Full text |
— 22 —
l’armée, une ou deux grandes fêtes de gymnas-
tique, l’illumination totale de la ville, des boule-
vards circulaires et du centre, la construction de
DIX ARCS DE TRIOMPHE DE 30,000 FRANCS CHACUN,
POUR LESQUELS UN CONCOURS SERAIT OUVERT ENTRE
nos meilleurs architectes, un grand bal donné
dans la cour de l’Hôtel de Ville et pour lequel un
plancher sera établi à la hauteur du premier étage,
une grande fête militaire organisée par les corps
spéciaux de la garde civique du pays, un grand
carrousel et tournoi à l’instar des fêtes du moyen
âge, organisé par et avec le concours de tous' les
officiers montés de l’armée , l’inauguration des
monuments en construction : la statue de Léo-
pold Ier, les Palais de Justice et des Beaux-Arts,
la Maison du Roi, etc.
“ A l’occasion de ces fêtes, il y aura également
une série de concours de toutes sortes, des tirs, en
un mot, de quoi contenter tout le monde. -
Los adjudications publiques.
La loi consacre le principe des adjudications
publiques lorsqu’il s’agit de l’exécution de travaux
décrétés par les administrations de l’Etat, de la
province et de la commune.
Le but est, évidemment, d’arriver à ne dépenser
que la somme strictement nécessaire , tout en
tenant compte des conditions d’une bonne exécu-
tion. Comme garantie, il y a le caulionnement, les
prescriptions du code civil et le principe des rete-
nues pour retards.
Tout cela est très-bien lorsqu’il ne s’agit que
d’ouvrages faisant partie du gros œuvre, bien que,
dans bon nombre de cas, l’on en soit arrivé, malgré
toutes les précautions prises, à de sérieux mé-
comptes.
Depuis quelque temps, les administrations se
réservent le droit de choisir l’adjudicataire. (Cela
ne démontre-t-il pas ce que nous venons de dire?)
La généralité des entrepreneurs ne sê livrent pas
à de bien grands calculs; rarement, ils vérifient
les quantités, cherchent à se rendre compte de
toutes les difficultés que présente tout cas spécial,
et ils établissent leurs rabais par une simple com-
paraison mentale avec des entreprises antérieures.
Notre but n’est pas d’examiner, sous ces consi-
dérations, le système des entreprises générales par
adjudications publiques; nous voulons seulement
attirer l’attention sur un cas particulier : l’entre-
prise de travaux ayant, par eux-mêmes ou dans
les conditions d’exécution, un mérite artistique
réclamé et nécessaire.
■¥■ *
Tout le monde soumissionne, aujourd’hui, pour
l’exécution de travaux d’art. Banquiers, fabricants
de briques, négociants ; nous pourrions même dire
marchands de parapluies, si, malgré toute la véra-
cité de l’allégation, celle-ci ne se présentait sous
une forme un peu trop burlesque peut-être.
Supposez qu’il s’agisse de la construction d’un
hôtel de ville, d’une église, d’un musée, d’un palais
de justice ou d’un palais d’expositions.
Dans l’ensemble des travaux à exécuter, il y a
de la sculpture décorative, des marbres ornés, des
ornements à placer dans les corniches, les archi-
traves, etc., etc.
Que fera l’entrepreneur désireux d’arriver bon
premier, c’est-à-dire le plus bas soumissionnaire?
Il consultera quelque ornemaniste, ex-mouleur,
et se préoccupera bien plus d’obtenir un engage-
ment dans les prix doux, que de s’assurer si
l’entrepreneur est doublé d’un artiste, si son travail
répondra à ce que l’on est en droit d’attendre.
★
* *
Vous voyez le résultat : l’architecte, malgré
toute son activité, malgré toute la complaisante
persévérance qu’il y met, voit interpréter ses con-
ceptions d’une façon ridicule, et de l’œuvre qu’il
aurait créée belle aidé d’un artiste, on fait une
chose informe,
Le résultat se traduit par une monstruosité de
plus et quelques pièces de cent sous économisées
par l’entrepreneur.
Il est, selon nous, désirable, nécessaire, que
tous les travaux devant avoir un mérite artistique
soient réservés pour être mis au concours entre
artistes d’un talent reconnu.
Il ne faut pas que les économies sur les choses
d’art servent à solder les déficits sur la brique et
le mortier. E. A.
Le château de Bouchout, sons Meysse, preés de Grimberghe
C’est une admirable résidence, une des rares propriétés des
environs de la capitale à laquelle se rattachent des souvenirs
historiques.
Tandis que vers le milieu du xn0 siècle le restant de l'im-
mense territoire de Meysse était, sauf quelques minimes frac-
— 23 —
lions, tenu à cens ou en fief des Berthout, le manoir de Bou-
chout formait une tenure relevant des ducs de Brabant. Ceux-ci
donnèrent son emplacement aux Crainbem issus des Boucbout,
à la condition d’y é'ever une forteresse qui surveillerait le
manoir plus redoutable de Grimberghe.
Boucbout fut d’abord l’apanage de Guillaume de Crainbem,
qui mourut sans postérité, et son patrimoine échut aux descen-
dants de son frère aîné Daniel.
Vers 1336, un comte de Flandre vint chercher refuge dans
la résidence de Boucbout. Ce doit être Louis de Crécy ou Louis
de Male.
En curant les fossés du manoir et en creusant les fonda-
tions de la ferme, on a trouvé des fers de lance, des piques,
des épées, des bouts de flèche et un grand nombre d’ossements
humains; on en conjecture que Boucbout eut à soutenir un
siège de quelque durée ou un sanglant assaut, à l’époque de la
bataille de Scheut.
Le château fut habité ensuite par Evrard de la Marck, frère
du célèbre de la Marck, le Sanglier des Ardennes. Son frère
Robert, seigneur d’Arenberg et de Mirvvart, aliéna tout le patri-
moine des Boucbout et vendit Boucbout lui-même, en 1336,
au chevalier Maximilien Transilvain, dont la fille Jeanne épousa
messire Gérard de Veltwyck, secrétaire de l’empereur Charles-
Quint.
Vers 1580, Boucbout fut occupé militairement; le duc de
Parme s’en empara dans les derniers mois de 1582. Jeanne de
Transilvain vendit Boucbout au chevalier Christophe d’Asson-
leville ou Assonville, seigneur de Hauteville (1590).
Devenu possesseur du château de Bouchout, il le restaura
et l’embellit considérablement. A sa demande, les archiducs
Albert et Isabelle déclarèrent que cette seigneurie était : « une
ancienne baronnie du Brabant, tenue directement et immédia-
ment d’eux, en un seul fief, avec toute justice haute, moyenne
et basse, consistant en un simple chasteau, tellement, disent
les archiducs, que ce lieu et commarqué monstrent bien leur
grandeur, antiquité et noblesse, pourvoy on l’aurait tenu,
réputé et nombré pour une ancienne et noble baronnie du
duché de Brabant, et, en cette qualité, les seigneurs auraient
jouy de toute autorité et prééminence, tant dans le pays que
dehors conséquemment tenu leur rang et lien entre les barons. »
Plus tard, le seigneur de Noyelles-Wion, qui avait épousé
en 1621 la fille du seigneur de Hauteville, obtint pour la sei-
gneurie de Bouchout la confirmation du titre de baronnie et
augmenta l’importance de ce domaine.
Bouchout fut mis en vente et acheté par sir Pierre-Ferdinand
Roose, seigneur de Ham, pair du comté de Namur, 1678.
Bouchout, qui avait été de nouveau déclaré une baronnie
en 1683, demeura la propriété des descendants de Roose jus-
qu’en mai 1830, époque à laquelle la comtesse Joséphine, la
dernière du nom de Roose, épousa le comte Louis-Léopold-
Amédée de Beauffort, fils aîné du marquis de Beauffort et de la
comtesse de Wignacourt.
Par ce qui précède, on a pu voir que le château existait déjà
au xnc siècle. Si l’on en croit De Cantillon, il était jadis
entouré de cinq enceintes de fossés qui se protégeaient l’une
l’autre cl qui étaient traversées par un pont d’une longueur
extraordinaire.
Après la restauration complète que lui fit subir Christophe
d’Assonvilie, vers l’an 1600, il formait un carré flanqué de
cinq tours de dimensions et de formes diverses ; la principale,
qui était carrée et dont le toit avait à ses angles des échangettes,
ne recevait le jour que par quelques meurtrières; les autres
étaient de forme hémisphérique ou ronde. Des bâtiments,
très-simplement construits, avaient été adossés aux murs inter-
médiaires, dans presque toute leur étendue. Les fondements
de la forteresse étaient baignés par un étang autour duquel
rayonnaient de belles allées.
M. de Beauffort, qui avait voué à Fart du moyen âge une
admiration profonde, avait fait exécuter, sous la direction de
feu M. Suys, des travaux qui ont considérablement modifié
l’aspect du château.
La tour d’entrée et son pont-levis ont disparu; aucun fossé
ne sépare plus le jardin de la cour.
La partie du manoir la plus ancienne est la tour occidentale,
le donjon carré, massif et recouvert par une terrasse de plomb.
Celte partie, qui date du xue siècle, contient trois étages.
Chaque étage ne comprend qu’une salle, chacune de ces salles
est voûtée.
L’aile adjacente, de construction moderne, a été mise en
harmonie avec les deux autres corps de logis.
Deux rangées de fenêtres leur donnent un aspect monu-
mental ; une galerie couverte, qui s'élève en avant du rez-de-
chaussée du principal corps de logis, ajoute encore à la beauté
de l’édifice. Aux angles s’élèvent de jolies tourelles, couronnées
par des ceintures de créneaux. Un campanile étale au milieu
d’elles son toit découpé en ornements gothiques.
L’intérieur est un véritable musée, dont les richesses ajoutent
encore au charme qu’inspirent l’aspect du château et les sou-
venirs de son histoire.
Des portraits en pied de quelques-uns de nos anciens souve-
rains et de nos hommes illustres décorent la salle à manger et
le grand salon.
Dans la salle à manger, la cheminée, de très-grande dimen-
sion, est surmontée des statues de Godefroid le Barbu, le pré-
tendu fondateur du manoir; de Godefroid de Bouillon et du
duc de Bourgogne, Philippe le Bon.
Près du grand salon, dont on admire les portes en bois
___ 24 ____
sculpté provenant de l’abbaye de Malonne et dont les murs sont
tapissés de tableaux et de portraits historiques, est une petite
chapelle dédiée à saint George.
Un peu plus loin que la chapelle, un cabinet est orné d’ar-
ceaux en ogive et des écussons des huit familles qui ont pos-
sédé Bouchout, depuis le duc Godefroid jusqu’au possesseur
actuel. De ces huit familles, six sont éteintes; les deux encore
existantes sont la famille d’Arenberg et celle de Beauffort.
Sur les vitraux des fenêtres sont représentés les ducs de
Bourgogne, l’empereur Maximilien, Charles-Quint, Philippe If,
Albert et Isabelle.
Des bas-reliefs, des meubles anciens impriment à ce char-
mant réduit un cachet particulier.
A l’étage, une longue galerie renferme un nombre considé-
rable d’objets rares et curieux, et, entre autres, des armes pro-
venant des batailles de Sempach, Laupen, Saint-Jacques et
Marignan, ces grandes dates des annales suisses.
Le parc comprend 170 hectares, planté d’arbres splendides,
et comprend un étang de trois hectares.
M. Léopold de Beauffort, qui est, comme on sait, un des
agronomes les plus distingués du pays, avait fait construire à
l’entrée du château une ferme modèle, construite en pur style
flamand. C’est là que sera installé le détachement militaire qui
aura la garde du château.
S. M. le Roi s’est rendu acquéreur, pour la princesse Char-
lotte, de cette belle propriété.
L’Impératrice a été installée récemment dans son nouveau
domaine.
CORRESPONDANCE DE HOLLANDE
Nous recevons de notre correspondant hollandais M. Y. d. B.
les renseignements qui suivent dont nous lui laissons la res-
ponsabilité, car il nous est impossible de vérifier les faits :
A l’occasion du mariage de S. A. le Prince Henri des Pays-
Bas, une souscription fut ouverte pour l’érection de deux
fontaines monumentales commémoratives dans le domaine du
prince situé à Poestdyck.
Le jury, composé de trois peintres et d'un ingénieur (?),
désigna pour le prix, c’est-à-dire pour l’exécution, un projet
ayant une singulière analogie avec la Fontaine des Fortius
à Rome.
Les journaux hollandais publièrent des comptes rendus, en
ayant soin de faire ressortir cette étrange analogie, et
M. Stracké, qui avait d’abord revendiqué la paternité de
l’œuvre couronnée, s’empressa de l’endosser à.son fils.
Outre la copie de la Fontaine des Fortius par M. le pro-
fesseur Stracké (pas la fontaine, mais bien la copie), deux
projets avaient été signalés par le jury. On fit exécuter les
modèles en plâtre de ces trois projets, et il se produisit ce
fait, signalé dans le rapport du jury-, que ces maquettes
n’étaient pas la reproduction exacte des dessins; que, modi-
fiées, les œuvres n’avaient ni plus ni moins de mérite.
Nous livrons le fait, sans commentaires, à l’appréciation
de nos lecteurs.
FAITS DIVERS
COMMISSION ROYALE DES MONUMENTS.— Par
arrêté royal du-1er avril, sont nommés membres correspon-
dants de la commission royale des monuments dans la Flan-
dre occidentale, MM. De la Cencerie, architecte à Bruges, et
De Meyer, docteur en médecine en ladite ville.
BRUXELLES. —L’administration communale de la ville
de Bruxelles a fait examiner l’état de, tous les pignons exis-
tant encore dans la capitale ; de cette enquête il résulte que
cent quatre-vingts d’entre eux nécessitaient des mesures de
précaution. En conséquence, les propriétaires ont été mis en
demeure de faire les travaux nécessaires.
Espérons que, cette fois, l’administration communale aura
réclamé une restauration exacte de ces pignons, afin d’en
conserver le caractère architectural ; c’est ce qui n’a pas été
fait pour le pignon de la rue de la Madeleine, qui n’est plus,
restauré, qu’un affreux pastiche rappelant à peine quelques
lignes de la construction démolie.
FRANCE. — M. Vaudremer, architecte de la ville de
Paris, a été élu membre de l’Académie des Beaux-Arts, en
remplacement de M. Duc, décédé. Le nouvel élu est l’auteur
de l’église Saint-Pierre de Montrouge et du monument de
Champigny.
HOLLANDE. — La Commission royale pour la con-
servation des monuments historiques, attaquée à diffé-
rentes reprises au sein des Chambres des États-Généraux,
vient d’ètre supprimée. Dans le cours de sa courte existence
(quatre ans) ladite commission a rendu des services incontes-
tables; mais elle en était arrivée à mécontenter tous ceux
qui s’occupent d’art par sa partialité et ses prétentions à
l’infaillibilité; aussi la mesure prise est-elle généralement
approuvée, si ce n'est par les amis et privilégiés.
STUTTGART. — La Société des Architectes (Polytech-
nikum) a fêté, le 1er mars courant, dans le Schützenhof, le
onzième anniversaire de sa fondation.
PARIS. — Le jury du salon de 1879. — Mercredi
2 avril ont eu lieu, au Palais de l’Industrie, les élections des
jurés du Salon de 1879, sous la présidence de M. Turquet,
sous-secrétaire d’Ètat des beaux-arts.
Ont été élus :
Architecture. — MM. Bœswillwald (Émile), Ruprich (Ro-
bert) , Viollet-le-Duc, de Baudot, Lisch, Darcy, Maurice
Ouradou, Simil, Ballu père. |