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1811. — M.°84.
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Sixième Aüsnét**
AîWlîRS, SEiiianelic Ô4 laiiviei*.
JOURNAL POLITIQUE
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BE IiA FltaCMAIXE SESSION Ul PABLEJIEST
AAULAIS.
C’est après-demain, 2G janvier, que le Parlement anglais va rentrer
en session. La reine en fera l’ouverture en personne.
Jamais session n’aura été inaugurée sous des auspices plus solen-
nels. Les whigs, maîtres du pouvoir depuis dix ans, ont épuisé en bien
peu de temps la somme des améliorations politiques que permettait
l'opposition dominante de l'aristocratie anglaise. Ils allaient faiblissant,
périssant d’impuissance et d'inaction forcée. Ne pouvant être réforma-
teurs, ils se sont fait guerriers.
Le parti tory ennemi jaloux du grand mouvement de 1830 qui a
changé la face de l’Europe et rendu si difficile leur retour aux affaires,
s’est attaché, depuis long-temps, à poursuivre les whigs sur le terrein
de la politique étrangère. On sait que les tories se proclament le parti
national par excellence. Leur longue possession du pouvoir leur donne,
en effet, beau jeu, pour s’attribuer tous les succès, toutes les conquêtes
de l'Angleterre durant une période indéfinie. Les whigs, nouveaux
gouvernants, portés au ministère par l’influence d une révolution étran-
gère. contraints par la force des choses de sanctionner la conquête de
l’Algérie, c’est-à-dire le démembrement effectif de l'empire Ottoman,
jouaient aux yeux de l’Angleterre un rôle blessant pour l’orgueil na-
tional. En un mot, leur politique étrangère, passive comme elle l’était,
ne pouvait manquer de devenir la partie faible de leur situation. Tou-
tefois, cette faiblesse a passé inaperçue du peuple, tant que la ré-
forme en travail a maintenu l’agitalion publique.
Mais, le jour est bientôt venu où la réforme s’est arrêtée devant la
résistance invincible de l’aristocratie, et le découragement des classes
populaires. Alors il a fallu compter avec tout le monde, et les whigs se
sont aperçus qu’ils avaient contre eux non-seulement les tories exal-
tés par une sorte de triomphe d’inertie, mais aussi les réformateurs
désappointés par l’impuissance du cabinet à pousser la réforme jus-
qu'au bout. Le chiffre décroissant de leur majorité avait atteint, à la
fin de la dernière session, sa dernière limite- Il n’était pas bien certain
qu’à la session qui va s’ouvrir, ce chiffre ne les fil pas tomber en mi-
norité. Il était grand temps d’aviser.
C’est alors que, la Russie aidant, lord Melbourne et lord Palmerston
ont songé à retremper leur ministère dans les eaux du patriotisme et
de l’orgueil national. C’est alors qu’une croisadea été organisée contre
le pacha d'Egypte, croisade dont le rôle actif devait être réservé à
l’Angleterre, et lui permettrait de prendre revanche de sa longue
inaction guerrière.
Ce n’est pas le cas de revenir ici sur les événements et les résultats
de la campagne de Syrie. Les événements sont connus, les résultats ne
sont encore ni tous constatés, ni tous obtenus. Néanmoins, il faut re-
connaître que l’ensemble de la campagne a donnégainde causeà la po-
litique de lord Palmerston, hormis sur un point, l’alliance française
qui se trouve extrêmement compromise. Quoiqu’il en soit, le ministère
whig est arrivé, selon toute apparence, au but qu’il se proposait. Il a
relevé son crédit en donnant au patriotisme anglais une satisfaction
d'autant plus vive qu’elle s'applique tout à la fuis à l’amour-propre et
à l’intérêt matériel.
C’est avec ce précédent favorable que le cabinet whig va se présen-
ter au parlement. S’il faut en croire les nouvelles de Londres, il peut
compter sur une majorité positive. Mais quels seront les éléments de
celte majorité? Evidemment, il y aura sur ce point un notable change-
ment. Voici à peu près ce qu’il est permis de présumer.
Les radicaux qui se sont attachés à l'alliance française avec une
persévérance et une énergie d’autant plus grandes qu’ils redoutent plus
le triomphe de l’aristocralie chez eux, les radicaux cesseront, en gran-
de partie, d'appuyer un ministère qui s’est fait tory en abandonnant
la réforme, et aristocrate en rompant avec la démocratie conlinentale.
En rentrant dans l’opposition, ils seront accompagnés d’un certain
nombre de whigs franchement atlachésaux principes libéraux de 1830.
Les Irlandais sont rentrés dans l’agitation. La voix d O’Connell pro-
clamant définitivement le rappel de I Union, a trouvé des milliers d'é-
chos. La diversion que le ministère a voulu faire au redressement des
griefs de toute nature qui irritent les populations de l'empire britan-
nique, n’a fait qu’irriter de plus en plus les malheureux habitants de
FEUILLETON.
r3S?'3a;i,«a&r«.
En 1817, vers la fin de décembre, il y avait à Paris une veuveâgée de
Vingt-huit ans, jolie, ce qui est mieux qu’être belle, d’une fortune rai-
sonnable et qui dans quelques jours devait changer son nom de Dutillet
contre celui de M. de Lanzy dont elle allait devenir la femme. Quoique
M. de Lanzy eût à peine trente-cinq ans et qu’il fût beau cavalier, ce
n’était de la part de la jolie veuve, ni un mariage d’amour, ni un maria-
ge de convenance ou d’intérêt; c’était un acte de soumission envers sa
famille, une preuve d’obéissance qu’elle donnait à son père. Mmc 1)uI-
tillet avait été mariée à dix-huit ans; bientôt après elle était devenue
veuve, et sauf une absence faite en 1810, époque où elle avait passé un
an ou quinze mois à Strasbourg chez une parente de feu M. Dutillet,
elle avait toujours vécu auprès de son père à peu près comme si le ma-
riage ne l’eût pas émancipée. D’un caractère naturellement mélancoli-
que, elle apportait néanmoins dans la société cette gaîté douce et gra-
cieuse, cette égalité d’humeur et ce bon vouloir qui attirent et sédui-
sent, qualités qu’elle devait, disait-elle, à deux heures passées tous les
jours sans témoins dans son cabinet. Comme les fées quise renfermaient
autrefois dans un coin obscur de leur palais pour renouveler les enchan-
tements auxquels elles devaient leur pouvoir, celte âme blessée de-
mandait à la solitude du jour la force de sourire et d’être gracieuse le
soir .De tous les prétendants qu’elle avait refusés, M. de banzy était ce-
lui qui lui déplaisait le moins; une vague espérance de bonheur se mêla
même à son assentiment aux désirs de son père lorsque M de banzy
lui fût proposé: Mrao Dutillet avait une femme de chambre de son âge
et sa sœur de lait, qui, ne l’ayant jamais quittée, et se trouvant la con-
fidente de toute sa vie, n’approuvait pas ce second mariage.
'— Que veux-tu ? Victoire, lui disait sa maîtresse, il faut désobéir à
mon père et nous retirer dans ma petite terre de Normandie, ou se ré-
signer à faire comme toutes les femmes de mon âge, c’est-à-dire à avoir
un mari, ou un amant, ou bien un ami, qui vous adoTe sans vous le dire,
pour lequel vous n’avez point d’amour et qui n’en passe pas moins dans
le monde pour être bien traité.
Mile Victoire ne recevait pas bien le futur époux, mais les bans n’en
étaient pas moins publiés et le mariage devait se faire dans quelques
jours. M.de Lanzy, exact comme un homme amoureux, passait de lon-
gues soirées avec la jeune veuve et soupiraiten se retirant quand la pen-
l’Irlande. O’ConnelI, à moins de concessions subites et inespérées, va
reprendre sa place dans l’opposition. Tous les membres Irlandais
suivront sa bannière.
Mais dira-t-on, si le ministère est abandonnné parles radicaux, par
une partie des whigs et par les Irlandais, que lui restera-t-il donc pour
former sa majorité ? — Les tories.
Il ne faut pas s’y tromper, les tories, malgré leurs diatribes contre
le traité du 15 juillet, malgré leurs protestations en faveur de l’alliance
française, les tories savent bon gré aux ministres de deux choses : 1°
de s’être arrêtés sur la pente de la réforme; 2° d’avoir mécontenté les
partis à base démocratique en Angleterre et au-dehors.
De là il a dû résulter un rapprochement qui ne se trahit pas en-
core dans le langage, mais qui apparattra bientôt dans les votes. Lord
Palmerston est l’homme de transition, sa politique est le point de su-
ture entre les whigs devenus tories et les tories ralliés aux whigs. Ne
fût-ce que par esprit de contradiction, une notable portion des bancs
tories voteront avec le ministère parce que ce sera voler contre les li-
béreaux. En un mot, opposition, majorité, partis intermédiaires et
llollanle, tout est en pleine désorganisation, tout s'apprête à un nou-
veau classement dont il est encore difficile, toutefois, d'apprécier d'une
manière absolue les éléments, l'influence et les résultats définitifs.
Qu’arrivera-t-il de ce travail intestin, dans le parlement, c'est ce
que le discours de la reine pourra seul nous faire pressentir. Selon que
les termes dans lesquels il sera conçu auront plus ou moins de jac-
tance, plus ou moins de franchise, plus ou moins de réserve, la situa-
tion actuelle pourra subir encore des modifications. C’est pour mettre
nos lecteurs en mesure d’en juger que nous avons cru devoir leur
exposer ce qui se passe à Londres, sur la foi des meilleurs renseigne-
ments.
AACÜ.ETEBRE.
Londres , 21 janvier. — C’est bien décidément le 10 février qu’aura
lieu le baptême de la princesse royale ; des réjouissances publiques
s’organisent en ce moment pour cette occasion dans diverses villes des
provinces.
— Les ministres sont de nouveau convoqués pour aujourd’hui à trois
heures en un conseil de cabinet qui se tiendra au Foreingn-Oilice.
— Pendant la semaine dernière on a remarqué une grande activité
dans les ambassades d’Autriche, de Russie, de Turquie, de Prusse. Le
baron Bulow, l’ambassadeur de Turquie, le baron BrunOW, le baron
Nieumann et le vicomte Palmerston, ont eu plusieurs conférences.Dans
la nuit de mardi, le baron Fegesacli est parti d’Ashburnham-House
pour Berlin, chargé de dépêches. (Globe.)
— On assure quele gouvernement portugais a conclu un contrat pour
deux mille harnachements complets, douze mille uniformes pour sol-
dats et autres fournitures militaires, et que le gouvernement anglais a
consenti à lui livrer à crédit une grande partie de mousquels, pistolets
et autres armes de guerre. (Idem.)
— La suspension de paiements de la respectacle maison de commerce
Garry et Gurtis a été annoncée hier, et quoiqu’elle ne fût pas tout-à-fait
inattendue, elle a produit la plus grande sensation dans toute la cité.
M.Curtis a été, il y a trois ou quatre ans, gouverneur de la banque
d’Angleterre. On assure que depuis quelque temps M. Garry est atteint
d’aliénation mentale.Cette maison était depuis long-tempsengagée dans
lecominerce direct avec la Russie.On prétend que les causes premières
de la faillite sont certaines poursuites de la part de la cour de la chan-
cellerie, qui avait ordonné le retrait du capital de M. Garry. Toutes les
évaluations ne portent pas le déficit au-delà de60,000 liv., et ce chiffre
est probablement encore exagéré, car les affaires de la maison en ques-
tion ont été très restreintes dans les derniers temps. M. Curtis s’est
chargé de la direction de diverses sociétés, entr’autres d’une qui a pour
objet l’amélioration des communications avec l’Inde au moyen de la va-
peur, mais qui jusqu'à présent n’a pas encore été mise en activité. On a
également annoncé hier la faillite d’une maison faisant le commerce des
vins, mais son déficit est peu considérable. (Idem.)
— City-article du Globe, midi: Malgré la grande abondance de l’ar-
gent, les fonds sont généralement faibles ce matin, et les prix montrent
une tendance assez sensible à la baisse. Probablement que les achats de
la part des individus qui spéculent sur les dividendes sont terminés et
que lescourliers et agioteurs jugent que les prix sont déjà trop élevés.
FRANCE.
Paris, le 22janvier. - MM. les ducs d’Orléans et d’Aurriale sont arri-
vés hier, à minuit, aux Tuileries.
— M. le comte Molé assistait hier à la discussion relative aux fortifi-
cations de Paris dans la tribune réservée à MM. les pairs. On remarquait
dans la tribune de la famille royale les infants d’Espagne.
dule marquait minuit. Un soir il arriva comme à l’ordinaire, et malgré
la résistance de Victoire, qui ne savait pas si madame voulait recevoir,
il pénétra dans la chambre à coucher. M*™ Dutillet était auprès du feu
pensive comme une femme qui va se donner un maître, mais résignée
néanmoins à épouser un homme d’un beau nom, d’une belle fortune et
qui paraissait avoir beaucoup d’amour. M. de Lanzy prit un fauteuil au-
prèsd’elleetcommença une de ces conversations de futurépoux, oû l’on
calcule toutes les chances heureuses de l’avenir : un amour constant,
une fidélité à toute épreuve, l’heureuse alliance de goûts pareils, d’une
humeur assortie et de deux caractèrestousdeux faciles et faits l’un pour
l’autre; point de retours jaloux, point de ces demandes fâcheuses sur les
secrets d’un premier amour. Il se leva ensuite et parcourut cette cham-
bre qui dans quelques jours allait être la sienne, ce temple de son bon-
heur prochain. Un flambeau brûlait sur un secrétaire ouvert. M. de
Lanzys’approchade ce meublemystérieux,et le regarda quelquetemps
en silence.
— Je vous abandonne mes secrets, lui dit M“>« Dutillet, vous pouvez
fureter dans mon secrétaire, vous y trouverez des billets doux dont je
vous fais volontiers le sacrifice.
M. de Lanzy, tout joyeux, hésitait encore, quand M™ Dutillet ajouta:
— Ouvrez donc ce tiroir, vous allez y voir les lettres d’un joli garçon
qui avait pour moi une passion profonde,qui voulait mourir si je n’avais
pas pitié de son cœur brisé par mes rigueurs..., Eh bien ! moncherami,
cet amoureux dédaigné est marié depuis un an avec une femme qu’il
adore, et j’en ai conçu si peu de dépit, que je n’ai pas daigné brûler ses
lettres.
M. de Lanzy fut moins indifférent, il prit la liasse retenue par une fa-
veur rose et la jeta dans lefeu ; puis il retourna au secrétaire. Là étaient
de petits bijoux passés de mode, quelques bagues qui ne plaisaient
plus; dans un tiroir voisin, des lettres d’une amie, ces mille riens, ces
mille brimborions que les femmes conservent avec les sachets imprégnés
des odeurs qu’elles préfèrent. Le hasard fit toucher à M. de' Lanzy un
ressort caché; une petite porte s’ouvrit, et dans cet asile mystérieux
l’indiscret M. de Lanzy vit.... un pantin ! un de ces pantins de quinze
sous qui pendent à 1 étalage des marchands de jouets d’enfants.PolichU
nelle était là couché sur un coussin de velours blanc brodé de jais, et sa
seigneurie étaitloin d’ètre en bon état;Ie chapeau dédoré portait la trace
du petit maître capricieux dont il avait été l’esclave; il était déchiqueté
et en lambeaux ; on pouvait même y voir encore l’empreinte de dents
nouvelles ; lenez et le menton étaient éraillés, les deux bosses n’avaient
plus leur galon, et les sabots rouges avaient perdu les petits flocons de'
laine qui les ornaient jadis. M. de Lanzy ne fit pas toutes ces remarques,
— On lit dans l'Armoricain de Ilrest :
M. l’amiral de Mackau qui a son pavillon sur la frégate la. Gloire, par-
tie de Montevideo, le 25 novembre 1840, a mouillé hier au soir en rade.
La Gloire, ayant perdu 5 hommes, dans sa traversée, d’affections graves
et contagieuses, fera une quarantaine qui n’est pas encore fixée.
— On lit dans le Moniteur parisien :
« Quelques journaux paraissent croire que le traité conclu par M. le
contre-amiral Mackau* ne recévra pas la sanction du cabinet. C’est une
erreur. Ce traité sera ratifié, bien que le ministère en désapprouve for-
mellement certaines dispositions.
» Deux raisons ont déterminé l’adhésion ministérielle.
» La première, c’estque M. de Mackau, s’étant conformé aux instruc-
tions qu’il avait reçues à son départ, aurait lieu de s’étonner et d’èlre
blessé, si le gouvernement qu’il a réprésenté dans la négociation venait
aujourd’hui le désavouer. C’est d’ailleurs toujours chose très-grave d’a-
bandonner ses agents dans leurs rapports avec l’étranger, et il faudrait
des motifs bien impérieux pour s’y décider.
» Mais en outre de cette considérations toute morale, il y a une con-
sidération de faitdont il estimpossibledene pas tenir compte. A l’heur®
qu’il est, M. de Mackau est très-probablement en route pour revenir en
France. Il était parti à une époque où une guerre générale paraissait
imminente eu Eerope; ses instructions portaient elle-même l’empreinte
des appréhensions qu’éprouvait alors le gouvernement. Aussilôt le
traité conclu, le comirtandant de nos forces devant la république Argen-
tine a ddncdù se mettre en devoir de ramener une escadre dont le con-
cours pouvait être nécessaire au milieu des grands événements qu’il
supposait en cours d’accomplissement dans la Méditerran née et ailleurs.)!
— Hier, parce que c’était L’anniversaire de la mort de Louis XVI, plu-
sieurs députés légitimistes se sont abstenus d’aller à la Chambre. On
sait que sous la Restauration, le 21 janvierétait un jour férié. M. de Val-
my, M. Béchard, M. de Labonnaye et M. Berryer étaient cependant pré-
sents à la séance.
— Le ministère de l’intérieur a rejetlé décidément hier jeudi la pièce
de M. Léon Gozlan, Il était une fois un Roi et une Reine.
— M. H. Larrey fils, que nous avons vu à Anvers au siège de la Cita-
delle, et qui promet de marcher sur les traces de sôn père, agrégé en
chirurgie à la Faculté de médecine de Paris, vient d’être nommé, par
concours et à l’unanimité, professeur de pathologie chirurgicale au
Val-de-Gràce (hôpital militaire de perfectionnement.)
— Dans la soirée d’avant-hier, entre onze heures et minuit, le cocher
de M. le duc d’Albuféra, assis sur le siège de sa voiture, et enveloppé
dans sa pelisse, dans l’attitude d’un homme endormi, attendait son
maître à la porte de l’hôtel de l’ambassadeur de Belgique, lorsqu’un lé-
ger mouvement d’oscillation qu’il ressentit, lui fit présumer que quel-
qu’un cherchait à ouvrir la portière de l’équipage. Descendant à pas de
loup de son siège, par le coté opposé à celui que l’on agitait, il fit rapi-
dement le tour parderrière, et parvint à surprendre en état de flagrant
délit, un individu qui, après avoir ouvert la portière, s’emparait du
manteau laissé à l’intérieur.
— Nous recevôns deChâlon-sur-Saône de nouveaux détails sur l’ex-
plosion du bateau à vapeur le Citis, dont nous avons parlé hier :
Ce bateau, construit d’après les plans d’un ingénieur de Paris et sous
la direction d’un ancien officier d’artillerie, avait été amené des usines
de Pont au chantier deMM. Schtieiderfrères, à Châlon, pour y recevoir
le complément de son aménagement et de ses machines. Retenu d’a-
bord par les débordements de la Saône, puis parles glàces, on attendait
la débâcle pour procéder à Fessai définitif. Depuis le mois de décembre,
les machines ataient plusieurs fois fonctionné sur place, et on avait
constamment entretenu un petit feu sous les chaudières pendant les
grands froids.Dimanche,vers deux heures de l’après-midi,diverses per-
sonnes intéressées à l’essai de ce bateau et des curieux s’étaient rendus
à bord pour descendre la Saône; la marche était très lente, faute de
vapeur ; on l’attribuait à la mauvaise qualité du charbon. Cependant, à
quatre kilomètres au-dessous de Châlon, on fît arrêter pour rétablir les
feux. Le bateau,étailt encore à l’amarré, les ingénieurs allèrent eux-
mêmes vérifier le niveau d’eau et les trois robinets de jauge. Tout était
en parfait état : on remarquait seulement que la vapeur demeurait fai-
ble et sortait à très basse pression par une soupape.
M. Bourdon et M. Schneider venaient de remonter sur le pont lors-
que l’explosion eut lieu. Toutes les personnes qui s’y trouvaient furent
lancéesàl’eau ou y sautèrent spontanément,» l’exception de M. Schnei-
der, qui, appelé par les cris, se porta immédiatement à l’emplacement
des machines. Il n’y pénétra qu’en surmontant tous les obstacles que
lui opposaient la vapeur et la fumée. Secondé alors par deux ouvriers,
il parvint à enlever deux blessés, et il allait remonter une troisième
victime, M. Germain, conducteur des travaux du Citis, lorsqu’une for-
te voie d’eau à l'arrière couvrit le corps qu’il ne put arracher et le'
força d’abandonner le bateau qui disparaissait sous ses pieds, englou-
tissant les corps mutilés qu’on n’avait pu retirer. Un radeau improvisé
permit de sauver ceux que leurs blessures empêchèrent de regagner la
rive à la nage ou aux moyens des amarres. M. Bourdon, que l’explosion
avait respecté, faillit se noyer pour sauver un des blessés. Dans ce terri-
ble accident on aura à dépiôrer la mort de neuf personnes, six sont
blessées plus ou moins grièvement ; les autres, au nombre de quinze'
environ, sont heureusement sauvées.Il paraît constant que l’explosion
doit être uniquement attribuée à un vice de disposition dans la chau-
dière, construite avec le bateau, comme nous l’avons dit hier, dans les
usines de Pont (Haute-Saône).
il ne vit pas le lit de mort où était étendu le pantin ; mais il s’en empara
et, tirant la ficelle qui faisait mouvoir ses bras etses jambes, il s’en fut
devant M“« Dutillet en fredonnant cette' vieille chanson dont les gou-
vernantes amusent les petits enfants :
Que Pantin serait content.
S’il avait l’art de vous plaire !
Que Pantin serait content.
S’il vous plaisait en dansant !
— Pantin ! dit M"”- Dutillet en retournant la tête.
— Oui, ma chère amie, Pantin, continua M. dCLanzy avec un sourire;
ah ! madame, je ne vous savais pas de tels bijoux.
— Pantin ! Pantin ! s’écriait la pauvre femme, en cachant sa tète dans
ses mains. , .
M. de Lanzy était immobile au milieu de la chambre à coucher; il te-
nait son pantin dans ses mains, il le tournait, il le retournait, il se de-
mandait par quel talisman ce malheureux pantin faisait sanglotter Mm»
Dutillet, une minuté auparavant si tranquille et si gaie.
— Ne touchez pas à cela, monsieur, disait Mm' Dutillet, d’une voix en-
trecoupée par les sanglots, n’y louchez pas, remettez ce pantin où vous
l’avez trouvé. .
Et cependant son visage s’était inondé de pleurs ; ses yeux s étaient
cernés tout-à-coup ; elle s’était levée hors d’elto-méme, et de son geste
impérieux elle commandait à M. de Lanzy de lui obéir. Celui-ci, épou-
vantéà son tour de cette colère dont le motif lui échappait, jeta le pan-
tin loin de lui pour courir vers cette femme offensée.
— Quelle profanation ! s’écria M:nf Dutillet en courant ramasser le
précieux jouet ; sortez, monsieur, sortez ; laissez-moi.
— Mais, madame, je vous eu prie, un mot. un seul mot : expliquez-
moi mon offense.
— Sortez, monsieur, sortez. , . •. .
Au même moment, Victoire entra dans la chambré sans être appelée;
elle avait une de ces figures joyeuses qui annoncent une bonne nouvelle,
une de ces nouvelles heureuses qui font revivre, qui donnent à Va vie
un cours nouveau, qui rattachent le présent à un passé regretté et
qu’on croyait évanoui pour toujours; mais M"» Dutillet était incapable
de rieft voir et de rien entendre, et sans laisser à Victoire le temps de
S’expliquer : , . ,
— Sortez, monsieur, dit-elle encore; sortez, si vouâ ne voulez que je
quitte mon appartement. . . ,',
M. de Lanzy fut obligé de céder à celte violence; fl sortit en faisant de
tristes réflexions Sur lé caractère des femmes, inégal,- fantasque meme- |