Full text |
Le Pi écîirscur.
chaude, a tiré un coup de pistolet sur sa femme et s’est ensuite donné
la mort. La blessure de cette dame est fort grave.
— Les journaux anglais publient une lettre «adressée par le lieu te-
nant Francis Rooke, officier de la marine royale au secrétaire de l’ami
raulé. M. Rooke était un des officiers du steamer Vdvenger, naufragé
sur la côte d’Afrique. Il est parvenu à gagner la terre sur une des i m-
barcations du steamer avec trois hommes de l’équipage seulement II
raconte que la frégate toucha le 20 à 10 heures du soir sur un banc de
corail avec une violence que ses mâts et sa cheminée furent renversés
et qu’il eut à peine le temps de faire mettre à la mer l’embarcation à
laquelle ses camarades et lui ont dû leur salut. Le capitaine et le maî-
tre d’équipage se trouvaient sur l’un des tambours au moment du
choc 11 résulte des détails que donne 51 Rooke qu’ihn’esl que trop pro-
bable que tous ceux qui se trouvaient à bord ont péri avec la frégate.
Xatice Itiogi'a]>liîciuc Mar Ahd-el-Hader.
(Suite.. — Voir notre n° d’avant-hicr.)
Abd el-Kader avait jugé le bey ; il avait vu sa peur à travers sa collè-
re. Hassan, suffoqué, vaincu, s’adoucit, mil les captifs en liberté, et
s’abaissa même jusqu’à les supplier, de ne point s’embarquer sans
avoir reparu au milieu de leurs tribus, pour leur montrer qu’ils se reti-
raient sains et saufs de cette entrevue.
Et, en effet, on les avait cru perdus ; jamais monarques voyageurs
ou exilés ne reçurent, en rentrant dans leurs Etats, d’aussi éclatants
témoignages d’affeclion.
Quelques jours après ils repartirent. Ils se dirigèrent vers Tunis où
ils furent cordialement accueillis par le bey ; puis vers Alexandrie, où
ils séjournèrent plus longtemp pour dilater leur âme et la tremper en
quelque sorte dans la grandeur de 51éhémet, élevé aussi sur une ruine
de l’empire ottoman,pour étudier les éléments de cette grandeur,se les
approprier et les appliquer un jour à leur tribus sauvages.
Sléhémet, intéressé comme eux à l’affaiblissement de la domination
turque, ne leur laissa rien ignorer de ce qu’il leur importait de con-
naître. Ils quittèrent le vice-roi, pénétrés de sis i,. Mes u tons, et che-
minèrent. en humbles pèlerins, vers les saints lie ix, a ia Mecque, à
Médine, à Bagdad, où ils fortifièrent leurs résolutions par ia prière.
lîn titre pour les braves vétérans de nos armées, c’est d’avoir assisté
aux grandes batailles de la révolution et de l’empire. Un titre non
moins glorieux et plus puissant sur l’esprit des Arabes, c’est d’avoir
visité en pieux pélérins les puits du Berd, d’Ismëol, le temple de la
Caaba, le miraculeux tombeau de Mahomet, réputé en équilibre dans
l’espace, comme les astres dans les cieux; les monts Ilira, Ohod, Arafat,
la vallée de Minha, tous les lieux foulés par legrand Prophète, par ses
grands aïeux ou ses principaux sectateurs, et qui ont été le théâtre des
plus notables événements de leurs vies.
Là. dans ces lieux sacrés, des missions divines sont quelquefois don-
nées aux pèlerins les plus fervents, et surtout les plus capables d’ajou-
ter à l’éclat et à l’empire de la religion.
Là, Slalndin et son fils, par leur dévotion profonde, édifièrent les in-
nombrables fidèles qui s’y trouvaient ; par les riches dons qu’ils firent
à tous les temples, ils furent déclarés aptes à entrer en communica-
tion directe, avec les saints du Paradis musulman.
Quant ils reprirent le chemin de leur patrie, ils y étaient déjà devan-
cés par le bruit des grâces célestes qui leur avaient été accordées. Un
pèlerin, revenu avant eux, avait apporté cette précieuse nouvelle aux
tribus et raconté que Slahomel était déjà apparu à Mahidin sous une
coupole de l’Almesdjid-Alahram, et leur avait dit :
« Ton fils ,ibd el-Kudcr sera le sultan des Arabes, et rompra le ioua des
tribus » r j y
Qu’On juge de l’effet de ses paroles sur des populations crédules et
opprimées.
L’élan fut immense.
Mahidin et son fils, à leur retour, durent le modérer les temps n’é
tant pas venus. Ces temps arrivèrent, mais il fallut donner une con-
tre-direction à l’ardeur des tribus.
Sans elles, le pouvoir turc venait d’être détruit, et elles se trouvaient
en Lice d’un autre pouvoir, les armes victorieuses de la France
Leur haine se tourna contre nous à l’instant, et la guerre sainte fut
résolue. Au moment de la commencer, un marabou rappela l'appari
tmn de la prophétie de Mahomet dans l’Almesdjid Alharam Un autre
ajouta que celle prophétie venait de lui être répétée à lui-mérae nen
dant une priere, par l’ombre de Muley Abd-el-Kader, et que ce grand
saint y avait joint des reproches : H ”
“ Pourquoi la parole du prophète n’est-elle pas encore accomplie ?
” Pourquoi le fils de Slahidin, honoré de mon nom. n’est-il pas encore
» votre sultan? C’est lui qui doit chasser les Français de votre navs ■
» qu attendez-vous ? » * 1 J ’
A cette nouvelle révélation. les chefs des tribus s’assemblent tien-
nent conseil et proclament Abd-el-Kader sultan des Arabes ' 1
La décision, cependant, ne fut pas priseà l’unanimité. Queloues
protestations même, inspirées sans doute par de secrètes prétentions
rivales, se produisirent avec une énergie imprévue.
Abd-el-Kader prit solennellement possession deson titre et ordonna
aussitôt une levée en masse. Partout on répondit à son appel et dès
que ses plus forts contingents furent arrivés, il se ruasur’la ville
ci Oran.
Son père, ses frères et Ben-Tami marchaient à ses côtés.
Le général Desmichels, heureusement averti à temps, vint l’attendre
hors de la place dans une position connue sous la dénomination de
Figuier.
Les Arabes se précipitaient sur les Français avec une épouvantable
furie. Nos baïonnettes croisées formèrent partout un mur de pointes
d’acier qui brisa leurs efforts et vainquis leur rage.
Le vieux Mahidin ne put être séparé un seul instant de son fils et le
jeune sultan fit personnellement des prodiges de bravoure et d’audace-
son cheval, couvert de sang, fut tué sous lui vers le milieu de l’action’
Abd-el kader, renversé, se trouva un moment d’autant plus exposé
que ses compagnons d’armes le croyaient mort et prenaient la fuite
Il fut sauvé par son nègre Ben-Abou, qui parvint à le relever et oui
lui présenta un nouveau cheval. Il s’efforça aussitôt de rallier les
fuyards, y réussit, mais ce fut pour se briser encore avec eux conlre
nos murailles de baïonnettes.
Plus de trois cents cadavres d’Arabes jonchaient le sol autour de lut
Le destin avait prononcé II fallut se résigner à la retraite Abd ef
Kader se retira en effet sous ses tentes, et le général Desmichels dans
la place.
Après un repos et une réorganisation de quelques jours, lesnltan des
Arabes fit une seconde irruption sur Oran, qui n’eut pas de meilleurs
résultats que la première. Slais Abd-el-Kader tenait à renouveler les
preuves de son courage pour affermir tout d’un coup sa jeune autorité
Il prévoyait même la possibilité de se faire passer pour invulnérable
s’il avait le bonheur de ne pas être blessé dans ses premiers combats’
Aussi, à cette deuxième action, dans un moment où les balles pleu-
vaieiit encore sur un point qui venait d’être abandonné par un groupe
d’Arabes, il s’y précipita seul, faisant caracoler son cbeval au milieu des
projectiles. Son burnous fut percé en dix endroits. Comme Napoléon à
Ratisbonne, il ne fut blessé qu’au talon. Surmontant la douleur, il
n’en laissa rien paraître. Personne ne s’en douta, on répéta partout
que les balles glissaient impuissantes sur son corps, qu’il était visible-
ment le favori du prophète, l’élu de Dieu même, aussi bien que des
populations qui l’avaient proclamé sultan.
Il ne lui fallait pas moins que ce prestige pour détruire la funeste
impresion de ses deux défaites, et môme d’une troisième qu’il essuya
encore, sur les bords de la rivière Salei, et où périt un de ses frères né
apres lui, le jeune Aly. ’
Abd-el-Kader avait trop de sagacité pour ne pas découvrir facile-
ment les causes de ses revers, dans le défaut d’organisation cl de dis-
cipline, des hordes qu’il commandait.
Une réforme était indispensable. Mais comment la tenter en face de
l’ennemi, avec des combats de tous les jours, qui ne lui laissaient pas
une heure de relâche ? Comment aussi changer, avec la célérité que le
besoin exigeait, des habitudes transmises de génération en généra
lion, et en quelque sorte ossifiées dans des brutes? Le temps un temps
bien long, lui était indispensable pour réaliser graduellement ses
projets. ’
D’un autre côté, les beys de Conslanline et deTittery n’avaient nas
reconnu son titre de sultan et s’efforcaient de miner son autorité
Jaloux et envieux, ils venaient même de s’entendre lâchement pour
l’attirer dans un piège et le livrer aux Français. ’
Que résoudre au milieu de ces complications et devant ce danger
nouveau? Abd-el-Kader déjoua les menées des traîtres en faisaient brus-
quement la paix avec le général Desmichels.
Le voilà donc maître de son temps et le consacrement tout entier à
consolider son pouvoir, à étendre encore son influence, à préparer
lentement les esprits à toutes les réformes praticables, à faire des ap-
provisionnements et des armemens de toutes sortes,enfin à tout orga-
niser pour des événements prochains et qui devaient êtresiextraordi-
naires.
Son père meurt. lien raît un saint qui est aussitôt universellement
vénéré; ce qui ajoute au respect qu’on lui porte à lui-même, ce qui lui
assure surtout un nouvel oracle toujours prêt à parler selon ses vues
dans les circonstances importantes.
Tout ce qui pouvait, en un mol, agir sur les esprits, Abd-el-Kader le
tenta pour se les attacher.
La vie, les actes de Napoléon,les ressorts qu’avait fait mouvoir l’em-
perenr pour toucher ou éblouir la multitude, lui étaient particulière-
ment connus.et il les imita dans plus d’une occasion en les appropriant
aux mœurs de ses Arabes.
On sait quels témoignages de douleur Napoléon fit éclater à la vue
de Lannes mourant au milieu des trophées d’Essling. Abd-el Kad- r té-
moigna la môme sensibilité à la mort, sur le champ de bataille,de quel-
ques-uns de ses guerriers. Il faisait solennellement transporter leurs
restes dans la plaine d’Eghris et frappait les imaginations par des
pompes prolongées.
Pour ne rien omettre de tout ce qui devait accroitre sa force dans
les nouvelles luttes qu’il se proposait d’engager contre nous, il visita
et étudia longuement toutes les positions militaires et les différentes
villes que le traité de paix lui avait livrées. Ici il élevait des redoutes,
là il créait une fabrique d’armes blanches et de fusils, ailleurs une fon-
derie de canons et des arsenaux. Partout il constituait des adminis-
trations régulières et en dirigeait lui-même les chefs, pour être mieux
secondé par eux, aux jours des grands efforts et des dangers publics.
Quelques-uns des siens, cependant, montrèrent peu de zèle ; il s’en
rencontra même qui osèrent tourneren ridicule ses efforts civilisa-
teurs, les signaler comme impies aux fanatiques du pays, et s’insurger
ouvertement contre l’autorité du novateur téméraire. Le courageux
émir n’hésita pas à accepter cette guerre intestine. Il eut recours à la
force, vainquit les rebelles et se trouve entraîné, en poursuivant le der-
nier qui lui résista, à porter les armes jusqu’au delà du Chétif, ce qui
lui était interdit par le traité
(ta suite à demain.)
LeUi'eg, sciences et nrts.
Les lignes qu’on va lire sont extraites de la Seybouse, journal de
Bone :
o La journée du 21 décembre 1847 est destinée à faire époque dans
l’histoire des découvertes. Ce jour sera marqué en lettres d’or dans
les annales de noire ville. Dans le courant de cette journée, à trois
heures de l’après-midi, la rade de Bone a reçu dans son sein le pre-
mier hydrostal ou sonde libre, sans corde, instrument précieux in-
venté par 51.1e capitaine Ferdinand.
L’hydostrat descend au fond de l'Océan, quelle qu’en soit la profon-
deur.el remonte de lui-même à la surface de l’eau,soit immédiatement,
soit après avoir séjourné au fond un temps limité et indique la profon-
deur exacte de la mer. Il descend également à une profondeur déter-
minée d’avance, sans aller au fond, et, arrivé à la couche d’eau qu’il s’a-
git d’explorer, il s’arrête et remonte comme dans le premier cas; it
peut, dans une môme immersion, explorer plusieurs couches succes-
sives en séjournant dans chacune d’elles un temps donné ; il s’arrête
avec la même facilité, dans son mouvement ascensionnel, pour redes-
cendre au fond.
» L’hydrostat, débarrassé de son lest, revient immédiatement à la
surface de l’eau. Ce mécanisme est tellement simple qu’une petite fille
de quatre ans, M11'Cipollina, qui assistait à la première expérience,
a fait faire à l’hydrostat son second voyage explorateur.
> 51. le capitaine Ferdinand met son invention à la disposition du
globe entier, sans réserve ni condition d’aucune espèce. »
— Dans les inhalations du chloroforme ou de l’éther, il y a altération
du sang, suivant les expériences faites sur les animaux vivants par M.
le professeur /tmussat. Voici comment ce savant s’est exprimé devant
l’Académie de Paris, dans sa séance du 27 décembre dernier.
« Soit avec le chloroforme, soit avec l'éther, dit-il, en observant atten-
tivement au moment où les animaux sont devenus insensibles, on peut
suivre graduellement les changements qui surviennent dans l’état des
vaisseaux et du sang ; ainsi l’artère est brune au lieu d’être rose-rouge,
et elle tend à se rapprocher de la couleur de la veine. A une période
très-avancée de l’inhalation, il y aurait une ressemblance complète
entre ces deux vaisseaux, si l’épaisseur de leurs parois était égale; ce-
pendant on les distingue quelquefois l’un de l’autre avec assez de peine.
Si on ouvre l’artère tordue, on voit s'écouler du sang brun, presque
semblable à celui d’une petite veine ouverte dans la même région. Dès
qu’on cesse l’inhalation, ces deux ordres de vaisseaux reprennent très
rapidement leur couleur normale ; le sang qui sort de la petite artère
redevient rouge, ce qui ne laisse aucun doute sur le phénomène.
On voit alors au voisinage de celte artère, deux nappes de sang
coagulé, l’une de couleur rouge-brun, formée par le sang qui s’est
écoulé pendant l’inhalation; l’autre de couleur rouge clair, formée par
le sang qui s'est écoulé lorsque l’animal respirait de l’air pur.
« Cette expérience doit être faite sur un chien de moyenne taille, et
non pas sur des grenouilles, des pigeons, des cabiais, des lapins, etc.,
dont les vaisseaux sont trop petits.
Cltroitifjuc jmlicinirc,
Une question usuelle, agitée souvent par la jurisprudence pratique,
est celle de savoir dans quelle mesure les maîtres sont responsables des
faits et gestes de leurs domestiques vis-à-vis des fournisseurs de leur
maison, et pour raison du prix de leurs fournitures.
Cette question a été encore soumise vendredi au tribunal de Paris,
M Carrié, secrétaire général du chemin de fer de Lyon à Avignon,
charge sa cuisinière, comme cela se pratique dans la plupart des mé-
nages parisiens, d’acheter elle-même chez les divers fournisseurs desa
famille, les objets nécessaires à la consommation de la journée. A cet
effet, il lui donne, chaque matin, l’argent nécessaire à cette dépense
Tout se passa d’abord régulièrement La cuisinière payait comptant
et se contentait de secouer légèrement l’anse de son panier; mais bien-
tôt elle prit tellement goût à la chose, que pour parvenir plus vite à son
but. elle imagina de prendre partout à crédit, et d’oublier ses mé-
moires.
Elle arriva, en effet, à s’économiser ainsi une somme assez ronde,
qu’en prudente et prévoyante ménagère, elle s’empressa de déposer à
la caisse d’épargne. Elle avait sans doute compté sur la longanimité in-
définie de ses fournisseurs ; elle se trompa, car un beau jour des plain-
tes parvinrent à son maître qui, sans s’abandonner à une coupable fai-
blesse, comme le font trop souvent les maîtres en pareil cas, livra la
coupable à la justice et la fil condamner à la prison pour abus de con-
fiance.
51ais l’affaire eut une autre conséquence. Les fournisseurs lésés par
l’infidélité de la cuisinière, prétendirent rendre le maître responsable
des détournements de sa domestique, et l’assignèrent devant le tribu-
nal, en payement de leurs fournitures.
M« de Jouy, avocat des fournisseurs, soutenait que le maître, ayant
profité des fournitures, en devait le prix.
Au nom de 51. Carrié. 51e Blot-Lequesne résistait à cette demande,en
faisant ressortir aux yeux du tribunal toutes les conséquences dange-
reuses.
Le patrimoine des maîtres se trouverait ainsi complètement à la dis-
crétion des domestiques. Ceux-ci n’étatent que les mandataires de
leurs maîtres, et comme tous les mandataires, ce qu’ils faisaient en
dehors de ce mandat était nul. Or, un maître ne donnait pas mandai à
sa cuisinière de prendre à crédit chez les fournisseurs , il voulait, au
contraire, qu’elle payât à ces fournisseurs comme il lui payait à elle-
même, tout comptant ; il ne pouvait donc être responsable des consé-
quences de la trop grande confiance que les marchands pouvaient
avoir eueen elle.
Le tribunal, adoptant ce système, a déclaré les fournisseurs non
recevables dans leur demande et les a comdamnés aux dépens.
Tribunal civil de la Seine (3° chambre). Présidence de M. Puissan.
— Un jeune homme de vingt-cinq ans, dont la tournure distinguée,
les manières de bonne compagnie et de langage élégant et choisi,révè-
lent beaucoup d’éducation,était traduit ces jour-ci devant la policecor-
reclionnelle sous prévention de vol. C’e jeune homme s’élail présenté
un matin chez un de nos auteurs dramatiques les plus connus, pour
solliciter quelques manuscrits à copier, l'homme de lettres, qui venait
de se lever, passa un instant dans un cabinet attenant à sa chambre à
coucher : le prévenu profita du moment où on l’avait laissé seul, et
s’empara d’une montre suspendue par sa chaîne â un clou près de la
ruelle du lit: L’auteur, après avoir congédié son visiteur en lui disant
qu’il n’avait aucun travail à lui donner, s’aperçut de la soustr action
qui venait d’être commise ; il s’élança dans l’escalier en criant : au vo-
leur ! et le prévenu n’était pas au bas de l’escalier, que déjà te portier
de la maison l’avait arrêté.
Le dossier qui concerne ce jeune homme est rempli de lettres adres-
sées à son juge d’instruction, etdans lesquelles, s'attaquant lourà tour
aux hommes et à la société, il leur rejette à la face la honte de son ac-
tion. Au milieu de ces lettres nous trouvons une pièce de vers, remar-
quable tout à la fois pour la pensée et par l’expression, et qu’on ne lira
pas sans intérêt :
J’ai failli ! Devant la justice
Je ne veux pas m’en excuser ;
Slais le malheur fut mon complice,
El c’est lui qu’il faut accuser.
Lorsque, mauvaise conseillère,
La Faim, fille de la Misère,
Vous fait sentir son aiguillon,
On sent tourbillonner sa tête,
El l’homme qui s’endort honnête
Souvent se réveille fripon.
Ah ! pour juges je vous récuse.
Hommes riches, hommes heureux...
Vous auxquels le ciel ne refuse
D’exaucer aucun de vos vœux,
Comprendriez-vous mon excuse ?
A vous tous, entourés d’éclat,
Dont la vie est douce et facile,
Vous qui possédez par contrat,
àlaison de campagne et de ville,
Solides rentes sur l’Etat,
Actions du chemin de Lille,
Et dont la main sans cesse empile
De ces chiffons signés Garat,
La vertu n’est pas difficile !
Mais qu'un beau jour la pauvreté,
S’attaquant à vos destinées.
Vienne, de ses mains décharnées,
Troubler votre rêve enchanté ;
Frissonnant des pieds à la tête,
Et sentant bondir votre cœur.
Vous verriez pâlir votre honneur
Comme au jour l’éclat d’une fêle !
De notre pauvre humanité.
Tel est le commun caractère :
Trop souvent on l’a constaté :
Quand nous lient la laide misère.
On peut dire : Adieu probité !
M. le président. — Prévenu, d’après tout ce que je lis dans volt
dossier, il paraît que vous avez reçu de l'éducation; on remarque sur
tout des vers dont la pensée et lés tendances sont déplorables, mais
qui, enfin, prouvent que vous auriez pu utiliser votre Lalenl.Commenl
est-il possible que vous vous soyez rendu coupable d’un vol ?
Le prévenu. — Mon Dieu ! Monsieur le président, c’est justement
mon éducation qui m'a perdu. Bien loin de moi la pensée d’en vouloir
à mon père de l’instruction qu’il m’a donnée ; sans aucun doute son
intention était excellente; il croyait travailler à mon bonheur. Mais,
simple ouvrier, ne devant me laisser aucune fortune, il n’a pas com-
pris que cette éducation serait pour moi une source éternelle de désen-
chantements et de malheurs. Il m’est impossible d'exercer un état
manuel; non pas que je dusse en rougir ; mais je n'en connais aucun.
M. le président. — Mais vous pouviez trouver des ressources da ns
votre éducation.
Le prévenu. — J’ai dirigé tous mes efforts vers ce but ; mais partout
j'ai trouvé encombrement et mauvais vouloir. J’ai fait plusieurs pièces
de théâtre; je lésai envoyées à divers directeurs, qui ne m'ont pas
même répondu ; j’ai déposé des articles dans la boîte de quelques jour-
naux, en sollicitant une petite part de collaboration : deux de ces arti-
cles ont été insérés, sans qu’on m’ait honoré d’une réponse.
M. le président. — Tout cela est très fâcheux, mais n’excuse pas le
vol que vous avez commis.
Le prévenu — Je le sais... Et cependant, si vous saviez dans quelle
position je me trouvais ! Je n’avais pas mangé depuis vingt-quatre
heures ; j’avais la tête affaiblie, perdue ; j’ai commis cette mauvaise ac-
tion poussé par je ne sais quelle fatalité et sans me rendre compte de
ce que je faisais... C’est ma première faute, ce sera la dernière, je vous
supplie. Messieurs, de me traiter avec indulgence.
Le Tribunal, attendu les circonstances très atténuantes de la cause,
condamne le prévenu à deux mois d'emprisonnement.
M. le président. — Le tribunal s’est montré très indulgent ; mais
n’oubliez pas qu’on ne doit jamais chercher à justifier un vol par des
théories ; il faut savoir résister à une mauvaise pensée; l'éducation
doit surtout servir à préserver l'homme de pareilles fautes ; plus on a
été bien élevé, plus on est coupable de s’y laisser entraîner.
Le prévenu salue le tribunal et surt vivement ému.
DERNIER COURRIER DE PARIS.
Paris, 9 janvier.
Nous marchons de révélations en révélations, et de turpitudes en
turpitudes. Les faits de corruption éclatent de toutes parts en le TVa-
lionai en cite ce matin un nouveau qui prouve jusqu'à quel point les
habitudes de corruption ont pénétré profondément dans (certaines
hautes classes de la société 11 s’agit de la formation d’une société en
commandite, sous la dénomination de Société générale des fabricant, et
ayant pour objet le prêt sur la consignation l'achat, la vente et l’é-
change de toute espèce de marchandises.
La société désirait composer son conseil de surveillance de person-
nes haut placées et son fondateur chargea une personne dont ia posi-
tion était considérable de s’occuper de la composition de ce conseil
c’est à celte occasiou que le fondateur reçut la lettre suivante que
nous croyons devoir reproduire.
A M. G.
* Paris,le 13 mai 1846.
» Mon cher Monsieur,
» Je me suis sérieusement occupé du conseil de surveillance de la
» Société des Fabricants Je me suis adressé spécialement à un magistrat
» d’une de nos hautes cours, que je sais engagé dans plusieurs entreprises
» industrielles-,je lui ai offert de se proposer lui mêmeet d’indiquer d’au-
» tres membres ; il m’a répondu qu’il se chargerait volontiers decom-
» poser parfaitement tout le conseil à la charge de ne pas y entrer lui-
» même. Mais en exprimant le désir formel d’avoir, par quelques aen’ons
• libérées, la récompense du service qu’il rendrait, que faire ?
» Il est certain qu’il vous donnerait des personnes parfaitement convena-
» bles.
» Tout à vous. »
Cette lettre n’est pas signée par une personne inconnue, mais par
M. Paul Royer Collard,doyen de la faculté de droitde Paris, chargé au-
jourd’hui par le ministère d’une mission en Italie.
— Un journal annonce qu’Abd-el-Kader a écrit au roi pour déclarer
qu’il renonçait à son projet de se rendre à Alexandrie, ou à St-Jean-
d’Acre et qu’il préférait rester en France.
— (tourne du (llmnnche, » décembre Tortonl. — Il se faisait fort
peu d’affaires à Tortoni. La vente était stationnaire. Le 3 0/o qui à fer-
me hier à 75-03 faisait 75-05 et demeure 73-71/2 offert. Pas d’affaires sur
chemins de fer.
Nouvelle* d'Espagne.
t
Madrid, 3 janvier.
Dans la séance de la chambre des députés, le ministre de commerce,
de l’instruction et des travaux publies, a donné lecture de deux projets
de loi sur les ponts et chaussées et sur les mines. Au départ du cour-
rier. on procédait aux opérations pour le renouvellement des bureaux;
on pensait qu’à la fin de la séance la chambre se réunirait dans ses bu’
reaux pour examiner la question ayant trait à l’accusation de l’ex-mi-
nistre Salamanca. Si les bureaux autorisent la lecture de ce document,
la lecture aura lieu dans la séance de démain.
On croit que les bureaux delà chambre autoriseront la lecture de
l’acte d’accusation contre le ministre Salamanca.
— Bouraede Mmlrid du a janvier.— Cours authentique3 p. c..
26 12 au compl., 27 à 50 jours; coupons détachés, après la bourse, 26
7/16 1,2 A. — 4 p. c-. 15 14 à 35 jours ; le 5 p. c. n’est pas coté ; après
la bourse, il a été négocié à 15 1/4 A. — Dette sans intérêt 5 1/8 P.;
après la bourse, 4 7,8 A. — Banque Sl-Ferdinand 123 P. — Banque
d’Isabelle n’est pas cotée. — Changes : Paris 5-14 P. Londres 48 30 P|
Héritières nouvelles d’Angleterre.
Londres, 8 janvier.
L’état de la situation de la Banque d’Angleterre au P janvier offre
une augmentation de 102,095 X sur la circulation des billets au por-
teur et de 166,724 sur l’encaisse en lingots et en numéraire. La réserve
a une augmentation de 21,284 X Les dépôts publics une diminution
de 224,410 X. Les dépôts particuliers une augmentation de 279,903 X.,
le tout comparativement au relevé de la semaine précédente.
— La faillite de la maison Colesworlh, Powell et Pryor, de Londres,
que nous avons annoncée il y a quelques jours.a entrainé celle de cinq
maisons de Glascow ; ces maisons sopt les suivantes : J. Anderson et
C % négociants ; W. et A. Taylor, manufacturiers ; M’Phail frères, fila-
teurs ; Gilmour et Kerr, aussi filaleurs, et T. Waddle, négociant. Le
passif de la maison Anderson et C' est évaluée à 170 000 X ; une autre
maison de Glascow,dont le crédit n’est pas compromis, se trouve pour
50,000 X dans la faillite de MM. Cotesworlh et O.
— La Galette de Londres, annonce que la cour prendra le deuil le 9
pour une semaine à l’occasion delà mort de l’archi-duchesse Marie-
Louise.
— Le paquebot à voiles le Yorkshire, arrivé hier à Liverpool, a ap-
porté des nouvelles de New-York qui ne vont pas au-delà de celles re-
çues au Havre par le Zurich. Le Yorkshire avait à bord 45,000 liv. en
espèces.
— Il n’est pas rare en Angleterre comme ailleurs de voir à côté
du luxe le plus somptueux une misère désolante. C’est ce qui a lieu à
Windsor, résidence de prédilection de la reine Sur une population de
10 000 habitants que compte cette ville il s’en trouve environ 4,000 qui
vivent des secours de la charité publique. Les aumônes delà reine con-
tribuent à soulager en partie ces misères.
— La commission spéciale siégeant à Limerick a prononcé dans sa
seconde audience, une condamnation à mort contre un nommé Ryan,
désigné comme le chef d’une ban le qui a jeté longtemps la terreor
dans une partie du comté parles assassinats et les autres crimes qu’elle
a commis. Ryan a protesté de son innocence et a demandé pour toute
grâce qn’on ensevelit son eorps à côté de ceux de ses parents. Dans la
, même audience la eour'a condamné à la déportation à perpétuité le |