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Le catholicisme en Belgique.
Voici l’article du Siècle dont nous parlions hier dans notre
bulletin politique :
« Les événements qui viennent d’émouvoir la B
nous un tel retentissement qu’il nous semble, 'dt'ue.
émotions sont llnai-îZpc olûnc* ïi In
giqüe Ont eu parmi
-. , , ------, aujourd’hui que ces
v,, t °.nt aPaisées, giftce a la sagesse du pouvoir royal, — d’en re-
cnercner la èause véritable et de se demander si ces manifestations popu-
nna< S.nl> sonl ^as u.n ^es symptômes qui révèlent lout à coup à une nation
que.a.m vice ignoré de son organisation politique, ou sociale, ou religieuse.
» Nous alicSns aborder cet examen, et nous y apporterons d’aulant plus
ne calme que les faits dont nous voulons parler ont donné lieu déjà à des
discussions très vives el à des controverses que la passion a troublées. Ces
discussions ont plus particulièrement porté sur deux ordres d’idées très
différents, ■
» Les uns. ont accusé le parti catholique; d’autres ont rejelé tous les torts
sur le parti libéral; d’autres enfin ont pris texte des événements belges
pour reprocher au régime parlemenlaire de ne porter pour tous fruits que
ie désordre et l’anarchie.
« Nous reprendrons successivement ces trois chefs d’accusation, et, avant
tout, nous prions les lecteurs français de ne pas s’y tromper : la question
qui s agite, qui est pendante encore chez nos voisins et qui n’est pas près
" ôlre résolue, n’est pas une question belge : elle intéresse tous les peuples,
et elle nous touche nous-mêmes de fort près. Celte question est celle de la
séparation des deux pouvoirs spirituel et temporel, ou de l’absorption de
celui-ci par celui-là. 11 ne faut qu’un instant de faiblesse chez un prince
pour que cette question revive et soulève tous les cœurs, pour qu’elle com-
promette le repos et la prospérité des Etats. Qui peut savoir le mal que
1 empereur d’Autriche, par exemple, a fait à son pays, les révolutions et les
réactions qu’il y a préparées, le jour où il a signé avec la cour de Rome le
fameux concordat qui met, dans ce vaste empire, les consciences en coupes
réglées ? 1
« Lorsque, — il y a peu de temps encore, — nous blâmions avec énergie
attitude révolutionnaire et le langage inconvenant des prélats belges qui
se mettaient eu opposition avec l’Etat et dénonçaient à l’animadversion des
pères de famille l’enseignement donné par ses professeurs, il était facile de
pressentir les manifestations qui viennent d’éclater. L’épiscopat, oublieux
de la maxime évangélique qui lui ordonne de rendre à César ce.qui appar-
tient à César, c’est-à-dire de respecter l’action du pouvoir civil, ne pouvail,
a moins d’un suprême effort, s’arrêter sur la pente fatale où il glissait. Qui-
C°k?-U8 °bservait avec quelque attention le mouvement de l’opinion
publique chez nos voisins, devait aisément prévoir qu’il viendrait un mo-
ment où les prétentions cléricales rencontreraient des résistances profondes
et sérieuses.
» C’est ce qui est arrivé ; et pour bien comprendre la cause des événe-
ments dont la Belgique vient d’être le théâtre, il est nécessaire de se rendre
compte de la situation des esprits chez ce peuple si intelligent et si ferme.
Belgique, comme en France, l’immense majorité des habitants est
catholique; il n’y a là ni dissidences religieuses ni sectes ennejnies. Dans
toutes les classes, dans tous les rangs de la société, la religion catholique
ne rencontre que les plus respectueuses sympathies, et le concours le plus
empressé de la part de l’Etat et de la part des citoyens.
» Mais dans toute religion il existe deux éléments distincts : ce qui est
éternel et ce qui est périssable, [Dieu et le prêtre, l’infini et le fini. Jésus
a dit que son royaume n’était pas de ce monde; le clergé catholique, au
contraire, veut régner sur le monde et y exercer la plus large influence. De
la un conflit qui dure depuis dix-huit siècles, et que Saint Louis avait cru
faire cesser en frappant le clergé de son temps. Mais les clergés sont incor-
rigibles- .
» Depuis le jour où la Belgique a conquis bravement son indépendance
et son individualité nationale, il s’est formé dans ce pays deux grands
partis : l’un qui veut donner la prépondérance à l’élément religieux : c’est
le parti catholique ; l’autre qui s’oppose à cet envahissement : c’est ie parti
libéral. Ainsi, tandis que nous avons chez nous des légitimistes, des orléa-
nistes, des impérialistes, des républicains, etc., etc., qui l^us aspirent à
donner au gouvernement une forme et des tendances qui leur sont propres,
la Belgique n’est divisée que sur ce point, — il est vrai qu’il est capital ;
— L Eglise sera-t-elle dans l’Etat et le dominera-t-elle ? ou bien en sera-t-elle
distincte ?
» Le parti catholique, qui est à la religion ce que l’excroissance est à
1 arbre, c’est à dire un élément de mort ; le parti catholique, disons-nous,
nest pas chez nos, voisins ce qu’il est en France : jl est nombreux, riche,
etsurtout très actif. La Belgique contrefait la France sous bien des rapports;
nous n’avons en France qu’une seule contrefaçon de la Belgique, — et elle
n est pas heureuse : — c’est notre parti ultramontain.
» Le parti catholique belge a conquis, depuis 1830, il faut bien le recon-
naître, des positions formidables, et nous n’en voudrions pour preuve que
le fait dont nous pariions tout à l’heure : l’attitude et ie langage de l’épisco-
pat dans la question de l’enseignement. Pour apprécier la distance qui
sépare sur ce point les deux pays, il suffit de rappeler que les évêques de
Belgique ont pu se mettre impunémenlen opposition avec l’Etat, provoquer
contre lui la haine publique, et que, peu de temps après, un évêque fran-
çais, M. de Moulins, était frappé par un arrêt du conseil d’Etat pour avoir
osé contester la légalité de la juridiction civile et violé, à l’égard de quel-
ques curés, les dispositions du concordat.
» Il est dans la nature des partis d’élever leurs exigences en proporlion
des concessions qu’on leur fait. Le parti catholique ne se tiendra pour satis-
fait qüe lorsqu’il aura soumis le pouvoir temporel à l’Eglise, lorsqu’il aura
fait de l’Europe et du monde entier ce que les jésuites avaient fait, au dix-
hmtième siècle, du Paraguay. On voit qu’il est loin encore de son but, et
qu n faut s’attendre à bien des péripéties. Un des moyens d’atteindre ce
but, c est le monopole de l’enseignement. Supposez, en effet, que, par im-
possible, loute la génération actuelle est insiruite par le parti catholique,
façonnée par lui, et, avant un quart de siècle, cette génération abrutie aura
laissé périr toutes les conquêtes de l’esprit humain, toutes les notions de
droit, de justice, de liberté.
« Le parti catholique belge vise donc au monopole de l’enseignement. La
campagne est ouverte depuis longtemps, et la levée de boucliers tenlée
naguère par les évêques n’a été qu’un de ses incidents.
» La présentation du projet de loi sur la charilé a élé un incident nou-
veau. Un article assez machiavélique de ce projet disposait que toules les
écoles qui seraient fondées en vertu de donations ou de legs spéciaux se-
raient libres, c’est-à-dire affranchies de la surveillance de l’Etat, lorsque
le donateur ou le légataire aurait mis celle condition à la destination de
son don ou de son legs.
» Le piège était grossier; le parti libéral, cette fois, ne s’y est pas laissé
prendre, et le peuple, qui confondait aisément les intérêts de la religion
avec ceux du parti catholique, a vu tout à coup l’abîme et a manifesté son
opposition à des tendances qui lui ont paru désastreuses. Que ces manifes-
tations aient été regrettables, qu’elles n’aient pas eu le caractère de calme
et de réserve qui devrait toujours être inséparable du bon droit, c’est ce
que nous examinerons plus lard lorsque nous aborderons le côté politique
ou plutôt parlementaire de la question. Pour le moment, restons sur le
terrain où nous nous sommes placés d’abord.
» Ii est certain que si la chambre des députés eût voté la loi, si le roi
Léopold, dans sa haute prudence, n’en eût ajourné la discussion pour en
effectuer plus tard sans doute le retrait, avant deux ans, grâce aux influen-
ces du parti calholique et aux ressources dont il dispose, la Belgique eût
été couverte d’écoles non soumises à la surveillance de l’Etat, et dans les-
quelles on aurait enseigné aux jeunes générations des principes incompati-
bles avec l’existence d’un gouvernement libéral. Heureusement ce danger
vu à temps, a été conjuré; mais il se présentera plus lard sous une autre
forme.
» Est-ce à dire, ainsi que le prélend ce matin un journal avec lequel
nous avons l’honneur d’êlre souvent en désaccord, que le parti libéral, en
signalant ce danger immense, a fait une œuvre impie et athée, qu’il s’est
séparé de Dieu, qu’il a voulu effacer dans le cœur humain tout ce qui le
rapproche de sa céleste origine ^ S’il en était ainsi, nous n’hésiterions pas
a le blâmer, car il n’est pas d’intérêts plus chers et plus sacrés que ceux
dont on reproche injustement l’abandon au parti libéral ; il n’est pas d’as-
pirations plus généreuses et fécondes que celles qui élèvent l’humanité
vers les régions éternelles el rapprochent l’homme de son Dieu.
. » Mais il n’en est rien. Le parti libéral belge n’a sacrifié aucun de ces
intérêts moraux, et nous le félicitons de n’avoir pas confondu la religion
avec le parti catholique, d’avoir compris qu’il pouvait s’attaquer à celui-ci
sans atteindre celle-là, qu’il pouvait au contraire rendre à la religion un
très-grand service en l’isolant d’un parasite qui la ruine.
» 11 serait temps, ce nous semble, que l’on mit un terme aux déclama-
tions stéréotypées qui se reproduisent invariablement chaque fois que les
prétentions cléricales rencontrent un obstacle dans l’esprit des sociétés mo-
dernes. La religion n’a absolument rien à redouter de ces échecs: ils la
lortifient au lieu de l’affaiblir.
» La religion est un ensemble de principes, de dogmes , d’idées morales
qui est l’héritage commun de tous les hommes. Chacun de nous prend
dans cet héritage , suivant les inspirations de sa conscience, la part qui
lui convient, de même qu’il rejette ce qui lui est antipathique. C’est ainsi
que nous voyons, par exemple , des personnes fort recommandables par
leur piété repousser le nouveau dogme de l’Imraaculée-Conception et
demeurer convaincues qu’elles peuvent parfaitement faire leur salut sans
cette croyance.
» Le clergé, digne de tous les respeels tant qu’il reste à l’ombre du
sanctuaire, rentre dans les conditions de la vie ordinaire dès qu’il se mêle
aux choses temporelles et prend les allures remuantes d’un parti; le prêtre
ne porte pas plus la religion dans les plis de sa soutane que le magistrat
n emporte la loi dans les plis de sa robe ; la religion n’est pas son bien ,
elle est le bien de lous; il est le ministre du culte à l’autel et dans le temple,
mais lorsque je le rencontre dans les luttes politiques, je n’ai plus en face
de moi qu’un simple citoyen soumis à toutes les obligations légales qui
m’incombent ; il doit à César ce qui est S..César.
» Les défaites du clergé ne peuvent donc élre des défaites pour la reli-
gion ; celle-ci gagne, au contraire, tout le terrain que le clergé perd dans
les luttes où il vient si imprudemment compromettre son caraclère et son
autorité. Le parti libéral belge, en s’opposant aux envahissements du
clergé, n’a pas plus été impie et athée, ne s’est pas plus séparé de Dieu
que nos rois et nos parlements ne furent impies et alhées, ne se séparèrent
de Dieu, en refrénant les ambitions temporelles du clergé. Le parti catho-
lique pourrait perdre tous les avantages qu’il a successivement conquis il
pourrait mourir,que les intérêts de la religion n’en seraient point atteints et
que Dieu n’en serait point offensé.
» Nulle corporation, nul homme, quel qu’il soit ici-bas, n’a le droit de
faire parler Dieu et de menacer au nom de Dieu ; et s’il était permis de
risquer en matière si délicate une hypothèse, nous dirions que, selon nous
Dieu est bien plus avec le parti qhi s’oppose à l’absorption de l’Etat par le
clergé qu’il n’est avec les hommes qui poursuivent cette absorption.
« Laissons donc de côté ces déclamations, et soyons convaincus que
Dieu n’est pas un fétiche qui soit à la disposition d’un parti quelconque •
Dieu est là où brille un sentiment généreux, une aspiration vers tout ce qui
est vrai, bon, juste et beau ; et le parti libéral belge peut revendiquer
Dieu aujourd’hui avec plus de raison qu’il ne l’aurait revendiqué hier car
il a agi dans le sens de la liberté et de la justice.
« Mais des désordres qui se sont produits ? nous dira-t-on. Patience '
nous allons y venir en examinant la question sous son point de vue noli-
tique. 1
« LOUIS JOURDAN. »
«BIEST.
(Dépêches télégraphiques.)
Marseille, dimanche, 7 juin.
Nous recevons des nouvelles de Constantinople en date du
28 mai. 1
Le projet de banque greco-arménienne a échoué. Le sultan, en présence
de 1 épuisement du trésor vient de frapper un impôt annuel de trente-
quatre piastres sur les chrétiens et les juifs de tout âge, pour exemption du
service militaire. Le montant de deux annuités a été exigé par andcinaUon
On annonce d’Egypte, à la date du 30, le départ pour Paris du prince
Toussoum el du général Meneckli. v 3 üu *!nnce
On écrit de Malte, 3 juin, que l’amiral Lyons et une partie de l’escadre
anglaise ont appareillé pour l’Espagne pour se rendre de là sur le3 côtes
de Barbarie,
Lê gouverneur Rcid a donné sa démission.
Les troupes mutinées de l’armée anglaise dans les Indes ont incendié les
ëlablisscmenls d’Umballah. Le territoire hindou doit être annexé après la
tnorl de Rajah, qui parait être prochainement attendue.
(Autre Dépêche.)
Marseille, dimanche, 7 juin.
Le Méandre vient d’arriver avec des nouvelles de Constantinople du 28.
Dos conférences diplomatiques auront lien prochainement entre le grand-
vizir et les représentants des puissances signataires du trailé de Paris, rela-
tivement à l’interprétation du firman de convocation des divans ad hoc.
Une campagne va être commencée conlre Schamyl. C’est le prince Bara-
tinski qui commandera. M. Finot, consul de France à Tiflis, accompagnera
le prince.
Les nouvelles d’Alexandrie vont jusqu’au 30. .
L'Euphrate amène Toulassotim, fils de Saïd-Pacha, âgé de quatre ans,
accompagné de Clot-Bey et de deux gouvernantes.
Le môme vapeur amène pour l’Empereur huit dromadaires destinés à élre
attelés à l’artillerie de campagne.
Le prince séjournera plusieurs mois à Marseille, puis, il ira à Paris et à
Londres.
La récolte est très belle dans le Levant, sur le Danube, en Algérie et en
Italie. •
AUTRICHE.
Vienne, 3 juin.
Voici un exemple de la tolérance que le parti catholique pra-
tique là où il règne en maître. C’est le sort réservé à la Belgique
dans un prochain avenir, si le parti libéral ne parvient pas à
éloigner le danger :
« Il vient de se produire entre l’église et le commerce un conflit grave
et qui, bien que nos journaux n’en disent mot, occupe beaucoup le public
en ce moment.
» Il y a quelques mois, les chefs de nos maisons les plus importâmes
avaient souscrit un capital de 400,000 florins (un million de francs), destiné
à la fondation d’une école de commerce. La souscription close, une com-
mission fut chargée de dresser les statuts de la société.Dans un des articles
de ces statuts, il fut déclaré qu’élèves et maîtres seraient reçus à l’école
sans distinction de religion.
» En vertu du concordat, les statuts durent être présentés à l’archevêque
de Vienne, sans l’approbation duquel aucun établissement d’instruction
publique ne peut être créé. La censure archiépiscopale raya l’article relatif
à l’égalilé religieuse.
» Alors le baron de Rothschild se retira de l’association, et son exemple
fut suivi non-seulement par les Israélites, mais par un nombre considéra-
ble de protestans et même de catholiques, de telle sorte qu’il n’est resté
que le vingtième des souscripteurs et des souscriptions, et que le projet se
trouve irréalisable.
» Néanmoins la commission, dont M. le docteur Jacques est le président,
a interjeté appel contre la décision de Mgr l’archevêque pardevant l’aulo-
rité civile.
» On espère que M. le docteur Jacques, jeune homme de beaucoup de
talent, Israélite et chef d’une des premières maisons de banque de Vienne,
réussira à démontrer au gouvernement l’importance de la création d’une
école de commerce dans les conditions proposées. »
Funérailles de P Archiduchesse Sophie.
J’ai assisté aux dernières cérémonies des funérailles de l'archiduchesse
Sophie ; elles ont eu lieu avant-hier, entre onze heures et minuit, dans les
caveaux de l’église des Capucins de Vienne, affectés aux sépultures de la
maison d’Aulriche. Elles se sont accomplies sans bruit, sans éclal, incognito
en quelque sorte. La ville, endormie, ne se doutait pas que la fille aînée de
son empereur Iraversait à cette heure dans son cercueil les rues que,
rayonnante de sanlé, elle avait quittées naguère poursuivre son Auguste
famille en Hongrie. ■
Le convoi funèbre, parti de Pesth dans la journée du lr juin, est arrivé à
10 heures du soir, par un train spécial, à la gare du chemin de fer du Nord.
Le prince de Lichtenstein, grand-maître de la maison de l’Empereur, le
curé du palais, assisté de ses prêtres, l’y attendaient. Le cercueil, enlevé du
wagon mortuaire par quatre fourriers delà cour, a élé déposé dans la salle
d’attente sur une estrade de velours cramoisie, d’où, après quelques priè-
res, il a été dirigé vers l’église des Ca'pucins, dans l’ordre suivant :
Un fourrier impérial, à cheval ; deux porle-lanternes, à cheval ; une divi-
sion de cuirassiers ; le corbillard attelé de six chevaux blancs ; plusieurs
voitures de ville ; une division de cuirassiers ; deux porte-lanternes à che-
val ; plusieurs voitures de cour ; un détachement de grenadiers de la
cour, à cheval.
Lorsque la tôle du cortège est arrivée devant la porte du couvent, le
grand-maître des cérémonies a frappé trois coups suivant l’usage, et une
voix a demandé de l’intérieur : -
— Que voulez-vous ?
— Le repos éternel.
—- Pour qui ?
— Pour S. A. I. l’archiduchesse Sophie, morte au palais de Bude.
— Laissez passer... laissez passer .,
Et les portes s’ouvrant aussitôt, le cercueil de l’enfant impérial a élé
transporté dans l’église.
Après les prières de l’absoute, le cercueil a été descendu dans les ca-
veaux, où, devant les capucins armés de torches, il a été ouvert, pour la
vérification du dépôt sacré dont ils allaient prendre la garde éternelle.
L’auguste princesse, vêtue de blanc, portant au front une couronne de
roses blanches et un bouquet sur son sein, semblait dormir. La mort avait
respecté les grâces de son charmant visage. Elle était couchée sur un lin-
ceul de satin blanc relevé par le velour cramoisi dont le cercueil était
drapé. L’heure avancée delà nuit, la sombre figure des capiicins, éclairée
par les lueurs blafardes des torches, leur voix réveillant ’le silence des
lombeaux, la vue des cercueils impériaux rangés en ligne, les noms de
Marie-Thérèse et de Napoléon II, rappelant dans le néant des splendeurs
humaines deux grandes gloires, lout donnait à cette cérémonie nociurne un
caractère imposant et solennel.
Après la vérificalion des dépouilles mortelles de l’archiduchesse Sophie,
le cercueil a été refermé à double serrure par deux clés. Le prince de Lich-
tenstein en a remis une au prieur du couvent, l’autre au gardien du trésor
impérial, et l’assistance, profondément émue du spectacle auquel la mort
l’avait conviée, s’est retirée à travers la haie des tombes impériales.
Dans l’espace de moins d’un demi-siècle, les hôtes inanimés des caveaux
des Capucins ont reçu deux mémorables visites: celle de l’empereur Napo-
léon, (son pied peut-être avait touché la place réservée à son auguste fils,)
el celle de l’empereur Nicolas.. .Le premier, la tête inclinée sur sa poitrine,
les bras croisés à la manière qui lui était habituelle, avait médité devant
le mausolée en bronze de Marie-Thérèse ; le second s’était fait ouvrir le cer-
cueil de l’empereur François, l’ami et le confident intime de son frère el
prédécesseur Alexandre.
FRAMCE.
{Correspondance particulière du précurseur.)
Paris, 7 juin.
Des trois ex-députés du Gard, un seul est le candidat de l’administration
c’est M. Peroux', les autres sont M. Tacher de la Pagerie, chambellan de
l’impératice, et M. André, banquier à Paris. Mais quel André? Ilyaplusieurs
banquiers de ce nom dans la capitale. Cependant, à en juger par les indi-
cations d’un journal de Nimes, ce devrait être M. Ernest André, l’un des
administrateurs du crédit mobilier.
Ce que je vous mandais avant-hier de M. Travot, le seul candidat du
gouvernement dans la Gironde qui n’eut pas de concurrent, n’est plus vrai
à l’heure qu’il est. M. Travot a pour concurrent (circonscription exlra-muros
de Bordeaux) M. Denis Lagarde, avocat et ancien représentant de la Gironde
à la constituante.
Dans la Côte-d’Or M. Louis Bazile, candidat du gouvernement pour
Chatillon et Semur, se trouve depuis 48 heures avoir un concurrent, c’est
M. Louis Philipon, propriétaire à Larrey, ancien membre du conseil général
de la Côte-d’Or.
Le préfet du département du Nord a enfin publié la liste des candidats
du gouvernement.Mais cette liste, qui comprend lous les députés sortants,
est pourtant encore incomplèle, attendu que l’administration déclare qu’elle
n’a pas encore arrêté son choix pour remplacer le baron de Lagrange dé-
puté sortant qui a décliné la nouvelle candidature qui lui avait été proposée.
Dans l’Arriége, dans la Moselle et dans Loir-et-Cher le gouvernement
présente tous les députés sortants.
Dans l’Eure, deux des députés sortants, le duc d’Albufera et le comte
d’Arjuzon sont présentés par l’administration, quant au troisième candidat
administratif c’est le marquis de Blosseville qui, à tort ou à raison, passe
pour légitimiste. M. de Blosseville est membre du conseil-général.
Dans le Calvados le préfet, dans une proclamation électorale , présente
avec les .députés sortants D’Houdelat, de Canlincourt et Vautier, un qua-
trième et nouveau candidat pour l’arrondissement de Lezime, ce candidat
est M. Amédée René, directeur du Constitutionnel et voici dans quels ter-
mes l’administration justifie son choix :
» Cependant une question grave asurgi dans l’arrondissement de Lisieux;
1 industrie cotonnière, appréhendant une concurrence ruineuse pour elle
s’est émue, et elle a voulu avoir un défenseur spécial, qui pût porter dans
les conseils de l’Etat ses lumières et son action tutélaire. Pour répondre à
ce désir, le gouvernement, qui veut témoigner à tous les intéréts son patro-
nage loyal et sincère, a fait choix de M. Renée pour représenter et défen-
dre les intérêts particuliers des arrondissements de Lisieux etdePont-
l’Evêque.
» Littérateur distingué, savant économiste, M. Renée, qui est né dans le
Calvados, quiy a fait ses études de droit, s’est déjà rattaché plus intimement
à notre pays, en prenant une part active dans la discussion des mesures
douanières qui ont éveillé les craintes de nos industriels de Lisieux, et en
défendant avec énergie et talent les intérêts de nos fabriques. Directeur du
Constitutionnel, il a imprimé à cet organe important une direction qui
offre à nos industriels les garanties d’une défense certaine el permanente.
Ces considérations ne vous échapperont pas et concilieront à M. Renée la
confiance de nos populations, comme il a déjà la confiance du gouverne-
ment. °
Dans Maine et Loire,où le gouvernement présente les quatre députés sor-
tants, M. Ernest Dubois candidat administratif pour Angers, se trouve avoir
un concurrent, c’est M. B. de Lascases.
M. de Bryas l’un des candidats administratifs du département de l’Indre,
fait connaître par sa circulaire électorale deux nouvelles qui ne manquent
pas d’intérêt. La première c’est que la ville de Chaleauroux va être dotée
d’une manufacture de tabac qui occupera 1200 ouvriers; la deuxième c’est
que le gouvernement a ouvert un crédit annuel de cent mille francs à la
Brenne pour assainir ses cours d’eau et aussi construire dans l’Indre des
routes agricoles.
Hier soir, ii y a eu chez M. de Sacy rédacteur en chef des Débats, une
réunion (et les noms qui se trouvent sur la liste ci-après vous indiqueront
suffisamment de quelles personnes cette réunion était composée) afin de
s’entendre sur la composition d’une liste électorale. — Les noms soumis à
l’examen ou si vous aimez mieux à la censure de la réunion étaient ceux-ci:
M.Remusat (quelques-uns disent M. Ed. Laboulage) M. Carnot, M. Goud-
chaux (quelques-uns disent M. Prost), M. Gavin, M. Marie (quelques-uns
disent M. de Benazé), M. Recurt, M. Henry Martin (quelques-uns disent
M. Labelonie), M. Ferdinand de Lasteyne , M. Vavin (ou un autre dont le
nom m’échappe).
Il paraît que la réunion n’a pu s’entendre, car elle s’est séparée sans rien
conclure et s’est ajournée à demain pour, dans le cas où elle aboutirait à
une résolution, cette résolution ôlro soumise à l’approbation du comité
électoral directeur.
Vous voyez d’après cela que la presse parisienne opposante représentée
par le Siècle, YEstafette, la Presse, a maintenant bien décidément pour
auxiliaire le Journal des Débats dans la voie de la non abstention. — Ce
qui n’empêche pas qu’en province la presse qui se dit libérale ne continue
à prêcher l’abstention et ne se tienne séparée radicalement de l’opinion de
scs confrères libéraux de la capilale. — Sous ce rapport le Phare de ta
Loire, le Guetteur de St-Quentin, le Courrier du Bas-Rhin et le Progrès du
Pas de Calais, tiennent un langage qui ne saurait permettre aucun douie.-
A propos du Phare de la Loire il dit dans son dernier numéro que l’ad-
ministration procède en ce moment à une enquête générale sur le mouve-
men, de la publicité des journaux des départements depuis 3 ans.A Orléans
le Moniteur du Loiret a rapporté que le commissaire central de police avait
fait demander et noter le nombre total des abonnés du Moniteur du Loiret,
et le Phare de la Loire raconte de son côté que lesélémentsdulàbleaudressé
pour Nantes ont été demandés à l’administration du timbre, el que cet élat
officiel donne la moyenne du lirage des feuilles de Nanles jusqu’au 31 mai
dernier.
Ici, il n’y a aujourd’hui aucune nouvelle parisienne à l’ordre du jour.
Les spéculateurs discutent les probabililés pour ou contre la retraite de M.
Mirés de la caisse des chemins de fer ; ils commentent la situation favora-
ble de la Banque, mais en somme ils font peu d’affaires. On assure que le
projet de transporter les Bagnes à la nouvelle Calédonie est abandonné. On
s’occuperait au ministère de la marine de trouver à cet effet un autre pays.
M. Ary Scheffer l’un de nos meilleurs peintres est en ce moment en An-
gleterre pour faire le portrait de la veuve de Louis Philippe.
C’est bien décidément, le lundi 13 de ce mois , que s’ouvrira , au palais
de l’Industrie, l’exposition des œuvres des artistes vivants.
Ce soir aura lieu la clôture de l’exposition horticole aux Champs-Elysées.
~ écrit de Dijon le S juin. L'affaire du domaine de l’Etat conlre les
héritiers de Mgr. le duc de Berryest revenu aujourd’hui devant noire cour,
pour les conclusions du ministère public.
M. Dugaiflier, premier avocat-général, a conclu à la confirmation du ju-
gement du tribunal de Vassy, c’est-à-dire conlre M. le comte de Chambord
et la duchesse de Parme.
La cour a remis à huitaine pour prononcer l’arrêt- »
— On lit dans le Mémorial de Vaucluse :
» Un événement déplorable a produit la plus douloureuse émotion par-
mi la population d’Anduze. M.G. Soulier, notaire, s’est donné la mort dans
la nuit de mercredi à jeudi dernier. Après s’étre tiré un coup de pistolet qui
ne lui avait fait qu’une blessure grave sans être mortelle, le malheureux
s est précipité'du haut de la terrasse de sa maison de campagne.il n’a survécu
que quelque heures, et a expiré au milieu de cruelles souffrances. On se
perd en conjectures sur le motif qui a porté M. Soulier à mettre fin à ses
jours. M. Soulier avait administré pendant longues années, comme adjoint
et ensuite en qualité de maire, la ville d’Anduze. »
Le maréchal ministre de la guerre, dit le Moniteur, vient de
recevoir la lettre suivante du maréchal gouverneur général de
l’Algérie :
. « Souk el-Arbâ, le 31 mai 1837.
» Monsieur le maréchal.
» Votre Excellence sait déjà qu’à la date du 27, les Beni-Raten et les Arb-
Douela avaient fait leur soumission. Ils s’empressèrent de remetlre entre
mes mains les otages qui leur furent demandés.
» Le 28, la division MacMahon quitta de bonne heure les positions qu’elle
occupait pour se porter à six kilomètres en avant jusqu’à Àboudid.
« Pendant que ses troupes prenaient leur bivac, le temps, brumeux de-
puis le matin, devint pluvieux et assez mauvais pour me décider à suspen-
dre le mouvement de la division Jusuf, que je voulais porter jusqu’au Souk-
el-Arbâ et que je laissai encore le 28 et le 29 dans ses positions d’Igfiril-
Gudfri et d’Et-Hadj-Ah.
» Ce mouvement n’a pu cire exéculé que le 30, et j’occupe en ce moment,
avec la division Jusuf, l’importante position de Souk-el-Arbâ, qui domine
tout le pays environnant.
» Le temps est redevenu beau, el j’ai la satisfaction de dire à V. Exc. que
nos ambulances restent tonl-à-fail vides, et que le soldat est conlent et
plein de santé. .
» Les journées du 28, du 29 et du 50 ont amené de nouveaux résultats
politiques que je suis heureux de vous faire connaître. Les Beni-Fraoucen,
les Beni-Bou- Chaïb, les Beni-Khellili, groupés autour du sebt des Beni-Jaya,
sont venus successivement demander l’aman et ont accepté sans'hésitation
les conditions imposées.
» Enfin les Béni-Mahmoud, qui avaient fait, l’année dernière, des ouver-
tures non suivies d’effet, se sont décidés à venir à nous, et leurs otages sont
dans notre camp.
» Tous les ôlages des tribus soumises sont dirigés sur le poste de Tizi-
Ouzou, d’où ils seront eusuite conduits à Alger.
» Depuis notre installation à Souk-el-Arbâ, M. le général de Chabaud la
Tour éludie avec soin l’emplacement du poste militaire qui doit nous assu-
rer la possession et la dominalion de ces montagnes.
» Pendant ce lomps, les troupes des différentes divisions fournissent de
nombreux travailleurs qui réparent les chemins arabes et assurent ainsi la
circulation facile de nos convois de ravitaillement.
» D’autre part enfin, je fais reconnaître et déterminer, après mûr exa-
men des lieux, la direction et le (racé des routes qui devrontdéfinitivement
relier notre poste de Souk-el-Arbû avec celui de Tizi-Ouzou.
» Notre bonne et nombreuse infanterie nous sera d’un très-grand se-
cours pour commencer et activer autant que possible, pendant la belle sai-
son, ces importants travaux.
» Veuillez agréer, monsieur le maréchal, l’assurance de mon respectueux
dévouement. ■ » Le maréchal de France
gouverneur général de L'Algérie,
» RANDON. »
7~ nombre des maisons de Paris était en 1532, selon quelques statis-
ticiens, de 12,000; il y en avait 14,000en 1568, suivant le président de Thou;
en_ 1637, 20,400, au sentiment de Lacailie , dans son ouvrage intitulé
Description de Pans. Jusqu’à cette époque, la plupart des maisons étaient
construites en pans de bois et en plâtre, et surmontées d’un pignon aigu
qui faisait l’orgueil du bourgeois de Taris. De là le proverbe « avoir pignon
sur rue, » qui impliquait une certaine aisance et une sorte d’agrégation à
la bourgeoisiè parisienne. La pierre élait encore généralement réservée
pour les églises , les palais et les édifices publics. Mais le luxes des cons-
tructions prit un grand essor dans le courant du dix-septième siècle, épo-
que où l’on bâtit plusieurs nouveaux quartiers, et notamment le faubourg
Saint-Germain, sur la rive gauche de la Seine.
Au commencement du siècle suivant, la rapidité avec laquelle s’élevèrent
certaines fortunes par suite du système de Law amena la réédification de
beaucoup de maisons dans différents quartiers. Leur nombre, toutefois,
n’augmenta pas considérablement pendant la période d’un siècle, car l’abbé
d’Expilly en comptait 23,500 en 1766. Les travaux d’amélioration entrepris
depuis la révolution entraîna la suppression d’un certain nombre d’habita-
tions parisiennes, et notamment celle des maisons qui obstruaient les bords
de la Seine et de celles qui surchargeaient la plupart des ponts. D’après le
recensement de 1817, 26,000 maisons contenant 179,000 locations, parmi
lesquelles 96,000 au-dessous de 150 fr., logeaient les 715,966 habitans
de Paris. Chaque maison en comptait donc un peu pins de 27, l’une dans
l’autre. Les nombreuses constructions et le percement des voies nouvelles
exécutés de 1822 à 1848 avaient porté le nombre des maisons à un peu plus
de 30,000.
Depuis cette époque, les travaux d’agrandissement et de reconstruction
des halles centrales ont nécessité la démolition de 29 ruelles étroites et
sombres qui conlenaient 249 maisons. Le prolongement de la rue de Rivoli
avec la régularisation des abords de l’hôlel-de-ville et de ceux du Louvre
ont fait tomber sous le marteau 32 ruelles bordées de 587 maisons Si on
ajoute à ces deux grandes séries de travaux le percement du boulevard de
Strasbourg, de celui de Sébastopol,de l’Alma, du boulevard Saint-Germain,
ainsi que l’ouverture des voies inférieures, on peut conclure que depuis la
fin de 1849, 2,500 maisons environ ont été démolies à Paris et ont amené le
déplacement de 100,000 personnes.
Malgré l’activité qui s’est manifestée pendant la même période dans les
travaux de reconstruction, sur 5 ou 6,000 maisons bâties dans le départe-
tement de la Seine, un quart au plus peut être attribué à Paris. La dispro-
portion toutefois, entre les démolitions et les reconstructions, ifest pas
aussi grande qffon pourrait le croire tout d’abord. La plupart des maisons
de l’ancien Paris étaient étroites et occupaient peu de superficie, parce
qu’elles avaient été construites dans un temps où la ville était encore res
serrée dans ses anciens rempart,s. Les nouvelles, au contraire, souvent sur-
chargées d’ornemens inutiles, présentent néanmoins un bien plus grand
développement de façade. Aussi, soit par le fait de l’abandon d’une partie
du sol à la voie publique, considérablement élargie sur le parcours des
nouvelles rues, soit pour obéir aux idées de luxe et de comfortable de
notre siècle, communément il a fallu l’emplacement de trois vieilles pro-
priétés pour en bâtir une nouvelle.
On lit dans le Bulletin commercial de la Presse :
La semaine a été calme pour le commerce. La venle du détail a eu encore
une certaine activité, mais qui tend à diminuer à mesure qu'une partie de
la population se retire à la campagne. On compte depuis quelque temps à
Paris un grand nombre d’étrangers qui sont venus à la suite du grand-duc
Constantin et du roi de Bavière ; ils ont fait quelquesachats importans dans
nos magasins en articles artistiques et de luxe. Nos magasins de nouveautés,
favorisés par les chaleurs du mois de mai, ont écoulé beaucoup de tissus
légers. La vente de ce genre d’étoffes a été, dans certains magasins, près du
double du chiffre obtenu au mois de mai de l’année dernière.Quelques-unes
de nos manulactures des départemens se sont ressenties de celle activité
de la vente de Paris, et ont obtenu de bonnes demandes pour les mar-
chands de la capitale. Les nouvelles de Lyon surtout sont assez favorables.
H semble que la faveur pour les lissus de soie augmente à mesure que la
matière première devient plus rare et plus chôre.Quelques ateliers de Lvon
ne peuvent suffire à la demande des étoffes de haute nouveauté. Quelques
Américains se sont décidés, malgré les nouvelles peu satisfaisantes de New-
York, à donner quelques commissions qu’ils doivent expédier de manière à
ce qu’elles n’arrivent aux Elats-Unis qu’après le l0” juillet, c’est-à-dire après
la mise en vigueur du nouveau tarif américain.
Nous avons malheureusement d’assez mauvaises nouvelles au sujet de la
récolte des soies. La mauvaise qualité des graines menace d’avoir de tristes
conséquences dans un grand nombre de magnaneries. Dans les contrées
où le Ver est parvenu à la 4» maladie, l’insecte languit, se raccourcit et
meurt. A Naples, en Lombardie et en Espagne, on ne compte guère que sur
les 2/5es d’une récolte ordinaire. Aussi doit-on s’attendre encore cette année
à des prix très élevés sur la soie. On sera obligé d’avoir recours de nouveau
à la soie de Chine, quoique l’expérience ait prouvé que la qualité delà
soie chinoise ne peut convenir à la fabrication de la plupart des tissus les
plus recherchés.
Les inquiétudes que font naître les avis reçus des contrées sericicoles font
une fâcheuse exception aux espérances qu’inspirent toutes les autres récol-
tes. Il y a bien des années que le temps ne s’ét ait montré aussi propice
pour les biens de la terre,et l’on s’attend à une récolte très abondante pour
les céréales de toute espèce et en vins. Il n’y a sur ce point qu’une seule
opinion parmi les cultivateurs, non-seulement en Francp, mais sur tout le
continent européen et en Angleterre. Il est probable que les blés et les
farines, qui maintiennent encore leurs prix, ainsi qu’il arrive tous les ans
à l’approche de la récolte, éprouveront une forte baisse aussitôt que les
nouveaux grains commenceront à arriver sur les marchés.
BELGIQUE
Bruxelles, 7 juin.
Le Roi et la famille royale sont venus, cette après-midi, au palais de
Bruxelles.
Le Roi n’a reçu personne officiellement. S. M. et la famille royale sont
relournées vers 5 heures à Laeken.
— C’est aujourd’hui, 7 juin, le 17e anniversaire de la naissance de
S. A. R. Mm6 la princesse Charlotte.
— Conirairemenr à ce qui avait été prévu, la procession annuelle de
l’église de N-D. de la Chapelle, pour la fête de la Sle-Trinité, est sortie
aujourd’hui, f t a parcouru un long itinéraire par une chaleur tropicale et
au milieu d’une affluence considérable. Plusieurs enfants et différentes
personnes qui faisaient partie du cortège religieux ont élé assez sérieuse-
ment incommodés par suite de la grande chaleur.
Le corps des sapeurs pompiers et plusieurs sociétés musicales étaient
dans la procession.
— La distillerie à vapeur de M.Wittouek, industriel à Leeuw-St-Pierre, a
été complètement incendiée dans la nuit du 6 au 7 juin. Un des ouvriers de
M. Wiltouck a été gravement brûlé.
observatoire noYAL de Bruxelles, 7 juin à midi, (15° jour delà
lune.) — Baromètre observé 756mm96 ; Thermomètre centigrade du
baromètre 2t°8; température centigrade de l’air 28°5; id. maximum depuis
hier midi 28°7 îd. minimum, depuis hier midi 17°2 ; eau tombée 0ra®’00;
vent SSO.
ABVERS, S JUJISf
Nous avons eu hier une chaleur étouffante pendant une par-
tie de la journée. Heureusement dans l’après-dîner un orage
suivi d’une pluie assez abondante est venu raffraîchir l’atmos-
phère Ce matin il faisait presque froid.
— La première nuit de la kermesse s’est assez bien passée.
La police n’a dû faire qu’un nombre fort restreint d’arrestations
pour tapage nocturne, etc.
— Le mouvement du port est très important aujourd’hui,
par suite du vent favorable de S.-O. bonne brise. Deux grands
trois-mâts de Callao se trouvent parmi les arrivages,le David G.
Fleming et North America, et parmi les navires en rivière on-
remarque encore trois autres trois-mâts, le Jacob A. Stamler
de New-York; le Child of the Regiment et le Nepaul, de Callao.
Des steamers sont partis pour les remorquer en ce port.
— Le steamer belge Baron Osy, de Londres et le steamer
anglais Volga, de Hall, sont arrivés ce matin chargés de mar-
chandises ; le premier avait en outre 100 passagers à bord
parmi lesquels on remarquait le général-major Wilson, de l’ar-
mée anglaise.
— Au marché au bétail de ce jour on a présenté en vente
174 vaches et génisses, 70 bœufs et 4 taureaux.
— Cette nuit un vol d’une certaine importance a été commis
dans la Maison aux Gaufres du sieur Fritz, établie à la Tête
de la Grue. Un adroit voleur a pénétré dans le chariot placé
derrière la maison, a fracturé une armoire, et enlevé une somme
d’argent assez considérable. On parie de plusieurs milliers de
francs. Il y avait, dit-on, fr. 1000 en or et ie reste en pièces de
2 francs et en billets de banque. Le tiroir vide de l’armoire a
été retrouvé daus la petite rue aux Crabes.
— Hier deux individus ont été transportés à l’hôpital Ste-
Elisabeth, qui dans des rixes avaient reçu des blessures assez
sérieuses. L’un s’étant battu avec son frère.avait été renversé et
fortement blessé à la tété. L’autre avait été frappé de plusieurs
coups de couteau par sa maîtresse.
— On ne saurait être trop prudent avec les allumettes phospho-
riques, même en plein air. Tantôt encore une jeune fille a man-
qué d’être brûlée affreusement au port. Une allumette mal
éteinte,jetée négligemment sur la voie publique,avait mis le feu
à sa robe d’étoffe légère,lorsque heureusement un passant s’en
aperçut et se hâta de l’étouffer.
— Par arrêté royal en date du 26 mai, M. Luc. Victor Schae-
fels est nommé professeur de la classe d’ornements à notre
Académie Royale, en remplacement de son père, décédé.
— Une jeune fille de Presbourg,s’il faut en croire les journaux
du pays, vient de mourir victime d’un accident jusqu’ici sans
exemple. Elle se plaignait un soir de maux de tête; bientôt après
elle fut prise d’attaques nerveuses et succomba enfin à une
fièvre cérébrale. Les médecins n’ayant pu découvrir la cause de
cette mort subite, firent l’autopsie du cadavre et trouvèrent
dans la tête une punaise qui s’y était introduite par l’oreille.
— La galanterie et la courtoisie du roi Victor-Emmanuel
vis-à-vis de la czarine ont été exquises. Tous les jours pendant
que l’impératrice était à Rome, et en voyage, le roi lui envoyait
une boîte de fruits préparés par le fameux Giacone qui n’a pas
de rivaux en Europe, sachant combien S. M. en était friande
(molto appetitosa). Lorsque la czarine est arrivée à Turin, tout
le rez-de-chaussée du palais a été mis à sa disposition. Afin de
lui éviter la fatigue de descendre les escaliers conduisant au
jardin, on les avait convertis en pentes douces et presqu’insen-
sibles, couvertes de tapis.Dans un des salons toutes les murail-
les avaient été couvertes de treilles naturelles, où S. M. pouvait
cueillir les grappes les plus fraîches et les plus savoureuses.
Un autre salon était tapissé de fleurs naturelles dont on entre-
tenait soigneusement la fraîcheur. Devant les fenêtres des ap-
partements occupés par l’impératrice,avait été improvisé un dé-
licieux jardin avec tous les arbustes empruntés aux serres
royales.
— On sait, dit un journal anglais, que des régiments ont des
fantaisies et des prédilections toutes particulières pour certains
animaux qui ne les ont jamais quittés, tels que daims, chiens,
boucs, singes. II est même jusqu’à des corbeaux qui ont été
adoptés par un régiment d’infanterie de la garde. Les derniers
animaux que l’on ait vus figurer à Windsor, ont été un magnifi-
que daim et un vieux bouc à cornes dorées. Us avaient l’habi-
tude de se placer devant la musique lorsque les gardes se ren-
daient de la caserne au château, et du château à la caserne. Or,
la reine vient de donner un beau bouc cachemire au 23e régi-
ment des fusiliers royaux de Galles. C’est un élève du grand
parc de Windsor. Mercredi dernier, il a été envoyé au quartier
de Portsmouth, confié aux soins du tambour-major Knight et
d’un tambour du même régiment C’est le cinquième présent de
cette espèce, fait par la reine, à titre de témoignage tout parti-
culier de sa faveur, à ce régiment distingué. Les autres ani-
maux sont morts à différentes époques. Un bouc qui était de-
venu très docile et qui avait été habitué à marcher en tête du
régiment, est mort dans le voyage de Crimée ; il avait été rem-
placé par un autre bouc, tiré du grand parc de Windsor, qui est
mort il y a quelques semaines. Le bouc actuel est parfaitement
blanc ; il a deux ans.
— On écrit de Port-Louis sous la date du 11 mai: La célèbre
voyageuse Mmo Birch Pfeiffer , après avoir passé quelque temps
dans cette île pour attendre la saison favorable, est partie le 28
du mois dernier pour Tamatave , dans l’île de Madagascar.
Pendant son séjour ici elle a mené une vie très retirée , dans
plusieurs familles, demeurant à une certaine distance de la
viRe, qui lui avaient offert l’hospitalité.
— Les observations suivantes, que nous empruntons au
Courrier de Lyon, sont, ce nous semble, tout à fait de circon-
stance; elles traitent des moyens d’échapper aux trois princi-
paux dangers que courent les baigneurs : les tourbillons, les
crampes et les plantes aquatiques.
« Le tourbillon est un mouvement circulaire et rapide qui se produit sur
un point de la surface d’un courant. Le centre d’un tourbillon se creuse
toujours en entonnoir, et son action circulaire s’étend sur un rayon plus
ou moins long, selon la force du courant el la masse des eaux. En vain
vous résisterez à ce tourbillon ; en vain vous essaierez de lui échapper
malgré lui. Vous lutterez affreusement; tournant sans cesse sur vous-méme,
vos efforts se détruiront les uns par les autres, et vous n’en sortirez pas.
Laissez-le faire, lui seul peut vous sauver. Voyez ce qui arrive quand on
jette dans la conque d’un tourbillon un corps inerte, une feuille, un mor-
ceau de bois : l’objet pivote sur lui-même, puis disparait. Sous l’eau, il con-
tinue à tourner, mais le cercle qu’il trace va toujours s’élargissant ; il finit
par arriver au point oùTaetion du tourbillon cesse de se produire ; il entre
enfin dans la partie calme du courant, remonle paisiblement à la surface
et continue paisiblement sa course. C’est l’affaire d’un instant. Agissez
comme ce corps inerte, abandonnez-vous, laissez-vous engloutir, et le tour-
billon vous aura bientôt rejelé de lui-même. Quelques secondes sous l’eau,
pour un nageur, ce n’est rien.
» La crampe est la contraction nerveuse d’un muscle. Celte contraction
est toujours accompagnée d’une douleur très vive. Le muscle ie plus sujet
à la crampe est l’extenseur du pied, le mollet. Outre la douleur qu’elle fait
éprouver, la crampe paralyse à l’instant les mouvements du nageur. Dans
ce cas, il doit se mettre sur le dos et se maintenir avec les mains. Puis il
contractera peu à peu son pied pour le relever en avant, comme un homme
qui Veut marcher sur les talons. Grâce à ce moyen, le mollet crispé par la
crampe sera forcé de se détendre et la douleur disparaîtra.
» Quant aux plantes aquatiques , elles sont longues, minces, souples el
pourtant très dures à briser. Ce sont do véritables cordes qui s’élèventdu
fond de l’eau et se penchent toutes dans le même sens, en obéissant au
moindre mouvement du courant. Jetez une pierre au milieu d’elles, frappez
l’eau de la main, et vous voyez ces herbes si droites tout à l’heure s’agiter,
onduler, se tordre, s’enrouler comme des serpens. Engagé dans leur lacets,
le nageur inexpérimenté cherche son salut dans la fuite ; il n’y trouve Cjae
la mort. Au premier mouvement qu’il fait, il se sent saisir aux bras, aux
jambes, au cou. Le danger presse ; le désespoir commence. Il redouble
d’efforts ; de nouvelles chaînes s'attachent à lui. Il s’agite au hasard ; jla
perdu la tête; ses efforts, d’abord réguliers, deviennent convulsifs. Ce n’est
plus un homme qui nage, c’est un noyé qui se débat 11 enfonce, et souvent,
quand l’eau a repris son calme, les herbes sont tellement enlacées autour
du cadavre qu’elles semblent retenir leur proie.
» Le contact de ces longues herbes filandreuses el gluantes eston ne peut
plus désagréable, et celle première impression contribue beaucoup à faire
perdre contenance au nageur. C’est un effet plutôt moral que physique dont
il est important de se rendre maître. 11 faut ensuite tâcher de rester immo-
bile et se maintenir autant que possible à la surface, parce que plus on |