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LE PKECLltSECK, Sameili 7 Janvier &Hi&
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Barrot contre le ministère actuel. Cela est possible, mais le
malheur de la position de M.Thiers est précisément de marcher
à côté des partis et non plus à leur tête. Le sien même a mis
des bornes à sa docilité. Il reconnaît toujours à son chef cette
supériorité d’esprit, cette fertilité inépuisable de ressources,
cette variété de talents comme improvisés qui en font un
homme à part. Mais ils blâment la mobilité de sa politique, ses
impulsions utilitaires, son dédain pour certains principes que
les esprits vulgaires ont l’habitude de respecter. De plus, l'ex-
périence leur a prouvé qu'il s’attache peu à ceux qui le servent,
qu’il accepte le3 dévouements en oubliant de les récompenser;
ils lui reprochent de n’encourager que ses ennemis n’ayant
aucun repos qu’il ne les ait amortis par des faveurs. En un mot,
ils reconnaissent qu’il a tous les talents d’un chef de parti,
mais qu’il n’en a pas les qualités. Le charme d’esprit qu’il sait
attacher à tout ce qu’il fait, à tout ce qu’il dit, et les engage-
ments du passé sont aujourd’hui les seuls liens qui l’attachent
aux hommes intelligents de son parti. M. Thiers, je vous l’ai
déjà dit, est d’ailleurs tout occupé de sa mission littéraire. Il
veut finir son grand ouvrage qui doit lui donner 25 mille francs
de rente et une gloire plus douce, plus durable que celle de
remplacer M.Guizot. Il ne sera donc pas, d’ici à quelque temps,
candidat au ministère. Son rôle sera passif et observateur.
Tout l’intérêt de la guerre parlementaire sera concentré sur
la lutte des deux fractions du parti conservateur, aujourd’hui
bien séparées, et marchant sous les bannières hostiles de M.
Guizot et de M. Molé. Depuis leur scission, sous le ministère
du 6 septembre, ces deux hommes n’ont pu se rapprocher.
Aujourd’hui, d’adversaires qu’ils étaient, ils sont devenus com-
pétiteurs. Toute la portion des conservateurs qui se sent des
entrailles nationales, a rompu avec la politique de M. Guizot.
Les éloges, les ménagements peu ménagés de la presse anglaise
pour le ministre, sont regardés comme autant d’outrages à la
dignité française. M. Guizot, en faisant semoncer vertement la
presse ministérielle des départements, n’obtient que des éloges
insignifiants de sa politique intérieure. Quant à sa politique
extérieure, il y a refus de concours général, et pour peu qu’on
lise attentivement les feuilles de préfectures les plus dévoués,
on est surpris de tout ce qu'on y découvre d’amertume secrète
contre le ministre dirigeant, ou plutôt contre sa politique.
Voilà sous quels auspices la session se présente. Si le minis-
tère était habile, il saurait exploiter quelques circonstances
favorables, et profiter de l’indolence et du découragement de
la Chambre pour lui arracher un bill d'indemnité, ou tout au
moins un satisfecit plus ou moins sincère. 11 a compris, au sur-
Ïlus, qu’il ne pouvait reculer devant une épreuve décisive.
I s’est décidé à subir les débats d’une adresse. C’est là que l’at-
tendent toutes les oppositions réunis. Si M. Guizot traverse
sans encombre cette épreuve difficile, il n'y aura plus de chan-
ces hostiles à son maintien, que le caprice des hommes, ou
l’imprévu qui est toujours au fond ses choses humaines.
tCSSÈCE.
Salonique, 12 décembre.—D’après les nouvelles d’Athènes, Tossaminos
a laissé les finances de la Grèce dans le plus déplorable état ; les caisses
de l’Etat sont vides; le gouvernement ne pourra faire face à ses obliga-
tions, par exemple,au remboursement des coupons échus de la créance
de la Bavière. Un nouvel emprunt est donc indispensable,et l’on assure
que le Roi veut s’adresser à cet effet aux trois puissances qui ont ga-
ranti le premier grand emprunt de la Grèce. Les ministres ont été in-
vités à présenter sous peu leurs budgets respectifs. Le budget de la
guerre serait réduit, mesure qui pourrait compromettre la sûreté pu-
blique. Le représentant de la Russie montre le plus grand empresse-
ment à appuyer tous les moyens de remédier à cet état de choses. Le
motif de cet empressement pourrait bien être de paralyser ainsi l’in-
fluence française qui dans ces derniers temps avait un peu grandi.
(Gazelle de Cologne.)
ITALIE.
Des frontières, 25 décembre.— Selon des nouvelles de Naples, on at-
tend dans cette ville, aussitôt après l’échange des ratifications du con-
trat de mariage entre la princesse Thérèse-Christine-Marie de Naples et
l’empereur du Brésil don Pedro II d’Alcanlara, l’arrivée d’une escadre
amenant le fondé depouvoirs de l’empereur. Le mariage par procureur
se fera ensuite par l’entremise du comte de Syracuse, et le voyage a
Rio-Janeiro aura lieu immédiatement après. (Gazette de Cologne.)
Roue, 22 décembre. — L’heureuse issue de la guerre de l’Angleterre
avec la Chine, a ouvert à la propagande catholique un vaste champ
pour ses missions. On songe sérieusement ici à envoyer en Chine un
vicaire apostolique. Ce n’est point Rome qui a pris l’initiative de cette
mesure, mais ce sont les catholiques romains résidant en Chine qui se
sont adressés au pape pour avoir un vicaire apostolique.
On mande d’Aquila que cette ville a ressenti le 5 à 6 heures du matin
de fortes secousses de tremblement de terre.Aucune personne n’a péri,
et quelques maisons seulement auraient été endommagées.
(Gazelle d’A ugsbourg.)
ILLEHAGAE.
Leipzick,28 décembre. — Le nombre des étrangers qui arrivent en
masse à la foire dépasse déjà 24,000. Une maison anglaise achète ici des
masses considérables de draps qu'on suppose être destinées à l’expor-
tation en Chine. ^
Berlin, 27 décembre. — Notre bibliothèque royale à la tête de laquelle
se trouve depuis quelques mois l’éditeur des monuments de l’histoire
de l’Allemagne, le docteur Pertz vient de s’enrichir d’un trésor inap-
préciable. Il s’agit de l’arrivéede deux caisses de manuscrits sanscrits
our sa voiture, de môme le nègre anglais a contracté des habitudes de
ien-être extérieur plus confortables que le nègre français. Il est mieux
vêtu, il porte des souliers plus fréquemment. Depuis l’émancipation,
tout nègre anglais a été jalouxde se donner l’extérieur d’un gentleman.
Pour première preuve de son indépendance, il ne vous salue plus. Les
négresses libres,qui enviaient les habitudes des blanches,ont tenu à dé-
ployer de beaux parasols rouges. Elles en sont si enchantées.qu’elles ne
les quittent ni nuit, ni jour, je rencontrais en foule des négresses ou des
mulâtresses qui altaientaux meetings, ombragées sous d’immenses pa-
rasols.
Eh ! bien, tout est de même à Antigue; l’apparence du bien-éLre vous
saute aux yeux; la réalité se dérobe aux plus actives recherches.
A l’époque de l’émancipation, la loi imposa aux planteurs l’obligation
de nourrir les vieillards et les infirmes : c’était juste, puisqu’ils avaient
profité de leur travail. Mais la loi ne put pas leurimposer la nécessité de
nourrir et dévêtir les vieillards et les infirmes à venir. Cependant, les
colons, par charité, et pour s’attirer l’affection des noirs, nourrissent et
entretiennent les vieillards et les infirmes,que la loi n’avait pas prévus.
C’est évidemment une augmentation de salaire pour ceux qui travail-
lent, puisqu’ils auraient été obligés de prélever sur leur salaire les frais
de l’entretien de leurs parents. Si les colons ne faisaient pas cette cha-
rité aux vieillards, ils mourraient véritablement de faim.llssonl du
reste, dans une grande misère; la distribution qu’on leur fait chaque se-
maine,toute considérable qu’ellesoit pour les maîtres,I est Tort peu pour
eux; et ils sont infiniment au-dessous du sort des vieillards et des infir-
mes dans les colonies françaises. Il n’y a donc qu’un philanthrope qui
pût être étonné d’apprendre qu’une goélette appartenant à un négociant
delà Guadeloupe, et montée pardes noirs esclaves, s’étant rendue l’an-
née dernière à St-Jean d’Antigue, l’officier de la douane, grand aboli-
tionniste, vint abord, déclara aux esclaves qu’ils étaient libres, les en-
gagea à descendre à terre dans son canot, afin d’aller fraterniser avec
les émancipés de la ville; et que ces noirs esclaves l’envoyèrent prome*
ner avec sa liberté, et retournèrent à leur esclavage de la Guadeloupe,
qui leur donne du pain, un bon traitement, un avenir assuré, qui leur
laisse la faculté de se marier et d’élever leurs enfants; et tout cela pour
moins de peine que n’en prennent les ouvriers libres d’Europe.
Les enfants des noirs d’Antigueet des autres colonies anglaisessontà
la charge des parents depuis l’émancipation. Ces enfants vont tous dans
les écoles que la philanthropie leur alibéralement ouvertes.s’imaginant
que tout est dit pour le bien-être du peuple lorsqu’il sait lire, écrire et
compter.Les écoles pullulent à Antigue.A Saint-Jean et à English-Har-
bour,ily ace qu’on nommeune Ecole Nationale, divisée en deux gran-
des sections, pour les garçons et pour les filles. Puis, auprès de chaque
église et de chaque chapelle, il y a des écoles libres, Free Schools. Joutes
qui ont appartenu au savant Robert Chambers, et que nous devons à la
munificence du roi. Le roi a en effet donné des ordres nécessaires pour
en faire l’acquisition pendant son séjour à Londres. Cette collection ri-
che surtout en manuscrits relatifs aux Vedas et aux Upanishads, et qui
aurait coûté à feu sir Robert Chambers 20,000 livres sterling aurait été
acquise au prix inconcevablementmodéré de 0000 lhalers. Cette acqui-
sition est d’autant plus honorable pour nous, qu’aucune des universités
de la Prusse qui possèdent pourtant des savants très versés dans la con-
naissance du sanscrit,et môme de l’Allemagne,à l’exception decellede
Tubingue peut-être,ne possède aucune collection de ce genre. Les col-
leclionsde manuscrits sanscrits des bibliothèques de Sl-Pétersbourg et
de Copenhague ne viendraient qu’a près la nôtre qui ne serait inférieure
qu’à celles de Londres, d’Oxford et de Paris. Le docteur Hôfer, savant
philologue de l’université de Greifswald est chargé de les classer et d’en
faire le catalogue. (Gaz. Unie, de Leipzick.)
Venise, 25 décembre.— Le capitaine anglais Bloomfield est arrivé hier
ici accompagné de deux autres personnes. Il a été envoyé par son gou-
vernement pour faire son rapport sur l'Etat des roules de la Bavière,du
Tyrol, etc., et pour faire en déterminer la durée du voyage de Londres
à Trieste, afin de pouvoir par suite établir un service pour le passage
de la malle-pcfste de l’Inde à travers l’Allemagne. M. Bloomfield s’est
montré très satisfait des résultats obtenus. Il fait surtout l’éloge de l’or-
ganisation des postes et de l’état des routes des provinces autrichiennes,
lia fait tout le voyage de Londres à Trieste,par Ostende,Cologne,Franc-
fort, Munich, Augsbourg,Innspruck, etc., en 155 heures 25 minutes. On
voulait établir une correspondance d’Alexandrie à Londres en 11 jours
et demie ou en 12 jours; ce problème serail à présent complètement ré-
solu, et il y aura encore une importante économie de temps, lorsque les
chemins de fer projetés seront exécutés: nous pourrons donc nous at-
tendre à ce que la malle-poste de l’Inde traverse bientôt l’Allemagne. A
la vérité, il n’existe pas encore de télégraphes sur cette roule; mais le
télégraphe français a jusqu’à présent fait plus de tort à l’Angleterre qu’il
ne lui a procuré d’avanlage. (Gazette d’.4ugsbourg.)
ESPAGNE.
Perpignan,2 janvier.
Le général Seoane a annulé,le 29,1a répartition de la contribution de
guerre faite par la municipalité,comme ne portant que sur les modérés,
étrangers au mouvement. Le commerce en soldera la moitié, les contri-
buables, l’autre. Le paiement devra être effectué le 5. (Messager.)
— Nous trouvons les nouvelles suivantes dans £1 Constitucional de
Barcelone du 30 :
Plusieurs consuls étrangers de Barcelone ont été féliciter hier le gé-
néral Seoane. S. Exc. a manifesté les bons sentiments qui l’animaient,
et il a ajouté que jamais Barcelone n’aurait plus à déplorer les malheurs
comme les calamités actuelles.
Zurbano est arrivé à Figuières et il a désarmé la garde nationale. En-
suite, à un signal convenu, les soldats des deux bataillons ont gardé
toutes les issues des maisons. Des carabiniers des finances sont arrivés
presqu’aussilôt et l’on a commencé à vérifier s’il se trouvait des objets
de contrebande dans les maisons.Ceux qui ont été trouvés ontété livrés
aux flammes sur la place publique. On eût dit un immense incendie.
L’état de siège est accompagné de certaines cérémonies qui, bien
qu’insignifiantes, provoquent unerépugnancegénérale.Nous nesavons
pour quelle raison on empêche le libre passage par les portes de la ville,
et les factionnaires onL ordre de faire retirer le manteau à tous ceux qui
passent.
Entr’autres bruits que les propriétaires de certaines fabriques dési-
reux de se concilier l’affection des prolétaires ont fait récemment courir,
est celui-ci : La Reine Christine, dont les événements de Barcelone ont
navré le cœur, veut donner un million de réaux pour réparer les con-
séquences désastreuses du bombardement.
Antonio Giberga,député provincial,qui allait être incarcéré par suite
des derniers événements, a été rendu hier à la liberté. Manuel Gibert,
a été également mis en liberté.
Madrid, 30 décembre. — Le Régent a quitté le 28 Valence; il couchera
demain à la résidence royale d’Aranjuez, et fera son entrée dans la ca-
pitale le 1« entre midi et une heure. On ne fera aucune réjouissance
publique; la garde nationale défilera devant le palais où le Régent se
rendra immédiatement après son arrivée pour présenter ses hommages
à la Reine et à la princesse. Les habitants qui voudront illuminer le fe-
ront, mais il n’y aura point d’illuminations générales.
Tontes les affaires sont en suspens jusqu’à l’arrivée du régent. On ne
peut que former des conjectures : celle qui est la plus accréditée relati-
vement au ministère, fait présumer qu’il sera seulement modifié,etque
MM. Rodilet Capaz continueront d’en faire partie en s’adjoignant qua-
tre collègues pris dans la majorité du Congrès. Ce nouveau ministère
aurait quelque chancç d’obtenir le budget et quelques lois importantes.
Les nouvelles des provinces continuent d’annoncer partout une grande
tranquillité. On croit que les Cortès seront convoquées pour le 10 de ce
mois.
— Dimanche prochain. le régent arrivera ici. Le conseil des minis-
tres, voyant que la municipalité ne faisait aucuns préparatifs pour re-
cevoir S. A., a fait venir le premier alcade et l’a invité à faire ordonner
des fêles comme celles de Valence et autres villes. L’alcade a répondu
qu’il ne pouvait rien décider etque le conseil municipal manquait d’ar-
gent. Enfin, il a été décidé que la milice nationale devant se réunir di-
manche pour recevoir les drapeaux,on profileraitde cette occasion pour
former la haie. On invitera aussi les habitants à i\\uminer.(Castellano.)
— Le général Rodil écrit du quartier-général de Valence, le 27 dé-
cembre. que les habitants de celte ville continuent à manifester le plus
grand dévouement pour la personne du régent, qui a visité les hôpitaux
et plusieurs établissements publics. (Gaz. de Madrid.)
— On écrit de Valence, du 26 décembre, au Corresponsal :
« Le Régent, dans son discours adressé à la députation provinciale,
» a dit que le drapeau par lui soutenu, et pour lequel il avait versé son
» sang, était celui de la liberté et de l’indépendance de la patrie, du
» trône, de la Reine et de la Constitution de 1837; voilà, a-t-il dit, le
» drapeau pour lequel il serait prêt à faire mille fois le sacrifice de sa
» vie et de ce qu’il estimait plus encore, son honneur. Mes inspirations,
» a-t-il ajouté, tendent à élever ma patrie au degré de grandeur et de
» pouvoir qu’elle doit avoir dans le monde. Dans vingt-deux mois, je
» remettrai à S. M. les rênes de l’Etat, et je laisserai la nation grande,
a libre et heureuse, pour me retirer dans le foyer domestique, confondu
« avec mes concitoyens, et pour y vivre avec le modique bien apparte-
» nant à ma femme. Que me faut-il de plus? Je ne suis qu’un soldat
» sans ambition; mais pour arriver à compléter mon œuvre, j’ai besoin
» de compter sur la coopération des autorités, etc. »
Le chef de la députation provinciale a répondu au Régent, et celui-
ci dans sa réplique, a déclaré « qu’à l’époque île la convention de Ber-
n gara, il avait pu ajouter à sa couronne une petite feuille de laurier ;
n mais, a-t-il ajouté, j’ai un grand cœur, et tout ce que j’ambitionne
ces écoles sont sous la direction et la surveillance du clergé anglican.
Les missionnaires Moraves et les MéthodistesWeslèyens, ont également
ouvert des écoles. Ils dirigent surtout des écoles du dimanche et des
écoles du soir, pour les enfants des deux sexes, dans les villes et à tou-
tes les stations qu’ils ont formées sur divers points de la colonie.
Dans toutes ces écoles, on apprend aux enfants des nègres libres à
lire la Bible et à chanter des cantiques; mais on ne leur apprend pas à
travailler,au contraire. Les colons ne trouventque très difficilement,et
quelquefois ils ne trouvent pas du tout, eu payant, des enfants pour
garder les bœufs et les moulons. La grande idée que les philanthropes
ont donnée aux nègres de l’indépendance et de l’éducation übéralea
dépassé le but; ils éloignent leurs enfants de l’agriculture; et les sectes
contribuent également à ce discrédit du travail manuel, par l’impor-
tance exagérée que la rivalité leur fait donner à leurs meetings et à
leurs exercices. Fendant que j’étais à Antigue, une négresse rapporta
que ses enfants étaient revenus de l’école, en disant que désormais ils
ne serviraient plus les blancs. Interrogés par elle sur la source de ces
maximes nouvelles, les enfants répondirent que le maître les leur avait
enseignées. Ce maître d’école fut traduit devant les magistrats; mais la
négresse confrontée avec lui, varia dans ses dépositions ; et le maître
d’école fut renvoyé de la poursuite. Toujours est-il queles écoles actuel-
les d’Antigue élèvent une génération de nègres qui seront bons à être
chantres de lutrin; mais celui-là sera bien habile qui décidera ces nè-
gres beaux esprits à devenir laboureurs.
Il est bien évident qu’avant l'émancipation, les hôpitaux et les asiles
pour les orphelins étaient inconnus, puisque les malades, les infirmes
et lesorphelins étaient soignés et entretenus sur chaque habitation. La
loi d émancipation a bien obligé les maîtres à faire soigner les ouvriers;
et ils ont tous avec un médecin un abonnement qui s’élève générale-
ment à douze cents francs par habitation; mais beaucoup de nègres ont
quitté leurs maîtres et se sont retirés dansles villes, et il est dès-lors
tout simple qu ils n’aient plus droit aux soins d’un médecin, en retour
de services qu’ils ne rendent plus. On a donc été obligé de construire
des hôpitaux pour les malades pauvres, et des refuges pour les enfants
abandonnés. Ça été là le premier établissement public nécessité parla
liberté Ces hôpitaux et ces asiles sont comme ceux de Londres et des
autres villes d’Angleterre, c’est-à-dire soutenus par des libéralités par-
ticulières, et ils ne coûtent rien à la caisse coloniale.
Il n’y avait pas non plusde mendiants dans lescoloniesanglaisesavant
l’émancipation, par la raison bien simple que chaque noir était néces-
sairement nourri et entretenu par son maître. Depuis l’émancipation,
il y à beaucoup de pauvres vivant d’aumônes particulières, organisées
par des comités; mais il n’a pas été possible aux autorités de la colonie
de me préciser le nombre de ces pauvres. La mendicité, produite par
» c’est l’indépendance et la liberté de ma patrie. Je suis Régent par la
» volonté formelle de la nation, et dans vingt-deux mois je remettrai,
» à qui de droit, les rênes de l’Etat. »
Deux ou trois fois le Régent, en parlant avec une sensible émotion ,
a porté son mouchoir à ses yeux. Il a ensuite, de son balcon, assisté au
défilé de la troupe. Le soir, il s’est rendu au théâtre, où il lui a été fait
une bonne réception. Le bruit à couru que Valence allait être grevée
de 4 millions de contributions pour réédifier la citadelle. On parle aussi
du décret de dissolution des Cortès, censure, etc.
FRANCE.
Paris, 5 janvier. — Nous devons rectifier une erreur que nous avons
reproduite, comme tous les journaux, d’après les feuilles du soir. On
avait annoncé que le consul anglais à Barcelone était présent au ban-
quet offertà M. de Lesseps par les autres consuls; il parait.au contraire,
que le consul d’Angleterre était seul absent. (Journal des Débats.)
— Plusieurs journaux annoncent ce matin que M. le garde-des-sceaux
a éprouvé une attaque d’apoplexie et qu’il est gravement indisposé. M.
le garde-des-sceaux n’a éprouvé autre chose qu’une hémorrhagie, qui
s’est renouvelée, il est vrai, deux ou trois fois, mais qui n’a présenté
aucun caractère inquiétant, et n’a pas même empêché M. le ministre
desortirhier et aujourd’hui. (Idem.)
— L’effectif de l'armée sera mis sur le pied de paix. On assure que des
ordres sont déjà donnés pour le renvoi de la classe de 1837. On parle
aussi de réduire tous les régiments d’infanterie à 1,800 hommes. L’ef-
fectif actuel de chaque régiment est de 2,200 hommes.
— Voici quel a été le résultat des travaux accomplis par les presses
parisiennes en l’année 1842 : il a été imprimé, publié et déposé à la di-
rection de la librairie 6,445 ouvrages de toute espèce écrits en langues
mortes et vivantes; 1,941 estampes, gravures et lithographies,et 395 ou-
vrages de musique. Total, 8,781 ouvrages déposés.
— On écrit de Granville, le 24 décembre.
a Soixante-dix bâtiments, jaugeant ensemble 10,600 tonneaux, mon-
tés par 1,316 hommes d’équipage, ont été expédiés de ce port, en 1842,
pour la pêche de la morue au Grand-Banc et à la côte de Terre-Neuve.
La conservation des poissons apportés par ces bâtiments a exigé l’em-
ploi de près de sept millions de kilogrammes de sel neuf. Quelques
chargements de morues ont été perdus ou avariés, du ressel ou sel im-
monde ayant été employé pour leur préparation. En somme, les résul-
tats généraux delà pêche peuvent être considérés comme favorables
cette année.
» Sur les 70 bâtiments partis de Granville, 52 y ont effectué leur re-
tour; 15 ont abordé dans les ports de la Manche du S.-E. et de la Médi-
teranée; enfin, 3 ont péri: ce sont VArthur, la Suzanne et le François
1er. Les deux derniers se sont perdus, l’un au Grand-Banc, l’autre à la
côte de Saint-Pierre. La mer renferme dans la profondeur de son sein
le secret du sort de l’Arthur et des 19 hommes qui le montaient. »
— Il résulte du bilan et du compte-rendu des opérations de la Banque
de France, publiés par le Moniteur, qu’en 1842 cet établissement a es-
compté des effets de commerce montant à 501 millions 375,702 fr. 98 c.
Elle a avancé sur effets publics 26 millions 22,802 fr. 24 c.; sur lingots et
monnaies, 15 millions 701,200 fr.; sur bons de la Monnaie, ! million
754,600 fr. Les comptoirs et escomptes d’effets de commerce et avances
sur rentes ont fait un mouvement de caisses de 130 millions 465,000 fr.
Les bénéfices de la Banque de France et de ses comptoirs ont été de 4
millions 909,326 fr. 29 c., déduction faite de 5,907 fr. 48 c., balance en
perle des opérations du comptoir d’escompte de Caen, et 562,634 fr.
12 c., montant des dépenses d’administration.
— Bulletin île la bourse. — La bourse a été complètement nulle et
sans affaires. On remarquait une disposition générale à la baisse sur la
plupart des valeurs. On s’occupait beaucoup aujourd’hui des paiements
de la dernière liquidation, qui se sont opérés assez facilement. La rente
3 p. c. a ouvert à 79, et elle a fléchi à 78-85; elle reste à 78-90. La rente
5 p. c. a fléchi de 119-95 à 119-85 La rente active d’Espagne était offerte
à 24 3[8,114 ; la passive faisait toujours 4, mais ce cours était nominal.
Le 5 p. c. belge a fait 103 3[4; l’emprunt de 1840 104 3j8; la Banque de
Belgique 770. Les autres valeurs ne donnaient lieu à aucune affaire.
BELGIQUE.
Bruxelles , 6 janvier. — Le premier bal donné jeudi à la cour a été
des plus brillants. Les invités étaient au nombre de 600 environ ;lecoup-
d’œil des salons n’a cessé d’être très animé. LL. MM. sont entrées dans la
salle du bal, et les danses ont commencé aussitôt. La majeure partie du
corps diplomatique, les ministres, les diplomates belges à l’étranger, en
congé à Bruxelles, des représentants, des sénateurs, les hauts fonction-
naires civils et militaires, des membres de l’état-major et des officiers de
la garde civique des officiers des régiments en garnison dans la capi-
tale, quelques artistes, des hommes de lettres, assistaient à cette fête.
Les dames semblaient avoir voulu renchérir encore sur l’éclat de tous
Ipsbals passés, par l’élégance et la splendeur de leur toilette.Le Roi s’est
entretenu de la manière la plus affable avecplusieurs personnes, durant
le bal. A minuit, les portes du salon, où était dressé un magnifique et
somptueux buffet, se sont ouvertes pourle souper. Suivant la coutume,
les dames y ont été admises les premières ; les cavaliers sont venus en-
suite. Le souper s’est prolongé jusque vers une heure du malin. Les
danses ont recommencé alors avec beaucoup d’animation.
ANVERS , ? JANVIER.
Dans la soirée d’avant-hier.un vol, consistant en effets d’habillements,
fut commis à l’aide d’effraction, à bord d’un bateau amarré au quai
Plantin.Le batelier en prévint la police et lui désigna l’individu sur le-
quel planaient ses soupçons.Le sieur Toussaint,inspecteur du bailliage
Maritime, fit aussitôt des perquisitions et ne tarda pas à se trouver sur
les traces du voleur; celui-ci sur le point d’être arrêlé.prit la fuite et ce
n’est qu’après une course d’une demi-lieue qu’il a été arrêté au Dam
hors la porte Rouge. Conduit à l’Amigo,ce malfaiteur a été reconnu pour
un repris de justice, ayant subi déjà un emprisonnement de 5 ans pour
d’autres vols.
— Par arrêté du,5janvier, sont maintenus pour l'exercice 1843, dans
leurs fonctions de membres du jury chargé de procéder près de l’école
de navigation à Ostende, à l’examen de divers titres de capacité dans la
marine marchande:
MM. P. Verraert, docteur ès-sciences, professeur à l’école de naviga-
tion d’Ostende; Fl. Van der Sweep, inspecteur du pilotage; F. Van de
Steene, capitaine du port, et J. Ruurds, ancien capitaine au longcours.
— On écrit de Liège , 6 janvier :
Aujourd’hui a eu lieu, à 2 heures et demie, l’enterrement du lieute-
nant-colonel du génie Cordemans, dont nous avons annoncé hier la
E-J-L"-..... 1 .-------■ ' "™ ---- 11 1
l’émancipation, a déjà acquis à Antigue un assez grand développement;
et j’ai rencontré aux environs de Saint-Jean des mendiants qui ten-
-dent la main, fait encore inconnu dans les colonies françaises et espa-
gnoles. Les philanthropes s’étaienlmontrés bien ignorants du passé, en
ne prévoyant pas ces faits. La société antique, fondée sur l’esclavage,
n’avait non plus ni hôpitaux publics, ni hospices, ni asiles pour les or-
phelins, avant que le grand nombre des affranchissements eût impru-
demment augmenté le nombre des prolétaires. J’ai déjà dit dans mon
Histoire des classes ouvrières et des classes bourgeoises que le premier
document relatif à l’établissement d’aumônes régulières, faites aux in-
digents, est une loi de Constantin, de l’année 315; et on lit au chapitre
III de la vie de sainte Fabiola, écrite par saint Jérôme, que cettegrande
et illustre matrone fit élever à Rome, avant la fin du IV® siècle, le pre-
mier hôpital que les peuples anciens aient jamais vu. Les mêmes causes
produisent donc les mêmes effets; et de même que l’émancipation des
esclaves antiques amena la mendicité et l’établissement des hôpitaux
dans la société grecque et romaine, l’émancipation des noirs devait na-
turellement amener le paupérisme et la fondation des hospices et des
asiles dans les colonies anglaises.
Les colons d’Antigue ont fait tout ce qui était humainement et en leur
pouvoir, même ce que la loi ne leur demandait pas, pour inspirer aux
noirs l’amour des devoirs que la vie libre impose. Les dames créoles
sont allées jusqu’à ouvrir, à leurs dépens, des asiles pour les orphelines,
et jusqu’à former des sociétés qui donnent des vêtements aux femmes
nécessiteuses. Les noirs ont accueilli tout cela avec indifférence, quand
ils n’y ont pas mis de l’ingratitude. J’ai déjà dit qu’un peu moins de la
moitié et un peu plus du tiers des affranchis, conduits par un vague dé-
sir de changement, s’en étaient allés à Démerary ou à la Trinidad; et
ceux qui sont restés, les meilleurs, du reste, suffisent, à l’aide de la char-
rue, partout applicable sur la campagne unie d’Antigue, à faire les tra-
vaux nécessaires à la culture de File. Du reste, aucun espoir de repos et
de bien-être ne peut luire à leurs yeux dans l’avenir le plus éloigné. Le
gain de chaque jour est emporté par les nécessités les plus élémentai-
res de la vie; et ils n’ont pour perspective, dans la vieillesse, que la mi-
sère et l’abandon.
J’ai pu étudier Antigue dans le plus grand détail.Tous les renseigne-
ments et tous les chiffres ont été mis à ma disposition avec l’empresse-
ment. le plus cordial. J’ai vu couper des cannes et fabriquer du sucre;
j’ai visité des cases à nègres et des habitations. Ce que je dis est donc le
résultat désinformations les plus précises et les plus directes, et je parle
après avoir conversé avec des hommes de toutes les positions et de tou-
tes les opinions.
(La suite prochainement.) A. GRANIER DF, CASSAGNAC. |