Full text |
1852. — M° 564.
ANVERS, Mercredi 29 Décembre.
Dix-Huitième année.
LE PRECURSEUR
CHEMIN DE FER. — DÉPARTS D’ANVERS.
Pour Bruxelles, à 7, 9-50, 11, 2-43,4-13,718.— Caud Bru.e» et
Ostende, 4 7,9-50,2-43,4-15. (Termondeet Gand)7-15. — Cour-
trai. Tournai, (.ilia et Calais à 7, 9-50, 4-15. — Liège et Veryiers,
Louvain et Tirlemont, à 7, 9-50, 4-15, 7 15. — Aix-la-Chapelle et
Cologne, à 7, U 50, 7-IÖ. - St-Trolld et Hasselt, a 7, 9-50, 4-15.
D-,,- J. W„„, Gand par St-Nirolas et Bekeren, d'Anvers 5-30,9,
lâjS Q6 WâBS, u -j-SU, 6. De Garni, 5-20, 8-50, 10-30, 2 55, 5-15.
Journal Politique, Commercial, Maritime et Littéraire.
l’ftls.- liberté. — Frogrè«.
ABONNEMENT PAR TRIMESTRE.
Po«r Anvers..................fr. 12 30
» la province franc de port. » 15
> la Hollande...............a 17
» la France................» 17
Insertions 25 c.» la ligne. Réclam. » » 50
On s abonne au bureau du Précurseur et cher tous les Directeurs des Postes.
29 Décembre.
BULLETIN POLITIQUE.
Rien de neuf de Paris. L’Empereur y est revenu hier après-mi-
di. Les lettres de créance des ambassadeurs du Nord n’ont pas
encore été présentées. On parle de nouveau du mariage de l'Em-
pereur avec une princesse allemande
D’après la Gazette de Cologne, d’accord en ceci avec plusieurs
suircs journaux allemands, la reconnaissance de l’Empire français
par les trois grandes puissances du Nord, serait faite sans condi-
tions préalables, avec la seule réserve que le nouvel Etat respecte
la situation territoriale établie par les traités de 1815.
Nous appelons l'attention du lecteur sur la profession de foi du
nouveau cabinet anglais que nous publions plus loin.
L’empereur d’Autriche est arrivé ü Vienne le 21 décembre de
retour de son voyage à Berlin. La correspondance autrichienne
annonce à ce sujet dans des termes formels que l’entrevue de
l’empereur et du roi de Prusse n’a eu pour but que d’assurer plus
que jamais le maintien de la paix en Europe.
Les journaux et correspondances de Madrid du 25 décembre ne
sont pas arrivés.
Un décret publié à Naples, le 15 décembre, porte que le conseil
d’Ltat reprendra son ancienne dénomination do conseil des Etats
du roi en déça du Phare; le ministre de grâce et justice est
président du conseil ; le vice-président et les conseillers actuels
conservent leurs fondions.
Le Journal de Constantinople annonce que le gouvernement a
pris la résolution de diminuer notablement les appointements des
fonctionnaires publics, au fureta mesure des remplacements. Il
en résultera, dans un temps donné, une économie de 50 à 40 mil-
lions de piastres par année pour le trésor.
Les bruit les plus inquiétants continuent à courir à Constanti-
nople sur l’étal des provinces de Bagdad et de Moussoul, que l’on
dit entièrement occupées par les Arabes du désert, et l'on ajoute
que Vamik pacha et Méhémel Réchid pacha sont bloqués, l’un à
Bagdad, et l’autre à Mossoul, si bien que le premier ne pourrait se
mettre en route pour venir occuper son poste de grand-maître de
l’artillerie k Constantinople, et que le second ne pourrait quitter
Mossoul pour aller prendre b Bagdad, à la place de Namid pacha,
le commandement en chef de l’armée de l’Irak.
Le Journal de Constantinople se dit autorisé k déclarer que tous
ces bruits sont complètement dénués de fondement.
Les journaux américains, apportés k Liverpool par 1 'Europa,
nous apportent les traces manifestes et nombreuses de l’émotion
produite aux Etats-Unis par deux événements qui intéressent di-
rectement l’Europe. Le gouvernement français a pris possession
de la presqu’île de Samana.dans la république de Saint-Domingue,
et M. de Raousset-Baulbon , ancien officier français, conquérant
de la province mexicaine de Sonora, l’a déclarée, k ce qu’il paraît,
possession française.
Les plus exaltés des journaux américains croient apercevoir,
dans la coïncidence de ces deux faits, l’intention de s’opposer k
l’agrandissement des Etats-Unis et de faire jouer k l’influence
française un rôle prépondérant en Amérique. Les plus modérés
font observer, en ce qui concerne M. de Raousset-Baulbon, que
rien ne démontre qu’il ait été autorisé par son gouvernement, ni
que la France accepte cette conquête imprévue.
Le Marco-Polo est arrvié dimanche au soir, k Plymoulh, venant
de Melbourne (Australie), après une traversée rapide de 75 jours.
La seule nouvelle intéressante qu’il nous apporte, c’est que ia ri-
chesse minérale de cette colonie, au lieu de diminuer, semble
s’accroître à vue d’œil. On attend le Melbourne avec une grande
cargaison de lingots.
Un nouvel incident, survenu à la Havane, défraie, faute de
mieux, l’attention publique et les commentaires de nos confrères
américains. L’affaire, celte fois, n’a rien de politique, et se ratta-
che uniquement k la question de l'esclavage. Elle paraît se résu-
mer dans les faits suivants. Un navire neuf, le Lady Suffolk , avait
été acheté à Baltimore, pour le compte d’une maison havanaise.
Expédié sur la côte de Cuba, l’équipage américain permuta avec
un équipage espagnol, et fut mis k terre, tandis que le Lady Suf-
folk. reprenait le large avec un chargement et un armement mys-
térieux. Ces circonstances ont fait soupçonner le navire d’étre
destiné k la traite, et, sur la dénonciation du consul anglais, le
capitaine américain et son équipage ont été mis eu étal d’arresla-
lion, comme prévenusde complicité. Les lettres particulières an-
noncent, néanmoins, que nulle charge ne s’élève contre eux, et
qu’ils vont être mis en liberté, si même ils ne le sont déjk.
L’Angieterre paraît, d’ailleurs, reprendre vivement k cœur la
suppression de la traite, qui aurait acquis un certa.n développe-
ment dans les dernières années. C’est, du moins, k ce but .que l’on
attribue la présence de forces britanniques assez imposantes dans
le port de Cuba. La marine française s’y trouve aussi représentée
en ce moment par deux bâtiments : la corvette k vapeur Oronle el
le brick Oresle.
M. le comte Félix de Mérode, cet implacable ennemi des
chemins de ter, parce qu’ils sont une voie rapide de civilisa-
tion , pardonnera-t-il à un journal dont il faisait si grande-
ment l’éloge, naguères encore, d’avoir dit hier que le meil-
leur moyen à mettre en œuvre, pour stimuler le progrès de la
civilisation dans la Campine, c'était d'établir un chemin de
fer? Nous en douterions, s’il n’était, nous allions dire avec
le ciel, avec le Journal de Bruxelles, des accommodements.
Car, il se trouve dans cette seule phrase des mots qui doivent
singulièrement choquer le noble comte. — Chemin de fer —
progrès de la civilisation, et cela au moyen de la vapeur? —
Nécessité de le stimuler dans la Campine : — Il y a là de quoi
faire bondir M. de Mérode. Le Journal de Bruxelles ne va-
t-il pas jusqu’à s’écrier, nouveau Jérémie ; —« Malheur à
h contrée qui resterait en arrière sous ce rapport et qui
essayerait de lutter contre les autres membres de la famille
nationale, au moyen de l'ancien système de communications. »
Un homme tel que le député de Nivelles, ne saurait, s’il
n’avait deux poids et deux mesures, pardonner une idée
aussi libérâtre que celle-là. A sa place, et pensant comme
lui, nous lancerions un bel et bon anathème contre le Jour-
nal de Bruxelles. Nous lui dirions hautement ; « Vacle retro
salarias, qui viens, tuquoque, prêcher les doctrines du pro-
grès et delà civilisation, au moyen de ces chemins de fer,
qui ne sont que de véritables chemins d’enfer. Sois excom-
munié. »
Le Journal de Bruxelles l’aurait bien mérité, car il fournit
des armes contre les chefs de son parti, et qui plus est
contre lui-même.
En effet, quand ii dit — « Malheur à la contrée qui res-
terait en arrière sous le rapport des voies nouvelles et qui
essayerait de lutter contre les autres membres de la famille
nationale, au moyen de l’ancien système de communication. »
— C’est la condamnation de ses propres doctrines qu’il pro-
nonce. Il rend, involontairement sans doute, mais en défi-
nitive il rend hommage à celles que nous avons constamment
soutenus. Car tout s’enchaîne logiquement dans les choses
de ce monde. S il est vrai que ce serait un malheur pour
nue contrée prise isolément, d’essayer de lutter contre celles
qui ne se guident plus d’après l’ancien système, qui sont
entrées dans la voie du progrès, ce qui serait un malheur,
pour cette contrée, en serait un aussi pour un pays tout en-
Der; prenons le nôtre pour exemple. La Belgique peut-elle,
sans comprometlre ses plus précieux intérêts, rester en ar-
rière et ne serait-elle pas insensée, si elle essayait de lutter
filtre les autres membres de la famille européenne, de la fa-
nüie universelle, au moyen des anciens systèmes?
Le Jour nal de Bruxelles, il est vrai, ne parle que des vieil-
t
les voies de communication ; mais ce qu’il dit à cesujet, s'ap-
plique également aux vieux principes économiques, au vieux
régime commercial et industriel. Quand, de toutes parts, on
voit des naiions se débarrasser prudemment des chaines du
protectionnisme, afin de suivre avec moins d’entraves le
chemin du progrès, serait-il sage ici d’en demeurer embar-
rassé? La Belgique pourrait-elle impunément rester en
arrière, lutter contre le mouvement qui pousse les autres
peuples à marcher en avant? non, et le raisonnement, très
bon d'ailleurs, que tient le Journal de Bruxelles, au sujet du
chemin de fer civilisateur de la Campine, s’applique au pays
entier, en matière d’économie politique. L’industrie linière
nous eu offre une triste preuve, par sa décadence. Elle a
essayé de lutter contre le progrès, au moyen de l’ancien
système, et elle a succombé. Que le Journal de Bruxelles
pèse bien la valeur de l’argument qu’il nous a fourni lui-
même, pour combattre les vieilles idées dont il est un des
plus tenaces champions, peut-être arrivera-t-il à comprendre
que toutes les espèces de progrès s'enchaînent, qu’elles se
suivent comme des wagons liés ensemble et entraînés par
une locomotive sur un raihvay. Allez donc vous obstiner à
maintenir de hautes barrières de douane, alors que le conti-
nent tout entier sera bientôt sillonné de chemins de fer et
que les steamers se chargent de relier les doux mondes?
A nos yeux, il y a plus que manque de prévoyance, plus
qu’aveuglement ; et cependant c’est le système qu’a jusqu’a-
présent soutenu le Journal de Bruxelles.
Peut-être viendra-t-il à penser autrement. Nous en avons
quelque espoir, quand nous le voyons pousser le courage
jusqu’à faire entendre aux habitants de la Campine, aux
électeurs de Turnhout, qu’ils sont très arriérés, qu’il leur
importe de ne pas demeurer plus longtemps étrangers au
progrès Ce langage paraîtra héroïque, si l’on considère la
position de celui qui le tient. On sait combien la Campine a,
dans ces derniers temps, été une contrée favorable aux can-
didatures d’hommes chers au Journal de Bruxelles. Il y a
donc de sa part, une véritable bravoure à venir dire haute-
ment aux Campinois: vous n’êtes pas àla hauteur du siècle;
vous avez beaucoup de terrain à regagner et vous devez
marcher vite, si vous voulez vous trouver sur la même ligne
que ceux qui sont avancés. Faites donc desprogrès et faites-
en beaucoup.
Ce conseil est si bon que nous joindrons notre voix à celle
du Journal de Bruxelles, mais nous rie nous bornerons pas
là et nous l’engagerons lui-même à pousser la grandeur
d’àme jusqu’au bout, jusqu’à l’abnégation d’idées qui n’ont
rien de commun avec celles si raisonnables qu’il prêche,
à propos de la Campine.
Jusqu’à ce jour les consulats des Deux-Siciles avaient été
chargés des affaires du duché de Panne. M. le ministre des
affaires étrangères de ce dernier Etat vient d’informer MM.
les consuls Siciliens, que, le duché de Parme ayant reconnu
S. M. catholique comme chef de la famille, dorénavant les
affaires concernant le duché seront traitées par les consuls
d'Espagne.
Colon. — Fourbaudage.
On nous écrit de New-York, 12 décembre :
La pétition des filateurs de colon en Belgique, adressée à la
Chambre de Commerce d’Anvers et insérée dans le Précurseur du
4 novembre, a éveillé ici l’attention de plusieurs négociants dis-
tingués. Dos démarches ont aussitôt été faites auprès de M. le
secrétaire du trésor à Washington, pour lui faire part de ce trafic
scandaleux, en le priant de prendre tout de suite des mesures
pour y mettre un terme. Ce fonctionnaire a déclaré que le gouver-
nement fédéral n’avait malheureusement pas le pouvoir de répri-
mer ces délits ; que les gouvernements des Etats et les municipa-
lités avaient seuls le droit d’intervenir dans ces circonstances. Il a
ajouté que des plaintes semblables lui parvenaient très souvent et
que le seul moyen de combattre le mal, était de faire dénoncer les
fraudeurs dans un journal de l’endroit, puis d’adresser en même
temps une plainte k l’autorité locale où le délit avait été commis.
A cet effet, les plaignants devront faire constater légalement la
fraude par une autorité locale et par le consul américain, lorsqu’il
voudra bien s’y prêter, lis auront soin d'indiquer minutieusement
toutes les marques et les numéros des colis.
Ces certificats officiels dûment légalisés par le consul américain,
devront ensuite ê.re transmis aux consuls belges, par le ministre
des affaires étrangères, avec ordre de faire toutes les démarches
nécessaires pour obtenir le remboursement des dommages et faire
cesser ce trafic frauduleux.
Puisse le moyen indiqué être efficace.
La Belgique et la limite (lu Rhin.
i.
Des assurances formelles el réitérées ont pu faire accueillir sans
crainte pour le repos du monde le rétablissement du gouvernement
impérial en France. On devait croire que le programme du nouvel
empire était tout entier dans le discours de Bordeaux, dont l’effet
a été immense en Europe et a sans aucun doute contribué pour
sa part k consolider la haute fortune de Louis-Napoléon. L'em-
pire, c’est la paix ! Ces paroles rassurantes n’ont pas seulement
été accueillies avec joie par les classes industrielles et commer-
çantes de la Franco, mais elles ont donné, en outre, une satisfac-
tion très-large aux susceptibilités des autres puissances.
La dernière transformation du gouvernement français s’est donc
accomplie sans provoquer au dehors ces manifestations auxquel-
les un événement de cette nature aurait certainement donné lieu
s’il s’était effectué dans d’autres conditions et avec un autre pro-
gramme. Il ne faut pas se dissimuler, en effet, que tout ce qui
rappelle les agressions du premier empire tend k exciter la plus
vive répulsion hors des limites de a France actuelle. Mais l’Eu-
rope n’a pu qu’applaudir aux vues levées que contenait aussi la
première circulaire du gouvernement de Napoléon 111.
« Une expérience, accomplie dans les circonstances les plus
» dfliciles, a suffisamment prouvé, disait le ministre des affaires
» étrangères, que le gouvernement français, jaloux de ses droits,
» respectait egalement ceux des autres et attachait le plus grand
» prix à contribuer pour sa part au maintien de la paix générale;
» cest à ce but que tendront toujours les efforts du gouvernement de
» l'empereur des Français qui a la ferme confiance que, ses in-
» tentions se trouvant en parfait accord avec les sentiments des
» autres souverains, le repos du monde sera assuré.. »
Ce sage commentaire du discours solennel de Bordeaux est in-
contestablement le plus ferme et le plus éclatant démenti qui
puisse être donné k quelques publicistes dont l’esprit aventureux
et brouillon s’ingénie k réveiller mal k propos les questions les
plus brûlantes et les plus redoutables. Bien qu’il ne faille point
s’exagérer l’importance de ces élucubrations, il n’est cependant
pas inutile de les signaler k l’attention du public. On verra ainsi k
quelles folies peut se porter un zèle maladroit.
Au nombre des brochures dont la publication a coïncidé très-
itnprudemmenl avec le rétablissement de l’Empire, on remarque
un opuscule qui se distingue surtout par les opinions les plus hos-
tiles a l’indépendance de la Belgique el par les provocations les
plus dangereuses pour la sécurité de l'Europe. Il s’agit de l’ouvrage
qui a pour turc : Les limites de la France. Nulle part les vœux
d'agrandissement et de conquête n'ont été exprimés avec plus
d’énergie. C’est k peiu" si Napoléon le Grand aurait pu, après les
victoires d’Ausierlitz et de Wagram, dicter h l’Europe un ultima-
tum plus orgueilleux.
L’auteur des Limites de la France supprime les frontières de la
plupart îles Etats qui avoisinent lé nouvel empire, sans avoir au-
cun égard aux traités sur lesquels est fondée la Constiiution ac-
luellc de l'Europe. Réunion k l’empire de la Savoie, de la Belgique
el des provinces rhénanes; voilà ce qui lui parait au moins néces-
saire pour assurer ia grandeur de la France. — Voilk la politique
qu’il recommande comme la conséquence directe, logique et for-
melle des luttes soutenues autrefois pour constituer le territoire
de cet Etat. Hors de ce qu’il appelle selon la phraséologie de 1804,
les limites naturelles de la France, il ne voit qu’affaiblissemenl et
déchéance pour le nouvel empire. C’est k celte conclusion au
moins bizarre que le conduit le résumé qu’il a tracé des efforts
autrefois tentés pour atteindre le versant des Alpes et le Rhin.
Mais il ne faut pas perdre de vue que l'auteur des Limites de la
France est comme obsédé par une idée fixe qui le pousse en avant
en dépit des écueils et des obstacles de toute nature. Quelques
citations textuelles feront mieux apprécier les vues anti-européen-
nes qui donnent kee livre un caractère étrange.
« Les limites naturelles et surtout la ligne du Rhin, voilà, dit le
« publiciste de Paris, la question vitale pour la France. Elle aura
» beau mettre en culture les grandes étendues de son territoire
» encore en friche, s’assimiler l’Algérie, coloniser la Guyane, se
» couvrir de chemins de fer, toutes ces grandes entreprises,
>» qu’elle est d'ailleurs peu capable de réaliser, n’augmenteront ses
» forces qu’à la longue et ne lui donneront jamais ce que lu pos-
» session de la rive gauche du Rhin peut seule lui donner.. . La
» guerre est un de ces maux des sociétés humaines, qui conlri-
» bitenlà leur grandeur et qui ne disparaîtront jamais.Si la France
» renonce à toute idée de conquête et d’agrandissement; si elle
» s'endort dans son repos, s'endurcit dans sa chute, ce sera le
» signe certain de sa déchéance. »
11 y a longtemps, disons-le ouvertement, que nous n’avons vu
préconiser des tendances aussi funestes, des projets aussi insen-
sés, des doctrines aussi contraires k tout ce qu’il y a d’humain el
de généreux dans la civilisation moderne. Jamais même nous n’a-
vous vu répudier avec un dédain plus soldatesque les nobles et
fécondes conquêtes de l’industrie , pour exalter une certaine
espèce de guerre que l’on qualifierait plus justement de brigan-
dage.
Écoutons encore :
« La France est aujourd’hui, au point de vue du territoire et de
» la nationalité, le résultat logique mais encore incomplet de l’ac-
» cord de la politique et de la géographie, accord qui est le but
» auquel tendent toutes les nalionalilés.
L’auteur veut ensuite que l’héritier de Napoléon poursuive et
termine Vœuvre inachevée :
« En voyant l’héritier du nom et du pouvoir de Napoléon prati-
» quer si scrupuleusement k l’intérieur la politique de l’empire,
» on doit le croire assez disposé à imiter aussi cette politique au
» dehors... Le pouvoir qui aspire k la succession de l’empire
» peut bien désirer de rendre à la France ce qu'elle a perdu sous
» l’empire ..»
«... On sent, lit-on ailleurs, qu’il faudra peu de chose pour je-
» ter l'Europe dans la guerre, et L'on soupçonne que le nouvel em-
» pire aura plus d’une fois une violente tentation de réparer Les
» désastres de l'ancien, el de se faire le rédempteur de 1814 et de
■» 1815.. ■»
La tâche dévolue au nouvel empereur est d’ailleurs indiquée de
la façon la plus neite :
« Il faut que tout le pays entre l’Océan et la Méditerranée, les
» Alpes, les Pyrénées el le Rhin, soit enfin la, France comme il a
» été autrefois la Gaule. »
Encore, le restaurateur des limites naturelles ne se contente-t-il
point des Alpes et du Rhin ; il fait aussi ses réserves quant k la
Hollande et aux bouches de l’Elbe. En résumé, si l’on excepte l’Es-
pagne, toute l’Europe semble directement ou indirectement mena-
cée.
Après les citations qui précèdent, on lira sans étonnement ce
qui suit:
« Les pays que la France a besoin d’incorporer à son territoire
» doivent aussi désirer cette réunion. Appartenant k la grande
» légion dont Paris est le cœur, et dont les Alpes, les Pyrénées et
» les deux mers sont les limites ; français d'origine, de langage,
» de mœurs, de religion, d'intérêt, ils n'ont qu’à gagner à le deve-
» nir politiquement (?)■ La Savoie el les provinces rhénanes n’au-
» ront pas k regretter une domination étrangère, la Belgique ne
» regrettera pas une nationalité factice et toute nouvelle qui ne doit
» son existence qu’k la jalousie de l'Europe contre la France.Quel-
» ques événements et quelques intérêts récents et passagers ne
» peuvent changer la nature des choses, et ne doivent pas faire
» perdre de vue les intérêts vrais et durables. Quand la France
» pourra el voudra posséder ces pays, elles les trouvera prêts à ta
» seconder. »
11 pourrait suffire de donner ces extraits pour que le bon sens
de nos lecteurs réduise k leur juste valeur ces singulières illu-
sions ou qu’il fasse justice de ces prétentions qui dénotent plus
de vanité que de sagesse. Toutefois, nous croyons devoir leur
opposer une réfutation plus complète. Invoquons k notre tour le
passé; niais au lieu de considérer une des faces seulement de la
question si grave des limites naturelles, tâchons de l’embrasser à
un point de vue plus large et plus général. En face de la France,
voyons agir l’Europe.
Ouvrons l’histoire d’une main impartiale pour démontrer que
le système des limites naturelles de la France n’a pas toujours été
une source de succès et de gloire pour ce puissant Etat ; que s’ap-
proprier et surtout conserveries anciens Pays-Bas a été dans tous
les temps une entreprise bien difficile; que les promoteurs les
les plus fameux des limites naturelles, que Louis XIV et Napoléon
ont tous les deux, après d’éciatanls succès, essuyé des revers ter-
ribles ; enfin, que trop d’ambition a déjk compromis l’existence
même de la France et pourrait encore, dans un moment où le sys-
tème d'équilibre est solidement affermi, l’exposer aux éventualités
les plus redoutables. (Indép.)
Le Moniteur d’hier annonce pour le 5 janvier prochain la
réadjudicatiou publique delà fourniture de 2100 tonneaux de rails,
600 tonneaux de coussinets, 50 tonneaux de chevilles et 100,000
coins en bois nécessaires au service du chemin de fer en 1855.
Conformément aux réclamations des maîtres de forges dont nous
avons parlé, les modifications suivantes ont été portées au cahier
des charges de cette adjudication : .
« La longueur de chaque rail est de 6 mètres 24 centimètres; il
» pourra cependant être fourni des rails de 5 mètres 10 centimè-
» 1res, mais seulement jusqu’k concurrence de 1/20 du nombre
» total do rails composant la fourniture.
» Au fur et k mesure de l’avancement des fournitures, il sera
» délivré k l’entrepreneur, sur procès-verbal de réception provi-
» soire, des certificats de payement jusqu’à concurrence de leur
» valeur. Pour les rails, l’entrepreneur sera responsable pendant
» deux ans à dater du jour où ces fers auront été placés sur la
» voie, néanmoins la durée de ta garantie ne pourra jamais
» excéder trois ans, k dater de la dernière livraison, quelque
» intervalle qui se soit écoulé entre celle-ci et la pose. »
Le môme jour il sera procédé à la réadjudicalion de l’entreprise
du rcmaniage de rails, coussinets, chevilles et clavettes en 1855
Un arrêté royal, en date du 25 décembre, déclare la Société du
chemin de fer de Charleroi k Louvain concessionnaire de d vers
. mbranchemenls industriels k construire dans le bassin de Char-
leroi. Cet arrêté royal a été pris k la suite d’une minutieuse en-
quête dans laquelle les autorités compétentes ont généralement
exprimé l’opinion que sous le rapport de l’utilité générale, il était
k désirer que le réseau des chemins de fer industriels fût exécuté
simultanément et conjointement avec le chemin de 1er de Charle-
roi k Louvain, de manière k ne former qu’une seule concession.
Les branches concédées dès aujourd’hui sont au nombre dedeux;
pariant de la station de Lodeiinsarl du chemin de fer de Charleroi
k Louvain, elles se dirigeront l’une vers les Quatre-Bras de Gilly,
avec un embranchement aboutissant au charbonnage des Ardinoi-
ses ; l’autre vers Jiirnet, avec un embranchement vers Damprcmy.
Deux autres branches seront construites ultérieurement ; les
plans en devront être soumis k l’approbatiou du gouvernement,
dans le délai d’un an.
Le prix de transport de grosses marchandises sera généralement
moins élevé en ce qui concerne le taux des péages, qu’il ne l’eût
été au taux de 15 centimes par tonne kilomètre tant k la remonte
qu’a la descente, qui a été admis par la commission d’enquête et
par la Chambte de commerce.
Chambre de commerce d’Anvers.
La chambre de commerce el des fabriques d’Anvers informe le
commerce qu’elle a reçu de M le ministre des affaires étrangères
divers documents relatifs k des mesures prises par le gouverne-
ment de Buenos-Ayres et qui intéressent le commerce et la navi-
gation des fleuves de la Confédération.
Ces documents sont déposés au secrétariat, k l’inspection de
ceux que la chose intéresse.
M. le ministre de la justice vient d’adresser la circulaire
ci-après aux gouverneurs provinciaux ;
Bruxelles, le 27 décembre 1852.
M. le gouverneur,
Je vous prie de vouloir bien vous occuper, dès k présent, de la
rédaction définitive des étals des autorisations qui ont été accor-
dées par la députation permanente du conseil provincial, pendant
l’année 1852, aux bureaux de bienfaisance, aux hospices et aux
monts-de-piété de votre province, en vertu de l’arrêté royal du
lr juillet 1816 et de l’art 76 de la loi communale, et de me les
adresser dans les premiers jours de janvier prochain.
L'état des dons et legs devra être dressé, séparément, pour cha-
que catégorie d’établissements charitables , conformément au
modèle annexé k la circulaire du 8 mai 1849, secrétariat général,
2e bureau, n8 25.
Si aucune autorisation n’avait été accordée pendant ladite année
k des établissements de chacune de ces catégories, il y aura lieu
de m’adresser des états négatifs. Le ministre de la justice,
Ch. Faideii.
On lit dans le Journal des Débats :
Dans les temps difficiles où nous vivons. lorsqu’il serait si dé-
sirable, dans l’intérêt de la paix en Europe, de voir tous les gou-
vernements marcher d’un pas ferme dans les voies de la sagesse
et de la modération, on ne peut s’empêcher de ressentir quelques
inquiétudes on jetant les yeux sur la Turquie, où les causes de
mésintelligence semblent se multiplier, surtout depuis que le Sul-
tan a retiré le pouvoir aux hommes de la réforme pour le donner
aux chefs les plus compromis du vieux parti musulman, aux enne-
mis les plus déclarés de l’œuvre entreprise par le sultan Mah-
moud. Certes, les hommes de la réforme n’avaient pas encore
sauvé la Turquie, et peut-être n’auraient-ils pas réussi k la sauver
définitivement de tous les périls qui la menacent, mais du moins
ne l’avaienl-iis pas compromise et savaient-ils la maintenir dans
l’alliance des peuples de l’Europe,tandis que les hommes du vieux
parti turc semblent destinés k précipiter sa ruine intérieure, et
ont déjk soulevé plusieurs sujets de querelles avec les puissances
étrangères, au risque de dégoûter ces gouvernements du bon vou-
loir qu’ils portent à l’empire, et de l’isoler de plus en plus, c’est à
dire de l’abandonner k la plus fâcheuse situation où un Etal aussi
faible et pourtant suivi par de si ardentes convoitises, puisse ja-
mais se trouver. Son salut ne peut venir que de la bonne intelli-
gence et de la facilité'de ses rapports avec tout le monde, et c’est
k se brouiller avec tous leurs anciens alliés que semblent travail-
ler avec une déplorable ardeur ceux qui tiennent aujourd’hui les
rênes du gouvernement.
Pour être juste avec tout le monde copendant.il faut reconnaître
que ia première des affaires qui ont porté le trouble dans les rela-
tions de la Turquie avec le reste du monde ne doit pas être impu-
tée aux ministres actuels du Sultan. La question des Lieux-Saints,
qui n’a pas encore porté tous les fruits et a donné des sujets de
mécontentement Dès vifs k plusieurs puissances, a été agitée d’a-
bord sous le ministère réformiste, il y a deux ans environ, et c’est
lui qu’il faut accuser de celte faiblesse ou de ce défaut de sincérité
qui ont semblé vouloir faire tourner celle affaire k la confusion
réciproque des Grecs et des latins.Nous ne pouvons pas savoir les
conséquences définitives qu’elle entraînera ; mais n’est-ce pas k
lui-même que le divan devra s’en prendre, s’il en surgit quelque
chose de désagréable pour son orgueil ou pour ses intérêts; et
la démonstration armée contre le pacha de Tripoly, qui a si
prolondément blessé la sublime-Porle,n’aurait-elle pu être évitée,
si le gouvernement turc avait su inspirer plus de confiance dans
sa force et dans son impartialité?
Quant au refus de l’emprunt, c’est bien l’œuvré du porti rél.. ■
grade ; ç’a été la preuve de son triomphe dans tes conseils du Sul -
tan et le premier acte de son entrée au pouvoir. Sans revenir si;.’
les regrets que tous les amis de la Turquie ont dû ressentir, eu le
voyant rejeter b jamais la plus belle occasion qui lui art éié offerte
de lier ses intérêts k ceux des peuples de l’Occident, et d’attirer
chez elle cette rosée fécondante des capitaux, dont ses provinces
incultes et sa population appauvrie ont un si grand besoin, ne
peut-on pas déjk signaler quelques-unes des conséquences de
cette déplorable victoire des vieux musulmans? La pénurie du
Trésor en est-elle ressortie d'une façon assez éclatante ? Toutes
ces démonstrations si pompeuses, ces appels au public, ces sous-
criptions patriotiques, l’envoi de l’argenterie du Sultan k ia Mon-
naie, tout ce bruit pour trouver les i i millions 500,000 fr. du pre-
mier versement de l’emprunt que l’on disait vouloir rembourser,
était-ce assez triste? Et aujourd'hui après plus de deux mois de si
grand travail, en être arrivé k ce degré d’impuissance constatée
que l’on n’a pas encore pu prendre de mesure sérieuse pour rem-
bourser le premier sou de ces H millions, n’est-ce pas [dus triste
encore ? Sous quelque côté qu’on l’envisage, celte fâcheuse affaire
au: a porté k la considération morale dont jouissait le gouverne-
ment turc l’atteinte la plus cruelle qu’il ail reçue depuis longtems.
C’est en vain qu’il essaie de se prévaloir de cette faculté de ra-
tification définitive qui, en droit public et international, appar-
tient sans conteste aux gouvernements sur toutes les transactions
signées ou conclues par leurs agents ; on sait maintenant que
cette faculté, le Divan l’avait aliénée dans les instructions données
au prince Callimaki, cl l’avait perdue en s’appropriant, en em-
ployant k son usage les fonds provenant du premier versement de
l’emprunt. Est-ce après avoir reçu et encaissé l’argent des capita-
listes européens, est-ce trente jours après en avoir disposé pour
ses besoins et l’avoir si bien dépensé qu’on ne sait plus comment
taire pour le rendre, qu’on peut être admis à refuser de ratifier
officiellement le marché en vertu duquel on se l’était procuré? Au
reste, les correspondances de Constantinople nous apprennent
combien sont déjk rapides les progrès que fait le mal. D’après les
lettres du H décembre, en effet, nous voyons que, d’un côté, le
cours du change est monté au chiffre de 120, presque aussi haut
qu’il était dans les mauvais jours où le sultan Mahmoud altérait le
plus violemment les monnaies pour payer k la Russie les contri-
butions de guerre stipulées par le traité d’Andunople, et, de l’au-
tre, que les bons du trésor, les haïmes, soutenus pendant long-
temps par la banque de Constantinople au cours de 97, mais aban-
donnés nécessairement aujourd’hui par elle, sont tombés an cours
de 92, tandis que la monnaie turque, cette mauvaise monnaie, qui
est en partie la cause du mal, jouit d’une prime de 5 pour 100 ; de
telle sorte que les créanciers de l’Etal perdent 12 ou 15 pour 100
sur la valeur nominale de leurs titres, et que le gouvernement,
s’il voulait, ou plutôt s’il pouvait trouver de l’argent, serait obligé
de le payer au moins ce prix, après avoir refusé 50 millions k 7
pour 100’.
Une fois lancé dans une telle voie, il est difficile de s’arrêter.
C’est ainsi, par exemple, qu’au mépris des capitulations, le Divan
a interdit au commerce étranger de faire usage dans ses transac-
tions de monnaies étrangères. Cette interdiction hardie, car elle
viole les traités, produirait, si elle était maintenue, la situation ia
plus bizarte que l’on puisse imaginer. Elle pourrait se traduire
ainsi, et cela sans sortir des limites de la vérité la plus scrupu-
leuse : l’habitude dans laquelle les Sultans ont persévéré pendant
longtemps de fabriquer de la mauvaise monnaie ayant déprécié le
cours de cette monnaie et contribué d’autant k faire estimer è
leur juste valeur les espèces étrangères qui sont universellement
frappées à un litre loyal et honnête, tout sujet étranger qui aura
introduit dans l'empïre quelqu’un de ces bonnes et excellentes
monnaies sera réputé faux monuayeur et puni comme tel ; car il
n’est désormais licite que d’employer la mauvaisê monnaie de
Selim et Mahmoud. Cela parait singulier, et pourtant ce n’est que
vrai ; seulement, comme les traités signés avec la Porte donnent
aux étrangers le droit d’importer les espèces de leurs pays pour le
besoin de'leur commerce, ia diplomatie aura des observations à
faire sur cette étrange ordonnance, et il est probable qu’en défini-
tive le gouvernement turc croira devoir la rappeler.
C’est encore au ministère actuel du Sultan qu’il faut attribuer ia
responsabilité d’une mesure qui lui créera des embarras avec plu-
sieurs puissances, et notamment avec l’Angleterre et l’Autriche ;
nous voulons parler de ia défense qui vient d’être signifiée aux
bateaux k vapeur naviguant sous pavillon étranger de faire le ser-
vice du Bosphore. En fait, il s’agit d’un assez mince intéiêl ; mais
en droit celle mesure viole les traités et des principes importants
à maintenir pour le commerce de tous les étrangers. Dans l’état
actuel des choses, elle concerne cinq ou six petits bateaux à vapeur
appartenant surtout k des Autrichiens et à des Anglais qui ont
entrepris de faire entre Constantinople et les rives du Bosphore,
sur un parcours de six ou sept lieues, un service analogue k celui
que font k Londres les vialermen de la Tamise, ou que l’on projette
d’établir en ce moment entre Choisy-le-Roi et Asnières. Ces ba-
teaux ayant produit d’assez beaux bénéfices, il s’ost formé k Con-
stantinople pour leur faire concurrence une compagnie puissante,
composée surtout de banquiers arméniens, qui passent k tort ou
k raison pour être les agents de personnages très haut placés, et |