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f844. — If.° 3£§.
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83 novembre.
chambre; des r e p r és e a ta ,\ t s .
Le huis-clos qui a duré toute la semaine sera enfin levé au-
jourd'hui et la Chambre passera au vote des articles de la loi
sur l’introduction des céréales du côté du Limbourg. Plusieurs
amendements ont été proposés au projet, qui sera adopté pro-
bablement en son entier dans la séance d’aujourd'hui.
La discussion, on nous l'affirme, a été remarquable sous plus
d’un rapport et d’excellents discours y ont été prononcés ;
mais ce qui a dominé ces débats, c’est l’attitude du gouverne-
ment. Dès l’ouverture de la discussion, on s'en souvient, M.
Osy a déclaré tout haut que le ministère et le ministre de l'in-
térieur en particulier avait trompé la Chambre, avait trompé
le pays. Or, cette accusation s'est vérifiée de point en point
dans la discussion. La Chambre a vu pour la vingtième fois le
ministère avoir recours à ses roueries habituelles pour tourner
la question, et pour la tourner vainement, car il a été impossi-
ble au cabinet, quoique M. Nolhomb, M. Dechamps et M. Go-
blet eussent parlé chacun à plusieurs reprises, de se tirer avec
honneur du reproche qui leur avait été adressé et de rester
fidèles aux faits qu'ils avaient allégués lors de la discussion des
droits différentiels ; ils ont été de nouveau surpris en flagrant
délit de mensonge et d’incapacité.
Ce qui est sorti de plus clair de ces débats, c’est que le gou-
vernement belge n’est pas sur un très excellent pied avec la
Hollande, et qu’il est à craindre que le traité du 16 juillet avec
la France, relativement aux fils et toiles, court quelques dangers
pour son renouvellement.
Ainsi, du côté de l’Allemagne, le gouvernement a donné tout
ce qu’il pouvait donner pour obtenir une concession sur les
fers et fontes, concession toute aléatoire en définitive, car il est
certain que le prix des fers baissant sur les marchés anglais,
prive de fait la Belgique des résultats de cette convention.
Ensuite, il s’est en quelque façon aliéné la France qui voit dans
ce traité une sorte d hostilité qui n’existe pas au fond, mais qui
sera toujours un prétexte suffisant pour que les Chambres fran-
çaises demandent ou des représailles, ou au moins le uon-renou-
vellement du traité sur les fils et toiles, contre lequel les pro-
vinces du Nord réclament particulièrement.
Et ce qui viendra encore ajouter à Paris à cette tendance
anti-belge, déjà si largement existante, c’est le bruit qu’on a
fait en Prusse de ce qu’on y appelle la conquête du baron d’Ar-
nim, et les récompenses honorifiques qu’on lui a accordées à ce
propos.
De sorte qu’en nous résumant, avec l’Allemagne, convention
favorable à notre port, nous l’avouons, mais qui néanmoins est
bien plus favorable encore à celui de Cologne; —pour nos
fers, avantage léger, immédiat, mais sans garantie de durée.
-Avec la France, froideur croissante et crainte derupluredes
traités existants.
Avec la Hollande, enfin, qui est de toute façon notre meil-
leure alliée et qui consomme considérableinenlde nos produits,
des rapports peu affectueux et peut-être pis dans un temps
donné.
Voilà ce que nous vaut, en total, l’habileté ministérielle en
dehors de tous les méfaits qu’on lui reproche à juste titre dans
sa carrière purement politique. C’est là le résultat le plus in-
contestable de la conduite de notre cabinet et de son penchant
pour les affaires.
QUESTION DES ENTREPOTS.
2° ARTICLE.
On a fait, pour ainsi dire, une question d'Etat de la création
de deux entrepôts francs à Anvers et à Ostende. Les villes de
Gand, de Bruges et de Courtrai en ont été émues, comme d’une
FEUILLETON.
LE HKAAL.
Batticalca, île de Ceylan, le 2juin 1844.
Monsieur,
Nous avons ici notre Sport comme en France; c’est la chasse aux élé-
phants. Nos jockeys sont des cornacs; nous les appelons Mahouts. Nos
chevaux de course sont une certaine espèce d’éléphants sauvages que
nous nommons goondah.
Ce divertissement s’achève rarement sans mort d’homme. C’est un in-
cident qui scandalise les nouveaux débarqués d’Europe, mais qui émeut
très peu la compagnie anglaise.
J'étais arrivé depuis peu de jours à Colombo, chef-lieu des établisse-
ments européens dans l’Ile de Ceylan, lorsqu’un matin je lus dans’le Cey-
lon Overland Observer, le récit des opérations préliminaires d’une gran-
de chasse aux éléphants; ordonnée pour repeupler les écuries du gouver-
nement. Je courusaussitôlchez mon correspondant, qui précisément se
trouvait être honoré de la présidence d’un club pour l’amélioration de
la race éléphantine. Un homme qui savait distinguer les vices d’un élé-
phant à son allure, et son âge à ses défenses, étaiL un cicérone précieux
en pareille circonstance. Qu’onjugede mon désappointement en appre-
nant que depuis deux jours déjà, il était sur le terrain de la chasse.
Elle avait lieu à une trentaine de milles de Colombo dans un canton
hiontagneux et désert.Or, les solitudes de l'Inde ont des mystères qu’un
Européen récemment arrivé n’est jamais empressé d’étudier sans
escorte.
Il fallut pourtant me résoudre à faire le voyage seul. Je montai à che-
val après avoir mis une paire de pistolets dans les fontes, et je sortis de
Colombo accompagné de mon saïce, espèce de palefrenier qui suit tous
les pas du cheval confié à ses soins.Cette fois, il était chargé du fardeau
inaccoutumé d’une excellente carabine où j’avais introduit deux balles
de fer.
Nous arrivâmes sur les bords de la rivière Calamy, qui coule dans des
forges sauvages. Le chemin, à peine tracé, traversait un jongle, sorte
le taillis entrecoupé de marécages, repaire accoutumé des bêtes féro-
ces. Par intervalle, le bruit des pas faisait sauter dans l’eau épaisse et
lormante de la rivière un hideux alligator. Il est inutile de vous dire
que je me sentais assez mal à l’aise avec la perspective d’avoir des tigres
à ma droite, des alligatorsà ma gauche, et des serpents sous mes pieds.
Vers la fin de notre route, nous vîmes passer sur la rivière une bar-
que longue et si étroite que sans un boule-lof (sorte de planches atta-
chées d’équerre aux lianes de l’embarcation) elle eût infailliblement
chaviré. Les efforts de seize vigoureux rameurs, nus et noirs comme
des démons récemment échappés de l’enfer, la faisaient voler à contre
courant. Un homme vêtu du costume des riches Chingulais, était assis
a Barrière, immobile et sombre, les bras croisés, la tête penchée sur la
Poitrine. Quand la barque eut disparu derrière un rocher, le saïce me
lit a voix basse :
— C’est Wikrimi-Radjah-Singah !
Dès mon arrivée dans la colonie, j’avais entendu parler de ce chef de
évoltés, qui prétendait à la couronne des anciens rois de Ceyla'n. De-
puis 1815, époque de l'usurpation anglaise, une partie de la population
chose ruineuse pour elles. Il n’y avait vraiment pas de quoi, et,
pour notre part, nous ne verrions pas le moindre inconvénient
à ce que l’on accordât un entrepôt franc à Gand, à Bruges et à
Courtrai. 11 ne serait pas impossible, par exemple, que ces vil-
les, mettant les avantages et les inconvénients dans la balance,
n’en vinssent à regretter d'avoir obtenu cette faveur, parce
qu’elle serait plus gênante que productive pour elles, mais du
moins leur part aurait été faite, leur susceptibilité appaisée.
Peut-être enfin demeureraient-elles convaincues qu’elles se sont
alarmées sans motif, et qu’elles ignoraieut la valeur réelle de
ce qui excitait leur envie.
L’institution des entrepôts francs est sans doute fort bonne
en elle-même, mais, comme les meilleures choses du monde,
elle ne saurait partout porter ses fruits. Ainsi, nous sommes
bien convaincus qu’elle serait parfaitement stérile à Gand et à
Bruges. Quant à Courtrai, il est inuLile d’en parler. Nous som-
mes même loin de croire qu'Ostende en retire de grands avan-
tages. Notre pensée est qu'un seul entrepôt franc suffirail-en
Belgique et qu’Anvers est sa place naturelle, parce que là est le
centre auquel aboutissent les principales relations du commerce
étranger. Il y a plus: nous connaissons des hommes très versés
dans la science et dans la pratique des affaires qui aimeraient à
peu près autant que l’on laissât subsister ce qui existe, en ac-
cordant seulement plus de latitude et de liberté au négoce, dans
ses rapports avec les entrepôts, et en diminuant les frais avec
les entraves inutiles.
Notre opinion personnelle est qu’un entrepôt franc, établi à
Anvers dans de bonnes conditions, produirait d’excellents ré-
sultats pour le pays tout entier, et que, loin de devoir concen-
trer, au détriment des autres villes, toutes les marchandises
d’importation et de réexportation, il alimenterait les autres en-
trepôts, au moyen de déversements continuels. Ce serait la cou-
séquence forcée de l’accroissement des importations, d’une
part, et de l’autre, celle des facilités qui seraient accordées
pour le transfert de l’entrepôt franc dans l’entrepôt public.
Les deux principales objections qui soient parties de Gand,
de Bruges et de Gourtrai, sont celles-ci : 1° L’impossibilité de
réprimer la fraude qui mettrait à profit la liberté même rendue
plus grande, en faveur du commerce ; 2° le danger qu’il y aurait
d’attirer en Belgique les produits de l'industrie étrangère, d'y
établir une exhibition permanente de ces produits et d’en faci-
liter ainsi l’exportation au préjudice des nôtres.
Aucune de ces objections ne peut soutenir un examen sé-
rieux.
La fraude n’est pas plus possible, dans un entrepôt franc,
qu’elle ne l’est dans un entrepôt public, si l'administration est
attentive et prend les mesures de précaution nécessaires. Il y
a, en Angleterre, des docks où les marchandises sont placées
dans des conditions analogues à celles des entrepôts francs; là
aussi, le commerce jouit d'une grande latitude, et la sortie en-
traîne toute décharge des colis entreposés sans vérification
ni contrôle ; demandez, si la fraude s’exerce dans les docks
avec plus de facilité qu’ailleurs ? Le grand argument sur lequel
on s’appuie à cet égard, c’est la corruption des employés. Cet
argument n’en est pas un , attendu qu’il est applicable partout
et qu’il ne l’est nulle part. On peut partout corrompre et par-
tout aussi on trouve des hommes qui ne se laissent pas cor-
rompre. C’est, Dieu merci ! ce dernier cas qui est la règle et
l’autre n’est que l'exception. A cet égard, on peut être bien ras-
suré, et nous connaissons assez la douane, pour être bien con-
vaincus que l’entrepôt franc, si entrepôt franc il y a, sera sur-
veillé avec une telle rigueur, qu’il sera tout aussi inaccessible
à la fraude, que pourrait l’être l’entrepôt public.
Quant à ce qui est de la seconde objection, elle est égale-
ment saus objet, et, loin que l'affluence des produits indus-
triels étrangers, dans un entrepôt franc, puisse nuire à l'indus-
Chingulaise n’a cessé de réclamer son indépendance. Les insurgés se
sont réfugiés dans des forêts impraticables. Wikrimi-Rahjah-Singah,
qui les commandait alors, était un déserteur de l’année des Cipayes.
Elevé dans toutes les habitudes de la civilisation européenne, il n’eut
peut-être jamais songé à revendiquer les droits de sa naissance royale,
si un amour malheureux ne l’avait attiré à Ceylan. Il avait fait subir
plus d’un échec aux soldats anglais et le plus vif désir du gouvernement
anglais était de s’emparer d’un chef aussi habile et aussi dangereux.
— Où va-t-il ? dis-je à mon compagnon.
— Qui le sait? répondit-il. Au Kraal, peut-être. Betsy Molligoode y
sera sans doute.
— Qu’est-ce que le Kraal, et quelle est cette Betsy Molligoode ?
— Betsy a pour père le vieux Molligoode, surintendant des éléphants
du gouvernement, reprit le saïce. C’est la plus jolie fille de tout le pays,
et il n’est pas étonnant que Wirkrimi soit amoureux d’elle. Quant au
Kraal, le voici.
A notre droite s’ouvrait une belle vallée arrosée par un ruisseau pro-
I fond et rapide qui se jette dans la rivière Calamy. On y avait formé un
vaste enclos, comprenant plusieurs acres de terrain mi-partie couvert
de lianes, de bambous, de hautes fougères et mi-partie des frais herba-
ges d’une vaste prairie où coulait le ruisseau. L’enceinte consistait en
une rangée de pieux profondément enfoncés en terrre, et appuyés sur
de forts madriers placés en arcs-boulans. Ces pieux, récemment em-
pruntés à la forêt, conservaient encore l’écorce et même le feuillage.Des
branchages verts étaient entrelacés entre eux. Vu de l’extérieur, cet
enclos représentait un de ces fourrés impénétrables qui abondent dans
les solitudes de l’ile. Tel était le Kraal. C’est là qu’il fallait amener les
éléphants pour les prendre.
Huit cents Indiens, hommes, femmes et enfants, étaient employés
dépuis quinze jours à pousser vers le Kraal un troupeau d’éléphants
qu’ils avaient entouré d’un cercle de cris et de feux. Etonnés du bruit
incessant des tams-tams et des crécelles; effrayés de la lumière des tor,
ches et de l’éclat des foyers que les chasseurs entretenaient nuit et jour,
les éléphants s’avançaient lentement du côté où l’on faisait régner avec
soin le plus grand calme. Au moment de mon arrivée, ils étaient res-
serrés autour de l'enceinte, et les chasseurs redoublaient de cris et d'a-
gitation pour les décider à y entrer.
Une sorte de pavillon, que nous appelons fiuwÿa/ow.était dressé pour
l’usage des Européens et de l'aristocratie Chingulaise. On l’avait élevé
sur une éminence qui dominait l’arène dans toute son étendue ; mais
il avait étédérobé aux regards par un rideau de bambous et de fougères.
Ainsi perdu au sein de toute cette verdure, il ressemblait à un nid ca-
ché dans un taillis. Quarante personnes environ, hommes et femmes,
étaient réunies dans le pavillon. Le gouverneur anglais de l'île de Cey-
lan paraissait au premier rang De plus, un certain nombre d’amateurs
se tenaient debout dans le Kraal même, placés aux deux côtés de la
porte, comme font vos sportsmen à Franconi; mais, vu l’humeur iras-
cible et sauvage des acteurs dont on attendait la venue dans le cirque,
nos amateurs, parmi lesquels je reconnus mon correspondant, se dissi-
mulaient prudemment sous la ramée qui couvrait les barrières.
Bientôt un Indien, hors d’haleine, vint nous annoncer l’arrivée des
éléphants. Nous reçûmes l’avis d’ôter nos chapeaux d’écorce de rotin
dont la blancheur aurait trahi notre présence. Puis nous attendîmes en
silence.
trie belge, elle ne peut que lui être favorable. Combien de na-
vires, en effet, ne partent pas aujourd'hui sur lest, uniquement
parce qu'ils ne trouvent nulle part, chez nous, de quoi former
une cargaison, pour les contrées lointaines! Ils vont en Angle-
terre, où l’on rencontre, dans les docks et dans les foyers de
commerce et d’industrie toutes les espèces de marchandises
propres à l’exportation. Là les capitaines et les affréteurs n’ont
que l'embarras du choix, entre les produits de toutes les na-
tions, et en même temps qu’ils achètent des marchandises
françaises, allemandes, belges, etc., ils achètent aussi des mar-
chandises anglaises. La vente des premières vient en aide à celle
des autres. Il en serait de même en Belgique. Nul doute que
s’il y avait dans un entrepôt franc des produits de tous les peu-
ples, susceptibles d’être vendus avec économie, parce qu’ils
n’auraient pas été grevés de frais inutiles, beaucoup de capi-
taines, au lieu d’aller chercher ailleurs, non sans dépenses, ce
qu’ils auraient sous la main, formeraient leur cargaison en
Belgique, et ce qui a lieu en Angleterre se produirait également
chez nous : la vente des marchandises étrangères faciliterait
celle des nôtres.
Aucun de ces prétendus inconvénients n’existe donc, et nous
ne pouvons comprendre l’opposition des trois villes flamandes,
qu’en l’attribuant à un sentiment d’envie, sans raison comme
sans objet, dont nous n’avons eu que trop d’exemples, toutes
les fois qu’il s’est agi de quelque chose concernant Anvers. Au
reste que l’on accorde aussi des entrepôts francs à Gand et à
Bruges, nous ne nous y opposons pas le moins du monde, ainsi
que .nous l’avons déjà dit. La ville d’Anvers n’en sera pas ja-
louse.
L’Emancipation assure que le gouvernement ne fera aucune
objection à ce que les villes de Gand et de Bruges aient leurs
entrepôts francs, comme Anvers et Ostende, si ces villes se dé-
clarent prêles à offrir les locaux et à supporter toutes les dé-
penses que cet établissement nécessite.
L’Allemagne déploie une rare activité dans la voie des traités
de commerce. Après les récentes conventions de la Prusse avec
la Belgique et du Hanovre avec l’Angleterre, voici la Saxe qui
vient de conclure un traité de commerce avec le Portugal. La
Gazette universelle allemande nous apprend en outre que le
baron de Rendulfe, envoyé du gouvernement de Lisbonne, est
en négociation avec tous les étals allemands pour en conclure
de semblables, sur la base de celui qui est intervenu derniè-
rement entre le Portugal et la Prusse.
D’un autre côté, suivant des nouvelles de Berlin, le Zollverein
n’a pas seulement l’intention d’entamer des négociations avec
le Brésil pour la conclusion d’un traité de commerce, mais
aussi avec le Mexique et d’autres étals de l’Amérique méridio-
nale. Des négocialionsonllieu aussi entre les états du Zollverein
relativement à l’augmentation du nombre de ses consulats.
Enfin, en Autriche, les négociations entamées avec la Russie
pour la conclusion d’un traité de commerce et de navigation
sont poussées avec activité. Dans ces dernières années trois
traités de ce genre oDt été conclus entre ces deux puissances,
mais ils n’ont pas été mis à exécution. Ce sont celui sur les
embouchuresdu Danube, celui sur le transit de Brody à Odessa,
et celui sur les rivières de la Gallicie.
Nous devons à M. Nolhomb la faculté pour le gouvernement
de nommer les bourgmestres en dehors des conseils commu-
naux, ainsi que les complications qui sont inhei entes à ce i égi-
me basé sur un adroit calcul d’absorption. Ces complications
peuvent devenir très graves et mettre en péril des intérêts ma-
jeurs. Qu’importe au pouvoir, pourvu que son influence con-
Les cris des éléphants, qui sont une espèce de beuglement, retentis-
saient à l’entrée de la forêt. I,es arbres, en s’inclinant sous l’effort du
puissant troupeau, marquaient de loin sa route. Il s avançait en droite
lipne écrasant les plantes, brisant les jeunes arbres, arrachant les bran-
ches quigênaienlson passage et laissant derrière lui une large trouée.
Nous vîmes enfin les superbes animaux. Us étaient au nombre de dix-
neuf, conduits par un chef haut de douze pieds peut-être.
Ils firent halte à l’entrée de la clairière qui séparait la forêt du Kraal.
Le chef s’avança seul vers celle enceinte, dont la paix trompeuse atti-
rait ses compagnons. Il l’examina quelques instants avec toutes les ap-
parences de sagacité d’un officierfaisant la reconnaissance d’une place.
A son retour la troupe tout entière sembla délibérer sur son rapport.
Six éléphants, qui formaient sans doute le parti del’opposition, se sépa-
rèrent de la bande et rentrèrent dans la forêt. Les autres firent le tour
de l’enceinte et franchirent la porte à la suite de leur conducteur.
Aussitôt la foule des chasseurs se précipita sur leurs traces, et cou-
ronna les hauteurs qui ceignaient le Kraal, criant, hurlant, agitant les
drapeaux et les torches, frappant sur les tams-tams, sur des vases de
cuivre ou de fer, tournant les crécelles, soufflant dans des cornes de
bœuf, et environnant trois côtés de l’enceinle d’un vacarme effroyable.
Si bien que les éléphants se retirèrent à l’extrémité la plus reculée de
l’enclos dans l’obscurité et la paix du jongle. On profita de leur é Digne-
ment pour fermer la porte en Uassujétissant avec des barres de bois.
Celte opération était à peine terminée, que de nouveaux mugisse-
ments se firentenlendre. Les éléphants venaient de rencontrer la bar-
rière la plus extrême de l’enceinte ; il se ruaient pour la renverser. Ce
mouvement avait été prévu, et cette partie avait encore plus de soli-
dité que le reste.Une muraille eût été jetée à terre; les pieux solidement
étavés résistèrent au choc. Lorsqu’ilseurent reconnu I inutilité de leurs
efforts, les éléphants revinrent en toute hâte vers la porte d’entrée, au
grand effroi des sportsmen. qui n’avaient pas deviné ce retour subit. Il
jeta la plus grande confusion parmi eux, et nous les vîmes sortir en un
instant de leur cachette et s’élancer vers le bungalow. Mon correspon-
dantavait à traverser le Kraal dans toute sa largeur.et ce né ai pas une
petite affaire pour un homme doué d’un énorme embonpoint et pourvu
de très courtes jambes. Je craignis un moment qu il ne devint victime
des éléphans. Ils l’auraient foulé aux pieds, s’il s’était trouvé sur leur
passage. Mais il était homme de ressources. Ayant avisé deux Indiens
qui couraient avec toute la légèreté que peuvent donner une taille
élancée, il les saisit par le bras, l’un a droite, I autre à gauche, et se fit
traîner de force par ces deux remorqueurs improvisés.
Cependant les éléphants s’étalent débandés ; ils couraient ça e la
cherchant l’issue de leur prison. Toutes leur allures attestaient la p US
vive inquiétude. Jamais je n’ai vu hommes sentir et déplorer avec plus
d’amertume la perte de la liberté ! . ,
dTi reste le spectacle auquel nous assistions était vra.men étrange,
et tel qu’il est impossible de se le représenter en Europe. Je renonce
à faire le tableau de cette multitude qui s’agitait dans une ceinture de
feux, qui se tordait dans des cris convulsifs, qui s enivrait de ses pro-
pres clameurs, et de ces nobles et puissants animaux parcourant au
hasard le vaste enclos, en proie à une sorte de folie, eux si graves et si
imposants d’ordinaire par la majestueuse lenLeur de leur démarche.
Convaincus de leur impuissance, ils se rassemblèrent pour regagner
lentement l’extrémité du Kraal, dans FeodroU ou le jongle leur avait |