en revanche beaucoup
plus sommaire, de sustentation.
11 n’y a point à marchander dans ces
maisons recommandables et honora-
blement connues de toute l’'Europè
Yoyageuse. Les Anglais ont conservé
AVIS AUX VOYAGEURS.
de 1815, où, par manière de repré-
sailles, ils furent si bien accommodés
par les traiteurs parisiens, cette dé-
fiante habitude de s’enquérir, au dé-
botté, du prix de toutes choses, et j'en
ai vu n’oser avaler un œuf à la coque
avant de savoir à une mouillette près
ce quil leur en allait coûter. Je ne
conseille pas à mes compatriotes d’évi-
ter celle assez sordide manie; car je
ne pense pas que ce soit leur travers.
IL faut la réserver en tous cas, et pré-
cisément, pour ces mauvaises auberges
ou hôtels borgnes, où un voyageur de
quelque apparence est une rare proie
sur laquelle il peut bien arriver, en
effet, qu'on se rue, pour l’extraordi-
naire du fait, avec une certaine rage.
Raison de plus, entre vingt, pour éviter
ces mauvais gites. D'ailleurs, les hô-
teliers de Belgique, les bons, sont
les plus honnètes que j'aie encore ren-
conirés.
Je vous conseillerai encore, surtout
dans un pays où il y a tant d’églises et
de monuments à visiter, d’avoir tou-
jours grand soin de vous précaution
ner abondamment de moyennes et de
menues monnaies, sans quoi, dans
l'embarras des grosses pièces, vous
payerez involontairement double ou
triple du raisonnable pourboire: Je
sens que les portiers et les sacristains
belges vont, pour ce simple avis, vou-
loir comme un seul homme m’arracher
les yeux ; mais cela m'est égal, je ne
connais que mon devoir, et, si la vue
m'est arrachée, j'aurai pour moi ma
conscience el le calme de la vertu.
L'index alphabétique placé à la fin
du volume contient tous les renseigne-
ments utiles sur les hôtels, les maisons
de change, les monnaies, les voi-
tures , les cafés, les théâtres, etc., etc.
Ainsi disposés, ces renseignements,
auxquels les voyageurs doivent recou-
rir fréquemment, sont faciles à trou-
ver, el ne viennent pas interrompre la
partie historique et descriptive du
Guide. |