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iHiidi 1*J Janvier.
1891. — Cinquante .sixième année. — W 19.
Lundi 19 Janvier.
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Journal Politique,
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tre. — Les titres se paient d'après l'es pact
%(insertionMt' °'1 ** peUi 9arantir le*
RÉSUMÉ politique.
Youte la presse italienne commente la note du
'■îjtanfuUa sur les négociations relatives â l’entrée
de i1 Italie dans la future Union douanière austro-
Henmnde. Plusieurs journaux saisissént cette occa-
sion puur attaquer la politique douanière de la
JTance. La Gazette de Turin va jusqu’à dire que,
après avoir été vaiucue sur les champs de bataillé,la
«rance doit l’ètre sur le terrain commercial,et qu’elle
lu sera certainement si l’Allemagne, l’Autriche et
Jfttalio se liguent contre elle,car la Russie, son alliée
in partants, ne saurait lui être d’aucun secours. Il
Bgsort, en tous cas, des appréciations des organes
{Ministériels que la nouvelle du Fanfulla est exacte.
^■Les journaux catholiques et progressistes aile*
■ffpiK.u publient des articles très chaleureux à l’occa-
sion du 80* anniversaire de M. Windthorst. Cet
■ JjEniversaire a même causé au Reichstag un incident
assez nouveau : le président, M. de Lewetzow, après
qijie l’ordre du jour a été épuisé, a exprimé publique-
ment aü nouvel octogénaire les félicitations de l’As-
Knbléc. Mais le plus piquant de tout cela, c’est que
M. Windthorst n’a, en réalité, que soixante-dix-neuf
aas aujourd’hui ; né en 1812, il n’aura ses quatre-
vingts ans que l’an prochain, en 1892. Au banquet
que lui a été offert par le Centre, M. Windthorst â
.jglrononcé un toast plein de verve ; il a rappelé qu’en
1812 on l’avait confié à la garde d’un cosaque, et il
a <’ primé l’aspoir quejarnais les cosaques ne revien-
draient en Allemagne.
MLo prince de Bismarck, qui continue la rédaction
de ses Mémoires, en est arrivé; dit-on, à son am-
tessade aux Tuileries ; on parle dans son entourage
de portraits tout à fait curieux des principaux per-
sonnages du second empire qu’il aurait vus à Paris,
fitte partie serait une de celles qu’il se déciderait
à publier de son vivant ; au contraire, plusieurs
autres seraient mises sous scellés et livrées au pu-
blic dans un temps plus ou moins long après la mort
dé l'auteur et quand leur contenu ne sera plus de
nature à causer préjudice à aucun personnage vi-
vant.
BULLETIN TÉLÉGRAPHIQUE.
I [Service particulier du Précursbur/.
Paris, 19 janvier.
pïTous les Journaux s’occupent aujourd’hui de. l’in-
cident qui a surgi entre le général de Gallifet et le
prince de Beaufl'remont, et qui, dit-on, se terminera
par un duel. Chacun de ces deux généraux prétend
avoir conduit la fameuse charge de Sedan, dite la
Cheva uchée dé la mort, comme étant à ce moment
là le plus ancien officier supérieur. Il résulte des
explications des Débats, combattues, de très- bonne
foi sans doute, par M. de Beauffremeht, que' c’est
bien M. de Gallifet qui avait été promu général le
premier,bien que dansïe désordre qui régnait alors,la
chose n’eût pas été constatée immédiatement d’une
manière officielle.
Lima, 17 janvier.
-Les vaisseaux de guerre insurgés sont : le Coche-
rane, le Blanco Ansalada, la Ismerâhla, le
Mgellan, 5 corvettes, le transport VAmazoïie et
le vapeur Asomagua.
les | vaisseaux restés fidèles au gouvernement-
sont :
, aÊje Huascar, actuellement en réparation, cinq
corvettes, 2 transports et 8 torpilleurs.
Le Blanco Ansalada est actuellement dans le
détroit de Magellan, attendant le vapeur Abcao et 2
«veaux croiseurs qui viennent d’Europe.
^H,es affaires sont paralysées. La viande se vend 2
dollars la livre à Iquique.
manifeste du Président paraîtra incessamment,
déclarera que le Congrès a violé la Constitution
e| refusant de voter le budget et la loi militaire.
IWLie président déclarera l’état de siège et prendra
lfpouvoir suprême.
„■^■1 ajoutera qu’il est résolu à maintenir sa position
Jltequ’après les élections du mois de mars.
Paris, 19 janvier.
Figaro, parlant des affaires de Belgique, dit
Feuilleton du Précurseur
du 19 Janvier 1891.
que la journée de mardi se passera tranquillement à
Bruxelles, mais si elle était orageuse, ce sera la
faute du ministère.
Voilà la question du suffrage universel nettement
posée devant le pays, sinon devant la Chambre.
La réforme électorale est demandée par le parti
ouvrier qui en a fait une question de grève générale.
L'aura-t-il pacifiquement ? Aura-t-on à . se fé-
liciter de la conquête ? C’est une autre affaire et
surtout l’afiaire des Belges.
Le suffrage universel pour les peuples est comme
la scarlatine pour les enfants ; il faut l’avoir eu et
on n’en meurt que rarement.}
Londres, 19 janvier.
M. Parnell, dans un discours qu’il a prononcé
hier, à Tralée, a déchiré que l’entente s'était faite
entre O’Brien et lui à l’entrevue de Boulogne, mais
qu’il ignorait quelle décision avait été prisé depuis
lors par les députés Irlandais qui lui sont hostiles.
Londres, 10 janvier.
Une dépêche adressée d’Odessa au Daily News
mentionne le bruit de la retraite du ministre des
voies et communications.
Une dépêche de Lisbonne au Times rejette en
termes très durs' toute la responsabilité de l’insurrec-
tion chilienne sur le président Balmacèda.
Dans un discours qu’il a prononcé, M. Parnell a
assuré que si M. Gladstone avait le courage de pro-
poser un large projet sur le home rule, lui, Par-
nell, quitterait son poste de leader. Il ajoute qu’il y a
a cinq jours déjà qu’il s’étalt mis d’accord avec
O’Brien.
Londres, 19 janvier.
M. Parnell interrogé à Tralée sur la véracité du
bruit qu’il aurait affirmé sa volonté de se retirer au
cas où O’Brien se déclarerait satisfait a niécepropos.
Ce bruit, a-t-il dit, n’a pas le moindre fondement.
Il a ajouté qu’il venait de recevoir de M. O’Brien
un télégramme exprimant son étonnement de ce que
des faussetés de ce genre fussent répandues par des
personnes prétendant le représenter.
Il restera donc à son poste de leader jusqu’à ce que
la cause irlandaise pourra se passer de sa direction.
L’armée de l’ordre I
Le ministère affolé rappelle deux classes de
milices, c’est à dire .vingt-huit mille hommes,
dérange et attriste vingt-huit mille familles
et leur enlève ainsi une partie de leurs res-
sources : il prend cette mesure cruelle parce
qu’un groupe d’ouvriers belges s’apprête à
faire en faveur d’une révision de la Constitu-
tion une démarche tout à fait légale. Il est
même prêt à rappeler trois classes.
Ha ! na, semble dire le ministère, vous, ou-
vriers, vous demandez à jouir de vos droits
politiques et vous venez les réclamer du Par-
lement ; attendez, j’aurai immédiatement une
revanche : je vais embrigader sans retard un
nombre double d’autres ouvriers, de ceux que
j’ai dressés au métier de soldat pour servir la
patrie contre l’ennemi du dehors, mais que je
-m'empresserai de lâcher contre vous, la
bayoupette au canon et la carabine chargée !
Si cepqpdant ces soldats, éclairés par les
dernièpés discussions sur le recrutement de
l’armée, mis au courant de l’injustifiable en-
têtement du ïhijfistère à faire peser unique-
ment sur les classés inférieures les charges et
les corvées de la défense nationale, se di-
saient : « On veut nous' forcer à tirer sur nos
frères qui luttent pour améiipi’er notre sart ;
on veut nous forcera les massacrer au profit
des privilégiés de la fortune », et si, refusant
d’exécuter cette barbare besogne, les soldats
mettaient la crosse en l’air et faisaient cause
commune avec les manifestants, que dirait,
que ferait le ministère ?
Il faut avouer que ce serait une punition
qu’il n’aurait pas volée, et qu'il encourra in-
ARIS ACTUEL
Paris, 17 janvier.
JJe ne sais pas si M. Ribot, notre ministre actuel
des affaires étrangères, est réellement un Talley-
J au petit pied, et si le tempsde ceux-ci n’est pas,
«Ueps, passé, mais ce que je sais bien, c’est que
■ délégué aux relations extérieures est un homme
«cessivement correct et d’une- habileté incontes-
gble. Tout en- s’occupant, naturellement, de main-
wnir les relations diplomatiques de la France avec
«s autres puissances sur un pied plein de cordialité
«i de dignité, ifintroduit dans son département une
joule, d’améliorations, réclamées depuis longtemps
pat l’esprit modérne, mais qui n’en étaient pas moins
«stées lettres mortes jusqu’à ce jour. J’en citerai
j&e seule, aujourd’hui : Depuis trop longtemps, les
»pp°rts commerciaux, que rédigent nos agents
■insulaires, et parmi lesquels il y en a parfois d’ex-
Spilents, qui auraient pu rendre de grands services
% nas marchands et à nos industriels, étaient pu-
Bjies et relégués dans des livraisons spéciales, irqpri-
§ees sur de magnifique papier, avec de belles cou-
Maures vertes, que personne ne lisait et qui ne
Bavaient absolument à rien. Mais c’était officiel,
Wamtionnel, et les garçons de bureau rangeaient
W^hodiquement la chose dan3 des armoires bien
«rmées où nul ne venait jamais les déranger, ni
jpeine les toucher ou lé6 consulter. Cela s’était tou-
jours fait et menaçait de se eontinuer indéfiniment,
41 y avait, pourtant, dans ces volumineuses et con-
Hpencieuses communications consulaires, une foulede
■enseignements précieux, que nos exportateurs, pe-
I ou grands, auraient eu intérêt à étudier. Ainsi
J* me rappelle avoir connu, autrefois, un brave
i jÉr.00™1 ^ara's, qui avait expédié tout une
>W*a,a‘son Ppndules dans un pays à tremble-
ments de terre où l’on ne se sert, of course,
4 e de montres, et un chargement de pianos
en Polynésie, contrée primitive, où cet instru-
ment funeste est peu répandu. Si mon gros mar-
chand, qui était pourtant un homme important
et considéré dans son quartier, avait eu lu les dites
Annales du commerce extérieur, il aurait su à
quoi s’en tenir et ne se serait pas étonné de l’insuc-
cès de ses deux envois de pianos et de pendules !
Une autre fois, ce fut un armateur de Nantes ou. de
St. Nazaire, qui écrivit à l’un de nos agents, en
Angleterre, pour lui demander si son navire, lougre
ou bisquine, qui tiraitde six à huit pieds d’eau,pour-
rait bien entrer dans le port de sa résidence ? Or,
des frégates venaient s’y réparer ! Cela prouve jus-
qu’à quel point l’éducation commerciale, maritime et
industrielle de certains de nos compatriotes a besoin
d’ètre complétée et combien notre ministère des
affaires étrangères pourrait y contribuer puissam-
ment, imitant simplement un peu l'esprit pratique
du Foreign office, dont non-seulement tous les con-
suls de S. M. B. mais encore les membres, eux-
mêmes, du corps diplomatique, sont tenus de rédi-
ger, “ au moins une fois par an, des rapports com-
merciaux spéciaux », qai sont livrés au public en
fascicules, faciles à la consulter, au prix modique de
one penny, et que l’on trouve à acheter chez tous
les Booksellers du Royaume-Uni. Ëh 1 bien, on
prête à M- Ribot l’intention d’imiter est exemple et
de faire rédiger, dans ses bureaux, des extraits de
ces rapports, quelquesfois un peu longs, et qu’il
communiquerait à la presse. Il songerait aussi,
m’assure-t-on, à exiger de MM. les secrétaires d’am-
bassade le même travail qu’on leur impose au
Foreign office. La chose serait, du moins, m’assure-
t-on, arrêtée déjà en principe et il ne resterait plus à
régler que la question d’exécution. Espérons que
M. Ribot ne s’arrêtera pas en si beau chemin et qu’il
achèvera de rendre à nos intérêts commerciaux et
industriels les services importants dont son dépar-
tement pourrait être l’utile dispensateur.
Quoi qu’il en soit, voici mon confrère et collègue,
M. Amédée Marteau, consul général de France, an-
cien rédacteur en chef du Journal dy, Havre, col-
laborateur apprécié du Petit Journal sous un
pseudonyme bien connu, qui vient de rédiger un
“ rapport, » aussi intéressant que complet et bien
fait, sur P Industrie houillère en Allemagne. Ce
remarqàable travail a eu les honneurs de l’insertion
au Moniteur officiel du Commerce. C’est très bien’
sans doute,' et ç’est déjà un progrès réel, mais ce
n’est pas encore assez, et il y a mieux à essayer.
La France démocratique ne peut pas faire mieux
que l’aristocratique Angleterre et le palais du Quai
d’Orsay n® peut plus se laisser devancer par le
failliblehièfif, si pas demain, du moins dans
peu d’années, par sa’conduite qui n’a rien do
patriotique, rien dé libéral ni même de sim-
plement prévoyant.
Divers incidents des funérailles dù général
Liâgre sont un. témoignage consolant de
l’adoucissement de nos moeurs et des progrès
que font, malgré les ultramontains, les idées
de tolérance, de respect mutuel des convic-
tions au sein de la société catholique. Il est
vrai que la haute et respectable personnalité
du défunt n’a pas été étrangère à ce résultat.
Le général Liagre est mort, comme il a
vécu, en dehors dé tout culte. Son testament
contenait les déclarations suivantes :
... l’argent qu’un service religieux, chanté en mon
honneur, rapporterait au clergé, sera miéux employé
si mes héritiers veulent bien donner une somme de 300
francs à une personne indigente et digne d’intérêt, de
préférence à une veuve ayant à sa charge de jeunes
enfants.
Dcâns la salle où sera déposé mon cercueil, je ne veux
ni obscurité factice, ni chapelle ardente, ni aucun
cierge allumé. 1
Ne voulant pas déranger pour moi toute la garnison
dé Bruxelles.je renonce aux honneurs militaires dus au
grade que j’ai occupé dans l’armée,
Toutefois, jé ne vois aucun inconvénient à ce que les
élèves de l’Ecole militaire servent d’escorte à l’ancien
commandant de l’établissement, et à cequ’ils reçoivent,
à cette occasion, congé pour le reste de la journée.
Je ne veux pas que mon cercueil soit recouvert d’ori-
pèaux, tels qu’uniforme, chapeau, épée, ^décoration ;
c’est un appareil théâtral qui contrasterait avec les
goûts que j’ai eus pendant ma vie.
Tout le monde a scrupuleusement respecté
les volontés, les désira au défunt, à commen-
cer par le gouvernement.
Les élèves de l’école militaire ont été seuls
à rendre les honneurs, et ils ont obtenu un
jour de congé. Les élèves de l’école d’applica-
tion assistaient aux funérailles en grande
tenue, ainsi que tout le corps professoral.
Le cercueil avait été déposé dans une pièce
du rez-de-chaussée de la maison mortuaire,
sans aucune tenture noire, avec quelques
palmiers seulement dans les coins ; mais il
disparaissait sous les couronnes.
Le Roi et le comte de Flandre étaient re-
présentés.
Le colonel d’artillerie de Tilly, comman-
dant l’école iuïïuairé, "aillant ses convictions
catholiques avec le sentiment de son devoir
social, a prononcé un discours très beau et
très senti; M. le général Brassine, qui affirme
en toute occasion les mêmes convictions, a
tenu un des coins du poêle. La présence aux
funérailles de beaucoup d’autres personnages
et de fonctionnaires connus comme des ca-
tholiques romains d’une nuance très marquée,
a achevé de donner à cette attitude de fa so-
ciété catholique un caractère sur lequel il
nous a paru utile d’insister un moment avec
l’espoir que d’autres catholiques s’en inspi-
reront dans des circonstances semblables,
tout aussi dignes d’égards quoique moins en
vue.
La mort en nous enlevant le général Liagre
fait disparaître une des grandes figures de la
Belgique contemporaine et du monde scienti-
fique. Le discours prononcé sur sa tombe par
M. Tiberghien.au nom de l’Académie, retrace
très sobrement mais complètement et dans
les termes les plus élevés la carrière de
M. Liagre et rappelle ses divers titres au
respect" et à la reconnaissance de ses com-
patriotes.
Nous reproduisons ce discours comme un
suprême hommage à la mémoire du défunt :
Messieurs,
Au nom des trois classes de l’Académie royale des
sfcisuices,des lettres et des beaux-arts, je viens rendre un
P1 * —I... Y ..-L-L '19Y_______—S
Foreign Office. En d’autres termes, que nos diplo-
mates ne se montrent pas plus grands seigneurs que
ceux des Iles britanniques, qu’ils piochent annuelle-
ment leur petit “ rapport » sur la pêche de la morue
ou toute autre question spéciale dé même nature
et qu’on répande celui-ci un peu partout, dans les
prix doux de 5 centimes! C’est ainsi qu’il populari-
sera, en France, l’idée de « l’Exportation » et qu’il
fera trouver, à notre commerce extérieur, lès mar-
chés qui manquent à notre production nationale
pour placer le trop-plein de ses usines et de ses
magasins de vente intérieure. Il y a pléthore! Qu’on
y remédie, en trouvant des dérivatifs au dehors!
A part la rentrée des Chambres et le discours de
M. Floquet, qui a rappelé, par son élévation et son
éloquence, celui de Gambetta, prononcé il y a quel-
ques années dans les mêmes circonstances, la grande
question du jour, à Paris, est toujours celle du froid.
Voilà dqjà six semaines, qu’après un été de la Saint-
Martin merveilleux, nous sommes en plein hiver et
que le patinage du Bois de Boulogne n’a été inter-
rompu que par un dégel pour rire.
Or, franchement, c’est trop pour un pays qui a la
juste réputation de jouir d’un climat tempéré et de
produire de bons légumes, même dans la prétendue
saison rigoureuse. Je sais bien que nous n’en sommes
pas encore réduits aux températures que le télé-
graphe nous signale à Moscou, à Berlin, à Stock-
holm, et que les dépêches d’Italie et d’Espagne sont
de nature à nous consoler, en nous parlant des
glaces et des neiges qui y régnent. Mais il n’en est
pas moins vrai que le temps, dont nous « jouissons »
actuellement à Paris, manque absolument de
charmes, et que la mortalité de la semaine, qui finit
aujourd’hui, y est de 1227, chiffre de décès supérieur
de plus de 200 à celui de la moyenne ordinaire, qui
n’est que de l ,054 à cette époque de l’année.Dieu soit
loué ! Depuis trois ou quatre jours, il y a une dé-
tente, le dégel est arrivé, et l’on espère d’autant plus
que ce sera peut-être la fin,que l’onnous avait prédit
pour demain, dimanche, la journée la plus froide de
l’année. Ce devait être “ le comble “ de la désolation
et tout le monde devait rester au lit pour ne pas être
transi. Les omnibus ne devaient pas marcher, les
chemins de fer se seraient décidés à chauffer leurs
wagons, les restaurants n’auraient pas ouvert et
les théâtres seraient restés fermés... faute de spec-
tateurs ! Ce devait être le fameux Finis Galliae,
de Gounod, sans la musique, et Paris, lui-môine,
était condamné à ressembler, ce jour-là, à un im-
mense Carpentras. Mais, je le répète, les Mathieu
suprêmfe hommage à l’un de ceûx qui ont le plus illustré
le corps savaiitet glorifié là Belgique, par l’élévation de
la pensée, parla noblesse du caractère, par la valeur et
la continuité dés services rendus. Que mà parole dans
cé cruel désastre soit à la fois un témoignage de recon-
naissance et d’admiration !
, Jean Baptiste Liagre naquit à Tournay le 18 février
1815. Après d’excellentes études il vit 8’ouvrif devant'lui
une brillante carrière, consacrée en partie à l’armée et
à l’école militaire, en partie âla science et à l’Académie.
Mais dans chacune de ces phases, la science fut l’objet
principal de ses préoccupations. L’offieier.dugénie devint
successivement professeur, examinateur permanent
directeur des études, commandant de l’école militaire,
D’autres se seraient arrêtés à ce poste, fiers d’être ar-,
rivés au premier rang. Mais Liagre pouvait donner
plus à la patrie. Le savant et le soldat chez lui n’absor-
baient pas le citoyen. Son parti fit appel à son dévoue-
ment et lui offrit une lourde charge dans un cabinet
libéral. Liagre fût nommé ministre de la guerre et
déploya dans ces fonctions ses hautes qualités admi-
nistratives. Le Roi le récompensa de son attachement à
l’armée et au pays en lui conférant libéralement les
dignités civiles et militaires. Liagre reçut des promo-
tions graduelles et parvint au rang de grand-officier de
l’Ordre de Léopold et de lieutenant-général. ~
La carrière militaire de notre éminent confrère est
terminée. Liagre a gravi toute l’échelle des honneurs,
sans jamais être inférieur à sa tâche.
Sa carrière académique et scientifique va maintenant
suivre là même voie. Liagre fût élu correspondant de
la clas?e, des sciences le 15 décembre 1850,membre titu-
laire le 15 décembre 1853, directeur de la classe et pré-’
aident dè l’Académie en 1861, secrétaire perpétuel, après
la mort de Queteiet, le 5 mai 1874. Il appartenait à ce
titre auitrois classes de l'Académie royale des sciences,
des lettres et des beaux-arts. Il a donc rempli toutes les
fonctions qu’on peut occuper à l’Académie. On peut dire
justetoent.qu’il était l’âme de ce corps savant, car lui
seul en connaissait à fond les traditions et lés règle-
ments. En réalité, c’esflui qui l’administrait et le gou-
vernait par son autorité ifiorale. Il en faisait partie
depuis quarante ans et assistait comme secrétaire à
toutes les séances depuis dit-sept ans. La perte d’un
tel homme est une calamité pour la république des
lettres et même un deuil publie, s’il est vrai que l’Aca-
démie est l’organe central do tout le mouvement intel-
lectuel du pays, comme le disait M. Stas, le premier
jour de l’an, dans son discours au Roi.
Malgré ces occupations ôiultipîôâ, Liagre était encore
président de la commission centrale de statistique,et là
encore 11 trouva l’occasion de manifester son rare talent
d’observâteur, de généralisateur et d'organisateur.
Les publications de Liagre sont importantes et-nom-
breuses. Elles embrassent une longue série de travaux
insérés dans les Mémoires, dans les Bulletins, dans
l’Annuaire de l’Académie, et d’ouvrages scientifiques
publiés sans le concours de la compagnie. Elles ont rap
port aux mathématiques, â l’astronomie, à la géogra-
phie, à la physique et même aux institutions de pié.
voyance et aux assurances sur là vie. Elles renferment
aussi quelques œuvres littéraires, écrites avec élé-
gance, avec bon goût, quelquefois avec éloquence.
Telles sont les notices nécrologiques consacrées à Bras
setu*, au général Nerenburger, au colonel Adan, et
surtout à Houzeau, un ami intime de Liagre et un
esprit de la même trempe.
Parmi les œuvres mathématiques et scientifiques
les plus accessibles aux esprits cultivés, qui.ne sont pas
dos spécialistes, on peut citer les éléments de géomé-
trie et de topographie, le calcul des probabilités et la
théorie des erreurs, les études sur les mouvements pro-
pres du soleil et des étoiles,sur la vitesse de la lumière,
son aberration et Son absorption, le discours sur la plu-
ralité des mondes, le discours sur la structure de
l’univers, enfin la cosmographie stellaire, une des der-
nières, des plus belles et des plus vastes productions
du savant.
Sans entrer dans l’analyse de ces divers tra-
vaux, l’orateur a présenté ensuite les considé-
rations générales que voici sur la mérite et
les tendances du regretté défunt :
Liagre était un esprit d’élite, qui avait pour marque
distinctive, l’élévation, l’étendue et la sagacité de la
pensée, la délicatesse et la loyauté du sentiment, la fer-
meté et la droiture de la volonté, la sincérité, la bien-
vaillance ot la dignité du caractère. Il avait un juge-
Laensberg en chambre qui nous avaient menacés
de ces diverses calamités, en seront, je l’espère, pour
leur courte lionte, car tout semble indiquer, jusqu’à
présent, que leurs sinistres prophéties ne se réalise-
ront pas.
La lune nouvelle, qui n’est pas encore la lune
rousse, ne devait pas nous faire de quartier, et j’ai,
au contraire, confiance dans celle qui entre demain
dans le premier de son existence, pour voir la vraie
fin du mauvais temps, dont nous sommes frappés,
depuis le mois de décembre ! Ce qu’il y a de certain,
entous cas,c’est que je compte bien,personnellement,
me rendre “ le dimanche 18 janvier, a 2 heures pré-
cises » à la matinée musicale qu’offre chez elle, rue
de la Tour d’Auvergne,- 15, mademoiselle Octavie
Carrier-Belleuse, la fille du célèbre statuaire de ce
nom, qui èst, elle-même,l’une de nos étoiles du Con-
servatoire, ou l’une de nos reines du piano, si l’on
préfère. C’est là que sera toute la critique musicale
de la capitale, le » Tout Paris » venj selected des
« fêtés de l’intelligence », et je vous dirai, la se-
maine prochaine, les colliers de perles lyriques,
qu’on y aura égrénés.
C’est dans la soirée de ce même dimanche, 18 cou-
rant, si fort menacé des foudres de bonhomme
janvier, qu’aura lieu le thé de famille qu’offrent
M. et Mrae Jules Pellegrin à leurs intimes, à propos
du mariage de leur fille, M1*® Louise Pellegrin avec
M. Gabriel Lubienski de Liva. Ce mariage de deux
jeunes gens accomplis, auquel assisteront beaucoup
de nos confrères, aura lieu, mardi prochain, à midi
précis, à la mairie du XVIIe arrondissement et à
l’église Sainte-Marie des Batignolles. M. Jules Pelle-
grin, sous-intendant militaire en retraite et cheva-
lier de la légion d’honneur, est non-seulement un
invmteur distingué, qui a doté le soldat d’une foule
d’objets indispensables à la vie des camps, mais en-
core un journaliste ad hoc de la plus grande vabur,
et qui est bien connu dans la presse militaire, où il
publie constamment d’excellents articles, très appré-
ciés au ministère de la guerre et très remarqués
également à l’étranger, où l’on suit avec une atten-
tion particulière la réorganisation de notre armée.
Jules Pellegrin, que je connais depuis de nombreuses
années, a été longtemps attaché à l’école de gym-
nastique de Joinville-le-Pont, où il avait fait accom-
plir aussi des progrès merveilleux, et s’il a été,
lui-même, un professeur émérite, avant de devenir
un inventeur remarquable et un journaliste de talent,
1 a de qui tenir, car son père avait été un peintre
d’elite et ses portraits étaient des plus recherchés
dans le Tout Paris, et notamment dans le monde
artiste de ce temps-là. Pellegrin avait, en effet,
ment sain et libre, indépendant des opinions reçues et
des conventions' sotifttles. il Obéissait à sa’conscience,
il consultait la raison, et quand sa conviction était
faîte, il allait jusqu’au bout, sans crainte,sans Mblesse,
sans transàétioh. Cw ainsi qu’il marchait droit dans
la vie, agissant comme il pensait, faisant simplement
son devoir, toujours libre, toujours digne, toujours
d'accord avec lui-même. Liagre était quelqu’un, ce qui
est rare à une époque où les passions et les intérêts oiq
un si grand empire. Toutes ses forces morales étaient
parfaitement équilibrées, ancrées dans l’honnête et di-
rigées vers le haut. Sa pensée ne s’arrêtait pas aux
phôndmènes instàblés, ni Son cœur aux détails vul
gaires, il cherchait les lois éternelles des choses, 11 ten-
dait vers l’idéal, il planait dansllnfini, comme un vrai
philosophe, quoiqu’il n’eût pas reçu d’éducation philo-
sophique.
Dans un de ces mémorables discours que je citais tout
àTheure, il s’occupe de la structure et de l’évolution
des systèmes planétaires, il constate les analogies de
Mars avec la Terre au triple point de vue climatolo-
gique, physique et. topographique, il expose la grande
hypothèse nébulaire de Kant et de Laplace, il conclut à
l'identité de constitution de toutes les parties de notre
système, puis, songeant à l’humanité et â ses immor-
telles destinées, il s'écrie, avec l’illustre PèreAngelo
Sécehi : « C’est avec un doux sentiment que l'homme
pense à ces mondes sans nombre, ou chaque étoile est
un soleil qui, ministre de la bonté divine, distribue la
vie et le bonheur à d’autres êtres innombrables, bénis
de la main du Tout-Puissant. Son cœur sê sent inondé
de joie quand il songé qu’il fait partie lui-même de cet
ordre privilégié de créatures intelligentes qui, des
profondeurs du ciel, adressent un hymne de louanges à
leur créateur ».
Voilà les hautes méditations et les nobles sentiments
qui - inspiraient Liagre, il y a 32 ans, lorsqu’il n'était
encore que membre de la classe des sciences, et sur ce
point, je dois le dire, la philosophie spiritualiste con-
temporaine est complètement d’accord avec les ensei-
gnements de l’astronomie depuis Copernic.
C’est la même pensée qui éclate avec plus de vigueur,
25 ans après, dans la conclusion de la magnifique cos*
mographie stellaire, qui résume les travaux astrono-
miques de Liagre. Ecoutons ce passage avec recueille*
ment comme un écho de l’esprit et du cœur de nota*
cher confrère :
« Heureux l’homme qui, détournant son regard des
vaines agitations du monde, peut se livrer en paix à là
contemplation du ciel ! Heureux celui qui borne son
ambition à pouvoir suivre de l’œil et de la pensée ces
Innombrables mondés, animés d’une vie universelle, et
entraînés d'u ne courae éternelle à travers l’immensité de
l’espace ! Ce spectacle, qui le met en présence de la
majestueuse ampleur de la création, élève son fntelii*
gence, agrandit, épure, annoblit sa pensée. Et si la
réflexion, en mûrissant son jugement, n’a pas en même
temps refroidi son cœur, chaque pas qu’il feit dans le
poétique domaine lui offre un nouveau sujet d’étonne-
ment et d’admiration.
» Faisant alors un retour sur les choses de la terre,
il prend en pitié nos préjugés religieux et nos pratiques
superstitieuses; car l’idée pure, impersonnelle, qu’il se
forme de la Divinité, s’élève au-dessus des grossière^
fictions de nos légendes théogoniques, autant que le
large dôme du ciel s’élève au-dessus des voûtes étroites
de nos églises.
» Reconnaissant enfin son impuissance à remonter,
par la seule force de sa raison, jusqu’à l'origine des
choses, il s’arrête, avec une respectueuse résignation,
devant les bornes que la nature a posées à l'intelligence
humaine. Sa raison s’incline devant l'incompréhensible;
mais son âme, cette pure émanation de l’éternel le source
de lumière et de vie, son âme aspire et espère. »
Ceci est le testament du savant. C’est une profession
de foi philosophique et religieuse, dégagée de tout lien
confessionnel. La mort de notre ami est un témoignage
des convictions de sa vie. C’est un acte d’espérance
aussi et une aspiration vers l’éternelle vérité. Ne nous
arrêtons pas à la forme agnostique de cet élan. L’agnos
ticisme de Liagre est du même genre que celui do son
confrère Houzeau. Il s’en est expliqué dans sa notice
nécrologique de l’année dernière. « La formule de Hou-
zeau, dit-il, était Ncscio, et non Seniper ign&rabitnus.
Bien loin de dire à la raison humaine : tu n’iras pas au
delà, il regardait l’homme commè un être essentielle*
ment perfectible, et ne posait aucune limite aux res-
sources futures de son intelligence. »
Adieu, cher et vénéré confrère. Tu as noblement vécu
en contemplant avec émotion les magnificences dè la
création, tuas aimé la vérité d’un amour pur et désinté-
ressé, tu as fait honneur àl’Académie, à ia science, à ta
patrie, à 1 humanité, tu as été bon, affectueux, dévoué
pour ta famille et pour tes semblables, sois heureux'
maintenant: Reçois la récompense qui est due à tes
mérites, dans un de ces mondes glorieux que tu as si
bien décrits ! Tu aspirais à l’idéal, tu espérais en Dieu.
Dieu c'est la just ice. Adieu ! p
Le discours de M. Bara à Tournai,
I/importance du discours de l’honorable M. Bara
nous eng;ageà mettre en relief quelques points sail-
lants qu il a traités avec une particulière énergie.
‘D’abord ce passage relatif à Napoléon III et au
général Boulanger, qui eurent pour eux, nominale-
ment du moins, le suffrage universel :
Pour ma part, messieurs, je ne saurais aller jusqu’au
suffrage universel. Quoique jeune alors, j’ai présenta
la mémoire le coup d’Etat du 2 décembre et les millions
de suffrages qui l’ont approuvé : vous dire, messieurs,
avec quelle douleur,et quelle colère j’ai vu succomber
la .iberté, c est rappeley leur propre douleur à ceux
dentee vous qui s’occupaient alors de politique. Notre
pays a servi d’asile aux citoyens les plus illustres qui
devenaient des proscrits: pendant dix-Iuiit ans la France
il a eu ni liberté de la presse, ni liberté de la parole,
pendant dix-liuit ans elle a été écrasée sous le des-
potisme.
j.l: ..outre lesuffrage universel encore un antre grief;
jaivu s élever en France cette indigne dictature de
Boulauger. Un rien et elle était faite. Óh ! il fallait voir
ce quêtait alors le suffrage universel. Pas un des ïibé-
raux belges qui s’y rallient aujourd'hui n’avait assez
d injures pour l’accabler, pour le condamner. Tons les
libéraux de France ôtaient impuissants contre d«s co-
hortes d électeurs qu’entraînaient l’image, faiteà Kpiuul,
du général monté sur son cheval noir, et des bandes de
camelots chantant des hymnes à cette idole. — Si Bou-
langer avait réussi, et qui dit que demain un autre
Boulanger ne réussira pas, quel ami de la liberté! quel
libéral aurait osé demander lé suffrage universel?
On a dit pour expliquer l'approbation du coup. d’Etat
par le suffrage universel que le'corps électoral n’avait
pas la liberté : l’excuse ne, vaut rien, car il l’avait lors
de la venture de Boulanger. Sans le courage d’un mi-
nistre, Boulanger, acclamé par le suffrage universel,
aurait été le maître de la France. Le suffrage restreint,
le suffrage censitaire a bien des torts, mais il n’a pas
donné le césarisme. Dans l’intérêt de la liberté, pour
rester (les hommes libres, nous, ne devons pas aller
imprudemment et immédiatement au suffrage universel.
En tout cas, quelle que soi t là réforme que le pays
adopte,l’extension du droit du suffrage ou qu’il aille
jusqu’au suffrage universel, le paili libéral ne peut
que gagner en autorité.
, Tous les intérêts alarmés et méconnus, tous les ou-
vriers lésés dans leur droit, dans la propriété de leur
travail, dans leur dignité, tous les bourgeois sacrifiés,
tous lés riches frappés au delà de leurs forces, iront
chercher un refuge dans le droit et dans la iustice. Et
, qui 03t le parti du droit et de la justice ? C’est le parti
libéral. En effet, il n’a pas de dogme à imjooser, U n’a
pas de caste à faire parvenir ou dominer. Sa passion
1 dominante, sa raison d’ètre c’est le droit. Toutes les
| idées si elles s’appuient sur le droit trouvent accueil
, chez lui. Il n’a pas a faire plier le droit (levant les en-
seignements d’une religion ; s’il trouve un peuple divisé
| rebgieusement, tous Tes citoyens, quel que soit leur
culte,sont également traités. Il ne fera pas des lois pour
! enlever à 1 un le profit de son travail et le donner à
l’autre; il ii’â pas à créer une situation hors du droit
comme on le veut pour les classes ouvrières. Nobles,
ouvriers, bourgeois, catholiques, rationalistes sont
égaux devant lui, et il n’a pas à connaître même leurs
qualités et leurs opinions. Justice leur est rendue
quand ils se réclament du droit C’est ce qui fait que le
parti libéral est éternel ; ses conquêtes vous les voyez
dans les codes de tous les pays et chaque jour il en fait,
de nouvelles.
L’éminent ministre d’Etat affirme, dans la péro-
raison de son discours, son inébranlable conviction
dans l’avenir du parti libéral ;
Ne vous effrayez pas du bruit que font les âpôtres de
certaines doctrines. II n’y a rien de neul dans-ces doc-
trines, et ceux qui veulent les faire réussir aujourd’hui
ne seront pas, espérons-le, plus heureux que leurs pré-
décesseurs. Sans doute, il feut faire tout ce que la,
justice commande de faire pour les classes ouvrières, et
sous ce rapport l’œuvre ne sera jamais achevée, mais
il ne faut pas préconiser des systèmes qui suppriment
le droit et violent les justes libertés des citoyens.
Dévoués aux classes ouvrières, vous avez le droit de
vous donner ponr tels ; plus dévoués que d’au tres, vous
trouve l’art, plus difficile qu’on né croit, de flatter
et de rajeunir, tout en respectant la ressemblance,
qu’il “ attrapait » presqu’aussi bien que la photo-
graphie. C’est dire que toutes les jolies actrices de
1850 à 1860 se faisaient « croquer » par lui !
Les obsèques du baron Haussmann, qui vient de
succomber presque subitement à l’âge de quatre-
vingt-deux ans ont été célébrées avant-hier, à midi,
avec une grande simplicité. Le service religieux a'
eu lieu au temple protestant de la rue Chauchat, où
le pasteur Lods a récité les prières d’usage et pro-
noncé l’éloge funèbre du défunt. C’est là une des
dernières figures brillantes d’une époque, dont le
souvenir commence un peu à s’effacer, mais qui
restera longtemps vivante dans le souvenir des
Parisiens.
En effet, si la seconde ère impériale a disparu tout
entière dans le désastre de Vannée terrible, il y a,
du moins, une chose qui restera, c’est le Paris
actuel, qui est celui du baron Haussmann et dans
lequel il se personnifiait, pour ainsi dire. La méta-
morphose de la grand’ville est, en réalité, une chose
qui occupera une page indestructible dans son his-
toire. Pendant que Napoléon III faisait la regrettable
guerre de Crimée, qui n’a servi à demi qu’à l’Angle-
terre et à l’Italie, et depuis..... la malheureuse
expédition du Mexique, par laquelle ont été, peut-
être, préparés nos désastres de 1870, le baron Hauss-
mann, seul, faisait une œuvre viable, une œuvre qui
lui subsistera, et qui rappelera une époque aujour-
d’hui effacée !
| Espérons que nos édiles, en présence de cette
tombe, creusée jeudi au cimetière du Père-Lachaise,
n’hésiteront plus à terminer le boulevard Hauss-
mann, qui sera l’une des plus belles artères du Paris
nouveau et . donnera la vie et le mouvement à tout
un quartier, qu’il inondera en même temps d’air et
de lumière. Le baron Haussmann était un grand
hygiéniste. Il a de beaucoup diminué la mortalité, à
Paris, et il est évident que c’est encore en s’inspi-
rant de lui que notre municipalité résoudra le pro-
blème qu’elle s’est posé : créer une ville, qui soit, à
la fois, la plus belle, la plus attrayante, la plus
riche en monuments magnifiques, en institutions
précieuses, la plus étincelante et la plus saine !
Nos édiles se doivent d’autant plus, à eux-mèmes,
de cesser une opposition, désormais inutile, qu’ils
auraient l’air de garder une rancune politique, post
■morton, à un homme, qui n’a jamais été un politi-
cian, et auquel on ne saurait reprocher qu’une seule
chose : son grand et inaltérable amour pour Paris !
Or, nos édiles pourraient-ils, sans manque» à leur
mandat et sans commettre un crime de jèse-Cité,
oublier ce que la capitale lui doit.
M. de Laboulaye, notre ambassadeur actuel en
Russie, et le fils du populaire auteur de Parts en
Amérique, est de retour à son poste, on le sait. Il
assistait, bien entendu, à la réception du corps di-
plomatique, qui a eu lieu au palais d’hiver de Saint
Pétersbourg, à l’occasion du nouvel an russe. Le
tsar Alexandre III, qui le traite avec une bienveil-
lance toute particulière, lui a dit, à cette occasion,
qu’il avait été » très touché des honneurs funèbres,
rendus â Paris au duc de Leuchtenberg ». Cette
importante communication a été transmise par le
télégraphe à M. Ribot, dont je parle plus haut, et
notre honorable ministre des affaires étrangères
s’est empressé d’eii informer M. Carnot, qui a dû,
naturellement, être enchanté de cette nouvelle
« entente cordiale », basée cette fois sur une sympa-
thie réciproque et réelle.
Ce qu’il y a de certain, c’est que le sympathique
M. de Laboulaye, sur les bords de la Neva, et le non
moins sympathique baron de Mohrenheim, à Paris,
sont une garantie sérieuse que cet heureux état de.
choses s’accentuera encore. J’ajouterai que la pré-
sence à l’hôtel de la rue de Grenelle St-Germain de
M. de Kotzebue, le conseiller d’ambassade, et celle
de M. Nicolas de (tiers, premier secrétaire, et fils du
ministre russe des affaires étrangères,.ne peuvent
que cimenter encore cette situation excellente, par
là position exceptionnelle que ces deux diplomates
hors ligne ont su se créer dans la société parisienne.
Le théâtre de la Porte Saint-Martin, comme le
théâtre Moderne, ne sortent pas des relâches chro-
niques. C’est une sorte d’influenza nouvelle, qui
règne sur ces deux scènes. Le soir, on espère pou-
voir jouer le lendemain, et quand le lendemain
arrive on est forcé de renoncer à cette espérance.
Seulement, les causes ne sont évidemment pas les
mêmes. Chez M. Duquesnel, c’est Mme Sarali Bern-
hardt, qui règle les destinées de la scène, et Cléo-
pâtre y est deux fois reine ! Chez M. Penaud, c’est
sans doute une autre cause qui s’oppose à la reprise
des représentations.Souliaitonsàrillustre Egyptienne
de se remettre bientôt et de pouvoir entreprendre
victorieusement sa grande tournée en Amérique.
Quant au théâtre Moderne, que va-t-il devenir
décidément ? Retera-t-il consacré à l’art nou-
veau», ou restera-t-il aux flanflans de Thérésa? Si |