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ÏÆ PRECURSEUR, Diinnnclic £ Août 1340.
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Plipionomie de la presse française.
IiC CONSTITUTIONNEL fait remarquer l’importance que doit avoir
dans les circonstances actuelles le langage de la presse anglaise, sous
ce rapport que la solution la plus simple et la plus naturelle des compli-
cations actuelles pourrait venir de Londres même.
Lord Palmerston, dit ce journal, est-il l’organe bien avoué du cabi-
net de Melbourne ? Le cabinet lui-même, s’il marche d’accord avec le
ministre des affaires étrangères, est-il en sympathie avec le Parlement
et avec l’opinion ? C’est sur ces points que-la presse anglaise peut don-
ner des renseignements précieux, et ce qui est surtout instructif dans
ses manifestationsquolidiennes,c’est de voir combien ses divers organes
sont peu d'accord entr’eux. »
Le Constitutionnel prétend qu’on s’est exagéré l'importance de l’in-
surrection des montagnards en Syrie, et dément d’une façon formelle
et positive les bruits répandus sur l’affront qu’aurait reçu M. de Langs-
dorff.«L’altercation qui a eu lieu, dit-il,à Vienne entre le général Mens-
-dorf et un Français, et que quelques journaux ont attribuée au chargé
d’affaires de France, baron de Langsdorff, n’a aucun rapport avec ce
dernier. Il s’agit d’un français attaché au service d’Jutriche, qui n’est
point connu à l’ambassade de France. »
-Le COURRIER FRANÇAIS pense que le parlement anglais, que l’on
devait proroger prochainement, restera assemblé une partie du mois
d’août.
h Au point dit-il, où en est venu le différend entre l’Angleterre et la
France, sur la question d’Orient, des explications publiques ne peuvent
plus être différées. Il faut que le ministère anglais sache si la majorité
du parlement est disposée à suivre lord Palmerston dans ses folles en-
treprises et à s’embarquer dans une alliance mensongère avec la Russie.
Lord Palmerston a pris ses mesures en vrai conspirateur. Avant de
faire adopter au cabinet ses plans politiques, il avait sollicité et obtenu
l’approbation du duc de Wellington. L’alliance russe étaitdans les vœux
et dans les prédilections des torys ; lord Palmerston,en l’adoptant,s’est
rallié par le fait au système de lord Wellington ; il a donné sa démission
entre les mains des torys. 11 est naturel,en effet, queceux-cireviennent
au pouvoir quand leurs idées triomphent, et si la Grande-Bretagne fait
la guerre à la France, ce ne sont pas les whigs qui la feront.
Ainsi, que les Anglais le sachent bien : la politique de lord Palmer-
ston à l’égard de l’Orient, c’est l’alliance russe, c’est la rupture avec la
France, c’est le retour des torys au pouvoir, et par conséquent l’oppres-
sion de l’Irlande, ainsi que la ruine de tous les intérêts commerciaux.
Avec les torys, l’Angleterre verra revenir les beaux jours de 1812 et 1813,
alors que le papier-monnaie avait un cours forcé, et que la dette publi-
que allait croissant jusqu’à écraser le pays. Le gouvernement anglais a
été obligé d’emprunter pour l’expédition qui attaque la Chine; ses re-
venus, qui s’accroissent à la faveur de la paix, sont pourtant inférieurs
aux dépenses. Que sera-ce donc quand on aura la guerre sur le conti-
nent européen, et qu’une grande partie des marchés , que les Anglais
inondaient de leurs marchandises, leur seront fermés ? »
Le JOURNAL DES DEBATS approuve sans réserve la promptitude
et la fermeté des résolutions du gouvernement, non pas qu’il croie à la
guerre : selon lui, malgré le traité signé à Londres, malgré l’accord
apparent des quatre puissances et malgré la mauvaise volonté évidente
de lord Palmerston, toutes les probabilités sont encore en faveur du
maintien delà paix. « Mais, dit-il, ce qu’il faut que l’on sache bien, c’est
que la France ne peut pas reculer, et pour qu’on sache bien que sa
décision est irrévocable il est nécessaire qu’elle se prépare immédiate-
ment à la guerre. Le gouvernement arme, il a raison. Heureusement la
signature de lord Palmerston n’engage jusqu’à présent que lui-même;
l’Angleterre n’a pas signé.
Il y a trop d’intérêts communs entre les deux pays pour qu’il dépende
de la folie d’un ministre de briser une alliance qui est dans la nature des
choses. Nousavions la confiance que le traité de Londres ne renverserai!
que le ministère de lord Palmerston. En tout cas, la France est prête.
Qu’on ne s’y trompe pas ! »
La PRESSE n’a pas abandonné sa tactique dirigée contre le ministère;
ce qu’elle yoit de plus grave dans les graves conjonctures où se trouve
la France c’est la présence de M. Thiers à la tête des affaires. Ce journal
sait bien, dit-il, que le cas échéant, la France aura toujours des marins,
des soldats et des millions quand on lui en demandera.
« Mais, ajoute-t-il, la question est de savoir s’il est de l’intérêt de la
France de prodiguer tous ces sacrifices pour maintenir un ministère
qui a déplorablement altéré la considération dont elle jouissait au de-
hors. La question est de savoir s’il ne serait pas plus simple et plus rai-
sonnable de changer les conditions du pouvoir, de le rendre aussi fort
qu’il est faible, de lui donner des organes qui inspirent autant de con-
fiance et d’égards que ceux d’aujourd’hui en inspirent peu. Voilà la
question, lavéritable questiondu moment. Dans un mois, ellesera peut-
être tout autre : maintenant, elle est la seule que les hommes sages doi-
vent se poser. »
Voici en quels termes le même journal parle de l’établissement des
forces navales dans la Méditerranée :
« Le ministère, en effet, a offert à M. l’amiral baron Duperré, qui l’a
accepté, le commandement supérieur des forces navales de la Méditer-
ranée. L’armée, qui doit se ranger sous le pavillon de M. Duperré, se
composera de vingt-sept vaisseaux de ligne. MM. Hugon et Lalande
auront des commandements d’escadre dans cette flotte. On ne désigne
pas encore les vice-amiraux auxquels obéiront les deux ailes de bataille,
et les contre-amiraux cpii commanderont les division. Tout fait présu-
mer que des retraites vont être données dans les hauts grades du cadre,
et que des promotions rajeuniront un corps qui est appelé peut-être à
faire bientôt preuve d’une grande énergie. »
Le COMMERCE proclame la nécessité d’un changement de système
politique. La malveillance bien reconnue des puissances étrangères lui
paraît motiver suffisamment la nécessité de se préparer à la guerre, et
de garnir les frontières.
h On ne peut donc plus, dit-il, faire de l’armée une garnison chargée
de préserver le pays de lui-même et de l’explosion de ses propres senti-
ments. Il ne sera pas possible d’occuper Paris par (30,000 hommes, quand
cette armée pourra décider de notre sort devant le Rhin; il ne sera pas
permis d’observer Lyon avec 13.000 soldats, quand ces soldats seront
nécessaires pour border la cime des Alpes. Il va falloir mériter l’appui et
l’affection du peuple, et si l’on veut être gardé, c’est à lui, comme en
juillet, qu’il faudra peut-être bientôt demander une garde. Cette affec-
tion et ce concours on ne l’obtiendra pas en gravitant encore dans les
vieilles idées et dans les hommes tarés. Celte popularité, elle n’existe ni
dans les éternelles palinodies du maréchal Souit, ni dans les conseils de
M. Molé, tout taché de la honte d’Ancône. A une situation si difficile et
si neuve, il faut trouver des hommes nouveaux.
Le NATIONAL pense que l’alliance des quatre puissances est un fait
logique, et qui était facile à prévoir. Mais il ne pense pas que le temps
soit venu encore pour la Prusse et l’Autriche de s’insurger contre la
France. X! prétend que notre gouvernement est bien pénétré de cette
vérité, et que ses préparatifs et sou déploiement de force n’est qu’un
« Mauvais jour pour moi, dit-il, et il rechargea son fusil. »
II ne croyait pas si bien dire. Nous nous remîmes à marcher, sans plus
nous occuper de la chasse, ni des chasseurs, lorsque nous approchâmes
d’un fourré où quelques jours auparavant j’avais cru remarquer les
traces d’un sanglier. Un sanglier tué était une belle chasse pour moi,
enfant de dix ans, qui n’avais jamais vu une proie pareille tomber de-
vant moi, et dont l’imagination était remplie de détails donnés par
M. Beaumont, qui l’année auparavant en avait tué plusieurs. Je m’ap-
prochai donc du fourré doucement, pas à pas, et en entendant du bruit
dans les herbes et les bruyères, je me mis à crier aussitôt :
« Un marcassin ! un marcassin!
» — Un marcassin! dit M. Beaumont avec indifférence. i>
limit son fusil en joue, suivit la ligne que lui indiquait mon doigt, et
tira. Un cri se fit entendre, M. Beaumont jeta son fusil et pénétra dans
le fourré; je l’y suivis.... àt. Lenoir était étendu; il avait reçu la charge
tout entière dans la tempe. Au même moment, la chasse arriva, et les
premiers objets qui frappèrent M.Vallière, ce furent son gendre futur
mort, et son parent, le rival de M. Lenoir, debout devant le cadavre.
Des scènes pareilles ne se décrivent pas : cette journée fut une journée
de deuil. Un mandat d’amener fut lancé contre l'infortuné M. Beaumont:
il se résigna et se rendit en prison. J’étais bien jeune, mais je compris
quelle était ma tâche, et je la remplis dignement.
Ma déposition fut claire, simple et de tous points conforme à la vérité.
Nous n’avions pas besoin de mentir ni M. Beaumont ni moi ; mais il y
avait dans ce meurtre involontaire plus d’une circonstance fatale; d’a-
bord l’amour du meurtrier pour mademoiselle Vallière, ensuite l’amitié
qu’avait pour lui le seul témoin qu'il pùl invoquer. On rappela une à
une toutes les bontés qu’avait pour moi M. Beaumont, on compta toutes
les petites pièces d’argent qu’il m’avait données, et la famille de M.Lenoir
voulut faire de moi un complice; j’avouai léut, j’appris même aux juges
des circonstances ignorées qui prouvaient de la part de l’accusé encore
plus de bonté pour moi qu’on n’en supposait, mais je fus ferme et inva-
riable dans ma déposition ; je dis même que j’étais le seul coupable, s’il
y en avait un, que j’avais indiqué le lieu et presque commandé le feu.
M. Vallière se conduisit en bon parent, sans doute, par respect pour lui-
même et pour sa famille, et il fit la déposition la plus favorable possible
à M.Beaumont, qui fut acquitté. Dieu seul sait la tendresse avec laquelle
ce pauvre jeune homme m’embrassa après le jugement. Mais quand M.
Beaumont voulut se présenter chez M. Vallière, la porte du château lui
vain épouvantail. « On veut, ajoute-t-il, effrayer surtout-ees deux puis-
sances, pour les amener à des transactions, pour continuer la paix,
enfin, et non pour commencer la guerre. On veut effrayer; mais que la
Prusse et l’Autriche ne ratifient pas le traité, elles feront leurs condi-
tions; elles exigeront de la France de nouvelles garanties de sagesse;
elles exigeront du gouvernement de nouvelles preuves d’amitié. Ces
preuves, elles seront faites au détriment de la révolution. Au bout du
traité Brunow, il n’y a pas seulement la chute du ministère Thiers : il
y a de plus un cabinet conservateur, violent peut-être, réactionnaire
assurément. Ce n’est pas la guerre entre les monarchies qu’on médite, ,
c’est la guerre des monarchies contre la révolution, qu’on veut repren-
dre et ranimer. »
La FRANCE résume ainsi la situation : « Nous assistons, dit-elle, à la
lutte entre le système de la paix et te système de la guerre. Les conser- 1
vateurs ayant à leur tète MM. Souit et Molé, veulent la paix; M. Thiers,
la gauche, les radicaux, demandent à grands cris la guerre. La rente
baisse, la polémique s’envemine, toutes les imaginations sont en tra-
vail. :i
ESevue «Ses journaux auglais.
Le GLOBE ainsi que le MORNING-CHRONICLE persévèrent à défen-
dre lord Palmerston; mais ce qu’il y a d’étrange, c’est la persistance de
ees feuilles à soutenir que le but du noble lord est uniquement de déli-
vrer la Syrie du despotisme tyrannique de Méhémet-Ali. Qui donc s’i-
magine-t-on tromper par de pareils contes ? A qui fera-t-on accroire
qu’un ministre, ou un cabinet d’Angleterre, se jette dans toutes les
chances d’une guerre, uniquement pour arriver à ce résultat philan-
tropique, d’affranchir du joug de Méhémet-Ali les Druses et les Maro-
nites du LibanNous n’avons point de précédent anglais qui nous per-
mette d’ajouter la moindre foi à une pareille version, et franchement
nous croyons que le Moruing-Clironicle .se moque de ses lecteurs. Quand
l'Angleterre se jette dansles aventures, ce n’est jamais pour briser les
tyrannies, et c’est quelquefois pour les fonder. Parlez-nous, comme le
faisait hier le Globe, de vos trois routes de l’Inde, nous vous compren-
drons. Méhémet serait le plus grand et le plus clément des souverains,
s’il avait accepté, pour 1 Egypte ou pour la Syrie, une petite part des
plans complaisamment développés par la feuille wliig.
Le COURRIER tient un langage infiniment plus vrai et plus raisonna-
ble. Ses observations sont de nature à produire une vive sensation dans
le public anglais. Au point de vue même des intérêts, lord Palmerston
a bien mal choisi le moment pour rompre avec la France. L’Angleterre
a d’assez graves affaires sur les bras pour avoir besoin de notre alliance.
M. Thiers , dit-il, avait fait beaucoup de sacrifices pour s’assurer la
bonne volonté de l’Angleterre, et tout d’un coup il se voit abandonné
pour la Russie, la rivale de l’Angleterre dans les Indes, en Turquie et
dans toutes les régions du globe. En vérité, lord Palmerston n’avait pas
la tête à lui quand il a adopté une résolution qui va ruiner le peu d’élé-
ments de vitalilé encore existant en Turquie et habituer le peuple à re-
connaître le joug de la Russie. Ce ne sera pas la seule conséquence de
cette conduite. Les sentiments du peuple français se réveillent. L’An-
gleterre est aujourd’hui redevenue son éternelle’ ennemie; de vieux sou-
venirs presque étouffés se raniment, et la pensée, le vœu dominant en
France, sont de se venger de l’Angleterre. Lord Palmerston aurait pu
choisir au moins une plus belle occasion pour ouvrir les hostilités avant
de provoquer la France; il aurait dû attendre d’ôtre débarrassé de ses
entraves en Chine, au Canada, à Caboul. La nation anglaise ne peut pas
approuver cette humeur belliqueuse de sa seigneurie; il est pénible de
voir la paix du monde encore une fois compromise par le caprice d’une
tète chaude. Quel avantage l’Angleterre tirera-t-elle d’une croisade
contre Méhémet-Ali ? La destruction des escadres turque et égyptienne?
Mais l’empire ottoman qu’il importe tant de consolider, n’en sera pas
plus faible pour cela, et d’ailleurs il serait absurde de penser que la
France demeurera spectatrice passive des événements. Jamais les res-
sources de ce florissant royaume ne furent plus grandes. Jamais, à au-
cune époque de son histoire, la France ne fut plus en état de tenir tète
à une coalition quelque formidable qu’elle soit. La vérité est que le peu-
ple désire ardemment la guerre et qu’il pourrait faire le plus grand
mal.
Le MORNING-POST qui le premier a révélé le nouveau traité expli-
que aujourd’hui les intentions qui ont dicté cette communication.L’au-
teur de l’article qui a fait tant de bruit déclare qu’il est un whig de
l'ancienne école ; qu’il a tou jours défendu le Ministère, mais que la ma-
jorité du Cabinet actuel inspire une véritable terreur à tous les amis du
pays, qui doivent combattre ses actes par tous les moyens légitimes.
Le HERALD, après avoir posé la supposition que Méhémet-Ali refusât
d’adhérer aux conditions qui lui sont offertes, se demande si l’Angle-
terre bloquera alors les côtes de la Syrie et de l’Egypte, et laissera une
armée russe prendre possession de Constantinople. C’est là une alter-
native à laquelle la nation anglaise ne consentira pas, dans le seul but
de flatter l’antipathie de lord Palmerston contre Méhémet-Ali. il est mê-
me fort douteux que sa seigneurie, malgré tout son courage, osât se
présenter sur sou oancau parlement, et y avouer qu’il a consenti à lais-
ser occuper une seconde fois la capitale de la Turquie par l’armée du
czar.
IIOI/LASOE.
La Haye, 1 août. — L’ouverture de la session extraordinaire des Etats-
généraux, se fera mardi prochain, 4 août.
— Le Jiandelsblud est informé par une maison de commerce d’Am-
sterdam qu’on a chargé à Batavia, dans les navires Sara Maria, en des-
tination pour Amsterdam, et de Catharina,pour Rotterdam,850[4,230,112,
et une partie de petites caisses de thé Java. Cette quantité assez consi-
dérable, qui s’expédie par chacun de ces bords, est une nouvelle preuve
qu’on pousse, avec sollicitude et persévérance, à Java, une culture qui
deviendra une source de bien-être pour la mère-patrie.
UEBjGEQUE.
AïïVKHS , IiK 2 AOUT.
Nous apprenons qu’un chien enragé a parcouru dans la journée
d’hier quelques communes environnantes et à mordu deux geriisses et
un bœuf dans les prairies du polder d’Austruvveel.
— Depuis que les Hollandais ont évacué le fort de Lillo un seul décès
a eu lieu parmi la population de ce fort qui se compose de 180 habitants
sans compter les employés de la douane et les troupes formant la garni-
son.
— Les travaux de démolition du mur de soutènement au réservoir
des brasseurs sont suspendus depuis hier par suite d’un ordre émanant,
dit-on, du génie militaire. On espère cependant que celte opposition
n’aura pas de suite et que les travaux seront repris demain. Hier, ou a
commencé la maçonnerie dans le canal de l’Ancre.
fut fermée.
» Vous êtes riche, lui dit M. Vallière, et le jugement des hommes vous
a déclaré innocent : allez en paix ; j’ai été pour vous plus loin peut-être
qu’il n’était permis d’aller à un honnête homme. Un amour-propre de
famille m’a fermé la bouche. Allez, monsieur....
» — Comment, monsieur, vous croyez....
» —Vous êtes acquitté, monsieur, encore une fois, vous êtes inno-
cent.
» — Mais, s’écriait le malheureux jeune homme, vous qui m’avez
élevé, vous qui me connaissez depuis l’enfance, vous me croyez un
assassin ?
» — Vous êtes acquitté, monsieur, je n’ai rien à vous dire, et vous
prie de ne plus vous présenter chez moi. »
M. Vallière savait probablement quelle était l’opinion de sa fille, puis-
que M. Beaumont put se présenter chez elle; il la trouva triste et grave,
elle !e reçut comme une personne qui s’attendait à sa visite ; elle écouta
patiemment le récit de sa malheureuse aventure, ses protestations d’a-
mour. mais froide, résignée et presque insensible, elle ne lui dit que
ces mots :
« Il y a du sang, M. Beaumont, entre vous et moi. »
En vain il protesta de son innocence, en vain il prit Dieu à témoin de
ce qui s’était passé, en vain il lui dit que si elle l’aimait, elle ne devait
pas être plus sévère que ses juges.
« L’arrêt de vos juges, lui répondit la jeune fille, pouvait vous coû-
ter la vie, l’opinion de mon père ni la mienne n’ont pas heureusement
ce pouvoir.
« — Vous le croyez ? répondit M. Beaumont; et il quitta le château
pour n’y plus revenir.
a C’est chez mon père le vacher qu’il revint, continua M. Marlin, c’est
notre misérable chaumière qu’il avait choisie pour asile quand on lui
refusa l’entrée du château, il était pâle, décoloré, et il m’attira près de
lui, il m’embrassa, il me remercia, il me bénit, puis il demanda du pa-
pier; j’en allai chercher chez l’épicier du village; il n’y en avait pas dans
notre chaumière. Il écrivit quelques lignes et me dit d’aller les remet-
tre au curé.
« — Je vais aller voir mademoiselle Vallière, » lui dis-je, et je partis.
Je trouvai mademoiselle Vallière seule. Quand je fus devant elle, je
pleurai d’abord, puisje lui dis que M. Beaumont était pâle, malade, qu’il
m’avait embrassé et qu’il m’avait béni; je lui dis combien j’avais eu peur,
— Vendredi dernier est arrivé de Londres par le bateau à vapeur
anglais Soho, un individu, Anglais de naissance, atteint d’aliénation
mentale et n’étant muni d’aucun papier en règle. Il a été arrêté et con-
duit à l’amigo, en le fouillant on a trouvé un pistolet dans une de ses
poches. La police l’a fait reconduire aujourd’hui à bord du même bateau
a vapeur qui le reconduira en Angleterre.
— Depuis quelques jours il.y avait grande rumeur parmi nos mar-
chandes des quatre saisons et les servantes de nos habitants ; le bruit
circulait, que par suite des travaux à exécuter sur toutes nos places pu-
bliques pour les fêtes de Rubens, tous les marchés de légumes devraient
être évacués par les premières qui seraient forcées de se réunir sur
l’Esplanade. On conçoit les courses forcées que feraient quelques-unes
de nos ménagères, demeurant de l’autre côté de la ville. Nous pouvons
les rassurer à cet égard, au moins pour le moment; aucune mesure n’a
encore été prise à cet égard.
— Edward Oxford depuis son acquittement était resté à la prison de
Newgate. Un changement considérable s’est fait dans ses manières. Il
est devenu plus gai, plus communicatif avec le geôlier chargé de le gar-
der à vue. Il a reçu la visite de sa mère, de sa sœur et de ses deux oncles.
11 est entré dans de longs détails sur ce qu’il appelle son équipée, car il
affirme n’avoir chargé qu’à poudre les pistolets qu’il a dirigés sur la
reine d’Angleterre, et n’avoir eu d’autre intention que de faire parler
de lui.
Samedi, sur un ordre du ministère de l’intérieur, Oxford a été conduit
à l’hôpital de Bedlam. Il n’a manifesté aucune émotion en apprenant
cette nouvelle. M. Cope, le gouverneur de la prison, l’a mené lui-méme
dans une voilure déplacé à Bedlam où existe encore Hafield qui a tiré,
il y a quarante ans, au théâtre de Drury-Lane, un coup de pistolet con-
tre Georges III. On avait annoncé à tort la mort de Haiield.
—-„universités de l’état. — nominations. — Par arrêté royal du 21
juillet 1840, le soir A. Timmerman, professeur ordinaire à la faculté des
sciences de l’université de Gand, a été nommé recteur de ladite univer-
sité, pour l’année académique 1840-1841.
Par le même arrêté, le sieur Philippe Lesbroussart, professeur ordi-
naire à la faculté des lettres de l’université de Liège, a été nommé rec-
teur de la dite université, pour la même année académique.
— Ordre de néopoi.D. — Par arrêtés du 20 juillet 1840, le roi, sur le
rapport du ministre des travaux publics et la proposition dli ministre
des affaires étrangères, a nommé chevaliers de l’ordre de Léopold M.
Berzelius, secrétaire de l’académie des sciences à Stockholm, et M. Dé-
siré Nisard, professeur à l’école normale à Paris.
Consulat. — Révocation et démission. — Par arrêtés royaux, le sieur
Henri van Nyvel a été révoqué de ses fonctions de consul à Cowes (île
de Wight), et démissionnaire a été donnée au sieur William van Nyvel
fils, de ses fonctions de vice-consul à la même résidence.
Nos abonnés recevront avec le Précurseur de ce jour, un supplément
contenant les n«* 3, 4, 5 et 6, complétant l’arrêté royal du 19 juillet, ré-
glant le transport des marchandises, etc. sur le chemin de fer.
Nos lettres d’Ostende s’accordent toutes pour se plaindre de la sta-
gnation des affaires maritimes sur cette place, et plusieurs armateurs
prennent leurs dispositions pour transporter leur domicile à Anvers où
ils espèrent trouver plus d’aliment à l’exploitation de leur industrie.
Enseignement «lu Dessin.
(Article communiqué.)
Les carossiers de Bruxelles ont adressé à M. le directeur de l’académie
de dessin de Bruxelles et adressent à la ville une demande pour qu’il
soit ajouté aux cours de l’académie, un cours de dessin et d’ornement
de voitures.
La section des beaux-arts estime que ce cours ne peut que contribuer
à donner de l’éclat à une industrie qui fait honneur à la capitale ; elle
propose donc d’accueillir la demande et d’allouer un traitement de 1000
francs pour le professeur.
Les conclusions de la section sont combattues par M.le président, qui
émet l’opinion que les jeunes gens doivent apprendreàdessiner, et que
lorsqu’ils sauront dessiner, ils pourront appliquer le dessin aux voitu-
res, aux meubles et à tous les genres d’industries. Il n’a jamais eu l’idée
d’apprendre à dessiner uniquement pour les voitures.
La proposition de la section n’est ni adoptée ni rejetée; il est passé à
l’ordre du jour.
D’après le système de M. le président,les fils de charpentiers, maçons,
tapissiers, jardiniers et autres artisans qui fréquentent l’académie pour
pouvoir se perfectionner dans l’état qu’exercent leurs parents auxquels
ils doivent succéder un jour, et qu’ils espèrent surpasser, devraient
perdre à apprendre à dessiner des nez, des pieds et des têtes, un
temps presque toujours pris sur leur plaisir ou leur sommeil. A quoi
servirait-il à un jardinier à bien dessiner d’après la bosse, s’il ne sait pas
tracer le plan d’un parterre ? Quel avantage un tapissier tirerait-il
pour bien drapper des rideaux, de son talent à dessiner d’après na-
ture ?
Nous espérons que M. le digne directeur de notre académie, qui ne
cherche qu’à protéger et encourager les talents naissants profitera de
l’opposition de M. le président du conseil de Bruxelles aux vœux de la
section des beaux-arts, pour organiser à Anvers un cours de dessin et
d’ornement de voitures, alors nos jeunes gens ne devront plus aller
faire leur apprentissage à Bruxelles.
Déjà la ville d’Anvers a fait depuis quelque temps de grands progrès
en fait d’équipage de luxe. Elle possède dans ses murs des fabricants,
tels que Yermild, Leva, Ceurvorst et autres, qui peuvent rivaliser avec
ceux de Brfixelles.
Si l’on forme ici encore quelques bons ouvriers, nous cesserons d’étre
tributaires de la capitale, et la Hollande donnera bientôt la préférence à
Anvers d’où les voitures pou rrontlui arriver sans risque et a bien moins
de frais, par le bateau à vapeur.
Note de la Rédaction. — Le Précurseur s’associe avec empressement
à l’opinion émise par Fauteur de cette note. Le dessin ne peut plus être
considéré aujourd’hui eomme un art d’agrément ou uniquement
comme une introduction à la peinture. Il est donc utile et avantageux
au développement des arts et métiers de créer autant que possible des
cours de Dessin industriel. Un dessinateur d’académie ou de paysage a
beaucoup de facilité, il est vrai, pour appliquer son usage du crayon à
l’ornement, à l’architecture, aux machines, etc., mais ce dernier genre
de dessin est néanmoins un talent spécial et le seul utile pour les diver-
ses professions. Le dessin linéaire et d’ornement doit donc être parti-
culièrement encouragé et protégé.
Nous ne croyons cependant pas, malgré l’importance en Belgique de
la varosserie, quelle mérite un côurs exclusif de dessin,car il tient natu-
rellement au dessin des machines. Ce que nous croyons véritablement
d’abord du marcassin, puis de l’homme tué. Elle me regardait attenti-
vement ; elle me demanda mon âge.... J’avais dix ans de la veille, un
front calme et pur, des yeux doux et qui, sans être hardis, s’arrêtaient
sans embarras sur les yeux qui me regardaient. Quand j’arrivai auprès
d’elle, je pleurais;lorsqu’elle m’eut bien examiné, ce fut elle qui pleura,
« Il dit vrai ! s’écria-t-elle. »
Et me prenant par la main, elle courut en me traînant après elle jus-
qu’au cabinet de son père.
« Mon père, c’est un enfant innocent ; écoutez-le ; ce n’est point un
complice, il dit vrai. »
Elle me (it recommencer mon récit; elle s'appesantissait sur les dé-
tails, nie faisait répéter vingt fois la même chose.
« O mon père ! dit-elle enfin, puisqu’il est innocent, que de torts nous
avons envers lui, et combien nous devons l’aimer davantage ! Cours,
mon enfant, dit-elle, emmène-le. »
Je ne iis qu’un bond du château à la chaumière; il était trop lard :
M. Beaumont n’existait plus ; il s’était empoisonné, il était mort douce-
ment dans les bras de ma mère, qui soutenait sa tète, et ne le croyait
qn'évanoui. Maintenant, M. le vicomte, savez-vous ce que contenait ces
quelques lignes que je devais porter chez le curé, à défaut de notaire,
car il n’y en avait point alors dans notre endroit ? Une donation de tous
ses biens en faveur du petit-fils du vacher, qui avait toujours soutenu
la vérité et proclamé son innocence.
« Je sais bien, écrivait-il, qu’on dira que je paie mon complice; hélas !
Dieu me voit et m’entend; je vais paraître devant lui, il va méjuger....
Non, on ne souillera pas les jeunes années de cet enfant par une accu-
sation impie; je le fais riche, parce que lui seul m’a aimé, lui seul m’a
défendu. »
En effet, M. le vicomte, dès que le malheureux fut mort, personne
ne douta de son innocence; mademoiselle Vallière se voua au célibat, et
vous savez qu’elle a tenu parole; elle fit plus, elle m’adopta, elle géra les
biens nouveaux qui m’étaient laissés par M. Beaumont, et prit soin de
mon éducation. A la mort de son père,elle plaça sa fortune dans ma mai-
son, et ces fonds seront un jour à moi ; je serai son héritier, j’en suis
sûr. Dieu fasse que l’héritage se fasse attendre. Voilà mon histoire, M.le
vicomte; voilà l’homme dont vous recherchez la fille,vous l’aurez àdeux
conditions : la première, c’est que ma fille vous aime ; la seconde, c’est
que je raconterai mon histoire au repas de noces.
» — Accordé, dit le vicomte. » MARC PERRIN. |