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ASV'ES&S, Jeudi Jasiiicr.
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V janrier.
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KIFFIFIIiEMEAT.
Depuis l’agitation causée par la révolution constitutionnelle de 1830,
on peut dire que la France est devenue, par sa position et par ses ex-
périences de progrès politique, l’arbitre du repos de l’Europe. Il taul
bien ajouter qu elle l’est aussi par le caractère mobile de ses habitants.
Néanmoins, reconnaissons qu'il s’est fait dans ce pays un notable
changement. Les générations nouvelles y sont, malgré tout ce que 1 on
peut dire, plus naturellement disposées pour les arts de la paix, pour
l'industrie, pour le commerce, que pour les arts et les chances de la
guerre. L'esprit de conquête est plutôt un préjugé qu’une puissance
de l’opinion française de nos jours. Nous en avons pour preuve la
docilité merveilleuse avec laquelle a été subi tout récemment un chan-
gement de système qui tend à réprimer, même au prix de l'amour-
propre national, toute velléité belliqueuse et conquérante. Assurément,
quand un peuple est bleu décidé à courir les risques d’une guerre,
pour atteindre un but quelconque, il est impossible qu’il n’entraîne
pas son gouvernement dans l’orbite de ses désirs et de ses volontés.
Avons-nous vu rien de semblable dans la crise dernière ? Evidemment
non. Le public français, nos correspondances en font foi, suivait vo-
lontiers les idées belliqueuses de M. Thiers parce quelles flattaient ses
préjugés. Cependant il laisse prédominer les idées pacifiques de M.
Guizot, parce quelles favorisent en réalité ses tendances nouvelles,
celles qui le portent plus particulièrement qu’aulrefois vers la conser-
vation et le progrès de son bien-être domestique.
Comment se fait-il, cependant, qu’en dépit des garanties nouvelles
données à la paix, l’esprit public soit si lent.àse rasseoir, à se rassurer
en France? Car tous nos renseignements concordent sur ce point.
Les affaires restent eu stagnation, les grandes entreprises s'évanouis-
sent à l’état de projets, la spéculation est nulle, les affaires courantes
même sont restreintes et timides. On ne sait que redouter et il semble
qu’on redoute tout. Le moindre article insignifiant du plus pâle jour-
nal de l’Allemagne, le moindre mouvement de troupes, le moindre ré-
giment changé de;résidence au-delà du Rhin, est accueilli par la presse
française et par le public avec une défiance qui réagit sur tout. La sen-
sibilité nerveuse de nos voisins ne fut, à aucune époque, aussi vivement
exaltée. Il semble qu’ils soient également troublés et de n'avoir pas la
guerre, et de ne pas tenir la paix.
Au fait, il y a dans cette défiance populaire qui suspend la vie com-
merciale, une assez juste appréciation de l’étal des ciioses. Il est cer-
tain que les puissances signataires du traité du 15 juillet ont apporté
un très grand trouble dans la situation de i Europe entière. Il dépend
d’elles seules d’y mettre promptement un terme. Malheureusement il
est bien à craindre que l’isolement où elles ont laissé la France ne soit
une pomme de discorde jetée au milieu d’elles. Si la France eût con-
couru au réglement de la question d Orient, l’exécution du pacha, si
tant est que ce prince se fût mis dans le cas de la subir, eût tout ter-
miné et rétabli pour long-temps la paix universelle sur la base d'une
union cimentée entre tous les grands états de l’Europe. Ou a agi au-
trement, et par là on a laissé la France maîtresse, en définitive, de
rompre la quintuple alliance à la première occasion, en se réunissant
à l’improviste à celui de ses membres qui pourrait avoir à se plaindre
des conséquences du traité.
Eh bien, précisément quelque ôhose de semblable semble déjà se pré-
parer. Nous avons parlé d’une espèce de coquetterie faite à la France
par la Russie et qui semblerait annoncer, de la part de cette dernière,
une intention de rapprochement. Bien que les journaux français aient
cru devoir accueillir cet incident avec beaucoup de réserves, on voit
néanmoins percer dans leur langage une arrière-satisfaction. D'un
autre côté, les journaux anglais n’ont pu cacher sous leurs railleries la
vive contrariété de voir s’allier contre leur pays deux puissances éga-
lement ennemies de la prédominance anglaise.
Et que serait-ce, si la Prusse qui a pris tant de soins de ne pas bles-
ser la France, si l’Autriche qui craint, au fond, la suprématie anglaise
FMJÏLETON.
SS.LTTZ-.&B.TS.
DEUX NOUVEAUX TABLEAUX DE WIERTZ.
Notre ami Stéphano avait certes bien raison, lorsqu’il se plaignait, il
y a quelques jours, de 1 embarras où se trouve le critique qui doit ren-
dre compte d’une œuvre dont l’auteur lui est attaché par des liens plus
ou moins chers ; mais cet embarras ne peut exister qu’à l’égard d’un
artiste ou d’un écrivain dont la valeur peut être contestée, qui, très
jeune encore, n’a pu s’acquérir par ses travaux assez de gloire pour que
les éloges qui lui sont adressées ne puissent être suspectes de partialité :
— il est de ces hommes que l’on peut louer en tonte sûreté, sans crainte
d’étre accusé de camaraderie, parce que leurs ennemis, leurs rivaux
eux-mêmes sont forcés de proclamer leur mérite, et de le proclamer si
haut, que leurs amis, avec la meilleure volonté possible, ne pourraient
que difficilement aller au-delà.
Wiertz est de ce nombre.
Aussi, quoiqu’il soit de nos amis, nous n’avons jamais craint et nous
ne craindrons jamais, d’aborder l’examen de ses œuvres, de manifester
hautement la sympathie que nous éprouvons pour son beau talent, de
le proclamer un peintre de premier ordre ;
Parce que si vive que soit chez nous l’expression de cette sympathie,
elle ne sera jamais plus vive que celle de beaucoup de personnes qui
n’ont avec Wiertz aucune espèce de relations, qui ne le jugent que d’a-
près ses travaux.
Nous avons annoncé il y a long-temps, — nos lecteurs doivent s’en
rappeler, — que l’auteur de Patrocle avait conçu le plan d’un vaste ta-
bleau destiné à la cathédrale d’Anvers; l’artiste avait proposé au gou-
vernement de le rendre propriétaire de cette œuvre, à une seule condi-
tion, celle d’intervenir dansles frais matériels; M. Rogier, qui, nous
devons le dire, a montré le zèle le plus louable à encourager les arts et
les lettres, depuis sou arrivée au pouvoir, a accepté avec empressement
cette offre. Ua toile était faite, le peintre se proposait de mettre la main
a l’œuvre, lorsque tout-à-coup un obstacle s’est levé. — La salle Saint-
André qui lui avait été tacitement promise, et sur laquelle il comptait,
lui a été réfusée par le collège des bourgmestre et échevius, sous le pré-
texte qu’elle devait servir à la restauration d’anciens tableaux apparte-
nant à la ville. Remarquez que ce refus date du mois de juillet, que
Wiertz avait objecté que tout autre local pouvait servir à cet usage,
qu’il s’était engagé à avoir fini en moins de trois mois, que depuis cette
époque on n’a point touché aux réparations dont on parlait, que la salle
est restée inoccupée, — et dites-nous après cela, si, en cette occasion
encore, Ie collége n’a pas montré du mauvais vouloir, ne s’est pas fait
dans la Méditerranée, s’avisaient, à leur tour, de faire des avances à
celte puissance qu’on a laissé avec tant d’imprévoyance hors des con-
seils de l’Europe, comme pour en faire un élément permanent de dis-
solution, un appùi tout trouvé des griefs ou des préteniious rivales
qu’un avenir prochain ne peut manquer de faire surgir ?
Ce qu’il y a de plus clair dans tout cela, c’est que le traité du 15
juillet destiné à tout arranger, n’a réussi qu’à tout troubler en Europe.
Certes, nous ne prenons pas au pied de la lettre les idées de blocus
continental que l’on cherche à ressusciter contre l’Angleterre. On ne
refait pas deux fois une expérience politique aussi collossale dans un
siècle. Mais, ii n’en est pas moins vrai que la simple énonciation de pa-
reilles idées, et la prévoyance des revirements d’alliance qui semblent
menacer l’Europe, suffisent amplement pour expliquer la continuation
de la défiance qui arrête les affaires, et semble paralyser pour quelque
temps encore le mouvement industriel et commercial des grands états.
Il appartient à la sagesse des puissances de mettre un terme à cette
situation précaire. Il faut quelles adoptent au plus vile un système de
conciliation qui, après tout, ne fera que les mettre d’accord avec la lo-
gique, et avec leurs protestations récentes. Ii ne suffit pas d'invoquer
ia paix dans les occasions d’apparal, ii faut la fonder sur des bases rai-
sonnables pour qu elles soient solides. De nouvelles négociations, un
accord général sur quelques grands principes, valent mieux que toutes
les déclarations officielles, que toutes les harangues diplomatiques qui
ne disent pas ce qui est, et promettent la plupart du temps ce qui ne
sera pas. La diplomatie a fait beaucoup de mal en 1840. Elle a de
grandes réparations à faire au monde dans l’année qui commence.
VOIES lî'ff M©YE«S DE I84i.
Le rapport de la seclion centrale sur le budget des voies et moyens
— M. Jadot étant rapporteur — vient d être imprimé et distribué.
On sait que. par suite des dispositions relatives à la perception des
impôts pour 1841, votées par la législature avant quelle prît son con-
gé de nouvel an. les augmentations proposées par le gouvernement
doivent former des dispositions spéciales. Voici sur ces majorations le
résumé de l’opinion de la section centrale :
Contribution foncière. — Après le rejet, par cinq voix contre une, des
propositions du gouvernement qui font l’objet des articles 2 et 5, M. le
président met aux voix les questions suivantes: 1» La majoration de-
mandée par le ministre serait-elle, au besoin, fournie exclusivement par
voie de centimes additionnels sur la contribution foncière? — Résolue
négativement, par cinq voix contre une. 2° Cette majoration serait-elle
fournie, au besoin, sur les contributions foncière et personnelle et sur
les patentes ? — Résolucaffirmaliveulent par cinq voix contre une.
J crises sur les eaux-de-vie indigènes. — M. le président a ensuite mis
aux voix les questions suivantes: 1°Y a-t-il lieu de majorer l’impôt sur
les eaux-de-vie indigènes ? 2»Cette majoration portera-t-elle sur la fa-
brication ? Ces deux questions ont été résolues affirmativement, la pre-
mière par cinq, la deuxième par quatre voix contre une, un membre
s’abstenant. Quant à la restriction des droits imposés par les villes, ia
section centrale n’a rien décidé ; elle attendra les propositions pour la
majoration.
J crises sur les bières. — La majoration est rejetée par quaire sections,
et par deuxàlTinanimité. Déterminée par l’impression défavorable que
produirait cette majoration, par la considération qu’elle pèserait princi-
palement sur ceux qui peuvent le moins la supporter, et parce que la
bière est un objet de première nécessité, la section centrale rejette la
majoration à l’unanimité.
Accises sur les sucres. — Après la clôturé de la discussion, 51. le pré-
sident a mis aux voix les deux questions suivantes : 1° Demandera-t-on
qu’il soit pris des mesures, soit en haussant le rendement soit par tout
autre moyen, pour que lé sucre exotique qui se consomme en Belgique,
supporte réellement l’impôt? 2° Demandera-t-on, en outre, un impôt sur
le sucre indigène, soit comme mesure propre à empêcher la fraude sur
le sucre exotique, soit par toute autre considération? Ces deux proposi-
tions ont été adoptées à l’unanimité des six membres présents, il ré-
sulte donc des résolutions qui précèdent, que la section centrale croit
insuffisantes les mesures proposées par M. le ministre.
Amandes. — La majoration est adoptée dans toutes les sections.
Café. — La majorité de la section centrale repousse toute majoration
d’impôt sur cet objet. Elle a été déterminée par les considérations que
font valoir les différenteschambres de commerce, et principalement par
le motif que le café était devenu un besoin pour la classe la plus nom-
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breuse, la classe des ouvriers et des artisans, qui, par suite de la Cherté
des denrées, éprouve un malaise qu’il ne faut pas aggraver.
Canette. — La section centrale adopte sans observations.
Epiceries. — Adopté par toutes les sections et par la section centrale;
Fer. — La section centrale, qui n’est pas suffisamment éclairée sur
cette matière, propose le renvoi à une loi spéciale.
Figues. - Admis par tous les sections et par la section centrale.
Fruits verts et secs, de toute espèce. — Admis par toutes les sections.
Huiles d’olive. — La section centrale a entendu 51. le ministre, qui a
consenti à île pas ma jorer le droit sur les huiles destinées à l’industrie;
ayant un moyen dont il serait fait emploi pour les rendre impropres à
l’usage domestique. A cette condition, la section centrale adopte.
Les observations qui précèdent forment la première partie du rap-
port de la section centrale et sont exclusivement relatives aux majora-
tions d'impôts et aux autres dispositions contenues dans les 27 articles
du projet de loi. Celles qui suivent sont résultées de l’examen du ta-
bleau qui fait suite à ce projet; mais elles n’ont pour objet que les
articles sur lesquels aucune modification n’a été proposée, sauf en ce
qui pourrait concerner des questions d’ordre et de comptabilité.
Nous résumerons cependant l’opinion de la section centrale sur les
divers articles de celte seconde partie.
Loi de comptabilité. — La section centrale a désiré connaître le mon-
tant des bénéfices présumés que fera la fonderie de canons de Liège,
sur les fournitures qu’elle se charge de faire à plusieurs .puissances. Le
ministre n’avait pas encore reçu ces renseignements de Liège.
Droits de consommation sur les boissons distillées. — La section cen-
trale a désiré savoir s’il y a moyen de répartir d’une manière plus juste,
en raison du débit réel, l’impôt de cette consommation. On a fait obser-
ver que le but principal de la loi a été de supprimer une quantité de pe-
tits débits. Si l’on formait plusieurs classes, les quatre cinquièmes des
débitants seraient rangés dans la plus faible, et l’impôt se trouverait
plutôt réduit qu’augmenté.
Recettes diverees. — Il a été demandé que le produit de l’entrepôt d’An-
vers (120,000 fr.), dont la dépense figure séparément au budget des dé-
penses, figurât séparément aussi aux voies et moyens. On a fait la même
observation pour les passeports et ports d’armes de chasse, dont leS
uns produisent 65,000 fr., les autres 165,000 ; ainsi que pour les canaux
et rivières appartenant aux domaines dont on a sollicité le chiffre sé-
paré des produits. 51. le ministre a donné les éclaircissements suivants :
Le pont de Walhem produit 949 fr.; le canal de Bruges et d’Ostende,
7,490; l’Escaut et le Lys, 105,527; le canal de Nieuport, 17,555; le canal de
Terneusen, 41,477; le canal d’Antoing, 575,160; le canal de Sîaestrichtà
Bois-le-Duc 57,431, et la Meuse 62,682. Total 665,867. — Le produit pré-
sumé de la Dyle, du Demer et de la Dendre, qui ne sera reçu qu’à par-
tir de 1841, est de 27,152 fr. Total général, 695,000 fr.
Produits des barrières. — La section centrale a désiré connaître ce
qui s’opposait à la rentrée de la somme de 657,580 fr. qui i-estait à re-
couvrer sur d’anciens fermages de barrières. 51. le ministre a répondu
que l’administration n’avait aucune connaissance de ce prétendu ar-
riéré. On suppose que la cour des comptes est en erreur par suite d’un
malentendu et qu’elle a confondu le chiffre des recouvrements à opérer
avec le montant des adjudications de toutes les barrières.
Chemin de fer. — Plusieurs sections ont désiré que l’administration
financière du chemin de fer tombât sous le contrôle du ministère des
finances. Sur ce chapitre, 51. le ministre des travaux publics a divisé
ainsi les prévisions des recettes pour 1841 : voyageurs, 4,850,000 fr.;
bagages, 150,000 fr.; marchandises, 2 millions : Total, 7 millions.
Capitaux des fonds de l'industrie. — On a demandé l'import des capi-
taux provenant dufonds de l'industrie quisont exigibles en ce moment,
et spécialement sur ce qui concerne la maison CockeriU ; le ministre a
communiqué une note que nous résumons.
Sous le gouvernement précédent il a été avancé 7.407,807 fr. ; sous
le gouverment actuel 1,561,515 fr. Total 8,969,525 fr. 51ais par suite de
déconfiture et del’insolvabiiité des créanciers, 1.593,862fr. sont devenus
irrécouvrables; en déduisant donc cette somme ainsi que 157,552 fr. ,
qui ont été récouvrés, ilreste dû 7,457,927 fr.
La section centrale ayant demandé à quelle époque cette somme se-
rait exigible. il n'a été fourni d’explication que pour une somme dé
4,187,453 fr., laquelle serait entièrement recouvrée, du moins on l'espère,
dans le courant de 1842 et 1845. Quantau reste, nous ne supposons pas
que l'intention de M. le ministre soit d’en faire cadeau aux héritiers
Cockeriil.
Prix de vente des domaines. — Sur cet article, en ce qui concerne leS
forêts, des motifs puissants d’intérêt public et de hautes considérations
d’ordre social ont paru, à la section centrale, devoir s’opposera leur
aliénation. Cependant on s’est réservé d’examiner s’il ne serait pas pos-
sible d’exposer en vente celles des propriétés boisées qui, par leur posi-
tion isolée, sont d’une surveillance difficile et coûteuse.
Cautionnements et consignations. —On a fait connaître à la section
mi—bmiii—ii(ui«Mi«hIiiimiii»i— «wiiwwmufcHiniw i u M8i> it11 nu i ÉfMifiTi irm~~n nw ror iwimrrrir in~tnTi—r ~ nu Mm
l’instrument de certaines petites passions jalouses, n’a pas eu pour but
d’empêcher la réalisation d'un monument élevé à la gloire du pays.
Que le lecteur se rassure ; ce que nous venons d’écrire ne doit nulle-
ment nous éloigner de notre sujet ; nous voulions dire que s’il n’a pas
été permis à Wiertz de melire à exécution son gigantesque projet., au
moins sa gloire n’en a pas tant souffert, il n’est pas resté inactif. — Car
il a produit deux œuvres qui sont appelées, dans un genre différent, à
ajouter encore à sa réputation et qui seront, pour ses admirateurs,pour
ceux qui attendaient avec tant de patience son grand tableau, au moins
une fiche de consolation.
Ces deux charmantes productions sont en ce moment exposées au Pas-
sage-Lemonnier ; le peintre n’a pu trouver d’endroit plus convenable ;
et comme le Passage n’offre pas tout le jour désirable, c’est à la lumière
qu’il a été obligé de les montrer; on conçoit que vues de cette manière,
elles y perdent au lieu d’y gagner, et que certaines couleurs restent
sans effet.
L’un de ces tableaux représente un Satyre assis, jouant du chalu-
meau; devant lui sont deux enfants entrelacés qui dansent aux accords
de cette musique. — L’autre nous montre un groupe de vingt-une
jeunes filles.
Pour bien juger du mérite de ces œuvres, il faut avoir vu Patrocle;
il faut avoir vu les magnifiques esquisses que l’artistea dans son atelier,
tracées d’une main si ferme, si vigoureuse, si hardie. On s’étonne alors
que l’homme qui a créé ces figures homériques, puisse réunir égale-
ment dans son pinceau tant de finesse, tant de grâce, tant de délicatesse,
tant de vaporeux; et cette diversité dans son talent porte à l’estimer
davantage encore.
Les nouveaux tableaux de Wiertz ne comportent guère de descrip-
tion ; ce serait en vain que nous voudrions, par ce moyen, en donner
une idée au lecteur; ce n’est pas par le sujet, par l’action que l’artiste a
su intéresser, a su charmer ; l’un, nous l’avons dit, nous montre uni-
quement un Satyre et deux enfants, sur un fond de paysage, tandis que
l’autre nous représenteun groupe de nymphes, la gorge et les bras nus,
qui s’apprêtent pour une chasse.
C’est d’une grande simplicité ; — et, pourtant en face de ces œuvres,
nous nous sommes délectés pendant des heures entières, tant le Satyre
est naturel, original, d’un puissant coloris, tant les enfants sont peints
avec grâce et naïveté, tant leur attitude plait, tant le paysage est pro-
fond, brillant, rendu avec art et vérité.
Et les jeunes filles donc! — Oli ! vous tous qui avez rêvé une femme
céleste, qui dans vos jours d’illusions avez évoqué ies anges du ciel, les
houris du Paradis de Mahomet, accourez vers cette toile, — car s’il ne
vous est pas donné de voir en ce monde se réaliser vivante votre idéali-
té, vous la rencontrerez là au moins; la fiction confuse de votre imagi-
nation aura pris un corps, une forme; vous pourrez la contempler.
Car Wiertz, qui s’est nourri de l’étude des grands modèles de l’anti-
quitté, nous a montré là, la beauté sous toutes ses faces, l’a revêtue de
toutes les formes qu’elle peut emprunter. Depuis celui qui aime la fem-
me aux cheveux noirs, à l’œil ardent au teint coloré , aux formes
vigoureuses, jusqu’à celui qui l’aime blonde, pâle, mélancolique et
frele, tous peuvent trouver là un aliment à leur goût. C’est un sérail
dont le Sultan ne sortirait pas sans avoir au moins fait choix d’une
Sultane. •
Certes, nous ne prétendons pas que toutes ces physionomies doivent
plaire à un égal degré : il se trouvera des personnes qui diront: celle-ci
est plus jolie que cette autre, cette autreest mieux que celle-ci; — par-
ce qu’en fait de beauté, nous sommes exclusifs, tous nous avons un
genre auquel nous accordons une préférence marquée et en dehoi s du-
quel toul nous paraît médiocre. — Et nous-mêmes qui vous parlons,
nous vous dirons qu’au milieu de cette phalange séraphique, nous avons
un type de prédilection, nous avons faitun choix. . , .
Ici. — madame qui nous lisez, — nous nous plaisons à croire que
vous vous arrêtez, que votre visage exprime la curiosité, que vous se-
riez bien aise de connaître celle que nous, avons adoptée. C’est peut-
être une bien grande fatuilé de notre part de penser cela, mais enfin...
— Permettez-nous donc de vous dire quenous avons toujours une pré
dilection pour les femmes blondes, frêles, pales, — dans le cas où vous
seriez noire ou brune, il est bon d’ajouter que ces couleurs ont égale-
ment leurs charmes et que nous sommes loin de tes dédaigner. — Vous
devinerez donc facilement, madame, ensuite de cette déclaration franche
et naïve, que nous avons accordé la préférence à celle placée l’avant
dernière à droite du tableau et qui tient une levrette dans ses bras. —
Dans notre opinion c’est la plus belle : elle nous plait. ,En ces sortes
de questions, l’opinion ne peut jamais être«»e. H y a autant d’amours
que de physionomies, a dit un auteur; cette pensée explique parfaite-
ment la diversité des avis que avons entendu émettre sur les nymphes
de Wiertz. Nous nous sommes trouvé en lace du tableau avec juste au-
tant de spectateurs qu’il y a de figures visibles, et pour chacun d’eux,
il v avait une figure admirable, divine, à laquelle toutes les autres
étaient sacrifiées, et celte figure n était la même pour aucun.
. Si nous rassemblons ces diverses opinions , nous aurons pour ctfnsé-
I quence que le tableau de Wiertz est un composé défigures parfaites, et.
! dont chacune rencontrera son admirateur exclusif.
Après avoir fait ressortir les beautés d’une œuvre, le critique doit en
signaler les défauts; c’est une triste tâche quelquefois, mais ici elle nous’
est bien douce; car après examen répété, il nous a été impossible de
rien trouver à reprendre; le dessin est d’une correction et d'une pureté
parfaite, les carnations Sont vivantes, la couleur est partout douce,
li;
t, selon l’avis de quelques-uns, le voile qui re-
........rremierde ces tableaux, n’a pas toute la légèreté,
toute la transparence désirables, et nu des bras d’une des nymphes, —
réaisement, — n’est, pus assez arrondi. L’observation est
larmonieuse; seulement,
couvre leS enfants du pr<
de là nôtre pré ....... ,
juste, — et nous permettons à Wiertz d’y retoucher,
loucher que cela.
5t. L .
, mais de ne re-
(Espoir dé Liéÿè-f
'■•4 |