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Le Précurseur,
Nous voudrions savoir maintenant si tous les dépu-
tés qui ont envoyé leur adhésion à la réunion-Jacque-
tninot y resteront fidèles, mais franchement nous ne le
croyons pas.' Un journal ministériel prétendait que celle
réunion comptait ces jours-ci 227 adhésions signées
6vec engagement de voter contre la coalition. C'était
ce qui avait rendu le Journal des Débats si lier elcequi
lui faisait dire que la semaine avait été bonne pour le
ministère. On pourrait ajouter queles premiers jours de
1839 ne lui sont guère favorables.
Aujourd’hui le Journal des Débats n’a plus qu’une
tactique, c’est de cherchera effrayer les députés timides
sur les conséquences du renversement du ministère, et
lur la difficulté de former un nouveau|cabinet.
a. de mérode. — On assure qu’un des secrétaires par-
ticuliers du roi Léopold est arrivé hier à la légation
belge et qu’il a été aussitôt conduit chez M. Molé qui
l’aurait emmené aux Tuileries. Nous croyons qu’il est
ici question de M. Félix de Mérode, dont les journaux
de Bruxelles annoncent le départ.
la princesse marie. — Le bruit s’est répandu ce ma-
tin que les nouvelles les plus funestes venaient d’arri-
ver de Pise aux Tuileries. On disait qu’à la date des
dépêches,la princesse Marie élaità la dernière extrémité.
nouvelles de l’escadre. — On lit dans le Journal de
Smyrne, du 15 décembre : M. le contre-amiral Lalan-
de, commandant l'escadre française de la Médilerrannéc,
est arrivé ici le 10 venant de Tunis, sur le vaisseau
PHercule. il était accompagné du vaisseau Santi-Fetri,
et il a été rejoint le 12 par la corvette la Favorite.
Les vaisseaux l'Jéna, le Triton, et le Diadème, qui lont
partie de l’escadre de la Méditerranée sont prochaine-
ment attendus de Toulon. On pense que M. l’amiral
Lalande ne restera que quelques jours sur notre rade,
«t qu’après s’être approvisionné d’eau à Ourlac, il fera
une courte tournée en Grèce d’où il reviendra pour finir
l’hiver à Smyrne.
troubles a la Rochelle. — On écrit de La Rochelle,
le 2 janvier : Notre ville a été depuis deux jours le
théâtre de scènes affligeantes; elles ont commencé hier
par les porte-faix à l’occasion des embarquements de
grains. Aujourd’hui, les agitateurs ont été soutenus
par des renforts venus des campagnes ; la générale a
été battue; mais à peine une moitié des citoyens s’est
rendue à l'appel, et l’autorité faible et indécise, a été
impuissante pour arrêter le désordre.
Les maisons de MM. Cormerais, Coniée et Martin,
Jraignand, A. Seignetle, Lévéque fils el C', Gon, ad-
joint, ont été mises au pillage par une population qui
ne connaissait plus de frein. Ce n’est que chez M. iias-
leau , maire, qu’on est parvenu à arrêter le mal, et en-
core avec l'intervention de la troupe de ligne. On s’est
»u dans la dure nécessité de faire feu, et quelques per-
sonnes, dit-on, ont été blessées.
On nous annonce que la ville va être mise en état de
siège pour arrêter le débordement de nos campagnes.
Votre position est lout-à-fail exceptionnelle , entourés
que nous sommes par une population exaspérée et par
/,800 militaires condamnés à Belle-Croix qui nécessi-
tent la présence d’un bataillon de notre garnison. Sien
temps utile des mesures eussent été prises, nous ne
ferions pas réduits à celte extrémité.
One soixantaine de cadavres de la corvette naufragée
la Désirée sont venus à la côte ; plus des trois quarts
sont des forçais ; on n’a pas trouvé le corps d’un seul
officier du bord.
opinions sua le projet d’adresse.
Les résultats de la séance d’hier n’ont pas besoin de
commentaire,ils parlent assez haut pour que chacun en
apprécie l’importance. Si la royauté ne dissout pas la
thambre, disait hier, au foyer de l’Opéra, un député de
la réunion Jacqucminot, la chambre dissoudra la
royauté. Le mol porté â faux , il exagère la situation ;
mais on sait que c’est le propre des partis d’être toujours
•n deçà ouau-delàdelavérité.Sansdoute les circonstan-
ces sont difficiles; elles ne pourraient se prolonger sans
de très graves inconvénients ; mais la cause de la
royauté n’est point comprise ; c’est le ministère seul qui
est attaqué et menacé dans son existence ; ces deux
causes sont bien distinctes l’une de l'autre.
—L’adresse excite des cris de joie ou de réprobation,
selon que les individus l'envisagent avec la loupe de
leur parti. Violemment attaquée par les ministres et
leurs adhérents,elle est reçue par leurs adversaires avec
enthousiasme et reconnaissance, et comme étant l’ex-
pression réelle du sentiment public, les uns ia traitent
d'insolente, de factieuse, de révolutionnaire; d’autres
la proclament au contraire un acte toul-à-fail parlcmen-
laire, une œuvre de vérité et de courage.
— Nous n’avons point ia prétention de rapporter
tou* les mots commis à propos de l’adresse. Un journal
ministériel affirme qu’après avoir entendu la lecture
du projet d’adresse M. Royer-Collard serait descendu
dans l’hémicycle et aurait dit au milieu d'un groupe de
députés : * Ces gens là n’ont pas le courage de leurs
passions : quand ou ose tant, on doit oser plus ! »
lorsqu'il revenait il fallait qu'il se contentât de ee que son
maître avait laissé pour lui; une nourriture chétive, de l'eau
•laire, remplaçaient l’ale le rosbeef et le pudding. Lepauvra
Reynold aoupirail eln'osoilse plaindre; mais la gentil le Cécily
De voulait pas que l'on fit maigrir son amoureux, et elle cher-
chait en elle-même parque! moyen on pourrait réparer les
injustices du fermier.
Bientôt un bruit étrange se répandit dans la ferme ; on se
dit qu'il s'y passait des choses surnaturelles, que des lutins,
des fantômes s'y donnaient rendez-vous aussitôt que l'horloge
do village voisin avait sonné minuit. Les paysans sont super-
stitieux : la terreur ne tarda pas à faire de rapides progrès ;
on ne savait pas encore au juste de quoi l'on avait peur, mais
od commençait à trembler dès que la nuit venait.
Baldwin fit venir devant lui Déborah, Patrick, Reynold et
Cécily. et il questionna ses serviteurs.
a Que signifie cette crainte qui vous domine maintenant T
dit lefermier à ses valets ; que se passe-t-il de nouveau dans
m« maison ? de quoi avez-vous peur ?
— D'un lutin, dit la vieille Déborah, qui se promène tou-
tes les nuits dans la ferme.
—-, L'avez-vous vu? — Moi, je l’ai vu , dit Patrick ; c’est
BD grand fantôme tout blanc... il rode toujours dans Icscnvi-
rons du cellier. — Pourquoi no l'as-tu pas arrêté? — Arrèler
un fantôme |... Ah ben ! par exemple... il m'aurait entraîné
an fin fond de l'enfer avec lui.
— Et vous. Reynold ? dit Baldwin en se tournant vers le
jeune garçon de ferme, avez-vous aperçu le lutin ?
— Oui, notre maître, répondit Reynold uvee vivacité, Je
-TflapertQ plusieurs foi*. . U e9t tout rouge et tout noir ; j'ai
— Une baisse de 25 c. s’est manifestée hier à la bourse
au moment de la fermeture des cours.Quelques person-
nes en attribuaient la cause à l’impression qu’avait pro-
duit sur un grand nombre de spéculateurs la connais-
sance du projet d’adresse.
— Leprojeld’adressea été écouté à la chambre avec une
religieuse attention. La physionomie de l’assemblée
pendant la lecture de ce projet peut se résumer ainsi :
joie bien .marquée sur les bancs de la gauche eldel’cx-
Irêtne gauche. Silence absolu et bien significatif aux
centres.
BELGIQUE.
Bruxelles, 6 janvier. — Hier le roi a reçu successi-
vement le général Daine et une députation delà regene
de Bruxelles.
S. M. a assisté au service divin dans la chapelle du
palais.
l.e roi a présidé le conseil des ministres.
— Un ordre du jour porte à la connaissance de l’ar-
mée que le général de division Daine est nommé com-
mandant supérieur de la place de Venloo.
Le colonel Dufresnel, commandant actuel de la même
place, est nommé commandant-inspecteur des avant-
postes dans les Flandres, sur la ligne zcélandaisc. Il
aura sa résidence à Maldcghem.
Le ministre de la guerre vient d’ordonner des pro-
menades militaires de toutes les troupes réunies des
garnisons. Ces marches auront lieu comme si elles se
faisaient en présence de l’ennemi.
— Le Théâtre du Parc a été samedi , pour la pre-
mière fois, éclairé au gaz. La rampe et le nouveau lus-
tre plus grand et beaucoup pius élégant que celui qu’il
remplace, jettent un vif éclat de lumière sur la scène el
dans la salle. Mais par ce mode d’éclairage, qu’il reste
encore à employer pour l’orchestre, une obscurité plus
profonde que par le passé semble régner dans les corri-
dors. Peut-être serait-il nécessaire d'augmenter le nom-
bre de becs. Au reste, les habitués du parterre ne doi-
vent plus craindre maintenant, la pluie d'huile, qui
venait parfois les surprendre au milieu des sensations
les plus agréables et des transports les plus joyeux.
ANVERS, 7 JANVIER.
Hier, lorsque le dernier convoi du chemin de fer ve-
nant de Bruxelles était arrivé au pont de Duffel, un
des conducteurs en allant d’une voiture à l’autre pour
demander les billets aux voyageurs, a fait un faux pas
et est tombé dans la Nèlbe. Un voyageur qui s’était
aperçu de Paccideut s’est mis à crier au secours,cl sur
un signal des autres conducteurs, le convoi s’est arrêté.
Par de prompts secours on est parvenu à sauver le
malheureux, qui s’était cramponné aux brise-glaces
qui bordent le pont. 11 en a été quitte pour quelques
contusions.
Cet accident n’aurait pas eu lieu si ce pont était mu-
ni d’un garde-fou.
— Hier après-midi est arrivé en celle ville un déta-
chement d’environ 300 hommes appartenant au 2“*
régiment de chasseurs à pied. Ils ont été logés chez les
habitants et sont partis ce malin pour Turnhout.
Les miliciens de 1857. incorpores dans le 8e régiment
de ligne sont également armés dans l’après-diner d’hier
et ont été immédiatement casernes.
— M. le général Vandcn Broeck, a inspecté ce matin
sur la Place de Meir, le 7” régiment de ligne.
— La représentation qui a eu lieu, hier soir, à la
Maison aux Gaufres, par les Alcidcs. avait attiré un pu-
blic assez nombreux. Les tours de force et exercices gym-
nastiques,exécutés par ces Hercules,sont vraiment éton-
nants et méritent d’être vus. Rien de pins beau que
leurs poses académiques qui ont clôturé le spectacle.
Ce soir aura lieu leur seconde représentation qui ne
manquera pas,sans doute, d’attirer la foule.
— Presque chaque soirée au Théâtre royal des
verres du lustre éclatent et tombent sur les specta-
teurs, qui sont places daus le centre du parquet. Hier
soir encore , les débris d’un verre sont tombés sur le
bras d’une dame et ont taché sa robe d’huile.—L’admi-
nistration ne pourrait-elle pas aviser aux moyens de
remédier à ces désagréments, qui outre qu’ils abîment
les vêtements des spectateurs, peuveul occasionner par-
f i> de graves malheurs.
— Dans la nuit du 24 décembre un vol a eu lieu
dans la commune de Wommelghein, consistant en une
cuve en bois, au préjudice de Melchior Ceulcmaiis. Dans
la nuit du 26 du même mois, un vol avec effraction
consistant en plusieurs objets d’habillements a eu lieu
dans la même commune, au préjudice du sieur P. Bul-
lekens.
Errata. — Hier, en rapportant, sous la rubrique
d’Anvers, le sinistre du navire Success, nous avons omis
de dire que cette nouvelle nous arrivait de Londres,
et que ce navire était parti du Havre nun pas pour An-
vers, comme quelques personnes auraient pu le croire
d’après celte nouvelle, mais bien pour Londres.
essayé de le suivre, mais en se tournant vers moi, il m'a fait
des grimaces si horribles que cela m'a ôté jusqu'à la force de
marcher.
Baldwin s'adressa alors à Cécily, en lui demandant aussi si
elle avait vu le lutin.
— Oui. sans doute, dit la jeune fille ; une nuit que je ne
dormais pas, entendant du bruit dans le corridor près de m*
chambre, j'eus la curiosité de me lever pour aller voir ce que
c'était... Ah ! je fus bien punie de ma témérité... et je jure
bien que je ne recommencerai plus !
— Qu'avez-vons dune vu ? dit la vieille Déborah eD se ser-
rant tout contre Patrick.
— Quelque chose d affreux... Un grand spectre... qui était
•i haut quesa tête dépassait le plafond ! Il avait de gros yeux
tout flamboyants un nez crochu comme un faux une bouche
dans laquelle il y avait au moins une centaine de dents : puis,
des pattes d'ours, des bras de singe et une queue de renard, »
Le fermier ne jugea pas à propos de pousser plus loin son
interrogatoire; car, chaque récit faisant la boule de neige,
la terreur de ses serviteurs prenait encore plus d'extension.
Baldwin feignit de croire aussi au lutin ; il se coucha de
meilleure heure, s'enferma dans sa chambre el permit à tous
scs valelsd'en faire autant.
Le lutin availdonc pleine liberté de parcourir la ferme;
car, sitôt que la nuit était venue , loin de lui disputer le pas-
sage, on s'empressait de lui faire plsce el on le laissait maitre
d'aller el de venir de la cave au grenier.
Mais c’était principalement du côté du cellier que le fan-
tôme portait sesipag. Ce cellier servait aussi de réserve ; on y
déposait les provisions couvantes, le gibier, les fruits el tout
Nouvelles diverses.
Le premier jour que la Rauque de Belgique a ouvert
sa caisse elle n’a eu à payer que 202.000 l'r. pour les
comptes courants et 119.000 fr. pour les petits billets.
Sur la caisse d’épargneon a demandé 215,000 fr. Il ne
s’est présenté que pour 14,500 fr. de billets de 1,000
et500 fr., pour toucher 20 p. c. et obtenir compte cou-
rant pour l'éxcédanl.
— On écrit de Bruges, 5 janvier : Hier, on a amené
en cette ville et conduit en lieu de sûreté, 4 officiers
hollandais arrêtés par les avant-postes belges, non loin
du Haxecjras, au moment où iis parcouraient notre ter-
ritoire en chassant.
L'étal-civii pour l’annce 1838 présente les résultats
suivants.- Décès du sexe maculin 645 ; du sexe féminin
672 ; ensemble 1,317. Naissances du sexe masculin 707,
du sexe féminin 694 ; ensemble 1,401. 105 enfants na-
turels du sexe masculin et 81 du sexe féminin ; ensem-
ble 184. Mariages 524.
— La question de la dérivation de la Meusevient d'ê-
tre décidée, par l’adoption du plan de M. l’ingénieur
Franck par M. le ministre des travaux publics. Le gou-
vernement fournit en tout 200.000 fr.. dont 50,000 ont
été portés au budget de 1839. Ces 200,000 francs sont
accordés comme subside à la ville de Liège. La provin-
ce, de son côté, a volé 115.000 fr., à la condition que
le projet de M. Franck fût adopté, ce qui a eu lieu.
Or,cet ingénieur demandant 950,000 francs, et les
subsides du gouvernement et de la province s'élevant à
315,000, la ville n’a plusà fournir que 635,000 francs
ou 47,000 francs de moins que n’eut coûté l’ancien el
vieux projet.
— On lit dans le Courrier de la Moselle : Tandis que
plusieurs journaux annoncent qu'il sc fait à Metz el daus
ses environs quelques démonstrations en faveur de la
Belgique, la plupart des régiments de nos garnisons
renvoient dans leurs foyers ceux de leurs soldats dont
le temps de service vient d’expirer au lr janvier. Ces
départs sont très nombreux.
— On lit dans le Constitutionnel des Flandres : Il pa-
rait que tous les organes de la presse périodique des
Flandres sont d'accord sur la nécessité, nous dirons
même l’urgence, d'assigner sur les marchés une place
spéciale aux toiles flamandes, afih que tout le monde
puisse les distinguer de celles faites avec du fil méca-
nique. l.e Nouvelliste des Flandres contient à ce sujet
uu article très étendu, dans lequel il fait valoir les argu-
ments les plus solides eu faveur de celte opinion , que
M. Bonnc-Maes, négociant en toiles àGand.adéveloppée
le premier dans notre journal. La feuille brugeoise dit
que u M. Bonne-Macs a mérité la raeunuaissaiice des
Flamands, en laissant le public juge d'une question qui
parait occuper en ce moment le comité directeur de
l’Association lirticre. » Nous reproduisons avec satis-
faction ce témoignage flaleur du Nouvelliste , el nous
disons avec lui que peu de personnes s'intéressent au-
tant au bien-être des tisserands et fileuses des Flandres
que notre honorable concitoyen.
— Les désastres de 1857 n’ont pas diminué la fa-
veur dont les banques jouissent aux Etats-Unis, dans le
seul état de Géorgie les diverses demandes d’autorisa-
tion portées devant la législature locale, ont pour objet
des établissements de crédit cl de circulation dont le ca-
pital réuni serait de 30 à 40 millions de dollars (cent
cinquante à deux cent millions de francs). Le principal
s’intitule Banque des Fermiers de Géorgie; son capital
serailde 15 millions de dollars (soixante quinzeiiiilituus
de francs).
— Dimanche dernier, vers quatre heures de l’après-
midi, une violente secousse de tremblement de terre a
été ressentie à Woodhouse. Elle a été précédée d’un
bruit souterrain semblable à celui que produisent les
wagons en roulant sur uu chemin de 1er. La secousse a
été assez forte pour être ressentie par ia nombreuse
congrégation qui se trouvait réunie dans l’église de
Woodlmuse-Eaves ; elle a détaché quelques fragments
de plâtre de la voûte, et le bruit que leur chute a pro-
duit a effrayé plusieurs personnes qui sont sorties en
grand émoi de l’église.
Nous avons publié deux documents relatifs â la con-
stitution d’uncomilé central établi à Bruxelles, dans un
but d’association politique. MM. Ducpétiaux cl Hardy
de Beaulieu, viennent d’adresser à l’Indépendant une
lettre par laquelle il* expliquent l'intention qu’ont eue
les membres de ce comité. Voici quel est ce document :
sdu Rédacteur,
Bruxelles, fe 5 janvier 1839.
Monsieur,
Vous publiez dans votre numéro de ce jour, d'après le Jour-
nal du Bruges, l'acte de constitution du comité central de
Bruxelles avec la circulaire qui l'accompagnait. Bien que nous
n'ayons pas jugé à propos d'occuper jusqu'ici la presse de cet
objet, nous n hésitons pss à accepter hautement et franche-
ment la publicité qu'on vient de lui donner Jamais notre in-
tention n'a été d'agir dans l'ombre, à la manière des conspira-
teurs ; nos Intentions, notre but, nos actes, nous ne deman-
ce qu’on devait resservir sur la table du maître Baldwin
avait remarqué la préférence que le lutin accordait à son
collier.
Après avoir laissé au fantôme pleine et entière confiance,
une nuit. Baldwin, qui ne s’était pas couché, sortit de sa cham-
bre après s'ètre armé de son grand sabreet avoir pris la lan-
terne sourde.
Le fermier marcha sans faire de bruit et se rendit pré» de
la vieille Déborah. à laquelle il ordonna de le suivre, ce que
la pauvre femme ne fit qu'avec une extrême répugnance. H
fil aussi lever Pslrick. lequel, pour accompagner son maître,
commença par s'armer d'un vieux fusil qu'il aurait été fort
embarrassé de faire partir. Le fermier éveilla encore quel-
ques valets; puis il leur ordonna à tous de le suivre en mar-
chant avec précaution el rie manière à ne point faire de bruit.
Baldwin voulait surprendre son lutin.
Le cortège se mit en route. Le fermier dirigea sa troupe
vers le cellier ; la troupe tremblait tellement que quelquefois
elle ne voulait plus avancer En approchant du cellier on
aperçut une faible lumière et on entendit du bruit.
« Avançons, dit Baldwin, nous allons surprendre le lutin...
Mais du silence surtout !... »
En ce moment Patrick se permit d’éternuer ; aussitôt s'é-
teignit la lumière que l'on avait aperçue dans le cellier. Le
fermier, furieux de la maladresse de son valet, marcha aussi-
tôt en avant, et tenant sa lanterne haute il se trouva bientôt
dans le cellieroù il vit sur une table los débris d'un repas, puis,
un peu plus loin, une Jeune fille qui s'étaif blottie contre une
port». : .
dons qu’à les produire au grand jour; jamais nous n'en .décli-
nerons la responsabilité.
Mais vous ne vous contentez pas. monsieur, de publier no.
tre acte et notre circulaire ; vous y ajoutez un commentai^
et des réflexions qui ne tendraient à rien moins qu'à faire sus-
pecter nos intentions en dénaturant le but avouée de nolri
institution. C'est contre ce commentaire et ces réflexions qoi
nous croyons devoir protester.
Le but de notre institution, monsieur, est de régularise
autant que possible, toutes les démonstrations contre la me
à exécution du prétendu traité des 24 articles, el de prêterai
gouvernement et aux Chambres l'appuie des efforts inditiè
duels de tous les bons citoyens, pour l'accomplissement dais
mission pah iotiqao dont ils sont investis. Ce sont là les pro-
pres termes de l'un des considérants de notre acte de coiisli.
tution. Comment donc se fait-il, monsieur, que vous non
prêtiez des intentions diamétralement opposées à cette fran-
che déclaration ? L'un des premiers actes de notre co-
mité à été de s'adresser à l'un des membres du cabinet pour
lui offrir le concours de nos efforts, en lui déclarant que nous
serions toujours prêts à lui donner tous les renseignement!
qu'il pourrait désirer sur nos travaux, nos projets et nos refi-
lions, (an! dans le pays qu’à l'étranger Nous n’hésitons psi,
monsieur, à vous donner communication de cette lettre Elis
suffira, nous l'espérons, pous vous prouver que toute pensés
d'anarchie est étrangère aux fondateurs de l'associaliun dont
nous nous glorifions de faire partie.
Dans les circonstances critiques ou se trouve la Belgique
abandonnée de ceux de ses alliés en qui elle avait le plus i
confiance, menacée d’un morcellement cl d'une invasion,
placée entre la vie el la mort, entre l'honneur cl le déshon
neur. nous avons cru qu'aucun effort nedevait être méconnu
que tous les dévoùrnents devaient converger vers un but cou
niun. l’énergique défense de l'intégrité du territoire etd
l'honneur national. C'est dans ce but seul. que nous non
sommes réunis elque nous appelonsâ nous tous les bons ci-
toyens qui partagent nos convictions. Le droit d'association,
inscrit au pacte fondamental. serait une lettre morte et uni
dérision, s’il n'était permis aux hommes pour lesquels l'amou
de la patrie n'est pas un vain mol . de se concerter et de i
fortifier mutuellement au jour du danger. Permis à vous
monsieur.de croire à l'inutilité d'une pareille précaution
quant à nous, elle nous parait indispensable. Le gou vernemen
sera d’autant plus fort. notre diplomatie d'autant plus ferra
pour soutenir nos droits méconnus , que l'opinion , loujou
vigilante, sera derrière eux pour les soutenir au besoin!
leur servir d'égide.
Il est tout naturel, monsieur, qu'attaquant le but de notr
association, tous attaquiez également les moyens quelle!
propose de mettre en œuvre pour l'atteindre. Mais ici encor
vous êtes dans l'erreur. Notre inlentiou n'est nullement d'a-
voir un budget à côté du budget de l'Etat, une armée dé
volontaires a côté de l'armée nationale. Ce serait là un
prétention dont le ridicule ferait bonne et prompte justice.
Nous disons tout simplement aux vra-s patriotes. « Le paj
peut avoir besoin de vous ; si. comme on nous en menace. '
Limbourg et le Luxembourg sont envahis par «les forces su-
périeures, tenez-vous prêts a marcher à leur défense ; noir-
brave artnée ne refusera pas d'abrilcr sous son drapeau le
volontaires qui voudront partager ses dangers et sa gluirc.
Nous disons au gouvernement : « Tout ce qu'il y a d’homme
dévoués en Belgique est décidé à vous seconder dansTarcom
plissement de la noble lâche que vous vous êtes imposée;
voire premier appel, de nombreux volontaires seront prêli
voler à la défense du sol sacré de la pairie ; nous sommesd
eidés à marcher d'accord avec vous, parce que noussomm
convaincus que voire volonté est ferme et que la voix «te l'é
trnnger ne prévaudra pas dans vos conseils sur la voix d
pays, n Nous disons enfin à la nation toute entière : « Soyon
calmes, parce que notre cause est juste, soyons modérés e
dignes dans nos manifestations ; que tous les parlis. que tou
tes les dissidences d'opinionss’efBlcent devani l'intérêt gén'
rai qui nous convie à l'union ; que toute tentative de désor
dre, dans les circonstances actuelles . soit dénoncée roniro
un acte de trahison. C'est ainsi que nous répudierons les ca
lomnies et que nous déconcerterons lessourdes menées d
ennemis de notre nationalité, n .
Est-ce là . dites-le nous, monsieur, le langage d'anarebfil!
el de mauvais citoyens ? et croyez-vous que le gouvernetnan
songera jamais à invoquer contre nous l'art 92 , du roi]
pénal qui punit de mort les eniôlemeu’sde volontaires? rial
sauteren matière aussi grave et aussi chose pçu.digne , ror
venez-en ; el cependant, nous aimons mieux voir «fin* voir
insinuation une plaisanterie qu'un appel direct à rfnierve"
lion du bourreau. , ‘,y_'
Lorsqu’en 1813 et 1814. l'Allemagne se leva commeonseo
homme pourjdéfendre son indépendance menacée, refui-à-t-ell
le concours de ses volontaires? Seshommcsri'Ëtat, bienquV
solutisles pour la plupart, s’efforcérenl-ils rie comprime
l’ardeur et d'élouffer le patriotisme de la jeunes,:c dcs miivri
sites? Ne vit-on pas au contraire les Hnmboldt, les jslei11
Gœrres, Uhlnnd, Korner, Arndl, el tant d'autres fiomm
éminents que nous pourrions citer, favoriser cet élan et 11
imprimer l'ensemble qui devait en assurer le suçijès ? E
Hollande, en 1831. n'a-t-on pas vu les corps d'étudiants , If
chasseurs-Trancs de Van Dam participer aux opérations d
l’armée qui envahit nos provinces? Sans parler des service
rendus par nos volontaires en 1830, qui contestera que fi
nombreux volontaires qui accoururent de tous les point» d
pays lors de la désastreuse retraite de Louvain n’eussent p
faire tourner la chance en notre faveur si on avait eu lé lerap
de les soumettre à l'organisation que nous voudrions provo
quer aujourd'hui? Profilons de ces renseignements , mon
sieur, et craignons d’en affaiblir l'autorité ; ne remettons pi
nos préparatifs au lendemain ; l’heure fatale pourrait sonne
avant que nous fussions prêts; ce serait le glas de notre naïf
nalité el «le noire indépendance.
Loin de nous plaindre, nous nous félicitons d'avoir, sans!
provoquer, trouvé l'occasion d'exprimer hautement la pens
qui nous a réunis; nous aimons â croire qu’elle nousronc
liera l'estime cl la sympathie, sinon l'active coopération d
tous les citoyens qui ne subordonnent pas entièrement les 1"
La jeune fille était Cécily; elle se troubla el ne sut que r
pondre lorsque son maître lui demanda ce qu’elle faisait fi
el Baldwin eut beaucoup de peine à lui faire quitter la plat
qu’cite occupait. Il y parvint cependant, et pénétrant alu
dans un petit caveau dont la jolie servante semblait voulu!
défendre l'entrée, il s'écria : « Je tiens le lutin! »
A ces paroles tous les serviteurs tremblèrent de plus bel
et furent prêts à se sauver ; mais leur terreur cessa quand i
virent leur maître ramener le fantôme en le tenant "par l’a
reille. Lorsqu'un lutin se laisse traiter ainsi. Il doit «voit
cessé d'être dangereux.
Baldwin arracha le drap el le bonnet qui cachaient lés tjàili
du fantôme: alors on reconcul Reynold qui tomba aux gcnoil
du fermier, tandis que Cécilly en faisait de son côlé.
a C’est Reynold ! s’écrièrent tous les gens de la ferme.
— Parbleu 1 il y a long temps que je tnVn doutais- •
Baldwin, et je lui ai laissé quelques jours de sécurité afin j?
le surprendre ensuite plu-facilement. Ah 1 mademoiselle t
cily... vous venez souper avec les lutins!...
— Dame! notre ninilre, dit la jeune fille, je lui tlonnil
à manger la nuit, depuis que vous le mettiez au régime»
jour. » .
Le fermier comprit la leçon, et, loin de se fâcher, il nuit"
ensemble les jeunes amants. Cela valait mieux que de Û»
lui-même un sot mariage qui ne l’eût pas rendu lleureu1
tandis qu'en cessant d'clrc amoureux il De larda pas à reeën
vrer sa bonne humeur. „
Ca. Paul DE KOCK |