Full text |
JLe Précurseur
nvoyé son drogmt n. un homme taré, comme le sont
presque tous ces gins-là, au gouverneur, pour l'enga-
ger à accéder à la prière du supplicié. Mahmoud a ré- |
pondu que le danger de mort n’était pas encore assez
grand pour qu’on le fit confesser ; il ajouta pourtant
qu’il voulait bien lui accorder cette faveur, si un Turc
assiste à cette confession.
Il serait à désirer que les consuls montrassent plus
d’énergie envers les Turcs; ceux-ci les jugent d’après
les drogmans, nos seuls intermédiaires, qui sont lâches
et rampants devant eux.D’ailleurs, lesconsuls craignent
souvent de se compromettre et reculent devant un acte
d’énergie qui pourrait leur faire perdre leur emploi.
ANGLETERRE.
Londres, 8 janvier. — S. M. tiendra un lever mer-
credi prochain au palais Buckingham, dans lequel LL.
EE. le baron Brunow, M. Dedel, le baron Gersdorff et
le baron Nieumann seront présentés par le vicomte
Palmerslon à la Reine. (Morning Herald.)
— L’amélioration survenue sur noire place, jointe à
la diminution qui vientd’avoir lieu sur le taux de l’in-
térêt à une époque de l’année où c’est ordinairement le
contraire qui arrive, semble avoir inspiré au public l’i-
dée que tous les embarras pécuniaires sont près de ces-
ser, et que le paiement que doit faire la Banque la se-
maine prochaine des dividendes trimestriels s’élevant à
10 millions sterlings, va donner une nouvelle impulsion
à toutes les branches de commerce, ce qui amènera pro-
bablement une hausse générale des prix. Sous cette im-
pression beaucoup de gens se lancent dans de grandes
spéculations sur les fonds et les actions industrielles,
■ce qui a produit une hausse rapide sur ces valeurs.
Nous ne pouvons prévoir jusqu’où ira ce mouvement;
mais nous ferons remarquer comme règle générale que
jusqu’à ce que les changes étrangers aient tourné déci-
dément en notre faveur, et que la situation de la ban-
que soit aisée elsùre,nous ne pouvons être parfaitement
rassurés contre le retour d’une crise financière qui, si
elle survenait, détruirait en un moment tous les rêves
de bénéfices que l’on fait sur une hausse que l’on désire
voir se maintenir. (Globe.)
— On s’entretient beaucoup d’un projet de refonte de
la monnaie de cuivre de la Grande-Bretagne ; et l’on dit
que le nouveau système simplifierait beaucoup les tran-
sactions, car le penny serait remplacé par une pièce de
cuivre de la valeur d’un 106au lieu d’étre d’un 12° du
schelling.On aurait aussi le projet d’émettre des pennies
d'argent avec une forte partie d’alliage. Cette mesure
serait très avantageuse surtout d’après le nouveau sys-
tème postal. (Edimbourg Journal.)
ESPAGNE.
Madrid, 30 décembre.— Rien de changé dans la situation
depuis hier. Il parait seulement que de tous les ministres le
moins solide est M. le ministre de l’intérieur. Ce ministre
fait de mauvais choix pour les diverses places de son adminis-
tration. Il vient de charger d’importantes fonctions son pa-
reut, M. Montalvo. célèbre parla participation prise a diver-
ses émeutes et notamment aux désordres sous le ministère du
duc de Frias.
— On écrit de Bayonne. 3 janvier :
Les provinces basques sont tranquilles, mais le bruit court
quedes autorités vont pourvoir au quinlos ou recrutement.
Cette nouvelle a produit une fâcheuse sensation dans ces pro-
vinces où l’on aspire surtout au repos.
Le baron de Gravestinea quitté Bayonne se rendant à Ma-
drid où il doit remplir les fonctions de chargé d’affaires de
Hollande. Un secrétaire d’ambassade de Belgique, se rendant
à la même destination, a quitté notre ville.
FRANCE. — Paris, 6 janvier.
Chronique et Bruits de salon,
petite chronique. — Aujourd'hui, la Chambre des
Pairs s’est réunie et aentendu le rapport de sa commis-
sion chargée de rédiger Padresse.en réponse au discours
du trône. Nous publions plus bas l’adresse et la discus-
sion qui en a suivi la lecture.
— C’est demain que la Chambre des Députés se réu-
nira à son tour pour entendre la lecture de l’adresse.
Il parait que Ma commission n’enlend pas être
aussi explicite que l’a été le cabinet, dans le discours
d’ouverture, au sujet de l’Algérie. Elle se bornera à ex-
primer le vœu que nos armes soient vengées, sans pren-
dre aucun engagement sur la question d’occupation ou
de colonisation.
résignation stoïque; je ne prononçai pas le nom de Mme de
Lagny ; personne ne m’en parla, et une heure se passa encon-
versation snr la pluie et le beau temps.
Un des joueurs de tric-lac, se leva et me proposa sa place.
J’exécrais le tric-trac; j'acceptai néanmoins la partie, elle dura
deux heures!
Personne n’arrivait cependant et je ne savais plus où pren-
dre des prétextes de rester encore. Une dame se fâcha contre
une petite fille qui l'aidait mal à dévider sa laine. Je saisis
l’occasion aux cheveux, et je passai la laine à mes deux bras
non sans l’embrouiller un peu pour gagner plus de temps.
Ceie me fit prés d'une heure de bénéfice
Personne ne venait encore! N’ayant plus rien à démêler
avec les dames, j'exploitai les enfants, je jouai au volant, au
solitaire, è la poupée; j’aurais joué à saute l'âne] Mais les en-
fants se lassèrent plus lôt que moi, et je tne vis pour la
troisième fois réduit aux expédients. Six heures étaient lo
terme que je m’étais fixé; et il n’était que cinq heures nn
quart !
Je m'agitais snr ma chaise, je piétinais dans le salon, ne
sachant quedire ni que faire, et regardant, de minute en mi-
nute, si rien ne venait. Od commerça enfin a arriver. Un ca-
valier rentra d’abord seul : puisun char-à-bancs ramena deux
femmes et nn homme. Mais M"10 de Lagny ne paraissait
point!... .
Le maître de la maison ferma la marche, avec un voisin
qui l’avait mené voir ses vignes. Et toujours point de Mmo de
Lagny I
Six heures allaient sonner... J’entendais servir le dîner
dans la pièce voisine. C’était pour ce moment sans doute
qu’arriverait Mm» de Lagny ; mais il fallait partir ; ma per-
sistance devenait ridicule et impolie. Le ciel vint à mon aide,
en lâchant une averse, au moment oùj'allais quitter la place.
Tout le monde m’arrêta sur la porte, elle maître de la mai-
son, me prenant par la main, me déclara, avec une cordialité
engageante, que je devais rester àdiner au château.
Je tressaillis secrètement déplaisir, et j’acceptai l’invita-
tion. aprésavoir fait semblant de me faire prier. J avais brûlé
mes vaisseaux ! je voulais la voir, et je la verrais !
Cependant, elle ne descendait point... et personne ne sem-
blait i attendre. On passa dans la salle à manger; elle n'y était
pas... On se rangea autour de la table sans regarder si tout
le monde ‘était présent... Je n y comprenais plus rien, et je
— Avant-hier soir, à neuf heures, le corps de Mgr.
l’archevêque de Paris a été transporté à l’église Notre-
Dame. Il était daps un char fermé, précédé et suivi
d’une voiture de deuil. Le cortège se terminait par les
voitures particulières. ï . •
Les service et enlcrrement auront lieu le jeudi 9 jan-
vier, à 10 heures précises, en l’église, métropolitaine.
— On annonce que le shalî de Perse se trouve cerné
dans son palais de Téhéran par ses frères révoltés con-
tre lui, d’accord avec la population de la capitale.
(La Presse.)
— M. Wallis, rédacteur de la Mode , a été invité par
la police à quitter les Etals du Pape ;il est allé à Naples.
— M. Besson, évêque de Metz, est mort à Metz le l°r
janvier, à la suite d’une maladie de plusieurs mois. M.
Besson était né à Mieugy (Ain), le 12 septembre 1786.
Il est donc âgé de 84 ans. D’abord grand-vicaire à Ge-
nève, puis curé à Lyon,il fut nommé à l’évèchéde Metz
en décembre 1825 et sacré à Lyon le 23 février 1824'
— Béranger demeure à Tours. Il habite la jolie mai-
son connue sous le nom de la Grenadière. Sou loge-
ment est composé de deux oude trois pièces au second
étage ; c’est toujours sa vie de la rue des Martyrs. Il est
heureux avec uneperspectivedes champs avecquelques
ormes devant sa fenêtre. Il voit peu de monde à Tours.
On le voit chaque matin allant chercher des journaux
à la poste, ou revenant'chez lui en les lisant. Il a peu
vieilli, il est fort gai : sa figure est calme et sa taille est
toujours ronde, comme à Paris.
Béranger a passé soixante ans. 11 écrit, il compose des
notices, il cause sur tout, car c’est dans la causerie qu’il
excelle. Cependant il vient d’achever une grande épopée
dont l’empereur est le héros. Ce poème, destiné surtout
au peuple de France, étincelle, dit-on, de beautés har-
dies et neuves. 11 ne sera publié qu’après sa mort. Son
histoire, en prose, de Napoléon, dont on a parlé der-
nièrement, parait l’occuper beaucoup,mais l’ouvrage est
loin d’être achevé. Béranger lui donnera un grand prix,
s’il yjette les souvenirs versés dans son esprit par quel-
ques contemporains illustres.
conspiration napoléonienne. — Nous trouvons dans la
Gazette d'Augsbourg, la lettre suivante de Paris en date
du 27 décembre : _
Des documents très importants concernant la conspi-
ration napoléonienne se trouvent en ce moment entre
les mainsdu roi. Louis-Philippe n’a pas été maître d’un
mouvement de colère, en voyant au bas d’un de ces do-
cuments la signature mystérieuse du chevalier de Saint-
Georges. On dit que S. AI. s’est même écriée: Mais voilà
un cas de guerre? Toute la correspondance saisie con-
tient, dit-on, des choses curieuses. Le gouvernement a
été forcé de se conduire avec beaucoup de modération
vis-à-vis des individus compromis dans cette affaire.
Les noms de députés eide deux généraux de l’empire
y figurent.
Parmi les papiers saisis chez le marquis dcCrouy-
Chanel, se trouve un fragment d’une conversation que
le marquis a eue avec M. deGenoude, et il en résulte
que les légitimistes auraient volontiers secondé un mou-
vement napoléonien, mais évidemment de leur intérêt.
Al. de Genoude a quitté Paris parce qu’il ne s’y croyait
plus en sûreté. Ou attribue à cette circonstance son
voyage à Rome. La présence du duc de Bordeaux n’a
servi que de prétexte.
Toutefois Al.de Chateaubriand ne veut plus enten-
dre parler des missions des légitimistes, et pour se dis-
penser d’aller à Rome, il a allégué les fatigues du
voyage ; celte circonslance et les nouvelles récemment
arrivées de Rome, ont complètement découragé les
légitimistes. En effet, on a insensiblement abandonné le
duc de Bordeaux. 1,'aristocratie lui a fermé ses hôtels,
et l’ambassadeur de Naples, et un autre ambassadeur
sont les seuls diplomates qui aillent le voir. Toutefois
la conduite de, ce dernier ne parait pas avoir obtenu
l’entière approbation de son gouvernement.
On attribue en général la diminution du crédit du
duc de Bordeaux au langage énergique qu’a tenu M. le
comte de Latour-Maubourg. Le comte avait demandé
de nouvelles instructions à sa cour. Toutefois les repré-
sentations ayant produit leur effet, il est probable que
les choses eu resteront là.
Nouvelles d Afrique.
Alger, 28 décembre 1859. — Pendant toute la se-
maine, des colonnes mobiles ont parcouru la plaine de
me tenais debout dans un coin de la salle, regardant autour
de moi d'un air effaré.
— Il faut qu’elle soit malade ou morte, me disais-je, ou
qu elle ne vive pas comme le reste des mortels.
La dame qui présidait la table me tira de ma rêverie, en
disant a un domestique, qui entrait, de mettre idod couvert à
sa droite, à la place de de Lagny.
— A la place de M™ de Lagny I je n’avais entendu que
ces mots, et je restais cloué au parquet.
— Est-ce que M“e de Lagny ne dîne pas ? demandai-je,
en sortant enfin de ma distraction, et en me rendant à la place
assignée. •
— Monsieur ne sait donc pas qu’elle est partie hier soir
pour Paris ? dit une ÿoix qui me fit tomber anéanti sur ma
chaise.
Je me serais trouvé mal, si tout le monde n’avait eu l’air
de venir à mon secours. J’expliquai mon trouble comme je
pus ; je feignis de dîner, je sortis après :e café, sur je ne sais
quel préteite assez peu poli, et je revios chez le chevalier de
Warel en labourant de mes deux éperons les flancs de mon
cheval.
Le lendemain matin j’arrivais à Paris. C’était une gageure
engagée désormais, non plus avec M”e de Lagny, mais avec
la fatalité ; j’aurais joué ma vie pour la tenir.
Les renseignements que je possédais étaient, plus que suffi-
sants pour trouver la jeune dame ; en moins de deux heures,
je sus son adresse, et je courus à son hôtel. Une calèche en-
trait en même temps que moi. Il me sembla reconnaître celle
où je l’avais vue, ou plutôt où je ne l’avais pas vue, le jour de
ina chute de cheval Je m’approchai de la portière pour tn’en
assurer, et j’apercevais déjà des cheveux.... lorsqu’une flaque
de boue m’aveugla en m’éclaboussant des pieds à la tête.
Je me précipitai chez le concierge. C’était bien elle qui
venait de rentrer ; mais je ne pouvais me présenter dans l’é-
tat affreux où j’étais. Je montai dans la première voiture qui
passa; je courus refaire ma toilette, et je revins sans perdre
une minute. Il n’était plus temps: elle venait de sortir.
Le soir, j’allai à l’Opéra, plutôt pour me consoler que dans
l’espérance de la voir. *
— Veux-tu; me dit un de mes amis que jc-le montre une
des plus belles femmes que j’aie vues cet hi ver dansîe monde?
— Quelle femme ?
! la Milidja : elles ont pris plusieurs maraudeurs ennemis,
mais sur aucun point elles n’ont pu joindre l’ennemi.
âcbmet-Ben-Salem, qui s’était montré dans l’est, se
tient sur les peints de l’Atlas, prêt à se jeter sur le ver-
sant méridional si nos colonnes voulaient pénétrer jus-
qu’à lui. .
Surlà ligne de la Chifîa, l’énnemi inquiète toujours la
place de Belidah ; les Arabes se tiennent sur lestpenles
élevées de l’Atlas ; ils cherchent à empêcher les travaux
que la garnison exécute; mais, jusqu’à l’époque des der-
nières nouvelles, aucune attaque sérieuse n’avait été
dirigée par eux sur la ville ou le camp supérieur.
Koléah et le Sahel n’ont pas été attaqués.
Un vol a été commis il y a deux jours en avant de Dc-
ly-Ibrahim, dans un ravin où malgré la défense qui en
avait été faite, des femmes et des enfants avaient conduit
des troupeaux. La gendarmerie, les colons et la garni-
son du camp, accourus aux premiers cris, n’ont pu em-
pêcher l’enlèvement de quelques bestiaux ; un enfant a
été tué, un autre blessé: une femme et son petit-fils
ont disparu. Plusieurs Arabes ont été tués parles colons
et les soldais du 41° de ligne. Dans la nuit du lende-
main plusieurs Arabes qui étaient venus marauder en-
tre Douera et Kaddous ont été pris les armes à la main.
Un fait nouveau a eu beu dans les derniers jours de la
semaine. Le 26 décembre un navire de commerce, se
trouvant à 18 milles au large, a été abordé par une tar-
tane sortie de Chercheli : l’équipage a abandonné le
bâtiment et s’est sauvé dans ses embarcations sans avoir
opposé de résistance. Dès quecetévénement aété connu,
les bateaux à vapeur le Sphynx et le Crocodile (ce der-
nier ayant à bord un détachement du 25° de ligne), ont
été dirigés sur Chercheli : ils ont trouvé le bâtiment cap-
turé échoué sur le rivage et hors d’état d’étre misa flot:
le commandant de l’expédition y a fait mettre le feu.-
pondant cette opération les bâtiments embossés devant
la ville, ont tiré sur les Arabes qui voulaient s’opposer
à l’incendie du navire. Les bâteaux à vapeur ont ensuite
fait route pour Alger où ils sontarrivés dans la nuit du
27 au 28, après avoir rempli leur mission. Quatre
hommes ont été tués et 13 blessés, dont 7 très légère-
ment. La marine et le 25° ont acquis dans cette expé-
dition de nouveaux litres à la bienveillance du
gouvernement du roi. (Moniteur algérien.)
Cliainlire sl«s Pairs.
Séance du lundi 6 janvier.
PRÉSIDENCE DB JR. LE CHANCELIER BARON PASQCIER.
La séance est ouverte à une heure un quart. MM. Passy,
Teste et Schneider sont au banc des ministres.
M. bocrdeau présente le rapport de la commission chargée
de vérifier les litres de M. Béranger, qui sont reconnus
valables.
M. Béranger est introduit, prête serment et prend séance.
MM. Thiers, Berryer, Odilon Barrot, Bugeaud, Garnier-
Pagès, sont dans les couloirs de la chambre.
L’ordre du jour appelle la lecture et la discussion du projet
d’adresse en réponse au discours de la couronne.
m. portalis. rapporteur de la commission, donne lecture
du projet d’adresse eu ces termes :
« Sire,
» La Chambre des Pairs a la juste espérance que le calme
intérieur, heureusement raffermi depuis la dernière session,
ne sera plus troublé, grâce à la fidéle exécution des lois et à la
fermeté vigilante du gouvernement de Votre Majesté.
» L’aîné de vos fils. Sire, vient de parcourir une partie
considérable du royaume. Partout il a trouvé le respect des
institutions uni au développement du travail, et l’ofiéissance
aux lois favorisant le progrès de l’industrie. Partout ontéclaté
sur son passage de touchants et solennels témoignages de
l’adhésion et de ia confiance publiques Un tel accueil a prouvé.
Sire, combien les Français apprécient les fruits salutaires du
régne de Votre Majesté,et le dévouement du prince royal au
service de la patrie. Les actes par lesquels il a signalé son cou-
rage nous ont apppris qu’il sera toujours prêt à exposer une
existeDce si précieuse et si nécessaire â l’Etat, quand l’hon-
neur. la gloire et les intérêts du pays l’exigeront. La France
n’oublie point avec quelle généreuse ardeur les princes ses
frères savent suivre de ses nobles eiemples.
» Nous partageons la satisfaction qu’inspire à votre majes-
té la continuation de nos relations pacifiques avec les puis-
sances étrangères.
» Sire, la paix de l’Orient importe au repos et au commerce
du monde. C’est dans ce grand intérêt que les heureux effets
de l’union établie entre la France et la Grande-BretagDe pour
l’utilité commune des deux pays, se soul fait récemment
sentir, en arrêtant les hostilités qui pouvaient compromettre
— Je ne la connais que de vue et de nom, c’est Mm* de
Lagny !
— Madame de Lagny t où est-elle ?
— A droite de nous, aux premières loges : elle nous tourne
le dos, mais elle ne tardera pas à regarder do ce côlé.
Je braquai ma lorgnette sur le point qu’ou me désignait,
et je remarquai uue jeune dame dont le premier aspect se
rapportait en effet à mes vagues souvenirs ; je ne quittai pas
des yeux ses cheveux et ses épaules, pendant plus d’un quart
d’heure qu’elle resta sans se retourner ; enfin elle Gl un mou-
vement pour changer de posture, et je voyais peu à peu le
bord de sa joue, quand tout à-coup un voile tomba sur le
verre de ma lorgnette, et intercepta la lumière. J’attribuai
cet accident à quelque corps étranger, et je changeai vivement
de place ; mais je fus tout étonné de me trouver dans une’
obscurité complète, et d entendre un grand cri dans la salle...
Le gaz venait de s'éteindre, et les spectateurs s’enfuyaient
•épouvantés dans les corridors.
Quand le lustre fut rallumé. Mm« de Lagny était disparue,
et je la cherchai en vais, des loges aux escaliers, et du foyer
au péristile.
Je laissai passer huit Jours sans faire la moindre recherche,
dans l'espoir de mettre en défaut le mauvais génie qui sem-
blait m'épier pour m'écarter d'elle.
Le neuvième jour, au moment oùj’allais sortir le chevalier
de Warel entra chez moi.
— En bien ! me dit-il, je viens savoir des nouvelles. Tu l’as
vue enfin ?
— Je ne l’ai pas vue !!! m'écriai-je, du ton convulsif dont
Oreste s'applaudit d’être le plus misérable des mortels.
Et je racontai au chevalier mes aventures depuis dix jours
et mes nouveaux projets.
— Tes projets viennent trop tard, me répondit-il avec
son calme ordinaire. En arrivait chez loi, à dix pas de ia
porte, mon cabriolet s'est accroché à une berline où était
Mm« do Lagny.
— Tool le monde la rencontré donc partout, exceptè-moi?
dis-je, en faisant un mouvement pour me précipiter dehors.
Wortel me retint par le bras.
— Inutile, mon cher ; elle part pour un voyage indéfini
avec une partie de sa famille.
— Allons I fis-je avec la résifnation d’un condamné qui re-
çoit le coup Ile grâce ; j’ai periu la gageure 1 Mais je profi-
la sûreté immédiate de l’empire ottoman. Une politique
éclairée et prévoyante nous conseille de veiller à la conserva-
tion et à l’indépendance de cet empire et nous hâlons de tous
nos voeux le moment où l’accord des grandes puissances lui
rendra la paix intérieure. Nous désirons que les arrangement!
qui seront conclus pour l’assurer, reçoivent, d’une juste ap-
préciation des intérêts de la France, ces conditions de durée,
sans lesquelles le but que l’Europe se propose ne serait point
atteint.
» Les événements dernièrement accomplis en Espagne ont
opéré un grand changement dans la situation de ce royaume.
La guerre civile qui le déchirait a perdu de sa gravité ; elle
ne menace plus la stabilité du trône constitutionnel. Il est
permis d’espérer que la réconciliation des citoyens dans le»
provinces du Nord sera le prélude d’une réconciliation géné-
rale. Nous sommes heureux de penser que le gouvernement
deVotre Majesté a concouru à ce résultat par les soius qu’il a
continué de donner, ainsi que le gouvernement de S. M. bri-
tannique, à la ponctuelle exécution des traités de 1834.
» Satisfaits d’apprendre que le Mexique remplit les engage-
ments qu’il a contractés envers nous, nous regrettons. Sire,
que le gouvernement de la république argentine se refusé
encore aux légitimes réparations qui nous sont dues. Son
obstination doit être vaincue. Assurer le triomphe du droit
est le plus noble emploi qu’une grande nation puisse faire de
sa puissance.
» Nous déplorons les hostilités qui viennent d’éclater en
Afrique, au mépris des Iraités et de nos droits. La chambre
des pairs s’empressera de s’associer aux mesures qui auront
pour but de donner au gouvernement de Votre Majesté les
moyens d’assurer le prompt succès de nos armes, et de garan-
tir une protection efficace aux tribus fidèles, ainsi qu’à tons
les habitants d’uue terre que la domination fraoçaise ne doit
plus quitter.
» Votre Majesté nous assure que la situation denos finances
permet de suffire à ces charges extraordinaires : nous nous
en félicitons avec elle.
» Une question importante était restée indécise pendant la
dernière session. Nous donnerons à l’examen du projet de loi
qui nous sera présenté pour la résoudre, l’attention que com-
mandent les intérêts de l’agriculture . de la navigation , de
l’industrie et du commerce, qu’il s’agit de concilier.
» Ce sera toujours avec un empressement que la chambre
des pairs concourra à l’amélioration du sort des sous-ofiieiers
et soldats de cette brave armée qui fait la gloire et la sûreté
de la France : il est juste que l’Etat acquitte sa dette envers
ceux qui paient si noblement la leur.
» Nous n’étudierons pas avec moins de zèle les autres pro-
jets qui nous seront apportés par les ordres de Votre Majesté.
Tout ce qui tend a compléter l’organisation de notre ordre ad-
ministratif et le régime de l’instruction publique ; tout ce qui
a pour but de perfectionner et d étendre nos moyens de com-
munication. ou de donner à la répression du crime plus d’efii-
caeité et de moralité, est digne de la méditation sérieuse des
Chambres. ’
» 8ire, depuis près de dix années, la Chambre des Pairs
n’a cessé de prêter au gouvernement de V. M. un fidèle appui
pour la dépense de l’ordre public et des libertés nationales.
Elle est heureuse de vous renouveler l’assurance de son loyal
concours. C’est en vain que les fauteurs de révolutions s’effor-
cent à liguer toutes les passions désordonnées contre la Con-
stitution du pays.L’étroite union des grands pouvoirs de l’Etat
pour l’affermissement du principe conservateur de nos insti-
tutions et pour le maintien des limites qui font leur force,
rappellera l’impuissance des tentatives insensées,dirigées non-
seulement contre la monarchie constitutionnelle, mais con-
tre la société elle-même. »
La discussion est ouverte aussitôt.
Mai. chaules Dupin et d alton SHEE parlent contre l’a-
dresse.
m. dufaure, ministre des travaux publics, répond aux at-
taques de ce dernier.
m. le comte molé parle après le ministre pour défendre
le cabinet du 15 avril contre les calomnies dont il a été l’ob-
jet. Ce ministère, si imparlemcntaire. dit-il, dans ses ten-
dances et son origine, trouvera des amis dans les deux cbam-
bres.
La discussion générale est close. On passe à la discussion
du paragraphe lr.
m. de noailles montait à la tribune au départ du cour-
rier.
Revue lied journaux.
Les félicitations officielles adressées au roi à l’occasion du
premier jour de l’an par les divers pouvoirs de l’état et les
corps administratifs do la capitale servent encore aujourd’hui
de texte aux discussions des journaux de Paris.
Le JOïiHïRixli i>E3débats se plaintavee amertume
des satires de l’opposilion envers les discours de nos compli-
memenrs. Il commence par l’accuser d’être toujours l’aveu-
gle interprète des ennemis de la monarchie dé juillet en
tournant en dérision les hommages publics rendus au roi
en ce jour solennel. Puis prenant le ton d’ironie qui lui est
habituel, le journal demande à l’opposition si. dans un pays
où depuis neuf ans dix-sept ministères et quarante-neuf
ministres se sont succédés, le rétablissement de l’ordre ea
terai de la leçon, morbleu! Qu’on revienne maintenant me
parler de projets de mariage !...
Je tins parole, et je crus avoir oublié parfaitement Mm* de
Lagny.
Deux ans après, je me préparais un matin à monter à Saint-
Roch avec le chevalier de \Varel, qui voulait m’y faire voir
un nouveau tableau placé dans le choeur, lorsque nous fûmes
arrêtés au bas de l’escalier par un cortège de noce qui sor-
tait de l’église. Je me trouvai dans la foule, si près de la ma-
riée. que je la heurtai involontairement par derrière, au
moment où elle montait la voiture.
— Ah ! mon Dieu ! s'écria Warel en me tirant par le bras
pour me faire tourner la tête.
— Eh bien ! dis-je, qu'y a-t-il ? — Madame de Lagny !
— La mariée ? ~ Elle-même. -
— Je sentis, à ce seul mot, toutes mes émotions passées *e
réveiller dans mon àipe, et je me retournai précipitamment..,
La voiture partait au grand trot, et je-n’aperçus au bord de la
portière qu’une petite main patelée à laquelle brillait une
alliance. •
— Est-ce que tu ne l’as pas vue? me demanda le chevalier.
— Pas le moins du monde.
— Elle ne pourrait pas en diro autant, reprit-il; car elle
t’a bien vu, regardé et bien reconnu; à telles enseignes
qu’elle a tressailli des pieds à la tète, et qu’elle est devenue
rouge comme une cérise.
Ces paroles me rendirent profondément rêveur. N’osant
pi us me présenter moi-même chez M“* d’ Hermans (c’était le
nouveau nom de Mms de Lagny), j’essayai de m’y faire intro-
duire par un tiers. Jo reçus une réponse ambiguë, qui équi-
valait â une défense, et que je dus interpréter néanmoins, â
en croire Warel, beaucoup plus favorablement qu’une ad-
mission...
Quinze jours après son mariage, Mlr« d’Hermans partit
pour Madrid avec son mari, chargé d’une mission diplomati-
que. Je n’en ai plus entendu parler; et je ne l’ai jamais vue !
Mais je n’ai jamais cessé de songer à elle, je l’avoue, et de
me dire qu’elle serait devenuo ma femme, si j’avais pu
l’aborder avant son second mariage.
— Folie ou raisonnable, acheva le vicomte, c’est cette pen-
sée qui rne fera mourir garçon; convaincu d'ailleurs, par ex-
périence, que l’hvmen est pour moi la chose impossible.
PITRE-CHEVALIER.
I*™ |