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formes el les combinaisons naissent d’un travail auxquels pren-
nent part simultanément l’imagination et la main , parce qu’il
importe que l’idée soit immédiatement jetée, revue et corrigée
ensuite par la discussion.
Il y a un peu de la forme mathématique dans la composition
architecturale, car la vraie marche à suivre est celle qui con-
siste à passer des connues aux inconnues, du plan, amené, par
les nécessités indiquées par la science et la raison, à l’éléva-
tion qui doit en être la conséquence.
Et pour que la composition soit belle et vraiment architec-
turale, il faut que toutes les parties aient dans l’ensemble cer-
taines relations qu’indiquent le sentiment et la science, abso-
lument comme il faut, dans l’œuvre du peintre et du statuaire,
des proportions justes et des relations indispensables.
Mais ce qu’il ne faut pas, c’est s’enfermer dans des règles
absolues. Il faut bien se pénétrer que tout est grand, harmo-
nieux dans Hercule; que cela est aussi dans l’Apollon, mais
qu’il y a en plus, dans l’un l’élégance, dans l’autre la force et
l’énergie.
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Il faut dans un édifice que chaque membre soit une utilité,
qu’il y ait parmi les éléments des sujets principaux. Il faut que
ceux-ci ne soient pas des équivalents pour ceux-là; que tout
porte solidement, soit bien posé, que rien n’éveille ce sentiment
de crainte qui tue le sentiment du beau. La hardiesse en archi-
tecture ne sera jamais synonyme de beauté, l’art n’admet pas
les tours de force. Et cela est tellement vrai que rien n’est beau
que ce qui est simple, vrai et logique.
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Nous ne voyons pas l’imagination dans la composition
d’œuvres aux formes tourmentées; dans la plupart des œuvres
de la Renaissance, nous ne voyons que la recherche, la fan-
taisie, la bizarrerie même. Une mauvaise interprétation d’élé-
ments exotiques mal vus, mal retenus ou mal compris; em-
ployés par suite dans des conditions qui en dénaturent le
caractère et la beauté.
Ces œuvres manquent toujours d’unité; elles peuvent être
jolies, elles ne seront jamais grandes et bel'es.
Où nous trouvons l’imagination d’une façon incontestable,
c’est dans ce grand art ogival dont tous les éléments ont une
forme raisonnée, des proportions qui conviennent à leurs fonc-
tions dans l’ensemble, dont les ensembles sont des conséquences
logiques des nécessités et de la destination.
Ce que nous croyons être l’imagination, c’est cette faculté
précieuse qui permet à l’artiste de donner aux objets la forme
et le mouvement qui leur conviennent afin qu’ils soient vraiment
utiles, que la raison soit satisfaite du rôle qu’ils remplissent,
que l’esprit enfin trouve très-naturel qu’ils aient été conçus
avec les dispositions qu’on leur a données.
C’est peut-être là le rationalisme et le bon goût de l’imagi-
nation. N’y a-t-il pas, d’ailleurs, tout un programme dans ces
quelques vers, description du palais du Don goût :
Simple en était la noble architecture ;
Chaque ornement à sa place arrêté
Y semblait mis par la nécessité ;
L’art s’y cachait sous l’air de la nature
Et l’œil en parcourant sa superbe structure
N’était jamais surpris, mais toujours enchanté.
_________________ E. A.
Académie royale de Belgique
Nous reproduisons ci-dessous, d’après le Bulletin
de la savante compagnie, un extrait du discours
prononcé par M. J. Portaels, directeur de la classe
des beaux-arts, dans la séance publique annuelle
du 25 septembre dernier.
Ce discours nous paraît offrir de l’intérêt parce
qu’il traite de cette question tant controversée de
l’utilité des Concours de Home, qu’il présente des
considérations assez nouvelles et que, en signalant
les vices de l’organisation actuelle, il signale un
moyen, employé déjà avec succès en France, de
remédier à cette situation.
S’il est une question qui intéresse à un haut degré l’avenir
des arts, c’est celle qui n'a cessé de me préoccuper depuis
que je suis entré activement dans la carrière : je veux parler
de l’institution des prix dit de Rome ; des épreuves qu’on
exige des concurrents peintres, et enfin de la situation qui est
faite aux lauréats durant les années qu'ils sont tenus de
passer à l'étranger. Depuis que j’ai l’honneur de faire partie
de l’Académie, je n’ai laissé échapper aucune occasion d’en-
tretenir mes honorables collègues de la nécessité d’apporter
certaines réformes à l’institution, et j’ai été heureux de ren-
contrer chaque fois leur chaleureuse adhésion.
Dès l’année 1850, je saisissais la classe des beaux-arts
d’une proposition ayant pour objet le séjour des lauréats
belges dans la ville de Rome, ainsi que les moyens de sous-
traire nos jeunes compatriotes aux dangers de l’isolement,
auxquels ils sont exposés à leur arrivée dans la métropole
des arts.
Plus tard, frappé des échecs essuyés dans les concours par
plusieurs jeunes artistes d'un mérite incontestable, frappé de
la répugnance qu a cet âge provoque une séquestration de
dix à douze heures par jour, et cela pendant trois mois,
séquest ration qui a souvent pour effet de paralyser les forces
des meilleurs esprits, je me suis demandé s’il était bien équi-
table de n avoir recours qu a cet unique moyen pour désigner
les pensionnaires que le pays envoie à l’étranger. Dans la
séance du 9 novembre 1876, j’invitais mes collègues à exa-
miner s’il ne conviendrait pas de demander au Gouvernement
de modifier les règlements qui datent depuis 1817 et d’attri-
buer un certain nombre de pensions de voyage aux jeunes
artistes qui, lors de nos exhibitions triennales des beaux-arts,
auraient produit une œuvre annonçant un talent déjà formé
et surtout un véritable tempérament.
Ce moyen nouveau de désigner les pensionnaires et que
j’avais depuis longtemps indiqué, a été essayé en France
quatre fois, concurremment avec le mode ancien; il a produit
d’heureux résultats.
Pas plus qu’on ne l’a fait chez nos voisins, je ne me suis
arrêté à cette objection inévitable : Qui répondra que les
concurrents ne se sont point fait aider?
Quand cela serait : cette faculté de profiter des conseils
d’autrui n’est-elle pas admise dans tous les concours acadé-
miques? Et lorsque le Gouvernement, à la suite d’une exposi-
tion, décerne des médailles d’or, voire même la décoration de
l’ordre de Léopold, quelqu’un s’imagine-t-il de mettre en doute
la paternité des œuvres qui ont valu ces distinctions à leurs
auteurs? J’ai la ferme conviction que le procédé, prudemment
appliqué, produirait les résultats les plus heureux et les plus
pratiques ; comme je le disais tout à l’heure, l’épreuve en a
été faite à Paris, et l’on ne saurait douter de l’éffîcacité d’un
moyen qui a désigné des artistes de la valeur de Fernand
Cormon, Sylvestre Le Houx et Lemaire.
Placés dans de nouvelles conditions, nos jeunes gens se
trouvant, pour la lutte, sur un terrain plus vaste, leurs œuvres
y gagneraient en liberté et en originalité.
En résumé, ce que je demande pour eux, c’est : 1° la liberté
du choix du sujet ; 2° la liberté dans les moyens d’exécu-
tion.
Il y a là certes un essai facile à faire et je me permets de
le recommander aux dépositaires de l’autorité.
L’autre proposition, dont j’ai pris l’initiative il y a vingt-
deux ans, est, j’en conviens, d’une exécution moins facile. Il
s’agit de fonder à Rome une institution belge en faveur de nos
pensionnaires lauréats des grands concours de peinture, de
sculpture, d’architecture, de gravure et de musique.
La question demandait à être étudiée à plusieurs points de
vue.
L’Académie l’a franchement abordée ; une commission prise
dans le sein de la classe des beaux-arts en a fait l’objet de ses
délibérations pendant plusieurs séances; elle a rédigé un rap-
port accompagné de conclusions et dont le Gouvernement a
reçu communication.
Je demande la permission de rappeler ici brièvement les
raisons qui militent en faveur d’un pareil établissement.
Lauréat moi-même et pensionnaire de l’État durant quatre
années, de 1842 à 1847, je puis parler avec connaissance de
cause des inconvénients de l’isolement dans lequel les pension-
naires sont laissés à Rome. Mieux qu’un autre peut-être, je
puis, à cet égard, être affirmatif et vous retracer fidèlement
la situation qui leur est faite.
Le jeune homme arrive à Rome plein d’ardeur et d espoir;
il y trouve des camarades tout disposés à lui être utiles. Les
premiers temps se passent en promenades dont le but appa-
rent' est de voir les monuments, les musées, d’étudier les
maîtres dont les toiles et les marbres sont répandus de toutes
parts dans cette ville merveilleuse. La fatigue arrive assez
vite, les camarades retournent à leurs travaux, et le nouveau
venu, à défaut de centre commun d’études où il puisse les
rencontrer, ne les retrouve plus qu’au café et à l’Osteria. C’est
dans ces lieux peu favorables à la méditation que l’on échange
ses idées, que l’on se communique ses impressions qui n’ont
pas toujours l’art pour objet. Ainsi placés sur la pente de la
flânerie, dans un milieu débilitant, sous les influences d’un
climat si différent du nôtre, les lauréats perdent un temps
précieux.
Plusieurs mois s’écoulent sans que l’on soit encore parvenu
à se procurer une installation convenable.
On n’a pas seulement dépensé du temps, mais on a large-
ment entamé la pension, et pour se rattraper, on en est réduit
à prendre un atelier à bas prix et souvent malsain. La gène
arrive, les études en souffrent, car on se trouve quelquefois
forcé de remplacer l’étude qui féconde le talent, par des tra-
vaux mercantiles, destinés à rétablir l’équilibre des finances.
Que j’en ai connu de ces jeunes gens, qui au moral et au phy-
sique ont été les victimes de cet état de choses ! Toutes ces
causes réunies font qu’à son retour au pays, le lauréat montre
souvent moins de talent qu’il n’en avait à son départ.
Ce n’est pas là évidemment le but que le Gouvernement
s’est proposé en instituant des pensions qui sont portées
aujourd’hui au chiffre de 5,000 francs.
Si les sacrifices que l’État s’impose ne produisent pas de
meilleurs résultats, la faute en est, je le répète, à la situation
dans laquelle nos lauréats sont laissés. II est urgent d’y porter
remède, et ce remède je crois l’avoir indiqué depuis 1856.
La commission nommée à cette époque par la classe des
beaux-arts pour examiner ma proposition a partagé ma
manière de voir.
Voici quel a été le résultat de l’étude à laquelle nous nous
sommes livrés alors :
Nous avons demandé :
La fondation d’un établissement dans lequel les lauréats
belges trouveraient, à leur arrivée à Rome, un logement con-
venable, un atelier particulier, une salle de réunion et de
travaux, ainsi qu’une table commune; et comme d’autres
artistes belges que nos lauréats vont aussi en Italie et y font
quelque séjour, nous désirerions que l’établissement fût assez
pour vaste que ceux-là aussi pussent, au besoin, user d’un
atelier où ils travailleraient sans autre préoccupation.
Toutes les grandes nations de l’Europe possèdent dans la
ville éternelle une institution de ce genre. La Belgique, si
petite quelle soit par l’étendue de son territoire, doit avoir la
légitime et noble prétention de ses voisines qu’and il s’agit du
développement intellectuel et particulièrement des beaux-arts.
Elle ne demeure point en arrière dans la lutte des grandes
exhibitions internationales; elle ne regarde point alors la
taille de ses concurrents. Si nous avons déjà obtenu de grands
succès, nous en devons ambitionner de plus grands encore, et
c'est en nous a ppliquant à améliorer nos moyens d’enseigne-
ment que nous y arriverons.
THÉATRE DE LA MONNAIE
LA VENTILATION ET LE CHAUFFAGE
Nous donnons planches 6, 7 et 8 de cette année les dessins
du système de ventilation et de chauffage exécuté au théâtre
de la Monnaie.
L’appropriation des souterrains et la pose, à travers les
murs épais, des tuyaux de chaleur, l’installation d’une
machine avec chaudière tubulaire à vapeur, sans danger
d’explosion, a été un travail d’autant plus difficile qu’on ne
pouvait le continuer régulièrement l’hiver à cause des repré-
sentations. Ces ouvrages ont donc dû être faits à trois ou
quatre reprises différentes, et ce n’est que l’été dernier qu’ils
ont pu être définitive ment achevés.
Peu de personnes fréquentant assidûment le théâtre de h
Monnaie se sont doutées du long et utile travail qui s’exécu-
tait par petites parties, bien souvent entre deux représenta-
tions. Il est vrai qu’on s’aperçoit peu des améliorations ; c’est
à peine si le public a constaté que la température intérieure
conservait cet hiver une moyenne très-supportable, qu’il fîi
chaud ou froid à l’extérieur : Il est impossible cependant qu’or
ait totalement oublié cette chaleur impossible qui, aux étages
supérieurs, devenait dès le 2e acte presque insupportable, ei
qu’on ne s’aperçoive pas aujourd’hui qu’au paradis et à l’am-
phithéâtre la température moyenne est de 20° et qu’elle n’a
jamais dépassé 24° ; elle était avant en moyenne de 37°.
Ce résultat remarquable a valu à son auteur, M. l’architecte
Bordiaux, la médaille d’or à l’Exposition universelle de Paris,
pour les plans que nous avons publiés.
Tout le système consiste à prendre l’air extérieur et à l’in-
suffler dans la salle en le tamisant, si je puis m’exprimer
ainsi, c’est-à-dire en le lançant par un nombre considérable
de bouches et arriver par conséquent à une répartition régu-
lière d’air nouveau.
Cet air extérieur, au moyen d’appareils que nous décrirons
plus loin, est chauffé ou raffraichi selon les besoins avant
d’être introduit dans les différents locaux. L’air vicié est
rejeté à l’extérieur par un grand nombre de tuyaux d’évacua-
tion dont le tirage est activé par des injecteurs d’air com-
primé employé comme agent moteur, ou s’échappe à volonté
par l’ouverture au-dessus du lustre.
Nous renverrons ceux de nos lecteurs qui désirent quelques
détails aux planches 6, 7 et 8.
Nous voyons pl. 6 : Plan du souterrain en A une machine
motrice de 20 chevaux qui met en mouvement deux pompes
à air B aspirantes et foulantes; celles-ci envoient l’air pris à
l’extérieur dans un réservoir D, où il peut être comprimé
à volonté par ladite pompe, à pression relativement élevée.
Cet air comprimé dans le réservoir est envoyé, après un
assez long parcours dans les tuyaux G, aux injecteurs F,
sous le grand vestibule, qui le projettent dans les différents
conduits d'air spéciaux et séparés pour chaque grande divi-
sion et pour chaque étage du théâtre, car il faut le remar-
quer, la scène, la salle, les loges d’acteurs, les foyers, etc.,
ont leur ventilation et leur chauffage indépendants, ce qui
permet de régler le chauffage comme on règle la lumière
du gaz.
L’air comprimé dont nous nous sommes occupés jusqu’ici
ne peut être suffisant à la ventilation de la salle; aussi son
office ne consiste-t-il qu’à entraîner avec vitesse,par des con-
duits à grande section, jusque dans les chambres séparées de
ventilation et chauffage, une plus grande quantité d’air frais
qui arrive de l'extérieur par la cour basse JJ, à droite et à
gauche du péristyle, et séjourne en dépôt dans la partie des
souterrains situés sous le grand vestibule.
Arrivé dans les nombreuses chambres de chauffage et ven-
tilation PP1, bb1, cc1, etc., l’air y est chauffé par les tuyaux de
vapeur ou refroidi par un jet en pluie d’eau très-froide qu’il
vaporise et entraîne avec lui, ce qui rend cet air plus saturé
d’humidité et par conséquent plus sain. Puis il se répand
naturellement par des milliers de conduits dans toutes les
parties du théâtre ; telles sont : 1° dans la salle les ouver-
tures PP sous les bancs du parterre, N sous le plancher
des différents balcons, N" N" à la partie inférieure de la
coupole; 2° pour la scène en NN'; pour les loges d’acteurs
en 001 ; pour le foyer en MA1, les couloirs en bb, cc, etc.
Toutes ces ouvertures de ventilation ont été placées à hauteur
suffisants au-dessus des tètes des spectateurs.
Ce système de chambre-réservoir séparé permet de ventiler
plus un local que l’afitre, de fermer, si on le juge convenable,
la ventilation par le bas en la laissant fonctionner dans le
haut; en un mot, d’obtenir la température que l’on désire
dans chaque local sans modifier celle des locaux voisins.
L’expérience a prouvé, du reste, ce que nous disons ici, et le
tableau des températures de quelques dernières soirées
pourra convaincre les plus incrédules.
Restait à maintenir l’équilibre entre la température de la
salle et celle des couloirs qui, constamment en contact par
l’ouverture continuelle des portes avec l’air extérieur, se
modifiait trop vite. M. Bordiaux y remédia, en plaçant dans
les divers dégagements, des poêles à vapeur, alimentés par le
générateur de la machine motrice.
L’évacuation de l’air qui s'est échauffé et vicié dans la salle
se fait comme l’entrée ; il est retamisé dans le bas par les
nombreux conduits sous l’appui des baignoires, et est appelé
à l’extérieur par des injecteurs placés dans la partie supé-
rieure des cheminées d’appel AA (coupes) ; dans le haut il
s’échappe par la grande ouverture du lustre dont la chaleur
active l’évacuation.
Tout ce système qui donne d’excellents résultats a été
établi dans un temps relativement court eu égard aux diffi-
cultés nombreuses qu’on a dû surmonter; il a été complété
au moyen de thermomètres enregistreurs, de transmissions
aux nombreux robinets de distribution d’air et de vapeur des
différents étages, transmissions qui toutes aboutissent au
bureau du chef de ventilation et de chauffage situé au fond
du parterre. Cet employé peut donc connaître les différentes
températures de tous les locaux du théâtre et les modifier en
raison du besoin, sans devoir quitter son bureau.
Nous terminerons par une réflexion : Le meilleur appareil
du monde, dans des mains inintelligentes, peut ne produire
que des résultats médiocres. De même, ce système qui, à
notre avis, est simple et excellent, demande à être bien
conduit et bien dirigé. Nous émettons donc le vœu que, sous
le contrôle de son auteur M. Bordiaux, la ville de Bruxelles
confie à un homme intelligent qu’elle rendra responsable
la direction de la ventilation et du chauffage de la Monnaie,
une des questions les plus importantes dans toutes salles de
réunions publiques et surtout dans une salle de spectacle.
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