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840. — M.° ©O.
A.MEES, liMsidi <£© Mars.
C'limniènie Asasiée.
LE PRECURSEUR
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du PRÉCURSEUR, Bourse Anglaise,
K.o 1040 ; en Belgique et d l’étranger
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PAIX. — LIBERTE. — PROGRES.
H
3» Mars.
ni: Il A KECOMPOSITiaV MU hkikistere.
Avons-nous ou n'avons-nous pas en ce moment un gouvernement
régulieren Belgique? Voilà la question que depuis quinze jours chacun
s’adresse sans pouvoir la résoudre.
Ce n’est certes point que nous voudrions voir traité à la légère un
acte aussi important de la prérogative royale, ou nous plaindre de ce
qu’elley met toute la réflexion désirable ; mais nous craignons que le
temps écoulé depuis le 14—Ifi mars n’ait point été employé à sortir
franchement du provisoire ; nous redoutons qu’on ne cherche à ha-
bituer l’opinion publique à voir reparaître le ministère tombé sinon
tout entier, au moins rapiéceté, et nous regrettons vivement le temps
perdu, et le temps bien plus long qui se perdra dans l’avenir sur les
questions de personnes et de partis, si par malheur la question minis-
térielle venait à se résoudre de nouveau par la présence des anciens
membres du ministère.
Si nous étions destinés à contempler un événement qui, croyons
nous, n’a point d’exemple dans les gouvernements parlementaires ;
c’est-à-dire si nous voyions qu’un ministère repartit après avoir été
battu sur une question dont il aurait fait lui-même une question de
cabinet, ce n’est pas tant encore à lui en effet que nous serions tenté
de nous en prendre qu’à la chambre, qui se laisserait ainsi honnir en
face.
Dans toute autre circonstance nous eussions tenu compte de la
question elle-même, qui en définitive bien posée n’eût jamais pu ren-
verser un cabinet habile et surtout franc; mais dans la conjoncture
actuelle où la malhabilité du ministère a été la seule cause de sa dé-
confiture, pourquoi la chambre reviendrait-elle d’un vote qui a eu un
grand retentissement elqui a été applaudi par la majorité de la nation,
parce que ce vote a renversé un cabinet qui,pris dans son ensemble, a
fait de larges blessures à sa dignité nationale ?
Nous tenons à obtenir dans l'administration intérieure les consé-
quences du gouvernement représentatif, c’est-à-dire l'avènement na-
turel des capacités hors-ligne ; et c’est en leur faveur seul qu’à nos
yeux les pouvoirs politiques peuvent homologuer des foills d’indul-
gence. En conséquence, nous le répétons, M. Nothomb, quoiqu’aussi
mal inspiré que M. Willmar, que M. de Theux et que tous les autres
ministres qui ont accepté la solidarité de la réintégration du général
Vandersmissen, n'en a pas moins tous nos vœux pour que le poste
qu’il a véritablement illustré reste entre ses mains capables, énergi-
ques, progressives et infatigables.
C’est jeudi prochain que la chambre des représentants se réunit.
Une proposition, dit-on, doit être faite dans cette séance. Si nous
devons en croire certains bruits, c'est devant cette chambre que s’ef-
fectuera la transaction conciliatrice qui devait être proposée d'abord
devant le sénat. — Mais nous nous plaisons à (louterde cette tentative
qui n’ajouterait rien à la considération de ceux qui en seraient les pro-
moteurs ou les instruments.
En effet, à quoi cette transaction aboutirait-elle ?
A un provisoire fâcheux pour le pays qui verra un temps précieux
se perdre en crises successives que nous prévoyons, que nous prédi-
sons même, et qui verra conséquemment s’ajourner une infinité de
questions qui seront considérées comme accessoires ou intempesti-
ves par celui qui n’atteùd pas, comme les inondés des Polders, qu’on
le mette à l’abri des intempéries, des souffrances de la faim , en un
FEUILLETON.
MAROC. — SUEZ. — TANGER.
L’empire de Maroc, désigné aussi sous le nom de Mogh’-rib-ul-aesa
fies extrémités de l’occident) comprend cette partie de l’ancienne
Mauritanie, connue sous la dénomination de Mauritanie. Tangitana.
Les auteurs et les voyageurs qui ont traité la géographie de cette con-
trée ne sont pointd’accord sur son étendue; communément on lui donne
de 23 à 24 mille lieues carrées. Situé entre les 27 et 35? de latitude nord,
et entre les 2 et 14» de longitude ouest, ce pays aurait ainsi 230 lieues de
longueur sur 130 de largeur.
Au nord il a la Méditerranée pour limite, à l’ouest l’Océan atlantique,
à l’est il touche à la régence d’Alger, dont il est séparé par la Malouia,
une de ses principales rivières, et vers le sud il s’étend du côté des dé-
serts, sans qu’on puisse fixer ses véritables limites du côté de la terre.
Divisé en cinq petits royaumes, l’empire de Maroc comprend dans sa
partie méridionale le pays de Maroc propre, de Sous, de Tafileit et la
province d’Al-Draha ou de Darat ; dans la partie du nord, le royaume de
Fez, dont le pays de Méquine était séparé et formait lui seul une pro-
vince. Ces petits états étaient éternellement en guerre l’un avec l’autre
quand ils furent soumis et réunis sous un seul souverain de la famille
des Chérifs.
Leur population respective estloin d’être en rapport avec leur éten-
due. M. Graeber de Homso,qui, en sa qualité de consul sarde et suédois,
a habité Maroc pendant six ans, l’évalue à 8,300,000 habitants. M. Jack-
son, consul anglais à Mogador , l’évalue à 14,000,000. Le capitaine
Washington et M. Hoert ne la font pas monter à 6,000,000, et Balbi la
réduit à 4,500,000.Quel que soit le chiffre réel et en prenant celui même
du capitaine Washington, il résulte de cette évaluation approximative
que la population est très clair-semée. Elle ne donnerait que 641 habi-
tants par lieue carrée, au lieu de 1,300 que donne la France.
Cependant, par la beauté de son climat, la fertilité de son sol, la ri-
chesse de ses pâturages, ce pays pourrait suffire à une population cent
fois plus nombreuse; malheureusement il végète sous l’empire du des-
potisme de la barbarie. On y a conservé les pratiques rurales les plus
simples, mais les plus pénibles. La charrue y est connue, mais elle est
encore à son état d’enfance; non-seulement on accouple pour la traîner
un âne à un cheval ou à un boeuf; mais, à la honte de l’humanité, on y
voit aussi des femmes, des jeunes filles presque nues attelées au même
joug que les ânes et les mulets !
Les Maures des campagnes considèrent moins leurs femmes comme
des compagnes que comme des esclaves destinées au travail ; ils les
emploient à tous les plus pénibles travaux ; (files sont pour eux comme
des bêtes de somme, comme des meubles vivants.
Le climat de l’empire de Maroc est généralement tempéré ; la chaîne
des montagnes de l’Atlas, dont le sommet est toujours couvert de nei-
ge, le défend du vent brûlant de l’est. Cependant, quoique les pluies y
soient assez régulières, il est sujet à des inondations subites et à des sé-
cheresses excessives. Les habitants n’ont rien prévu pour garantir
leurs moissons et leurs pâturages de l’intempérie des saisons. Géné-
ralement on ne sème là que ce qui est nécessaire à la vie. A trois
mot de la misère; par celui qui n’attend pas, pour sa réhabilitation
commerciale, que les indemnités réclamées pour les pertes résultant
de l’incendie de l’entrepôt d’Anvers le mettent à même de payer des
créanciers impatients et qui, après dix années d’attente, pourraient
bien en venir à des moyens extrêmes dont le résultat. grâce aux pré-
jugés existants, est le plus souvent le déshonneur, l’infamie pour celui
qui en est l'objet et la victime.
Cette transaction aboutirait à une défaite complèle pour le parti que
représente M de Theux, défaite que ce parti pourrait convertir en triom-
phe s’il avait l’adroite politique d’attendre la possibilité, nous disons
plus la probabilité de revoir un jour son chef remonter au pouvoir en
remplacement du cabinet que nous aurions voulu, et qui ne serait pas
immuable quelque bon qu il puisse être, car sous un régime consti-
tutionnel comme celui sous lequel nous vivons, quel est le ministère
auquel on puisse promettre une longue existence 'I
KOUVISIiI.ES IÏE B.A HOLLA&DE.
(Correspondance particulière du Précurseur.)
La Haye, 29 mars.
Les sections delà seconde Chambreviennenld’achever l’examen des
réponses du gouvernement relatives aux cinq projets touchant la loi
fondamentale. Elles ont insisté sur des garanties plus amples, sur des
modifications plus larges que celles présentées par le gouvernement.
Les sections ont particulièrement exprimé le désir que des représen-
tants du duché de Luxembourg fussent appelés à prendre part aux dé-
libérations sur la modification de la loi fondamentale. Le gouverne-
ment ayant observé que cette particij»ation ferait traîner les discussions
en longueur, les sections ont répondu que cette raison ne devait pas
exclure toute une province de la représentation nationale ; que le bon
droit s'opposait formellement à une pareille mesure, et qu'on ne de-
vait pas s’exposer à encourir les reproches ultérieurs que celle popu-
lation ne manquerait pas d’adresser au gouvernement. La Néerlande
a besoin d'une constitution établie sur des bases nouvelles, et quoique
ce besoin soit devenu pour le pays d'une urgence telle qu’on devrait
éviter avec soin tout ce qui pourrait arrêter la marche de cette grande
amélioration, on devrait songer en même temps à donner à ce travail
une existence durable et à le poser sur un pied de stabilité impérissable.
Quant à la séparation administrative de la province de Hollande,
elle a été fortement approuvée par les sections. Toutefois, elles ont
voulu que les deux parties eussent un nombre égal de membres dans la
représentation nationale. Elles désirent encore que le nombre des dé-
putés, qui s’élève maintenant à 55, soit fixé, dans la nouvelle Constitu-
tion, d’après la population actuelle des provinces.
Demain, les sections continueront l’examen des sept projets présen-
tés dernièrement par rapport à la loifondamentale.Cet examen achevé,
des observations pressantes, concernant la situation financière du pays,
seront adresséesau gouvernement, et afin de laisser à celui-ci toute la
latitude nécessaire pour rechercher l'état de cette situation, la chambre
s’ajournera pour une quinzaine de jours.
L’Arnhcmsche Courant contient aujourd’hui une pièce en vers où
l’on met au carcan du ridicule l'article du Ilandelsblad qui félicitait
le roi sur la renonciation à son mariage avec la comtesse d'Oultremont.
Un homme éminent par ses vastes lumières. M. Thorbecke, profes-
seur de droits à Leyde (ancien professeur de littérature à Gand), vient
de publier un nouvel opuscule en faveur de son système, qui tend sur-
lieues des villes les terres restent en friche et sans propriétaires. Lors-
que la récolte est abondante, on jette le superflu, sans s’inquiéter de
la saison suivante. Sous un gouvernement aussi despote, aussi vorace
que celui sous lequel est courbée cette contrée, où le sujet n’a rien,
n’est sûr de rien, et qu’un ordre du souverain peut dépouiller de
tout, même de la vie, on conçoit aisément que les arts, que l’agricul-
ture, que le commerce, que tous les moyens de bien-être et de civilisa-
tion soient également négligés.
Cependant Fez est une ville d’industrie et de commerce. Les arts et
les sciences même y ont été cultivés, mais à l’exception de la prépara-
tion des peaux, dans laquelle excellent surtout les habitants de Tafileit,
l’industrie manufacturière des Marocains est à peu près nulle; ils ne se
livrent grossièrement à la plupart des autres industries que pour leur
usage personnel et immédiat. Leur commerce est très limité. Le plus
actif paraît être celui qu’ils font avec Tombouctou, au moyen d’une
caravane partant d’Abba, dans la province de Draha.
Ils comptent aussi quelques ports assez fréquentés : Tétuan, sur la
Méditerranée; Tanger , Rabban , Mogador, sur l’Atlantique. Toute leur
politique se borne a la piraterie. L’empereur, qui se considère comme
le second sultan de l’empire de Mahomet, s’attribue la dixième partie
des prises, des captifs, des bestiaux,des fruits, des grains, et de tous les
produits de la terre. On élève approximativement le revenu de la dîme
et du brigandage, à 500 quintaux d’argent qu’il exerce à raison de 383
livres sterling le quintal.
L’effectif de ses armées s’élevait en 1836 à 35,000 hommes en état de
tenir la campagne. Sa marine se composait d’une frégate et de 14 bricks.
On porte aujourd’hui, nous ne savons par quel rapport, cette armée à
50,000 hommes et la floLle de 24 bâtiments, auxquels on ajoute des fe-
louques et des sandales que l’on manœuvre à la voile et à la rame, et
qui armés en guerre éviteraient nos croiseurs et feraient beaucoup de
mal au commerce. On suppose qu’il ne nous faudrait qu’un vaisseau,
une frégate et deux bateaux à vapeur pour bombarder et démolir les
remparts de Tanger, le port le plus important de ce côté ouest de
l’Afrique.
La ville de Maroc, ou Mara-Koucka, capitale de tout l’empire, est une
ville complètement déchue de son ancienne splendeur, et qui est située
à vingt lieues de la mer. Bâtie en 1052, par Abu Tessisin I»-, à l’époque
de sa grande prospérité elle comptait 80,000 habitants ; elle a perdu au-
jourd’hui la moitié.
Maroc est entouré de murs très épais, bâtis avec un ciment composé
de chaux et de terres sablonneuses, mises dans des caisses, et réunies
ensuite à coups de mouton. Le palais impérial, qui fait face au Mont-
Atlas, est bâti en pierres de taille et orné de marbre. Le palais est sub-
divisé en plusieurs pavillons, que séparent des cours et trois jardins
magnifiques. Le plus petit est appelé Jinen-Nile, jardin du Nil, a cause
des fruits et des plantes du Nil, de Tombouctou et de Soudan qui y
croissent. L’empereur permet aux marchands étrangers qui vont le
saluer de dresser leurs tentes dans les deux premiers de ces jardins.
La mosquée d’El-Koutoubia est construite d’après celle de Sébille.
Bel-Abbas est un édifice qui offre, réunis, un sanctuaire, un mausolée,
une mosquée et un hôpital, où l’on soigne jusqu’à 1,500 malades. Près
du grand bazar El-Kasserïa se trouve l’immense fabrique de maroquin,
où travaillent 1,500 ouvriers.
Le palais de justice, appelé Medschouârd, est un grand carré entouré
d’un mur où l’empereur donne ses audiences et rend ses jugements
deux fois au moins par semaine. Tout le monde est admis là, et peut li-
brement lui porter ses plaintes. Les empereurs, qui n’ont d’autre code
que le Coran et leur volonté, ont été pendant des siècles parties, juges
et exécuteurs dans toutes les affaires criminelles. Cette juridiction exis-
tout à obtenir plus de garanties pour l'administration des finances, et
pour la régularisation des revenus des Indes. Cet opuscule a été reçu
avec une grande satisfaction par les membres de la seconde chambre.
AIGIETERRE.
Lohdres, 27 mars. — La reine et ie prince Albert ont honoré hiçr de
leur présence la représentation de M. Charle Semble au théâtre de
Covent-Garden. M. Kemble jouait le rôle de Merçulio dans Roméo et
Juliette.
— La chambre des communes, dans sa séance du 26, s’est de nou-
veau occupée du bill relatif à l’enregistrement des votants dTrlàhde
proposé par lord Stanley, et dont elle avait la veille ajourné la discus-
sion. Plusieurs orateurs ont pris la parole, et entr’autres lord Stanley
et M. O’Connell, qui ont parlé longuement. Le bill a été adopté à la
majorité de 250 voix contre 234. L’annonce de ce résultat a élé accueillie
par de grandes démonstrations de joie de la part de l’opposition. Le
colonel Sibthorp s’est ensuite levé et regardant lord John Russell en
face : « J’espère bien, a-t-il dit, que le noble lord voudra bien après ce
vote ne pas se moquer (humbug) plus long-temps du pays ! » Ce mot a
été accueilli parles éclats de rire de l’assemblée.
— Nous apprenons qu’il a été expédié hier beaucoup d’or de la Ban-1
que d’Angleterre pour Paris, dans le but de liquider les obligations
contractées il y a quelque temps par cet établissement. Nous regardons
cette affaire comme à peu près terminée. Elle cause des dérangements
dans toutes les transactions qui se rattachent aux changes. Les spécu-
lateurs dans cette partie n’agissent pas avec leur confiance ordinaire,
tant qu’ils peuvent redouter la concurrence puissante de la Banque:
alors la balance des prix est troublée et tous les calculs de bénéfice
s’évanouissent. (Globe.)
— City article du Globe : midi : La situation du commerce et des
manufactures parait être aussi défavorable partout ailleurs qu’en An-
gleterre et il est difficile de prévoir jusqu’à quand cet état de choses se
prolongera. Quant au commerce de Londres, la stagnation s’accroît évi-
demment de jour en jour, sans qu’on puisse prévoir de changement
prochain , et nous craindrions qu’elle n’amenât de grands embarras, si
nous ne savions qu’il n’y a pas eu de spéculation exagérée, mais que les
affaires ont été dernièrement dirigées sur des bases saines et rationnel-
les, de sorte que le commerce est bien préparé à soutenir une crise
modérée.
Les nouvelles du Lancashire etduYorkshiresont plus favorables cetté
semaine, mais il reste encore bien des sujets de plainte qui ne disparaî-
tront que quand notre commerce avec la Chine et avec les Etats-Unis
aura repristoute son activité première. Il est néanmoins satisfaisant de
savoir que partout les ouvriers ont passablement d’ouvrage, et par
conséquent ne sont pas exposés aux privations qu’ils auraienta souffrir
s’ils venaien t à chômer dans un moment où le prix des objets de première
nécessité est si élevé.
Cette stagnation des affaires a nécessairement réagi sur le marché du
numéraire; les spéculateurs sont forts contents de placer leurs fonds
sur effets publics, bons de l’échiquier et autres sécurités dont les cour-
tiers et spéculateurs regorgent . Les consolidés sont faibles et montrent
une tendance à la baisse; 90 ! [2, 5[8 au comptant et 90 5[4. 7^8 en liquida-
tion.
ESPAGNE.
La Gazette de Madrid du 21 publie le décret par lequel le comte de
Clonard a été nommé capitaine-général de Grenade et Jaen, en rempla-
cement du général d’Aldama. On sait que l’on parlait depuis quelques
jours de la destitution de ce général.
Les chambres n’ont pas siégé le 20.
Une correspondance d’Aragon, publiée dans VEmancipation de Tou-
louse du 25, revenant sur le bruit qui avait couru du passage de Cabrera
en Catalogne dans le but de se préparer à un voyage en France, ajoute
les réflexions suivantes :
« Ce qui pourrait donner assez de fondement à cette nouvelle, c’est
qu’en se rapprochant comme il vient de le faire de la frontière des
Pyrénées, on a remarqué qu’il s’était fait suivre de ses deux sœurs et
tait encore sous le fameux Muley-Ismaël, ce sultan qui eut trois
mille femmes, auxquelles il laissa neuf cents garçons et trois
cents filles. Voici comme il procédait : Un fermier étant venu s.e
plaindre à lui des nègres de l’empereur qui avaient Volé ses bœufs
et détruit toutes les sources de sa fortune, Ismaël appelle devant
lui tous ses nègres, et tue sur-le-champ ceux qui lui sont dénoncés par
le fermier. Puis il l’interpelle à son tour, et lui demanda comment il
pourra le dédommager de la perte de tant d'esclaves; et apprenant qu’il
n’a que la misère à lui offrir, il lui fait subir le même sort qu’aux victi-
mes immolés. Les états des despotiques aiment les lois simples et les
modes expéditifs. „
Les Maures, race dégénérée, efféminée, semblentnés pour l’esclavage
et dignes du despotisme sous lequel ils courbent la tête. Ils sont mous,
lâches, paresseux, et avec des traits réguliers, de beaux yeux, de belles
dents, ils n’ont qu’une physionomie sans âme et sans expression. Leurs
mœurs sont en harmonie avec la barbarie dans laquelle on les voit
plongés. Leur superstition est excessive comme leur ignorance ; iis
n’observent dans leur dévotion que les pratiques les plus bizarres ét les
plus opposées même aux lois de l’islamisme. Un seul trait de leur ca-
ractère est à remarquer: jamais on ne voilà Maroc la fouleaccompagner
un criminel au lieu du supplice ; s’ils viennent à en rencontrer un sur
leur chemin, il excite leur compassion et non leur curiosité. C’est Une
leçon donnée par des barbaresaux peuples civilisés.
De toutes les villes qui composent l’empire, Fez est la plus peuplée.et
la plus importante. C’est le centre du commerce de cette partie de !’Afri-
que. Algbey évalue la population à 100 ,000 habitants, le consul Jackson
l’élève à 380,000. M Graeberg lui en assigne 80,000, tandis que M. Caillé
ne lui en donne que 20,060, chiffre qui parait beaucoup trop réduit. Fez
est situé sur le penchant de plusieurs collines qui l’environnent. Ses
rues pavées, mais étroites, tortueuses, ne sont que de longues et obs-
cures galeries recouvertes par des treilles ou de la maçonnerie (pii em-
pêchent l’air de circuler. On compte jusqu’à deux cents mosquées dans
ses murs. La principale, remarquable par son étendue et les ornements
qui décorent ses lourds piliers de marbre, a une demi-lieue de circon-
férence. Au commencement de ce siècle, Fez possédait une bibliothè-
que et des écoles renommées dans toute l’Afrique. L’amour de l’étude
y est éteint ;l’industrie y a survécu. On y fabrique (les couvertures,des
armes, de la poudre à canon.des maroquins. Les bains sulfureux et fer-
rugineux y attirent beaucoup de malades.Le commerce y est florissant;
les marchés sont en grand nombre et sont aussi abondamment appro-
visionnés que ceux d’Europe. _
C’est dans le royaume de Fez que se trouvent les ports de Tétouan,
Larache ou El-a-Raysch et Tango. Tétouan, habité seulement par des
Maures ou des Juifs, et dont les chrétiens sont bannis, possède un port
sur la Méditerranée, et commerce principalement avec l’Espagne, La
station ordinaire de la flotte ou flottille de l’empereur est établie à La-
rache. Tanger, résidence des consuls européens, et où l’un d’eux vient
d’être outragé, est situé à 60 lieues nord-nord-ouest de Fez, Sur le dé-
troit de Gibraltar. Son port est grand, commode et sûr. Les murailles
qui entourent la ville, bâtie sur ie penchant d’une colline, tombent en
ruines. Vers la mer, il y a quelques batteries. La population Se compose
de soldats, de marchands, de juifs qui ne sont pas rélegués, comme a
Maroc, dans un quartier particulier, et dont les femmes sont renom-
mées par leur beauté.
Dans la prévision d’une attaque maritime, Muleÿ-Abderamnn, I em-
pereur actuel, a songé, dit-on, à relever les murs de Tanger. S il était
vrai que les Arabes eussent insulté les sujets français et frappé un con-
sul européen, nous verrions sans doute bientôt la France renverser ceà
murailles et les raser. |