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1874-1875
No 4.
lre ANNÉE.
ABONNEMENTS :
Belgique.......fr. 25-00
Étranger.......fr. 28-00(leporten sus.)
DIRECTION :
Rue Cans, 22, Ixelles.
PUBLICATION MENSUELLE DE LA SOCIÉTÉ CENTRALE
D’ARCHITECTURE
— DÉPOSÉ — DE BELGIQUE — DÉPOSÉ —
ANNONCES ET RÉCLAMES
A FORFAIT.
S'adresser tue des Palais, 166
SCHAERBEEK.
RÉDACTION :
Rue des Quatre-Bras, 5, Bruxelles.
SOMMAIRE :
TEXTE. PLANCHES.
N°13. Coupe de la Galerie de l’Escalier de l’Hôtel-de-Ville de Bruxelles.
A nos Lecteurs. — l’architecture contemporaine dans les habitations. Suite
N° 14. Façade du projet de maison communale de Jemappes.
(voir le no 2).E. A.—L’Exposition nationale des Arts Industriels. E.A. No 15. Exposition des Halles.—Cheminée flamande par M. Tulpinckx.
— Nos planches. — Bordereaux de prix : Plafonnages et ornements. No16. Plans à divers niveaux du Marché du Quartier Léopold.
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— 20 —
— 21 —
Bruxelles, le 1er décembre 1874.
A NOS LECTEURS.
Nous avons publié dans notre troisième numéro la
sacristie de l’église du Finistère construite par l’ar-
chitecte Almain de Hase. Cette planche n’a pas ré-
pondu à notre attente. Le temps nous ayant fait dé-
faut pour la faire recommencer avant le 1er novembre,
nous joignons à ce numéro un nouvel exemplaire
que nous prions nos lecteurs de vouloir bien substituer
à celui qu’ils possèdent.
Nous saisissons cette occasion pour remercier nos
abonnés du bienveillant accueil qu’ils ont fait à notre
publication. Nous chercherons à la rendre de plus en
plus digne de sympathies, nous ne négligerons rien
pour atteindre ce but.
Le résultat dépasse de beaucoup notre attente et
nous sommes certains, avec l’appui que vient de nous
accorder le gouvernement en souscrivant pour un cer-
tain nombre d’exemplaires, d’avoir créé une oeuvre
durable.
L’architecture contemporaine
dans les habitations.
Suite (Voir notre second numéro).
Ce ne sera que lorsque nous serons bien pénétrés de
cette vérité, et lorsque nous aurons compris l’esprit et
les moeurs de l’époque, du milieu où nous vivons, que
nous pourrons sérieusement songer à atteindre à un
caractère, à l’originalité : d’ici là nous nous arrêterons
à l’étrangeté de nos constructions si nous ne tombons,
comme quelques-uns déjà, dans l’excentricité.
Si, comme art proprement dit, nous n’apportons dans
la construction de nos habitations que plus ou moins
d’habileté dans l’interprétation des styles européens d’é-
poques antérieures, la distribution de nos habitations
est certes une merveille d’ingéniosité comparée à celle
des habitations de nos ancêtres ; le confort et l’hygiène
président à son étude ; les considérations de chauffage
et de ventilation sont examinées avec soin.
Bien des considérations nous ont amené à donner à
nos habitations les dispositions quelles ont aujourd’hui ;
nos mœurs ont considérablement changé comme notre
esprit, depuis le temps, peu éloigné de nous, où nos
pères occupaient des logis composés le plus souvent
d une vaste salle au rez-de-chaussée dans laquelle on
pénétrait directement, et où se trouvait, apparent,
l’escalier raide et massif conduisant à l’étage.
Ces salles dont le plafond était peu élevé, n’étaient
le plus souvent éclairées que par une ou deux fe-
nêtres (1) ; une demi-obscurité y régnait sanscesse.Une
vaste cheminée occupait une grande partie de l’un des
côtés, cheminée couronnée par un immense manteau
dans lequel pendait la crémaillère et couronnant un
foyer spacieux où, sur le pavement, brûlaient sans
réchauffer quelque bûches retenues par les chenets.
L’étage, en encorbellement sur le rez-de-chaussée
et généralement construit en bois (2), était le plus sou-
vent moins agréable encore : la charpente, la lourde
charpente du moyen-âge, était apparente, les poutres
et solives étaient à découvert.
Le sol, au rez-de-chaussée et aux étages, était re-
couvert d’un pavement en carreaux de terre cuite ; la
toiture était faite en tuiles dans les habitations bour-
geoises, le chaume même était souvent employé.
Au quinzième et au seizième siècle tout le soin de la
décoration est apporté aux façades, au moins dans les
habitations ordinaires des villes, — le soubassement
était en pierre et, comme nous l’avons vu, portait en
saillie un ou deux étages, la façade était construite en
bois. Les pièces importantes étaient apparentes et
très-souvent décorées de sculptures très-curieuses.
Les vides étaient fermés par des planches posées
jointivement et clouées aux traverses.La façade, ordi-
nairement, était couronnée par un pignon, générale-
ment élégant et orné de sculptures ou de bois découpé.
Cette architecture d’un grand caractère était bien
l’expression de cette époque où la fortune, privilége de
la noblesse et du clergé, n’était pas comme aujour-
d’hui, subdivisée et répandue dans les masses. Le dé-
sir de confort et de luxe qui est si développé de nos
jours n’animait pas l’esprit de ces siècles, plongés en-
core dans l’ignorance.
Ce n’est guère que sous Louis XV que la civilisation
et le progrès pénétrant dans les masses amènent une
transformation complète des mœurs, de l’esprit, des
habitudes et par suite une révolution en architecture.
Sous Louis XIV déjà et avant lui sous François Ier l’on
vit l’architecture revenir aux idées du beau classique,
mais encore habituée aux écarts d’imagination qui
produisaient cette décoration excessive et étrange, elle
produisit ce style que l’on appela la Renaissance.
Toutefois ce mouvement ne se manifesta guère que
dans les édifices et les demeures princières.
Sous Louis XV se retrouvent encore ces formes
tourmentées, mais là avec ce caractère affété, guindé
qui caractérise l’esprit de cette époque.
Sous Louis XVI, le génie de l’architecture s’épure
(l) Jusqu’au treizième et au quatorzième siècle le verre à vitre, alors
épais et assez opaque, n’était pas d’un usage bien fréquent, l’on évitait
par suite le grand nombre de fenêtres.
(2) Jusqu’au milieu du seizième siècle. — Le 7 janvier 1567 parut un
édit des magistrats de Bruxelles défendant ce genre de construction.
Toutefois il existe à Ypres une maison portant le millésime 1575.
encore, se débarrasse de ce fatras d’ornements, de
formes contournées, d’erreurs enfin, qui ne servent
souvent qu’à cacher la pauvreté de la conception, et le
manque d’harmonie dans les proportions et les lignes.
La fin du dix-huitième siècle et le commencement
du dix-neuvième virent naître les splendides créations
où nous retrouvons enfin ces grandes conditions du
Beau en architecture, le rationalisme, l’harmonie, la
simplicité, résultat d’études sérieuses et approfondies.
C’est sous l’influence de cette époque remarquable
et qui certes est la plus belle depuis la grande époque
ogivale du treizième et du quatorzième siècle, que se
trouvent les architectes nos contemporains.
L’esprit de notre époque nous a prouvé toute sa vi-
talité, toute sa puissance dans les grandes inventions
qui suffiront peut-être à illustrer notre siècle, au point
de vue de la science.
Notre civilisation a fait un pas considérable sur celle
des siècles derniers ; les principes humanitaires se sont
puissamment développés au soleil de la liberté ; les
intelligences sont plus éclairées et l’instruction, be-
soin, nécessité plus urgente peut-être que la solution
de bien d’autres questions sociales, donne enfin aux
masses les forces nécessaires pour penser sans hési-
tation, pour étudier elles-mêmes les questions qui
les intéressent, les lois qui doivent les régir.
L’industrie a fait d’immenses progrès : la fortune
publique dont la conséquence naturelle est le dévelop-
pement du commerce et des arts-industriels, entraîne
le besoin de luxe et de confort qui appartient à notre
époque.
Aussi voyons-nous nos habitations complètement
différentes de celles dont nous avons parlé plus haut.
Avec l’accroissement de la fortune publique se produit
l’accroissement de la population de nos villes, accrois-
sement considérable qui rend nécessaire l’extension de
l'étendue de la cité, l’agrandissement et le développe-
ment des voies de communication ; l’élargissement de
ces voies, la création de places publiques, indispen-
sables au perfectionnement de l’hygiène de la ville.
De ces premières conséquences de l’accroissement
de la population et de leur cause même résulte l’en-
chérissement des terrains, la construction de nom-
breuses et nouvelles habitations, l’augmentation du
prix des matières et de la main d’œuvre et, par suite,
l’accroissement proportionnel de la valeur des pro-
priétés.
C’est ce qui a amené la construction de ces vastes
rues, de ces avenues larges, des édifices considé-
rables. C’est aussi ce qui a entraîné l’élévation de nos
habitations et la superposition de trois, quatre, cinq
étages.
Au lieu d’une habitation pour chaque famille, nous
avons aujourd’hui la maison occupée partrois, quatre, |