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Parmi ces œuvres, il en est de médiocres; d’au-
tres présentent quelques qualités. Huit seulement
ont été bien étudiées, parmi lesquelles cinq arrê-
teront l’attention du jury.
Nous citerons pour mémoire les projets A. S.
entrelacés, Persévérance n° 1, Esquisse, Facili-
ter LA TACHE DE NOS ÉDILES, La LIBERTÉ, JoNG
WERK BAART GELUK, MISSCHIEN, ESPÉRANCE, PER-
SÉVÉRANCE n° 2, Aux FRANCHISES COMMUNALES et
Grosse cerise de Schaerbeek, et un projet hors
concours.
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Les projets qui présentent des qualités sont
Azinus, — dont le plan, très-régulier, nous montre
la préoccupation du groupement des locaux poussée
jusqu’à faire oublier les proportions relatives de
divers locaux. Nous ne trouvons pas non plus que
ce projet réponde suffisamment au programme
imposé.
Il nous paraît aussi que les bureaux de l’instruc-
tion publique auraient pu être placés à l’étage, pour
reporter au rez-de-chaussée les locaux où le public
doit avoir plus fréquemment accès.
La façade principale a des qualités ; elle a assez
de caractère, ses lignes sont amples, mais l’ensemble
est entaché de quelques maigreurs. Les pignons
nous rappellent quelque peu ceux de l’école du
Vieux-Marché; quant aux fenêtres, il nous semble
les avoir vues dans un projet publié naguère par
l'Emulation. Dessins violents et ternes à la fois,
aspect dur et froid.
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Patrie. Ce projet offre des dispositions assez
originales, mais il eût été préférable de consacrer
à agrandir certains bureaux l’espace en trop occupé
par les dégagements, les couloirs et les grands
vestibules. Il est fâcheux aussi que les bureaux des
échevins du contentieux et de l’instruction publique
soient placés dans les combles.
Quant aux façades, rendues au trait, elles nous
rappellent un peu trop la tradition académique;
elles manquent aussi de caractère.
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Cuique suum. Quelques dispositions ingénieuses
dans le plan, mais défaut constaté dans plusieurs
projets : beaucoup d’espace affecté aux couloirs,
vestibules, etc. — Quant à la façade, elle manque
d’unité et de caractère ; composition timide, mala-
dive. Nous croyions que l’on n’exhumerait plus en
Belgique ce genre d’architecture bâtard et faux,
dont Paris offre malheureusement tant d’exemples
édifiés sous Napoléon III.
Le dessin est assez faible.
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Lettres S. H. entrelacées. L’un des projets les plus
travaillés quant au plan et où nous constatons im-
médiatement la volonté de répondre à toutes les
exigences du programme. Les bâtiments disposés
autour d’une vaste cour ouverte par le fond, du
côté des agrandissements prévus dans l’avenir. Les
bureaux sont bien groupés et placés près des cabi-
nets des échevins dans chaque groupe, et cependant
ceux-ci suffisamment rapprochés et communiquant
facilement avec les salles de section, le cabinet du
bourgmestre et la salle du conseil; services acces-
soires ingénieux et bien complets.
L’air et la lumière parfaitement ménagés ; la cir-
culation du public bien établie et ne pouvant gêner
les divers services.
Comme plan, c’est l’un des plus étudiés, sinon
celui qui répond le mieux au programme et aux
nécessités des services.
Les façades seraient construites en matériaux
apparents et appareillés ; elles sont conçues dans le
style de la renaissance. La façade principale, dont
l’ensemble est élégant et pittoresque, perd un peu
de son caractère par suite du peu de largeur des
trumeaux, ce qui fait que les éléments sont trop
condensés. Cela est encore accentué par la colon-
nade engagée du rez-de-chaussée, qui peut parfai-
tement être supprimée, puisqu’elle ne porte que le
balcon d’étage.
La tour qui occupe la partie centrale est un peu
maigre et la flèche un peu lourde ; il est fâcheux
aussi que ce motif important ne pyramide pas plus.
A part ces quelques critiques, nous Je répétons,
c’est l’un des meilleurs projets du concours.
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Simple. Le plan de ce projet nous rappelle abso-
lument la tradition académique : un vaste rectangle
de bâtiment avec cour centrale et avant-corps à la
façade principale. Otez toutes les divisions inté-
rieures, vous obtiendrez un excellent plan de
musée.
L’auteur de ce projet n’a pas tenu assez compte
du programme, quant à la combinaison des services
et la circulation du public. Quelques combinaisons
cependant sont heureuses.
La façade bien qu’offrant un certain caractère,
peut-être un peu trop sévère, offre une composi-
tion hybride et de peu de style.
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Triangle dans un cercle. Plan assez travaillé ;
mais, encore une fois, que d’espace affecté aux
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couloirs, dégagements, etc. Salle de pas-perdus
énorme. Quant à la façade, c’est une composition...
quelconque, rendue par un dessin lavé de cou-
leurs... quelconques et agrémentée d’une colossale
statue équestre de Léopold II, qui vient faire je ne
sais trop quoi dans la façade d’un hôtel communal.
Il est vrai que les pâtissiers en mettent bien sur
leurs pains d’épices monumentaux.
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Labor omnia vincit improbus. Que l’auteur de ce
projet ne nous en veuille pas trop, mais il n’est rien
qui nous paraisse aussi pédant que ces longues et
trop souvent insipides devises latines ; nous avouons
d’ailleurs que c’est depuis longtemps et pour tou-
jours que nous sommes brouillés avec le Gradus.
Fermons la parenthèse.
Le plan de ce projet offre une disposition origi-
nale et unique dans ce concours. Les locaux de
l’administration sont groupés à droite, au fond et à
gauche d’une cour fermée à la façade principale
par un bâtiment, isolé des ailes par deux entrées
cochères; ce bâtiment est le commissariat de police.
Le commissariat de police est donc tout à fait isolé
du reste.
Cette disposition donne à l’ensemble du bàtiment
un aspect tout à fait inattendu qui sort absolument
de la tradition. Cet ensemble, tel qu’il nous est
présenté, traité dans un style renaissance élégant
et pittoresque, nous plaît beaucoup; il est très-
heureux de composition.
Ce n’est pas, d’ailleurs, parce que cette disposi-
tion sort de la tradition qu’il faut la rejeter sans
examen.
Examinons-la. Il est certain qu’il n’est nullement
agréable, pas plus pour le public en général que
pour Messieurs les membres de l’administration
communale d’être exposés à se trouver en présence
des visiteurs ordinaires du bureau de police et à
assister à ces scènes déplorables de gens que l’on
traîne au poste. A ce point de vue, il est logique
d’isoler le service de la police; mais faut-il pour
cela interpréter cette idée, comme le fait l’auteur du
projet, jusqu’à lui consacrer un pavillon spécial
assez important, et n’est-ce pas un peu une contra-
diction que de le mettre en évidence jusqu’à en faire
le motif principal de la façade vers la place ?
Si nous étions à Paris, là où le service de la
police est si distinct de tous les autres services
municipaux, nous admettrions cette idée pour une
mairie.
Encore ne serait-ce qu’au point de vue pratique.
En Belgique, c’est le bourgmestre qui est le chef
suprême de la police et, au point de vue des idées
reçues chez nous, ce service est placé moralement
au-dessous de tous les autres.
Que l’on isole ce service, soit; mais qu’on ne lui
donne pas un local d’apparat, et, d’instinct, il nous
semble que, tout en lui donnant un accès facile, au
dehors, on doit tâcher de le dissimuler.
Nous ne nous rallions pas à cette disposition, qui
a cette autre conséquence fâcheuse de placer au
second plan les services les plus importants où le
vrai public doit avoir accès.
Ainsi, pour aller à la recette communale, il faut
traverser toute la cour, pénétrer dans le grand
vestibule et revenir ensuite vers la façade princi-
pale. Quant à l’ensemble des autres services, nous
les trouvons bien groupés, mais nous aurions
voulu une circulation du public plus indépendante
de celle du personnel.
Nous l’avons dit déjà, les façades sont belles;
mais, par suite de la disposition du plan, elles nous
indiquent bien plus un hôtel seigneurial avec cour
d’honneur dans l’axe de laquelle on aurait placé la
conciergerie.
L’auteur de ce projet n’a pas cru devoir placer,
dans l’axe, une tour proprement dite ; il s’est con-
tenté d’un campanile en flèche, assez important.
Quant au projet qui nous occupe, à part les
observations faites ci-dessus, nous lui trouvons de
très-sérieuses qualités, notamment comme style,
et nous aimons beaucoup le rendu des dessins,
délicat, sobre et vrai.
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Les monuments sont l’expression de la vita-
lité du peuple. Très-beau projet, fortement tra-
vaillé et très-étudié. Le plan paraît avoir été conçu
dans l’esprit du programme ; en général les locaux
sont bien disposés ; mais nous regrettons que, dans
les ailes en retour, ils aient été placés à droite et à
gauche d’un couloir central.
L’expérience a démontré que, presque toujours
ces couloirs sont obscurs et mal aérés; or, dans
toute administration ou un public nombreux doit
avoir accès, les conditions essentielles sont l’espace,
l’air et la lumière. — La salle du conseil est très-
vaste, d’un accès facile ; les bureaux des sections, ca-
binets du bourgmestre et des échevins bien disposés.
L’escalier principal nous paraît insuffisant ; dé-
faut saillant, les escaliers de service, à marches
rayonnantes, ne sont pas éclairés. Pourquoi placer
les pompes dans une aile du bâtiment et les pom-
piers dans l’autre?
La façade principale, très-monumentale, a un
fort bel aspect. A l’ampleur des lignes, elle joint la
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variété des éléments; le beffroi surtout est fort
beau, à part une partie un peu nue qui pèse lourde-
ment sur la partie inférieure. Nous aimons moins
le porche d’entrée qui est trop détaillé.
Nous n’avons point vu les devis, mais il nous
semble douteux que cet édifice, dont toutes les
façades seraient construites en pierre, puisse être
exécutépour le million accordé par l’administration.
En effet, il s’agit d’une surface bâtie d’environ
1,900 mètres carrés. Cela ne ferait guère que
550 francs ce que nous croyons insuffisant. Quoiqu’il
en soit, nous le répétons, c’est un beau projet.
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Scharbeek vooruit. Plan assez agréable d’as-
pect, mais qui nous paraît être venu de jet et
n’avoir pas été assez travaillé le programme en
mains. Encore une fois beaucoup d’espace consacré
aux dégagements.
Quant à la façade, c’est un vaste emprunt au
nouveau palais de justice de Bruxelles.
Certainement le palais de justice est fort beau,
Monsieur; mais c’est un palais de justice, et l’on
demandait un hôtel communal.
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Union. Plan assez étudié; cependant quelques
locaux sont bien petits. Secrétariat communal trop
éloigné du cabinet du bourgmestre ; salle du conseil
trop peu importante.
La façade ne manque pas d’une certaine allure,
bien quelle soit froide. Elle manque à la fois d’unité
et de mouvement.
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Vaart wel. La distribution présente quelques
bonnes dispositions; les cours sont trop petites; par
contre le vestibule est immense ; quelques locaux
sont insuffisants.
Jolies façades d’un bon style gothique. — La
tour est d’un sentiment trop religieux.
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Espérance. Encore cette fâcheuse disposition de
couloirs avec bureaux à droite et à gauche ; l'air et
la lumière y feront défaut. Les façades, traitées en
style ogival, ont du caractère, bien quelles soient
cependant un peu froides et sèches. Quant à la tour,
elle a le même défaut de caractère que celle du pro-
jet précédent.
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Ainsi soit-il. Ce projet a certainement des qua-
lités, il contient des dispositions ingénieuses ; mais
il a un immense défaut : celui de ne pas répondre au
programme.
Les façades sont très-drôles.
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Signe : Etoile rouge. L’auteur de ce projet pré-
sente deux plans : nous préférons de beaucoup la
seconde disposition à la première, car elle rendra
l’agrandissement prévu beaucoup plus facile. Ce plan
est d’ailleurs bien jétudié, et nous paraît répondre
au programme dans la plupart de ses données.
Les locaux sont bien groupés ; les communica-
tions de service, parmi lesquelles il en est de très-
ingénieuses, sont commodes. Cependant la circula-
tion du public paraît moins bien établie, en ce sens
quelle n’est pas assez séparée du mouvement du
personnel.
La façade est traitée dans un beau style ; l’en-
semble est largement conçu, bien arrêté par les
pavillons en aile, dont les pignons, peut-être un
peu lourds, donne du mouvement à la silhouette
que complète, en la dominant, un gracieux beffroi,
peut-être un peu maigre. Nous aimons assez cet
ensemble, dont on juge mieux encore par la vue
pittoresque qui, dans une bonne perspective, nous
montre l’ensemble du monument.
Le projet Etoile rouge est à classer parmi ceux
qui nous paraissent devoir fixer l’attention du jury.
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Van't ouwt’t nieuw. Le plan présente de
bonnes dispositions au point de vue des divers ser-
vices et répond aux données du programme; l’a-
grandissement aussi serait aisé. Nous regrettons
dans ce projet quelques dispositions fâcheuses,
telles que le secrétariat placé au rez-de-chaussée,
alors que le cabinet du bourgmestre est à l’étage.
Il nous paraît aussi que si la cour intérieure avait
en plus ce qu’il y a d’espace en trop dans le grand
vestibule, cela n’en vaudrait que mieux; cette cour
est un peu petite.
Quant aux façades, traitées dans un beau style
d’architecture ogivale, elles ont beaucoup de carac-
tère; la façade principale est d’une composition
ample, les éléments en sont bien pondérés et les
motifs variés en sont d’un beau dessin. C’est en-
core un projet à noter.
En somme, ce concours présente huit projets
intéressants, parmi lesquels plusieurs ont un
mérite incontestable. L’administration communale
de Schaerbeek a droit de se féliciter du résultat de
ce concours.
Pour finir, il nous reste à féliciter l’administra-
tion de la mesure prise pour le placement. On nous
a dit qu’il y a été procédé par voie de tirage au sort.
C’est une excellente et très-loyale mesure.
E. A. |