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IÆ PRECURSEUR * Mercredi & Minier SS4S.
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D. La tare sur les.grains en sac est fixée à 2 Ojo du poids brut.
JE. Les grains importés en entrepôt obtiendront exemption du droit
de transit lorsqu’ils seront réexportés partner, par le portmème de leur
importation.
P, La vérification en pesage et mesurage, pourra toujours avoir lieu,
maissansautre charge pour le commerce que celle de fournir lesmoyens
de fortification nécessaires à celte opération.
G. Les pommes de terre et leurs farines seront soumises, à la sortie,
aux mêmes prohibitions que le froment, le seigle et leurs farines. Ces
prohibitions seront également applicables au pain et au biscuit exportés
en quantité supérieure à 100 kil., sauf le cas où ils seraient mis à bord
pour l’approvisionnement d’un navire.
H. Nulle exportation de grains ou de pommes de terre ni de leurs fa-
rines ne peut avoir lieu à partir du jour où la prohibition de sortie est
devenue applicable, quelle que soit la date des acquits de paiement à la
sortie qui auraient été délivrés.
En cas de circonstance grave, le gouvernement pourra, par un arrêté
délibéré en conseil des ministres, prohiber la sortie des céréales et de
leurs farines. La ratification de cette mesure sera soumiseauxchambres
immédiatement si elles sont assemblées, et, dans le cas contraire, à leur
première réunion.
Art. 2, Dans le cas où l’exportation ou l’importation seront prohibées
d’après les dispositions de l’art. 1« les quantités degrains,soumises à ce
régime existant alors en entrepôt, seront admises à en sortir pour être
réexportées par mer ou en transit, et dans le cas de défense d’importa-
tion, l’expédition réelle sera garantie au moyen d’acquits à caution.
Art. 5. Toute quantité de grains livrée frauduleusement à la consom-
mation, soustraite au régime de restriction ci-dessus, ou détournée de
l’exportation ou du transit déclaré, rendra,dans les cas prévus par l’ar-
ticle précédent, le contrevenant ainsi que le propriétaire ou le détenteur,
sauf leur recours l’un envers l’autre, solidairement responsables de la
contravention et du paiement d’une amende égale ao double de la va-
leur de l’objet détourné, suivant le prix du jour où le fait aura été con-
staté.
Art. 4. Le gouvernement fera établir, chaque semaine, et publier dans
le Bulletin officiel, le prix moyen du froment et du seigle, de l’orge et
de l’avoine d’après les mercuriales, qui seront, chaque samedi, formées
à cet effet par les soins respectifs des autorités provinciales et commu-
nales, qui les adresseront immédiatement à l’autorité supérieure dési-
gnée par le roi.
Les marchés régulateurs sont exclusivement: Arlon, Anvers, Bruges,
Bruxelles, Gand, Hasselt, Liège, Louvain, Nainur, lions.
Art. S. Lorsque les prix moyens de deux semaines consécutives don-
neront lieu, en vertu de de l’art, l", soit à une prohibition, soit à un
changement de droits d’entrée ; le gouvernement en fera la proclama-
tion, et l’art 1" sortira ses effets, dès le septième jour après celui de la
proclamation. Ï1 sera,à cette fin, adressé ampliation aux gouverneurs de
chaque province.
Il en sera de même, lorsque les prix de deux semaines consécutives
donneront lieu à la levée de la prohibition.
Maniions et ordonnons, etc. ,
Donné à Bruxelles, le 27 novembre 1840. LÉOPOLD.
FKMCE.
Paris, A janvier. — M. d’Oiozaga, que S. M. la reine d’Espagne vient
de nommer son envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire au-
près du roi. a remis à S. M., en audience particulière,les lettres par les-
quelles la régence provisoire d’Espagne l’accrédite en cette qualité, au
nom de S. M. Catholique. Au sortir de l’audience du roi, M. d’Oiozaga a
été reçu par la reine et par les princes et princesses delà famille royale.
— Par ordonnance du roi en date du 3i décembre, sur le rapport du
ministre de la marine et des colonies, M. le baron Hugon (Gaudamàble),
contre-amiral, a éténommévice-amiral en remplacement de M. le baron
Poussin, élevé à la dignité d’amiral.
M. le capitaine Dumont d’Urville (Jules-Sébastien-César) a été nom-
mé contre-amiral, en remplacement de M. le baron Hugon.
Par décision royale en date du 51 décembre, sur le rapport du minis-
tre de la marine et des colonies, M. le contre-amiral Cusy a été appelé à
exercer un commandement dans l’escadre de la Méditerranée sous les
ordres de M. le vice-amiral Hugon.
M. le contre-amiral Perceval-Duchône a été nommé major-général de
la marine à Toulon, en remplacement de M. le contre-amiral Casy.
— On lit dans le moniteur :
« Hier maljn, vers onze heures un rassemblement d’une centaine
d’individus, la pluparten blouse et en casquette, parmi lesquels on re-
marquait quelques gardes nationaux en uniforme, s’est formé un instant
sur la place de la Bourse.
» Arrivés dans la rue delà Michodière.tous les individus dont se com-
posait ce rassemblement, se sont rangés devant la maison où demeure
M. l’abbé de Lamennais. Une députation de quatorze individus, dont
trois en uniforme, est montée chez lui. Au bout de dix minutes, la dé-
putation est redescendue et l’attroupement s’est alors dispersé sans
proférer aucun cri.
n Cependant 40 à 50 individus, dont 25 gardes nationaux environ, se
sont rejoints sur les boulevards et se sont dirigés vers la place Saint-
Antoine, en marchant trois par trois, se tenant par le bras. Us ont fait
le tour de la colonne de Juillet en chantant la marseillaise, et poussant
les cris : « A bas Guizot ! à bas la garde municipale ! » Ce second at-
troupement s’est ensuite dispersé dans diverses directions.
» Ces manifestations sont coupables; elles sont une atteinte au res-
pect qui est dû à la justice et aux lois. L’autorité a pris des mesures
pour réprimer sur-le-champ de pareilles démonstrations, si elles ve-
naient à se reproduire. »
BBLfeETMt de LA EOERgE. — La bourse a été très bonne aujourd’hui ;
tant et le plus simple, àles bien comparer, sera toujours celui qui est
né le plus sans cause.
Pourquoi Christel aima-t-elle le comte Hervé ? Pourquoi du second
jour l’admirait-eile si passionnément? Il vient, il entre et salue, et n’est
que froidement poli; pas une parole inutile, pas un regard. Elle ne le
connaît que de nom et par une simple information dérobée aux propos
voisins. Elle l’admire par ce besoin d’admirer qui est dans l’amour. Qu'a-
t-il donc fait pour cela ? Comme si, pour être aimé, il était besoin de mé-
riter. Il est beau, jeune, ému, fidèle évidemment, et peut-être malheu-
reux : que faut-il de plus ? Il a de la grâce à cheval quand il repasse
devant les fenèlres et qu’elle le voit monter. II lui semble qu’elle con-
naisse tout de lui : oh ! combien elle compterait fermement sur lui, si
elle était celle qu'il aime.
Ces lettres perpétuelles faisaient comme un feu qui circulait par ses
mains et qui rejaillissait dans son cœur. Le courrier de Paris arrivait
vers deux heures et demie, à l’issue du dîner; bien peu après, dès que
sa mère lassée commençait à sommeiller, Christel s’approchait sans
bruit du bureau et faisait rapidement le départ; puis elle prenait la
lettre pour Hervé, mise tout d’abord de côté, et la tenait long-temps dans
sa main, et non pas sans trembler, comme si elle se fût permis quelque
chose de défendu. Elle la tenait quelquefois jusqu'à ce que sa mère s’é-
veillât ou que lui-mème il vînt, ce qu’il faisait d’ordinaire vers quatre
heures. Elle avait fini par lire couramment la pensée du cachet qui se
variait sans cesse avec caprice, facile blason de coquetterie encore plus
que d’amour, et qui ne demande qu’à être compris. Le cachet du jour
lui disait donc assez bien la nuance de sentiment qu’elle allait trans-
mettre, et fixait en quelque sorte son tourment. Elle voulait quelquefois
s’abuser encore : l’empreintede cire rose ou bleue lui montrait-elleune
fleur, une pensée haute et droite sur sa lige comme un lis (le lis était
alors fort régnant) : C’est peut-être un lis et non une pensée, se disait-
elle. Mais le lendemain le lévrier fidèle-et couché ne lui laissait aucun
doute et la poursuivait de tristes et amères langueurs. Le lion au repos
la Taisait réver; à de certaines fois où il n’y avait autour du cachet que
le nom même des jours de la semaine, elle respirait plus librement. Un
jour, y considérant avec surprise une tête de mort et deux os en croix,
elle se dit: — Est-ce sérieux, n’est-ce qu’un jeu? s’affiche-t-elle donc
ainsi la douleur ?
Elle n’avait pas tardé non plus à distinguer, entre toutes, les lettres
qu’il écrivait, tantôt mises dans la boite par lui-même, qui revenait
exprès pour cela, tantôt apportées par un domestique qu’elle eut vite
reconnu. Son coup-d’œil saisissait sans qu’un seul mot fût dit. Ses let-
tres, à lui, étaient simples, sous enveloppe, saris cachet, adressées à
Paris poste restante à un nom de femme qui ne devait pas être le véri-
table; il semblait qu’elles fussent au fond bien plus sérieuses. Avec
quelle émotion elle les pressait, quand elle y imprimait le timbre voulu!
Quel était-il. cet amour qui occupait tant le comte Hervé, qui l’avait
arraché aux plaisirs d’une vie brillante, et le reléguait depuis près de
six mois aux champs dans une unique pensée ? Peu nous importe ici ;
et le récit en serait trop semblable à celui de tant de liaisons incom-
plètes et avortées. Une femme du grand monde, à laquelle il avait rendu
de longs soins, avait paru l’accueillir, lui promettre quelque retour;
elle avait même semblé lu» accorder, lui permettre sans déplaisir quel-
qu’un de ses gages qui ne se laissent pas effleurer impunément, Elle
avait fait semblant de l’aimer un peu, ou elle l’avait cru. Des obstacles
survenus dans leur situation l’avaient décidé, lui, à partir, à se confiner
pour un temps dans cet exil fidèle. Elle lui témoigna d’abord qu’elle lui
en savait gré, eut l’air de l’en aimer mieux, et se multiplia à le lui dire.
Mais peu à peu. les obstacles ou les distractions aidant, elle se rabattit à
l'amitié { grand mot des femmes, soit pour introduire, soit pour congè-
les spéculateurs se montraient généralement très satisfaits des assuran-
ces pacifiques renfermées dans les divers discours prononcés parie roi
à l’occasion de la nouvelle année; c’est à cette seule occasion qu’il faut
attribuer le mouvement de hausse qui a eu lieu sur toutes les valeurs.
Le 5 p. c. ouvert à 77 25 est monté à 77 70 le5 p. c. de 111 30 s’est élevé
à 112-10 ; il s’est fait une très grande quantité d’opérations. Les primes
étaient surtout très recherchées. La fi nique de France s’est faite àô200.
Le 5 p. c. belge s’est élevé à 98 ; le nouvel emprunt à 97 Sf4 ; le 3 p. c.
à 70. Les actions de la Banque se soûl faites à 850 coupon détaché.
La dette active espagnole s’est faite à 25 ]|4.
PIiy8i«noinie «ïe Bsa prenne frsaaaçaise.
Les journaux de Paris s’occupent encore aujourd’hui des discours
adressés au roi le 1>- janvier ; les uns pour continuer leurs critiques, les
autres pour en démontrer l’injustice. Les fortifications de Paris sont
aussi l’objet de quelques réflexions.
Le COURRIER FRANÇAIS renouvelle le blâme qu’il exprimait hier
sur les tendances trop pacifiques des discours adressés au roi par les
grands corps de l’état. 11 s’en prend aujourd’hui à MM. Pasquier, Por-
talisct Barthe; voici commentil s’exprime :
« La cérémonie qui a produit les beaux chefs-d’œuvre de MM. Pas-
quier, Rarthe et compagnie, mérite, celte année, une désignation par-
ticulière : ce sont les saturnales de la paix. Nous sommes obligés, comme
tous les journaux, d’en publier la déplorable histoire; mais du moins
cette prostitution de la dignité humaine ne passera pas sans que nous
Payons flétrie. Si le sentiment national ne vibre pas dans le cœur des
hommes qui parlent au nom des corps de l’état, il doit se retrouver
dans la presse, gardienne naturelle de tous nos droits, »
Le même journal en rappelant les réflexions qu’il faisait hier sur la
mission de M. le Baron Mounier parle de nouvelles reçues de Constanti-
nople qui viennent, dit-il, compléter les renseignements que M. Mou-
nier a rapportés de Londres.
« 11 est certain aujourd’hui, ajoute-t-il, que le vice-roi d’Egypte sera
traité comme les autres pachas de l'empire. On prendra le hatti-shériff
de Gulhané pour règle des relations qui doivent exister entre le sultan
et Méhémet-Ali. Le pacha d’Egypte aura le rang d’un lieutenant-géné-
ral ; il cessera d’étre souverain : la puissance, qu’il avait créée, descen-
dra bien avant lui au tombeau. L’hérédité qu’on lui laisse n’est qu’un
hochet destiné à l’amusement de sa vieillesse ; c’est une hérédité hono-
rifique, dans toute la rigueur du mot.
En soumettant Méhémet-Ali au hatti-shériff de Gulhané, on anéantit
son pouvoir. Il n’est plus rien, et l’Egypte ne compte plus. L’Angleterre
sera contente, elle qui poursuit avec une constance digne d’un meilleur
but la destruction de toutes les marines secondaires dans la Méditerra-
née. Mais la France doit-elle s’en réjouir? La Providence ne nous avait-
elle pas destinés à protéger toutes ces marines secondaires? Et pouvait-on,
sans travailler à notre honte ainsi qu’à notre ruine, humilier, et ruiner
le pacha ? Courage donc, ministres du 29 octobre; enivrez-vous de l’en-
cens quifumait hier aux Tuileries. Pendant que vous vous complimen-
tez les uns les autres sur votre système humanitaire, un empire périt
en Orient par votre faute; et vous n’entendez pas le bruit sinistre qu’il
fait en s'écroulant ! »
Le JOURNAL DES DEBATS félicite le gouvernement sur l’unanimité
des remerciments qui lui ont été adressés dans la personne du roi pour
avoir su conserver une paix qui paraissait compromise. H trouve cet
accord d’autant plus remarquable que les orateurs appartiennent à
tous les rangs et à toutes les professions de la société; il pense donc
qu’il est tout simple que la gauche se lâche de ce que ia généralité des
vœux exprimés, l’aient été pour la paix.
La PRESSE jette un coup-d’œil rétrospectif sur les événements de
1840. et se livre à d’amères récriminations sur les actes et la politique du
ministère du b mars, auquel elle reproche d’avoir pesé déplorablement
sur les destinées du pays, et de lui avoir laissé pour adieu l’isolement
et le déficit.
Le COMMERCE demande à quoi servent les fortifications de Paris, si
l’on est disposé à tout céder à l'étranger, il est vrai, ajoute-t-il, que de-
puis dix ans il demande ces forteresses, parce qu’il a besoin d’un gage
contre l’élan possible de la population de Paris.
La FRANCE prélend que le sort du ministère et celui de la chambre,
la question de la paix eL de la guerre dépendent de l’issue de la discus-
sion engagée à propos des fortifications de Paris : on redoute, ajoute ce
journal, l’influence de M. Thiers sur la chambre.
Le NATIONAL continue sa polémique avec le Commerce à propos des
fortifications; sa réplique n’off're pas d’argument nouveau.
Le même journal critique vivement de nouveau le choix que le mi-
nistère a fait de M. Bugeaud pour gouverner les colonies d’Afrique. Il
prétend qu’il ne s’agit de rien moins aujourd’hui que d’abandonner la
province de Constantine, les points militaires qui dominent les posses-
sions françaises, et de restreindre l’occupation à quelques points qui
seront bientôt facilement évacués.
« Ce n’est pas, ajoute-t-il, l’abandon qu’on va exécuter d’abord; c’est
l’abandon qu’on prépare. — Ainsi, tandis que l’Europe se coalise pour
diminuer notre influence dans une partie de l’Afrique, nous nous
amoindrissons nous-mêmes et de nos propres mains dans l’autre partie.
C’est la volonté de l’Angleterre qui va encore être obéie là-bas. Le mi-
nistère de l’étranger ne nous avait pas promis d’autres succès : il faut
subir toutes les avanies, courber la tête et attendre. Ce méprisable
système ne se lassera pas, jusqu’à ce qu’il ait enfin lassé la patience du
pays. »
Le COURRIER DE BORDEAUX s’exprime ainsi au sujet de cette mê-
me nomination :
« Depuis long-temps, l’opinion publique avait désigné le général
dier l’amour ), et elle en vint le plus ingénùment du monde à oublier
de plus douces promesses si souvent écrites, et même faites à lui par-
lant, et non-seulement de la voix,
On n’en était pas là encore; pourtant il y avait quelquefois des ralen-
tissements dans la correspondance. Hervé semblait s’y attendre en ne
venant pas, ou paç moments il venait en vain.
Quand la correspondance allait bien, quand les cachets de Paris mar-
quaient une pensée (car décidément, si royalistes qu’on les voulût faire,
cela ne pouvait ressembler à un iis), quand chaque courrier avait une
réponse d’Hervé, Christel le sentait avec une anxiété cruelle, et il lui
semblait que le courrier qui emportait cette réponse, lui arrachait, à elle,
le plus tendre de son âme, le seul charmant espoir de sa jeunesse.
Mais si les lettres de Paris tardaient, s’il revenait plus d’une fois sans
rien trouver, si, poli, discret, silencieux toujours, se bornant avec elle
à l’indispensable question, il avait pourtant trahi son angoisse par une
main trop vivement avancée, par quelque mouvement de lèvre impa-
tient; elle le plaignait surtout, elle souffrait pour lui eL pour elle-même
à la fois; pâle et tremblante en sa présence sans qu il s’en doutât, elle
lui remettait la missive tant attendue, à lui pâle et tremblant aussi,
mais de ce qu’il redoute d’un seul côté ou de ce qu’il espère. Elle vou-
drait la lettre heureuse pour lui, et elle la craint heureuse; elle est dé-
chirée si elle l’a vu sourire aux premières lignes ( car en ces cas d’at-
tente il décachetait brusquement ), et s’il lui semble plus triste après
avoir parcouru, elle demeure triste et déchirée encore.
Qh ! si alors, un peu après, quelquepauvrejeune fille paysanne venait
apporter, en la tournant dans ses mains, une lettre de sa façon pour un
soldat du pays, et la remettait, pour l’affranchir, avec toute” sorte d’em-
barras et rougissant jusqu’aux yeux, elle aussi, tout bas, rougissait en
la prenant et se disait : c'est comme moi!
Vers ce temps, un jeune homme, fils d’un riche notaire de l’endroit,
pour lequel madame M...avait eu en arrivant quelque lettre,mais qu’elle
n’avait pas cultivé, parut désirer d’étre présenté chez elle et d’obtenir
le droit de la visiter. L’intention était évidente. Madame M... en toucha
un soir quelque chose à sa fille; dès les premiers mots, celle-ci coupa
court et, se jetant dans les bras de sa mère, la supplia avec un baiser
ardent de ne jamais lui en reparler ni de rien de pareil. La mère n’in-
sista pas; mais, à la chaleur du refus et à mille autres signes que son œil
silencieux depuis quelque temps saisissait, elle avait compris.
Pourtant, depuis des mois déjà que le comte Hervé venait plusieurs
fois parsemaine, il ne s’était rien passé au dehors entre Christel et lui,
rien qui fût le moins du monde appréciable sinon à la sagacité d’un
cœur tout à fait iutéressé. Pour deviner qu’une passion était en jeu, il
aurait fallu être un rival, ou il fallait êtreune mère, une mère prudente,
inquiète et. malade, qu’éclaire encore sur l’avenir secret de sa fille la
crainte affreuse de la trop tôt quitter. Lui-mème, Hervé, avait à peine
distingué, dans celte chambre où il n’eptrait jamais, la jeune fille, mes-
sagère passive de son amour. Elle en eut un jour la preuve bien cruelle.
C’est un dimanche : elle était sortie avec sa mère pour une promenade,
ce qui leur arrivait si rarement. Toutes deux suivaient à pas lents la
grande route, à cet endroit, fort agréable, d’où la vue s’élend sur des
champs arrosés et coupés comme de plusieurs petites rivières, et par
delà encore,
Sur ce pays si vert, en tous sens déroulé,
Où se perd en forêts l’horizon ondulé.
Il y avait assez de monde le long de la route; de loin on vit venir à cheval
le comte Hervé; c’était l’heure ordinaire de sa visile, et une lettre an bu-
reau l’attendait. Christel trembla ; elle pria, à ce moment, sa mère de
s’appuyer plus fort sur son bras sans crainte de la lasser. Hervé passa
Bugeaud pour cette mission.Quant à nous, nous sommes tellement con-
vaincus que la colonisation de l’Algérie est une absurbe et impossible
entreprise- que nous regrettons beaucoup qu’on en jette le fardeau sur
un homme dont nous apprécions hautement les talents et le caractère.
Sans doute, M. le général Bugeaud fera en Afrique, tout ce qu’il est
possible de faire dans l’intérêt de la France. Mais il est des obstacles qu’il
ne pourra surmonter,parce que la nature des choses les rend insurmon-
tables. Nous désirons bien sincèrement que les événements démentent
nos prévisions; mais, soit dans la paix, soit dans la guerre, nous persis-
tons à croire que l’occupation de l’Algérie çst une des plus grandes ca-
lamités de la France. »
BELGIQUE.
Bri’Xei.i.es, & janvier. — M. le baron Friesen, chambellan et grand
maitre des cérémonies du roi de Saxe, est arrivé à Bruxelles. Il est des-
cendu à Fhôlel de Belle-Vue,
— M. Willems, bourgmestre delà ville de Hasselt, a été nommé pré-
sident de la commission d’agriculture du Limbourg pour 1841, en rem-
placement de M. Berenbroek, membre sortant.
ANVERS, « JASTVIER.
Le concert annoncé par les artistes-musiciens ci-devant attachés au
Théâtre-Royal, pour le !6 de ce mois, aura définitivement lieu le 18. Des
causes indépendantes de la volonté de ces Messieurs ont nécessité ce
retard. Les nombreuses souscriptions recueillies jusqu’à ce jour, parmi
les premières familles de notre cité, l’empressement que tous les artis-
tes témoignent, pour concourir par leur talent, à l’embellissement de
ces soirées, tout promet enfin que ces concerts par abonnement seront
une heureuse et agréable innovation. Pour la partie instrumentale,nous
pouvons déjà citer comme devant se faire entendre au premier con-
cert MM. Singelée, violon-solo du Théâtre-Royal de Bruxelles, Schidlic,
premier haut-bois du môme Théâtre, et Warrot, 1" prix du Conserva-
toire de Bruxelles.
On se rappelle que ces soirées auront lieu à la salle Philharmonique,
et que des listes de souscription, quoique déposées déjà dans les prin-
cipales Sociétés et chez MM. Schott, seront mises en circulation et pré-
sentées à la signature des amateurs, par les soins de la commission
choisie parmi les artistes exécutants.
— On nous écrit de Turnhout, 5 janvier :
L'Indépendant, en rendant compte dans un de ses numéros du mois
passé, d’une saisie opérée par la douane, dans la nuit du 17 au 18 dé-
cembre, disait que le nombre des fraudeurs était de quarante, tandis
qu’il n’était que de quatorze. 11 est d’autant plus important de rectifier
cette erreur que la version de la feuille bruxelloise changeait singuliè-
rement ia question, tant sous le rapport de l’importance de la tentative
de fraude que sous celui du succès obtenu sur elle.
Plusieurs journaux du pays prétendent encore que la fraude se fait
en ce moment sur nos frontières avec une audace incroyable. Cette as-
surance n’est rien moins qu’exacte. Depuis plusieurs années, les tenta-
tives de fraude n’ont été moins fréquentes que cet hiver, au moins sur
la ligne de Turnhout, et jamais peut-être le résultat n’en a été plus fu-
neste pour les personnes qui se livrent à ce trafic honteux.
On annonce pour demain une représentation extraordinaire au Grand
Théâtre Royal au bénéfice de M. Alphonse Réné.
Le spectacle se composera de la Salamandre, vaudeville nouveau en
4 actes, le Bûcheron de Salerne, ou les Souhaits, vaudeville-féerie en 4
actes, et du Dépit amoureux, comédie en 2 actes.
Comme on le voit, il y a ià de quoi satisfaire tous les goûts; aussi
croyons-nous pouvoir espérer que le public ne manquera pas d’encou-
rager par sa présence, un acteur qui mérite sous tous les rapports
cette preuve d’approbation.
Tltëàtre Royal «l’Anvers.
Jeudi, 7 janvier, au bénéfice de M. Aepiiosse RÉNÉ :
La Salamandre, opéra vaudeville nouveau en 4 actes et à grand spec-
tacle, par MM. Ch. Delivri, Deforges et Leuven; Le Bûcheron de Salerne,
ou les Souhaits, vaudeville féerie en un acte et 6 tableaux, à spectacle,
par MM. Desaugiers et Gentil ; Le Dépit Amoureux, comédie en 2 acte»
et en vers de Molière.
©ynïnase Ëqiieartrc Franeoni.
M. Franeoni a l’honneur de prévenir que la clôture est fixée ai»
17 courant.
Mercredi, ôjanvier : GRANDE REPRESENTATION.
Jeudi, 7 janvier : Rerache.
Vendredi, 8 janvier : GRANDE REPRESENTATION.
gagaawgBHMM^mww'Hia ii n wi« ■' iwiiiiw^rwi» ■"ri'TMBaM—OM————p
COMMERCE.
ISosarse «l’Anvers du © janvier.
2 heures. — L’actif espagnol était ferme et avec beaucoup d’affaires à
la bourse de ce jour; ouvert 22 5)8 5|4 pour rester 22 ll[16.argt. — On a
fait des primes au 8)9 courant à 22 7[8 dont !|8 0[0. — Fonds belges,les
5 0]0 étaient 961[4 A. et les 3 0[0 ont été faites de 69 1)4 à 69 3[8 0[0 et
reste cours.
fi*!are d'Anvers «Un ® janvier.
A cause du jour férié les affaires ont été généralement inactives.
bientôt sur la chaussée devant elleau petit trot; il les regarda d’une façon
assez marquée; mais ne les ayant jamais vues au dehors, ne s’étant ja-
mais demandé apparemment ce que pouvait être Christel avec sa sou pi»
et fine taille en plein air, il ne les reconnut pas à temps et ne les salua
pas. Dix minutes après, au retour, les rencontrant encore et ayant de-
viné sans doute (à ne voir que le domestique au bureau ) que ce pouvait
être elles. il les salua. Juste image du degré d’attention de sa part et
d’indifférence !
Que fait donc à certainsTnoments le cœur, et quelles sont ses distrac-
tions étranges ! absorbé sur un point et comme aveugle, tout à côté il
ne discerne rien. Mille fois, du moins, dans ces vieux romans tant goû-
tés, on voit le page, messager d’amour dans sa grâce adolescente, faire
oublier à la dame du château celui qui l’envoie. Les brillants ambassa-
deurs des rois, près des belles fiancées qu’ils vont quérir aux rivages
lointains, ont souvent touché les prémices des cœurs. Ici c’est près du
jeune homme qu’une belle jeune fille est messagère, élégante, légère,
demi-penchée, émue et alarmée, lisant depuis des mois la mort ou la
vie dans son regard, et il ne Ta pas vue. Il est vrai qu’elle ne lui appa-
raît qu’en toilette simple, sans autre fleur qu’elle-même, derrière des
barreaux non dorés, dans une chambre étroite que masqueviin bureau
obscur : mais est-ce qu’elle ne l’éclaire pas ?
Christel avait d’affreux moments,des moments durs, humiliés, amers.
La langueur et la rêverie première étaient bien loin; le souvenir de ce
qu’elle était la reprenait et lui faisait monter le sang au front; elle se
demandait en se relevant pour qui donc elle se dévorait ainsi. Elle fai-
sait appel dans sa détresse, oh ! non plus à ses goûts anciens, à ses gra-
cieux amours de jeune fille, à ses lectures chéries ( tout cela était trop
insuffisant et dès longtemps flétri pour elle) mais à des sentiments plus
màlesjet plus profonds, comme à des ressources désespérées, — à son
culte de la patrie, par exemple. Elle se représentait son père, le drapeau
sous lequel il avait combattu, le deuil de l’invasion ; elle excitait, elle
provoquait en elle l’orgueil blessé des vaincus; elle cherchait à im-
pliquer, dans l’inimitié de ses représailles , le jeune noble royaliste, le
mousquetaire de 1814, mais eu vain ; le ressort sous sa main ne répon-
dait pas; l’amour, qui aime à brouiller les drapeaux, se riait de ces colè-
res factices. L’empereur évoqué en personne sur son rocher n’y pouvait
rien. — Elle voulait voir du mépris de la part il Hervé, de la fierté inso-
lente dans cette inattention soutenue, et tâchait de s’er. irriter; mais
non, c’était moins et c’était pis, elle le sentait; ce prétendu dédain s’en-
foncait plus cruel, précisément en ce qu’il était plus involontaire; c’était
de Toubfl. , . „ .
Comment donc oublier à son tour ? Comment se fuir elle-même, s iso-
ler contre l’incendie intérieur qui s’acharnajt ? F,Ile jetait dans un coin
ces lettres odieuses, et se jurait de ne les plus voir ni toucher. Si elle avait
pu du moins sortir, se distraire par le monde, vivre de la vie de bal et
s’étourdir comme la plus frivole dans le tourbillon insensé, ou mieux
s’échapper et courir par les bois, biche légère, et chercher, s’il en est,
le ilictame dans les antres secrets, au sein de la nature éternelle !
Dieux ! que ne suis-je assise à l’ombre des forêts !
Mais non, encore non ; sa cage la lient; il faut qu’elle y reste enfermée
sous celte grille, près du poison lent qui passe Par ses nlains et qui la
tue, elle-même, devenue jusqu’au bout l’instrument docile et muet de
son martyre. Des larmes d’impuissance, de jalousie, d’humiliation et de
honte brûlent ses joues, et, versées au dedans.de son âme, y dévastent
partout la vie, l’espérance, la fraîcheur des bosquets du souvenir. — S’il
entre pourtant, s’il a paru au seuil en ce moment même avec sa simple
question habituelle, tête découverteet strictement poli, la voila touchée;
tout cet assaut de fierté s’amollit en humble douleur, et le reste n’est plu», |