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« En conséquence, le 7 février 1696, le magistrat autorisa
les trésoriers et les receveurs, de concert avec le bourgmestre
(il faut évidemment entendre par ce terme le premier bourg-
mestre), a choisir le plan ou projet, qu’ils jugeraient convenir
parmi ceux qui avaient été exécutés par le contrôleur de la ville,
Guillaume De Bruyn, pour les façades situées sur la Place,
depuis la Bourse jusqu’à l’Hermilage.
« Le 13 du même mois, on approuva les conditions d’après
lesquelles on vendrait les terrains des quatre maisons situées
sur la Grand’Place, ainsi qu’un terrain se trouvant près du cou-
vent des Frères-Mineurs et appartenant aussi à la Ville. En
tête des conditions, la vente est annoncée comme ayant lieu à
charge de suivre pour la bâtisse le plan annexé.
« C’est alors que fut cédé l’emplacement des maisons dites :
« 1° La Bourse (pour 8,4S6 florins 10 sous, à Adrien
De Vleescbouwer;
« 2° Le Moulin-à-Vent (pour 4,008 florins, au métier des
meuniers) ;
« 3° La Fortune (pour 3,581 florins, à Pierre De Broyer,
dont les successeurs la cédèrent au Métier des tanneurs, à la
suite d’une résolution, du magistrat, du 6 décembre 1759,
approuvant cette transaction), et
« 4° L’Ermitage (pour 6,068 florins, à Jean Vander Meulen).
« Puis, quand les charpentiers, propriétaires du Pot-d’Etain,
et les maçons, propriétaires de la Colline (ou des Quatre-Cou-
ronnés), demandèrent au magistrat l’autorisation de contracter
un emprunt afin de pourvoir aux dépenses que la reconstruc-
tion de ces maisons allaient leur occasionner, la même obliga-
tion de suivre un plan leur fut imposée (résolutions du 4 juillet
1696 et du 17 avril 1697).
« Les maisons appartenant aux corps de métier ont été con-
fisquées par la République française et vendues comme biens
nationaux :
« Les Quatre-Couronnés (ou la Colline), appartenant aux
maçons et située entre la Bourse-d’Or et le Pot-d’Etain, le
8 fructidor an VI ;
« Le Pot-d’Etain, appartenant au métier des charpentiers et
situé entre les Quatre-Couronnés et le Moulin-à-Vent, le même
jour;
« Le Moulin-à-Vent, appartenant au meuniers et situé
entre le Pot-d’Etain et la Fortune, le 28 du même mois;
« La Fortune, appartenant aux tanneurs et située entre le
Moulin-à-Vent et l’Ermitage, le cinquième jour complémentaire
de la même année. »
Lorsque la République française aliéna comme biens natio-
naux les propriétés des anciennes corporations civiles et reli-
gieuses, parmi les conditions générales de la vente furent
insérées celles qui suivent :
« Art. 1er. L’adjudicataire jouira des objets spécialement
« énoncés par situation et consistance et déclarera les bien
« connaître. Ils lui seront vendus avec leurs servitudes actives
« et passives, francs et quittes de toutes dettes et hypothèques,
« rentes et redevances foncières et droits ci-devant seigneu-
« riaux, conformément aux lois de la République française
« promulguées dans les départements réunis.
« Art. 2. Il jouira des biens comme ils appartiennent à la
« Nation et comme les précédents propriétaires jouissaient,
« sans garantie de consistances, de produits, ni aucune autre
« que celle des tenants et aboutissants. »
CONCOURS
Le gouvernement italien a ouvert, il y a quelques mois, un
nouveau concours international pour le monument à ériger à
Rome, à la mémoire de Victor-Emmanuel, aucune des œuvres
primées au premier concours n’ayant été jugée digne de l’exé-
cution (r). (Voir l’Emulation, 7mc année, col. 25 à 30.)
Le programme primitif n’indiquait aucun emplacement pour
1 érection du monument, et pas un concurrent n’avait résolu
heureusement la question. D après le nouveau programme, le
monument devra s’élever sur la hauteur septentrionale du mont
Capitolin, dans le prolongement de l’axe du Corso, et en vue
de cette voie. L’esplanade du monument est à une hauteur de
27 mètres au-dessus de l’escalier qui y conduira.
L’ensemble du monument se composera :
1° De la statue équestre en bronze de Victor-Emmanuel, à
placer sur ladite esplanade, dans le prolongement de l’axe du
Corso ;
2° D’un fond architectonique qui, devant aussi servir à mas-
quer les édifices placés derrière, aura au milieu une hauteur de
29 mètres; il se composera d’un portique ou d’une loge, ou de
toute autre construction architectonique, de la forme qui plaira
au concurrent ;
3" Des escaliers montant à l’esplanade.
Les concurrents devront rappeler par l’art historique ou
symbolique, pittoresque ou statuaire, les hommes et les évé-
nements qui, se rapportant à Victor-Emmanuel, père de la
patrie, ont le mieux coopéré à l’indépendance nationale.
Le monument pourra coûter 9,000,000 de francs.
Le total des primes est de 50,000 francs.
L’exposition des projets et maquettes est ouverte depuis le
7 janvier, au Palais des Beaux-Arts, à Rome; 92 artistes dont
6 étrangers y ont pris part. Le premier concours avait réuni
près de 300 concurrents.
fi) Néanmoins les primes avaient été accordées aux projets remplissant
le mieux les conditions du concours. En Italie ce n’est pas comme en Bel-
gique, on respecte au moins les conditions d’un concours.
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Concours de l’Académie de Belgique pour 1885
Dans sa séance du 6 décembre dernier, la classe des beaux-
arts de l’Académie royale de Belgique a arrêté sou programme
des concours pour 1885.
Dans la partie littéraire nous signalerons à nos confrères la
première et la troisième question qui les intéressent plus par-
ticulièrement; ce sont :
Première question. — « Faire l’histoire de l'architecture
qui florissait en Belgique pendant le cours du xv° siècle et au
rommencement du xvi°, archilecture qui a donné naissance à
tant d’édifices civils remarquables, tels que halles, hôtels de
ville, beffrois, sièges de corporations,de justices, etc. » Décrire
le caractère et l’origine de l’architecture de cette période.
Troisième question. — « Quel est le rôle réservé à la pein-
ture dans son association avec l’architecture et la sculpture
comme éléments de la décoration des édifices. Déterminer
l’influence de cette association sur le développement général des
arts plastiques. »
La valeur des médailles d’or présentées comme prix pour
ces questions sera de mille francs pour la première et de huit
cents francs pour la troisième. Les mémoires envoyés en
réponse à ces questions doivent être adressés avant le Ie''février
1885, à M. J. Liagre, secrétaire perpétuel, au palais des
Académies.
La classe des beaux-arts a également arrêté le programme
des sujets d’art appliqués. Voici celui relatif a l’architecture :
On demande un projet de cimetière pour une ville de
100,000 âmes. Le projet comportera : 1° Une entrée monu-
mentale; 2° Une chapelle; 3° Des galeries, etc. Le plan
général sera dressé à l’échelle de 0m0025; l’élévation générale,
de 0m005; les plans, coupes et élévations de l’entrée et de la
chapelle, de 0ra02 par mètre. Le choix du style est laissé aux
concurrents.
Un prix de mille francs sera décerné à l’auteur de l’œuvre
couronnée. Les plans (sur châssis) devront être remis au secré-
taire de l’Académie, avant le 1er octobre 1885.
LA PROPRIÉTÉ ARTISTIQUE
Architecture
Notre sous-titre n’est pas indispensable, étant donné le
programme et le but de l’Émulation; cependant il nous a paru
utile de l’employer, parce que dans l’incident récent dont nous
allons entretenir nos lecteurs, les journaux quotidiens ne nous
paraissent avoir vu que l’occasion de discuter cette question
de la propriété littéraire, d’ailleurs digne d’intérêt, au même
titre que la propriété artistique.
*
» *
Voici le fait : un journal d’art, la Revue d’architecture de
Liège, a publié la vue générale et divers détails artistiques de
la Banque nationale d’Anvers, malgré le refus d’autorisation
de l’architecte, M. Henri Beyaert.
L’auteur de l’œuvre a intenté une action au directeur de la
Revue, et le tribunal de commerce de Liège lui a donné raison.
La Chronique n’accepte pas le jugement prononcé; elle
raille fort agréablement les juges qui ont vu dans le fait que
nous venons de rappeler la cause d’un préjudice dont, selon
eux, il est dû réparation à l’artiste. Elle trouve mêmejiassa-
blement ridicule le jugement qui a prononcé en faveur de
M. Beyaert.
L’habile architecte, qui est non moins habile polémiste (dit
la Chronique), a proteste contre cette appréciation par la lettre
que nous reproduisons ci-après :
Monsieur le rédacteur en chef de la Chronique,
Je crois devoir répondre à l’article que consacrait votre
numéro d’hier au procès que j’ai intenté récemment à une
revue de Liège qui avait cru pouvoir, malgré ma défense,
publier la reproduction détaillée de mes œuvres.
Vous trouvez « passablement ridicule » le jugement qui me
donne gain de cause et qui admet le principe de la propriété
artistique réclamé par tous les artistes depuis si longtemps.
Je dois vous dire d’abord que ce n’est pas sans étonnement
que je vois dans votre journal une semblable appréciation ;
j’aurais juré, au contraire, que vous vous seriez constitué le
défenseur de la propriété intellectuelle, qui est aussi respec-
uble que mute autre.
Ensuite, je crois devoir rectifier, dans l’intérêt de la vérité,
les erreurs certainement involontaires que renferme votre
article.
Etes-vous bien certain, Monsieur le rédacteur, qu’il soit
permis, ainsi que vous l’affirmez, de faire et de vendre des
contrefaçons portant le nom d’artistes célèbres? Je crois le
contraire.
Vous vous trompez incontestablement en faisant supposer
que la Revue d’architecture s’est bornée à publier « des vues
perspectives de mes constructions, » alors qu’en réalité elle
s’est livrée à une spéculation commerciale, en accompagnant
ces vues générales des divers détails artistiques, ainsi que
cela se fait dans les publications architecturales. J’ai soutenu
avoir seul ce droit, et la plaidoirie de mon conseil a engagé le
tribunal de commerce de Liège à me donner raison.
Je vous prie, Monsieur le rédacteur, de vouloir bien insérer
ces quelques lignes dans votre prochain numéro et d’agréer
l’assurance de ma considération distinguée.
Ce 22 décembre 1883. Henri Beyaert.
Nous ne reproduirons pas les commentaires nouveaux dont
la Chronique fait suivre cette lettre.
Nous nous contenterons d’y relever ce fait que le rédacteur
du journal bruxellois condamne souverainement l’imitation de
tableaux de maîtres qui, dit-elle, est poussée parfois jusqu’à la
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signature; ce qui constitue (nous sommes du même avis) un
faux au même titre que le fait d’imiter la signature d’un négo-
ciant au bas d’une valeur quelconque.
C’est entendu, copier un tableau et imiter la signature du
maître au bas d’une toile constitue une fraude sur laquelle i!
convient d’attirer toute la sévérité des lois.
*
* *
Vous croyez peut-être que démarquer l’œuvre d’un archi-
tecte, s’emparer de certains éléments qui en font, parfois,
toute la valeur, cela doit être rangé dans la même catégorie
de méfaits.
Eh bien, non! la Chronique trouve dans ce fait que
« Vous lui fîtes, seigneur,
« En le pillant beaucoup d’honneur. »
Et que c’est là une réclame dont l’honorable architecte
devrait savoir gré.
Mais il y a un argument bien digne d’être relevé : La
Chronique envoie cette (lèche de Parthe à M. Beyaert :
Je ne le crois pas assez candide pour avoir fourni gratis à
la Ranque nationale ses plans et son travail. La Banque a
acquis et payé le tout. La Banque seule serait en droit de
dire aujourd’hui : Ne louchez pas à cela, c’est ma propriété.
Eh bien, voilà un argument qui m’étonne passablement, et
je poserai cette question à la Chronique :
La Banque ayant acquis et payé les plans de l’architecte,
croyez-vous qu’elle ait le droit de faire construire quelque
part, ailleurs, voire même de céder à un tiers les plans dressés
par l’artiste?
Non, n’est-ce pas, pas plus qu’un éditeur ne pourra céder à
un de ses confrères, sans l’assentiment de l’auteur, le droit de
faire de nouvelles éditions d’un ouvrage dont la publication lui
aura été confiée, alors même qu’il aura payé une certaine
somme à l’auteur pour la première édition.
•k
* N-
Et d’ailleurs, quelle différence y a-t-il entre le fait relevé
par la Chronique et celui-ci :
Un peintre reçoit la commande d’un tableau ou on lui
achète l’une de ses œuvres. L’artiste est payé en beaux et bons
écus, trébuchants et sonnants.
Son tableau lui est acheté par un brocanteur ou l’un de ces
marchands qui tiennent à merci les jeunes artistes peu fortunés.
11 fait faire un nombre quelconque de copies du tableau,
bien connu par l’exposition et les comptes rendus, et en tire
quatre ou cinq fois (ce qui est modeste pour un marchand de
tableaux) son prix d’achat et ses frais.
Croyez-vous, ô Chronique, que l’auteur de l’œuvre ainsi
exploitée n’ait pas le droit de protester?
★
Mais la Chronique n’a pas saisi la portée de ces mots : détails
artistiques, qui accompagnaient vues d’ensemble. Ces détails
artistiques sont de nature à permettre la reproduction textuelle
de tout ou partie de l’œuvre de l’artiste.
Et, si la Chronique « doit payer l’autorisation » de reproduire
telles œuvres littéraires de l’un des membres de la Société des
gens de lettres, en tout ou en partie; si elle doit d’abord se
munir de celte autorisation, comment se fait-il donc qu’elle
s’étonne de l’attitude de M. l’architecte Beyaert?
Quant à nous, nous approuvons hautement cette altitude, et
nous félicitons l’auteur de tant d’édifices remarquables d’avoir,
en intentant l’action pendante aujourd’hui devant la cour
d’appel, posé sérieusement cette question de la propriété
artistiques! longtemps controversée.
Et nous estimons que la conduite de M. Beyaert doit ren-
contrer l’assentiment unanime de tous les artistes, parce que
le jugement en appel et en cassation, s’il y a lieu, établira
définitivement une jurisprudence dans cette question de la
propriété artistique à laquelle toutes les polémiques soulevées
depuis dix ans et les protestations des artistes n’avaient pas
fait faire un pas. Ernal.
Société Centrale d'Architecture de Belgique
La Société a admis, dans ses dernières séances : En qualité
de membres effectifs : MM. Octave Van Rysselberghe, Albert
Dumont-Hebbelynck, Armand Fumière, Jean Hubrecht et Au-
guste Schoy, à Bruxelles.
En qualité de membres correspondants : MM. Joseph Hu-
bert, à Mons, Léopold De Geyne, architecte communal à
Courtrai; Oscar Francotte, à Paris; Salembier, à Belœil ;
P. Jaspar, à Liège; Joseph Dewacle et Charles Van Ryssel-
berghe, à Gand; P. Close et G. Serrurier, à Liège.
Elle a procédé, dans sa dernière séance, au renouvellement
partiel de son comité administratif. En vertu de l’article 44
du règlement, M. J. Baes, président sortant, n’était pas rééli-
gible et M. Van Peteghem, commissaire sortant, ne désirait
pas voir renouveler son mandat.
La commission administrative se compose donc actuelle-
ment de :
MM. üumortier, Valère, Président.
De Vestel, Frantz, Vice-président.
Maukels, Gustave, Secrétaire.
ifelpy, Adrien, Secrétaire-adjoint.
Peeters, Joseph, Trésorier.
Coenraets, Henri, Bibliothécaire.
De Rycker, Louis et Saintenoy, Paul, Commissaires. |