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1840. — N.° 344
AM VERS, Mercredi f> Réeemiire
Cliieguièieic Année
LE PRÉCURSEUR
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9 décembre.
CHAMBRE DES REPRÉSENTANTS.
Dans la séance d'hier, la Chambre a adoplé deux budgets : celui de
la dette publique et le budget de la marine. La discussion de ces bud-
gets.quoique soutenue par plusieurs orateurs.a oflert peu d'intérêt. Un
article cependant a donné lieu à un débat dont nous devons dire quel-
ques mots. C’est l’article relatif au paiement de la rente annuelle au
profit de la Hollande, par suite de l'exécution du traité du 19 avril. M.
Delehaye a réclamé de nouveau contre ce droit; il a demandé qu’on en
suspendit le paiement jusqu’à ce qu’on ail obtenu satisfaction sur le
péage de cinquante quatre cents, établi sur le canal de Terneuse. H a
parlé d'autres réclamations encore.et notamment du séquestre des biens
de la Société-Générale. M. le ministre des finances a répondu que le
cabinet était en négociation avec la Hollande sur ces divers points ; il a
fait valoir l'inconvénient d’une discussion publique et de révélations
intempestives sur des matières qui se traitaient diplomatiquement; il
a ajouté enfin qu'il fallait, sous peine de voir les négociations inter-
rompues,laisser figurer cetarlicleau budget jusqu’à la conclusion pro-
chaine qu’il avait tout lieu d’espérer favorable. M. Meeus a souteuu le
sentiment et les assertions de M. le ministre.
Quant aux intérêts de la ville de Gand dans celte question, M. le
ministredestravaux publics a fait remarquer que. si les navires payaient
le droit de cinquante quatre cents sur la partie hollandaise, par com-
pensation ils ne payaient rieu sur la partie belge.tandis que les navires
qui sont dirigés sur Bruxelles ou Louvain, sont assujétis au paiement
des droits établis sur les canaux de ces villes. Cette même discussion a
fourni à M. le ministre l’occasion de rappeler que la commission d’An-
vers savait soutenir les intérêts de la navigation de Gand avec autant
d’énergie que les autres intérêts. Puisse cet exemple être suivi par
nos concitoyens gantois.
Les pétitions lues à l’ouverture de la séance, engageront sans doute
la Chambre à ne pas adhérer à l'établissement des nouveaux impôts
que le ministère a proposés. Les industriels de toutes les villes sont
unanimes contre des dispositions ruineuses pour leur industrie.
ISOLEMENT DE LA FRANCE.
En politique savoir attendre c’est comprendre; épier l’occasion, se
tenir en mesure de la saisir et d'en profiter c’est le principe et le fonds
de la science. Voyez comment, parmi les cabinets habiles, se conduit
le plus habile de tous, le cabinet de Saint-Pétersbourg. L’alliance de la
France et de l’Angleterre opposait à l’exécution de ses desseins un in-
surmontable obstacle. Durant dix années il s’est tenu en observation
des circonstances qui pourraient affaiblir cet obstacle. Le progrès de
la navigation à la vapeur; les avantages pour l’Angleterre de commu-
niquer avec ses possessions dans l’Asie orientale par un chemin plus
direct et moins long du Cap de Bonne-Espérance; le refus de Méhémet-
Ali de laisser donner au passage nouveau des têtes fortifiées et gardées
par les Anglais; la protection dont la France couvrait ies résistances
du vice-roi étaient des germes de discorde qui n’échappaient pas aux
regards de la Russie ; elle les a fécondés du souffle de son influence, et
voilà l’alliance anglo française rompue.
Le traité de Londres,dansses dispositions patentes porte qu’aucune
des puissances protectrices de la Turquie,ue pourra obtenir.pour prix
de son concours à l’exécution des mesures arrêtées eotr’elles aucun
territoire, aucun agrandissement nouveau. Il ne doit donc rien échoir
à l’Angleterre des dépouilles deMéhémet-Ali Mais occuper ce n’est pas
acquérir. Ne faut-il pas mettre garnison dans les places évacuées par
les Arabes ? Il y a des troupes anglaises à bord des bâtiments de l’es-
cadre. pourquoi ne s’en servirait-on pas pour former ces garnisons ?
Et quelle occupation plus naturelle pour les troupes stationnées dans
des places démantelées par le bombardement que d’en relever les fortifi-
cations? Et pendant qu’elles seront à l’œuvre quoi de plussimple, de
plus raisonnable que de construire toutes les fortifications nouvelles
qui seraient jugées propres à compléter le système définitif de ces pla-
ces ? Ne serait ce, en agissant ainsi, se montrer bon et utile allié du
sultan Abdul ?
Mais le moment de l’évacuation arrivant,l’Angleterre aura à réclamer
et le paiement des dépenses faites, par elle, pour tous ces travaux; et
le paiement des dépenses plus considérables que,seule,elle a faites pour
soulever et armer les montagnards de la province syrienne ; pour bom-
barder et réduire les places du littoral de celle province. Or, le sultan
de Constantinople ne manque pas seulement de soldats, il manque sur-
tout d’argent. El ce n’est pas du trésor de la Russie,du trésor de l’Au-
triche, du trésor delà Prusse qu’il en pourra tirer Quefera-t-ilou que
lui fera-t-on faire? Un journal hâlif, le Standart, vient de nous l’ap-
prendre; il donnera des gages; il laissera, à litre de dépôt, entre les
mains des Anglais Sainl-Jean-d’Acre ; il laissera file de Chypre où
une innocente relâche aura fait aborder leur flotte; et ce peuple qui
prend pendant la guerre, qui prend pendant la paix, les Anglais occu-
peront d'une manière permanente, comme dit le Standart. Acre et
Chypre; ainsi qu’ils occupent les îles Ioniennes, Malle et Gibraltar.
Un journal ministériel, le Globe, se récrie contre le dire du Standart,
non pas, croyez-Ie bien, parce que ce dire est un mensonge, mais par-
ce que c’est une indiscrétion, parce qu il déclare d’avat ce ce qui ne
devait être déclaré qu après. Celte déclaration anticipée est ud embar-
ras, mais ce ne sera pas un obstacle-
C’est là ce qui fait penser aux politiques à courte vue que par le
traité de Londres, la Russie n’a pas été moins trompée que la France.
Bonnes gens ! ils n’aperçoivent pas, au-delà de ces éventualités, pré-
vues et désirées,le prétexte et l’occasion qu’attend la Russie pour mar-
cher sur Constantinople, pour occuper le Bosphore et les Dardanelles,
pour se saisir enfin du débouché delà mer Noire et de ce quelle appelle
les clefs du grand empire des Czars!
Plusieurs années s’écouleront probablement encore avant l’accom-
plissement de cet événement; qu’importe, s’il est inévitable? la Russie
sait attendre. Mais pour elle l’attente n’est jamais oisive. Susciter à
l’Angleterre des guerres avec la France ou les Etats-Unis d’Amérique;
susciter à la France des guerres avec l’Autriche, avec la Prusse, avec
la confédération Germanique, ce sera le passe-temps de la diplomatie
russe. D’ailleurs ce passe-temps peut amener des circonstances, pro-
duire un état de choses qui permette aux armées du czar de se jeter, à
l’improviste, sur la proie qu’il convoite et de s’en rendre maître avant
que l’Europe soit en mesure de s’y opposer.
Voilà les deux grands sous-entendus des conventions de Londres;
pour l’Angleterre la route des Indes par la Méditerranée; pour la
Russie, Constantinople et son canal.
Il est deux autres sous-enteudus, l’un pour la Prusse, l’autre pour
l’Autriche.
Indépendamment d’un plus libre accèsdansla mer Noire par les voies
Danubiennes,la possession de la Servie, la possession de la Valachie et
peut-être celle de l’Alsace,et peut-être celle de la Lorraine sont les éven-
tualités dont la Russie et l’Angleterre bercent l’ambition Autrichienne.
Déjà, dans le partage en perspective des provinces françaises, une ga-
zette du royaume des Pays-Bas ne réclame-t-elle pas pour le roi Fré-
déric-Guillaume II, Anvers, Gand, Bruxelles ou plutôt toute la Bel-
gique; les forteresses de Lille, de Valenciennes et quelques-uns denos
départements du Nord?
Quanta la Prusse, dont on cherche l’intérêt caché dansles replis du
traité de la quadruple alliance, ceux-là saven loù il gtt, qui se sou-
viennent des propositions qui furent faites, des négociations qui furent
entamées sous le ministère Martignac. entre la Prusse, la France et la
Russie. Alors il était question de restituer à la France les provinces
rhénanes. La Russie, à qui la Turquie d’Europe était abandonnée, re-
nonçait aux parties de la Pologne dont elle avait été dotée par les traités
de Vienne; elle en faisait don à la Prusse et le dernier royaume de
Pologne, agrandi du duché de Posen, renaissait sous le sceptre de la
maison de Brandebourg. Celte maison s’arrondissait encore des pro-
vinces de la Saxe, dont la coalition n’avait pas, en 1815, achevé de dé-
pouiller le roi Frédéric-Auguste. Pourquoi ces arrangements, ou d’au-
tres analogues ne seraient-ils pas. en ce qui concerne la Prusse, la
partie secrète du traité du 15 juillet?
Mais l’accomplissement de si vastes desseins exige le concours de
tant d’intérêts, de volontés et de circonstances favorables qu’il rentre
dans la classe de ces futurs contingents dont l’aveugle fortune dis-
pose plus souvent que l’intelligence éclairée des hommes d’Etat.
Et d’ailleurs quelle puissance en Europe n’a pas ses entraves et ses
infirmités ?
L’Angleterre est sous la menace de la population catholique de l’Ir-
lande, de la population famélique de ses manufactures, et le cancer du
paupérisme lui ronge le cœur.
L’Autriche a ses populations slaves, ses populations italiennes et la
fièvre des réformes la travaille sourdement.
La Prusse a ses populations catholiques, son clergé catholique ; la
longue et étroite configuration de son territoire, ce qui l’a fait compa-
rer, par un écrivain, à un reptile dont la queue se baigne dans la Bal-
tique el dont la tête vient mordre la France au talon.
La Russie a ses populations polonaises el caucasiennes, sa vaste et
creuse étendue. Chez elle la race des Pugatschow el des faux Yvan
n’est pas si bien éleinte que dans des circonstances critiques il ne puis-
se en paraître quelque dangereux rejeton. Et n'a-t-elle pas aussi des
Orlowet des Palhen,p!us redoutables encore que les Yvan et les Pu-
gatschow ?
Un poète a dit ; Le temps présent est gros de l’avenir. La sagesse
des nations consiste à attendre que ses fruits viennent à terme.
Si, dans la position que les coalisés du 15 juillet lui ont faite, la
France résiste à l’impatience, qui est le grand défaut de son caractère;
si, se contentant d’organiser chez elle un bon système de résistance,
des landwehrs mobiles, des réserves de soldats déjà formés et non
pas, comme à présent, de conscrits à former ; si, restant dans ses
étroites limites, elle y co-ordonne ses énergiques facultés de la manière
la plus propre à en bien diriger l’emploi, l’isolement, qui parait l’af-
faiblir aujourd'hui, fera sa force au moment difléré mais inévitable,
du choc des intérêts russes contre les intérêts anglais. Plus long temps
la France se tiendra à l’écart de ce grand conflit, plus son intervention
sera décisive pour celui des deux intérêts en faveur duquel elle pren-
dra parti; plus les fruits de cette intervention seront pour elle im-
portants el nombreux.
NOUVELLES RU LEVANT.
Constantinople, 17 novembre. — C’est le 8 de ce mois, à deux heures
après-midi, qu’une estafette, venue en trois jours des frontières, a ap-
porté à l’internonce la nouvelle du changement du ministère français.
Ce diplomate se rendit aussitôt à la Porte et lit part à Reschid-pachâ de
cet événement, dans lequel on dût voir une assurance du maintien de
la paix. Le baron Sturmer en a informé également le corps diplomatique.
Le lendemain, il retourna chez le ministre des affaires étrangères et tra-
vailla avec lui pendant trois heures.
Un bateau à vapeur ta Marianne, arrivé le 11, nous a donné ta nou-
velle de la redditiondeSaint-Jean-d’Acre. Le capitaine Walker est venu
lui-méme présenter les clés de cet équivoque boulevart de la Syrie, au
sultan, qui l’a récompensé avec magnificence.
Le bruit court ici que les Anglais avaient gagné la garnison de St.-
Jean-d’Acre. Les véritables Turcs sont ici irrités de voir les infidèles
maîtres de ce point important; les partisans de Reschid et de Riza s’en
réjouissent seuls. Lord Ponsonby, notre véritable padisha, voyant que
le jour de l’arrivée de cette grande nouvelle, on ne préparait aucune
démonstration de joie publique, exigea que toute la ville fut illuminée
dans la nuit du lendemain, et que de nombreuses salves d’artillerie an-
nonçassent aux Turcs le triomphe des chrétiens. Le divan a obéi à son
véritable maître. Les illuminations ont eu lieu, les salves ont retenti, et
des bulletins qui rendent compte du fait d’armes chrétien ont été pla-
cardés partout.
Lord Ponsonby a dicté une singulière prière à Reschid, celui-ci vient
de supplier les alliés de ne pas se hâter de quitter les points qu’ils ont
conquis en Syrie, car il s’agit d’empêcher une réaction. On a remis au
sultan les 500,000 fr. qu’on a trouvés dans le trésor de Sl-Jean-d’Acre.
Ponsonby n’épargne rien pour prolonger l’occupation, lia ses vues,
L’ambassadeur français ne désespère pas encore, malgré tout ce qui
se passe, de conserver'l’Egypte au pacha ; il poursuit avec activité ses
négociations dans ce but. 11 a eu avant-hier soir une longue conféren-
ce avec le ministre des affaires étrangères.
L’emprunt dont je vous avais parlé n’aura pas lieu, caries conditions
stipulées ici n’ont pas été ratifiées à Londres.
Lord Londonderry, après s’ètre rendu auprès de tous les pachas de
la capitale, en vertu des lettres de recommandation du prince de Met-
ternich,a été présenté le 15 au sultan Le même jour, Sa Hautesse a reçu
lord Canning ; lord Ponsonby ne voit point avec plaisir la présence âe
ces deux personnages à Constantinople qui n’ont aucun rapport avec
lui ; leur haine mutuelle est l’objet de toutes les conversations.
Un détachement de troupes régulières envoyées d'ici pour aller
joindre le camp de Chypre, a égorge ses officiers, et après avoir débar-
qué aux Dardanelles, s’est dispersé dans la campagne. Des soldats ont
été dirigés contre eux.
Du 18 novembre. — Je r’ouvre ma lettre pour vous dire que M. de
Pontois a retardé d’un jour te départ du paquebot, à cause de ses dépê-
ches, que l’on dit fort importantes. (Sémaphore de Marseille du J.)
Alexandrie, 17 novembre.
La nouvelle de la prise de St-Jean-d’Acre n’a pas abattu le moral de
Méhémet-Aii. L’énergique vieillard, bien que livré intérieurement aux
plus pénibles anxiétés, et ne sachant rien de posotif touchant la situa-
tion d'ibrahim et de Soliman pacha, n’en a pas moins conservé sur son
visage cette sérénité, qui inspirait tant de confiance à ses sujets, dans
les plus beaux jours de sa grandeur et de sa prospérité. Il est toujours
fidèle à sa sympathie pour la France, malgré les déceptions dont il est
abreuvé. Les Turcs les plus fanatiques se montrèrent dans cette occa-
sion très dévoués à S. A., qu’ils regardent comme le défenseur de l’is-
lamisme, bien qu’on l’ait excommunié à Constantinople.
Du 1" au 15 novembre notre ville a offert un aspect militaire qui an-
nonçait une activité vraiment extraordinaire. Méliémet-Ali a paru sup-
poser un moment que l’Egypte allait être attaquée à l’improviste, et
qu’il voulait semettre à l’abri d’un coup de main. lia désigné à chacun
son poste en cas d’aggression, et l’on assure même qu’il a voulu se ré-
server un des plus importants pour le commander en personne. Lefait
est qu’il est partout, et comment pourrait-il n’être pas secondé, lors-
qu’on le voit, malgré sa barbe blanche et ses 72 ans, déployer une si
puissante énergie.
Les mouvements de troupes n’ont pas cessé hier et aujourd'hui. Ce-
pendant, l’on doit insister de nouveau aujourd'hui pour porter le vice-
roi à un arrangement.
Le blocus rigoureux doit toujours commencer le 21.
(Sémaphore de Marseille du 4.)
FRANCE.
DÉPÊCHES TÉLÉGRAPHIQUES.
Paris, 7 décembre 1840.
La dépêche télégraphique suivante a été reçue ce matin, 7décembre,
à neuf heures, par le gouvernement. Elle est parvenue j’usqu’à Lyon
par voie télégraphique ; mais l’état de l’atmosphère n’ayant pas permis
la transmission au-delà de Lyon, elle a été mise à la poste de cette der-
nière ville et est arrivée ce matin à Paris par le courrier.
Marseille, le 5 décembre, à quatre heures du soir.
Alexandrie, le 26 novembre.
Le consul-général à M. le ministre des affaires étrangères.
D’après une longue correspondance entre le commodore Napier et le
ministre des affaires étrangères de Méhémet-Ali, le vice-roi s’est décidé
aujourd’hui à accepter l’hérédité de l’Egypte seule, à rendre la flotte
turque et à évacuer la Syrie.
(Parvenue par le télégraphe jusqu’à Tours, et de cette ville à Paris
par la poste.)
Bayonne, le 5 décembre 1840.
Le sous-préfet à M. le ministre de l'intérieur.
Par décret de la régence, en date du 30 novembre, amnistie est ac-
cordée à tous les crimes et délits politiques commis depuis le 19 juil-
let 1837.
Les réfugiés carlistes, sauf pour le moment les chefs civils et militai-
res, les officiers et les ecclésiastiques, sont autorisés, sous la condition
du serment, à rentrer en Espagne par la Junquières et Caufranc.
Depuis que la Belle-Poule est arrivée à Cherbourg, il rège un grand
mouvement au ministère de la guerre et à l'état-major de la place, pour
la disposition des honneurs militaires à rendre aux restes mortels de
Napoléon. Voici comment l’armée sera représentée à cette grande so-
lennité : V assisteront tous les régiments faisant partie de la t™ divi-
sion, composée des départements de la Seine, de Seine-et-Oise et de
Seine-et-Marne. Quant aux autres divisions, elles seront représentées
par line députation de chacun des régiments qui y tiennent garnison.
Pour chaque régiment, chaque députation sera ainsi composée : un
colonel, un chef de bataillon ou d’escadron, un capitaine, un lieutenant,
un sous-lieutenant, un sous-officier, un caporal ou brigadier, et deux
soldats. Bien entendu, après le colonel, tous les autres grades seront
choisis parmi les plus anciens ayant la décoration. Ces députations, or-
ganisées par ordre de division, la première en avant, marcheront, avec
leur étendard en tète, sous la conduite des lieutenants-généraux com-
mandant les divisions auxquelles elles appartiennent. Indépendamment
de cette grande députation militaire, toute la garde nationale de Paris
et de la banlieue sera convoquée pour cette cérémonie nationale.
Voici, en outre, le résumé du programme concernant la marche du
char : Entête, la musique et les régiments de toute la 1™ division; der-
rière, suivront tout le clergé de la capitale, tous les vieux soldats por-
tant l'uniforme de l’empire. Après, les maréchaux de l’empire, faisant
escorte à l’épée impériale, aux insignes de la Légion-d'IIonneur, et aux
cinq Codes imprimés en lettres d’or. Viendront ensuite les pelotons de
la garde impériale, les drapeaux des députations militaires de chaque
divisions, les bannières des 86 départements, les écoles civiles et mili-
taires, le corps diplomatique, les chambres des pairs et des députés, le
conseil d’état et municipal, la magistrature, tout le barreau de Paris,
tous les savants, etc. Tel est, en abrégé, l’immense programme de cette
grande solennité nationale.
— C’est décidémentle Bequiem de Mozart qui sera chanté dans l’église
des Invalides le jour des funérailles de Napoléon.
La cérémonie aura lieu le 15 de ce mois. En peu de temps, toutes les
mesures ont été prises pour rendre l’exécution du chef-d’œuvre de
Mozart digne de la solennité. Il y aura cent cinquante chanteurs ; les
parties du quatuor solo ont été quadruplées et distribuées ainsi :
Soprani: Mmi>! Grisi, Damoreau, Persiani et Dorus-Gras. Alti: M»"'»
Pauline Viardot-Gareia,Eugénie Garcia, Albertazzi.Stoltz. Tenori : MM.
Duprez, Rubini, Alexis Dupont, Massol. tiassi : MM. Lablache, Tambu-
rini, Levasseur et Alizard.
Pendant le dernier convoi par eau, qui se fera de Maisons à Courbe-
voie, le 14, des marches militaires seront exécutées par deux cents mu-
siciens, sur un bateau que précédera celui qui doit contenir les restes
de l’Empereur. Le lendemain, des symphonies militaires accompagne-
ront le cortège, de Courbevoie jusqu’aux Invalides. La composition de
ces symphonies a été confiée, comme on sait, à MM. Auber, Halévy et
Adolphe Adam. Toute la partie musicale est organisée et dirigée par M.
Habeneck; c'est un hommage qu’on devait au célèbre organisateur des
concerts du Conservatoire.
Après toutes tes attaques auxquelles M. Thiers a été en butte, il a cru
ne plus avoir de ménagements à garder, et pouvoir faire connaître le
projet de discours du trône qui a été repoussé et qui a été le prétexte
delachûtedu ministère du Ur mars. Le Siècle publie aujourd’hui le
texte du travail de MM. Thiers et Rémusat. Nous y remarquons^beau-
coup de fermeté; mais nous devons ajouter que le langage qu’aurait
tenu le roi était à peu près le même que celui tenu par la chambre des
députés dans l’adresse tellequ’ellea été amendée et adoptée. Seulement
M. Thiers y faisait connaître que l’existence de Méliémet comme souve-
rain de l’Egypte était indispensable pour assurer l’indépendance et l’in-
tégrité de l’empire ottoman. C’était un casus belli que l'on n’a pas vou-
lu admettre, parce qu’on se serait créé de nouvelles difficultés, une fois
que le vice-roi aurait été chassé de ses états.
Voici le texte des paragraphes rédigés par M. Thiers pour te discours
du trône : . ,
« En vous réunissant aujourd’hui, j’ai devancé l’époque ordinaire de
la convocation des deux chambres. Vous apprécierez la gravité des cir-
constances qui ont dicté à mon gouvernement cette détermination.
» Au moment où finissait la dernière session, un traité a été conclu
entre la Porte-Ottomane, l’Angleterre, l’Autriche, la Prusse et la Russie,
pour régler le différend survenu entre le sultan et le vice-roi d’Egypte.
„ Cet acte important, accompli sans la participation de la France, et
dans des vues d’une politique a laquelle elle n’a point adhéré, pouvait,
dans l’exécution, amener de dangereuses conséquences.
i« La France devait les prévoir et se disposer à faire face à tous le* |