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1840. — UT.0 9Aö.
A X.VE RS, I'èhniim'he 2 Août.
Cinquième Aimée.
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LETTRES PAHISIEXXES. (*)
SL.
CORRESPOND AÏS CE PRIVÉE DU PRÉCURSEUR.
Paris, 31 juillet.
Plus de bruit que de besogne. — Prévoyance de M. Tbiers. —
Responsabilité de lord Palmerston. — Solidarité du ministère
Whig. — Triple issue de la difficulté; lu retraite de tord Pul-
merston; 2° retraite du cabinet Whig ; 3° retraite du cabinet
français. — Discussion de ces éventualités. — Caractère de
I esprit public en France. — Les 200 mille blouses bleues.
A la baisse des fonds publics, à l’agitation de la presse, au déluge
des nouvelles belliqueuses, qui ne croirait qu’on est en pleine guerre
et qu’il s’agit d’un J S14 ou d’un 1815 renouvelé? A l’étranger surtout
on parait avoir reçu une commotion très vive, beaucoup trop vive pour
la réalité des faits. Soutirez que je contribue à vous rassurer sur les
conséquences immédiales de ce qui se passe.
M. Thiers et ses confidents se sont toujours attendus à la demi-rup-
ture qui vient d’éclater entre la France et l’Angleterre. M. Thiers a
hérité de M. de Talleyrand la sagacité, la portée du coup-d’œil. Il a de
moins la maturité de l’expérience, et de plus une promptitude de déci-
sion que les adversaires qualifient d étourderie et de témérité. II n'en
est pas moins vrai que le discours qu’il prononça à la tribune, dans la
discussion des affaires d Orient, est un monument de prévoyance et
d’adresse on ne peut plus remarquable. Toutes les éventualités y ont
été indiquées, et l’orateur n'a pas craint de dévoiler d’avance quel serait
son plan de conduite relativement à chacune d’elles; de sorte qu’il ne
fait autre chose aujourd’hui que mettre en pratique ce qu’il a admis
en théorie. Celte conduite donne à la position du gouvernement fran-
çais un mérite de franchise qui est fort rare en matière de conflits di-
plomatiques.
Lord Palmerston ayant justifié de point en point toutes les prévi-
sions du ministre des Tuileries , et ayant été obligé de forcer la main
à ses collègues pour leur faire adopter sa politique, il résulte de là que
toute la responsabilité de la situation et des événements à venir pèse
sur lui seul. Or, le caractère de lord Palmerston a toujours déplu à ses
collègues. Il est vaniteux, passionné, léger comme il n est pas permis
à un Anglais de l’être. De plus, il n’est pas un franc Whig. 11 a servi
dans les rangs des tories avant d'être ministre de la réforme. Tout ce
qu’on peut dire de plus favorableàses précédents politiques, c’est qu'il
manque de principes et d’opinion, ce qui est abuser du privilège des
diplomates.
Dans la responsabilité de lord Palmerston peut se trouver le remède
aux embarras qu’il a créés. Depuis long temps sa politique gèue, en-
trave,contrarie et compromet le cabinet Whig tout entier. La faiblesse
de ce cabinet qui n’a que 10 à 15 voix de majorité dans les communes,
ne lui a pas permis de se modifier, et tout récemment quand lord Pal-
mersion a menacé de sa démission, la crainte d’une crise ministérielle
a suffi pour rallier ses collègues à une marche politique que leur bon
sens désavoue. Ils ont pensé, d’ailleurs, que c’était le cas de laisser ce
ministre infatué se compromettre personnellement vis-à-vis du pays et
de la France, et que sa chute méritée deviendrait le gage de la paix et
de la réconciliation.
II faut le dire; en France aussi l’on compte de cette manière. Lord
Palmerston y est le bouc émissaire que l’on charge de toulesdes iniqui-
tés politiques du moment, et dont le sacrifice est demandé, attendu,
exigé, comme œuvre expiatoire et indispensable au salut du monde. Je
parle ici des exigences du public. Quant au gouvernement, son plan est
de déployer une grande ardeur de dévouement aux idées libérales dont
il connaît toute la puissance, bien qu’il n’ait pas voulu en user en
d’autres temps. Il tirera profit des témérités de la presse libre, les sta-
tistiques qui récapitulent avec complaisance les forces de terre et de
mer, les ressources financières et les richesses inépuisables de laFrance.
Il se réserve de désavouer, au besoin, tout ce qui peut paraître une
menace dans cet étalage. En attendant, l’esprit public s’enflamme, les
hommes de bonne volonté se produisent, les hostilités des agitateurs
démocrates s’apaisent, parce que ces hommes entrevoient dans une
guerre prochaine un aliment pour leur énergie et une voie pour leur
ambition.
O Voir le Précurseur du 25 juillet.
FEUILLETON.
EE FIES E5ë.: VACESEK.
, * 11 Ainsi donc, monsieur, dit le jeune et élégant vicomte de Mircourt
a M. Martin, l’un des plus riches manufacturiers de ia Brie, vous êtes le
fils d’un vacher ?
» — Oui, M. le vicomte, le neuvième enfant d’un vacher.
« — tes troupeaux de M. votre père devaient être plus nombreux
que ceux d’Abraham et de Jacob. Combien avait-il de centaines de va-
ches ?
» — Pas une seule ; il gardait celles des autres. Î1 n’a jamais eu que
celles que je lui ai données.
» — Vous avez donc commencé avec rien, comme on dit ?
,11 — Au contraire, j’ai commencé avec quatre cent mille francs. Oh !
c’est une histoire fatale, où, d’un seul mot, moi, enfant, j’ai causé ia
mort de deux hommes, et j’ai ravi à une seule jeune hile son fiancé, son
amant et son cousin. Ce seul mot, M. le vicomte, que je me reprocherais
toute ma vie si je ne l'avais pas dit avec bonne foi, ce seul mot a fait ma
lortune. »
M. le vicomte de Mircourt courtisait la fille unique de M. Martin, et le
souvenir de ses ancêtres nel’arrètaitnullementdans la riche mésalliance
qu’il projetait, mais il n’en fut que plus curieux de connaître l’histoire
de son futur beau-père. Celui-ci, assis auprès du feu, était dans un cie
ces moments où l’âme s’épanche volontiers; fier de sa roture, il ne don-
nait la main qu’avec peine au mariage de sa fil le dont il répugnait à faire
une vicomtesse; il n’en conta que plus volontiers son histoire.
« Je suis né dans la Brie, dit-il, et à cent pas de notre chaumière, il y
avait un château habité par un riche négociant nommé Vallière, dont
la jeune fille devait épouser un parisien, homme de 40 ans, qu’elle n’ai-
mait pas. Un petit cousin sans fortune que M. Vallière avait recueilli
chez lui, avait tout l’amour de la jeune fille; c’est toujours ainsi dans le
monde, m’allez-vous dire, mais patience, le sus donner aux choses un
cours inattendu.
>' — Vous devîntes amoureux de mademoiselle Vallière ? demanda
le vicomte.
» — Moi ! monsieur, un pauvre vacher, âgé de dix ans! A quoi pen-
sez-vous donc ?
Tout ce mouvement, toute cette turbulence calculée chez les uns,
spontanée chez les autres, peut présager de grands troubles en Europe,
et particulièrement en Angleterre. Les ministres whigs y regarderont
à deux fois avant d’y donner les mains, et peut-être leur faiblesse
changeant d'objet, ira t-elle jusqu’à sacrifier leur imprudent collègue
sur l’autel de la paix. Alors tout rentrera dans l’ordre que ce dernier
vient de troubler, et une transaction interviendra dans laquelle la
France abandonnera, s’il le faut, quelques-uns des droits de Méhémet-
Ali, pour sauver les autres.
Mais, si les whigs, trop engagés, persistent à marcher dans le sens
de lord Palmerston, que fera-t-on, direz-vous? On fera ce que M.
Thiers a indiqué dans son discours, où tout est prévu. On cessera de
soutenir les whigs, et comme la guerre Européenne est fort impopu-
laire en Angleterre, les whigs abandonnés par laFrance tomberont,
et feront place à un ministère tory modéré depuis long-temps dé-
signé. Après tout, les whigs qu’ont-ils fait pour la réforme libérale,
depuis 3 ou 4 ans? Rien, absolument rien, ils ont, au contraire décou-
ragé, amorti l’esprit public, et ajourné par impuissance des réformes
que les tories seront forcés de réaliser par besoin de se populariser.
C’est ce que M. Thiers a parfaitement laissé entrevoir quand il a dis-
cuté, devant la chambre, les chances de l'avénement d'un cabi-
net tory, et quand il a dit que cela ne l'effrayait pas et qu’il y aurait
moyen de s’entendre avec ce cabinet. MM. Peel et Stanley sont assuré-
ment de Cet avis, Mais s’ils étaient hostiles, il y a un troisième parti
qui prendrait leur place, au risque de né pas ia garder long-temps;
c'est le parti radical. De toutes les manières, il est certain que l’action,
l’on peut dire incendiaire, de la France,exercerait une influence puis-
sante sur les affaires intérieures de l’Angleterre comme du continent.
C’est ce qui doit rassurer les esprits raisonnables relativement à la
conservation de la paix. Il y a, comme vous le voyez, plus d’une issue
aux difficultés que vient de créer la politique égoïste de lord Paimer-
ston. Il y en aurait encore une dernière, dans le cas où la guerre géné-
rale apparaîtrait avec un caractère de coalition et d’invasion qui pour-
rait faire craindre des désastres semblables à ceux de 1815. Ce serait
la retraite du ministère du 1er mars. A la vérité rien n’est moins pro-
bable en ce moment. Le roi Louis Philippe témoigne autant d’indigna-
tion que ses ministres contre la conduite folie de lord Palmerston.
Il approuve toutes les mesures de précaution décidées dans son conseil,
il va au-devant des sacrifices d’hommes et d’argent, et celte con-
duite lui concilie singulièrement certains esprits qui ont toujours vou-
lu que sa royauté reçût le baptême de la guerre pour devenir légitime
à leurs yeux. Mais ces dispositions peuvent ne pas durer; elles peu-
vent céder devant un danger imminent. Enfin le ministère du lr mars
peut, dans un moment donné, songer à une retraite volontaire pour
résoudre pacifiquement une situation trop compromise. Néanmoins,
au point où en sont les choses, il ne peut être aucunement question de
cette issue que je ne vous signale qu’afin de vous faire voir qu’on a
poussé la prévoyance jusqu’à ses dernières limites.
Maintenant que vous savez à quoi vous en tenir sur le fond du
mouvement belliqueux qui agite la France, je dois ajouter que dans la
forme ce mouvement est très remarquable. Ce n’est pas la furia
Francese, ce ne sont pas des cris, de l’emportement, de l'enthousias-
me, c'esl un mélange de satisfaction guerrière, d'orgueil patriotique,
d’espoir conquérant. Venger le désastre de Waterloo, reprendre les
frontières du Rhin , soulever l’Italie , l'Allemagne, la Pologne contre
leurs gouvernements absolus, voilà quels sont les vœux qu'on entend
exprimer dans le peuple, non pas avec bruit, mais avec une détermi-
nation calme et une énergie sombre qui font vraiment réfléchir, car
cela n’est pas naturel dans ce peuple ordinairement si inflammable.
On a pu juger de cet esprit nouveau qui l’anime à l’occasion de la
cérémonie populaire du 28. Le monument de la Rastile a été visité
processionnellement par 200 mille hommes au moins. L’œil était fa-
tigué de les nombrer et de voir les masses de blouses bleues se dé-
rouler autour de la colonne. Parmi celte immense foule, pas un cri
bruyant ne s’est élevé. Niais, en approchant, tète découverte, du mo-
nument funéraire, elle faisait entendre un murmure sourd où l’on
distinguait ces mots : Vive la France! A bas la Sainte-Alliance!
Laissons M. de Brunow et lord Palmerston méditer sur ce pronostic
grave et sévère, et qu’ils se rappellent que la Francea 1,500 mille gardes
nationaux dont 8 à 900 mille sont armés et exercés, et que tous ces
hommes partagent les sentiments des blouses bleues.
Les fêles de Juillet se sont passées avec le plus grand ordre; l’atti—
ii — Pardon ! pardon ! cette demoiselle Vallière et la vieille demoiselle
du même nom qui a des fonds si considérables dans votre maison,sont
deux personnes différentes?
n — Du tout, M. le vicomte. Le cousin aimé s’appelait Beaumont, et
quand le mariage de la jeune fille fut décidé, M. Beaumont alla se jeter
aux pieds du père, et là il parla de son amour, il parla de l’amour île sa
cousine ; il pria, il supplia, mais le tout en vain : M. Vallière lui fit com-
prendre qu’il n’avait rien, et que lui ne pouvait pas donner sa fille à un
homme sans fortune.
a — Votre amour, lui dit-il, est une ingratitude envers moi, qui vous
ai nourri, élevé; vous n’aurez pas ma fille, et c’est à vous de voir si vous
voulez renoncer à vos projets, et me promettre de ne pas détourner ma
fille de l’obéissance qu’elle me doit ; en ce cas, vous pouvez demeurer
auprès de moi, vous serez traité comme auparavant; si vous refusez de
prendre cette obligation, les portes du château sont ouvertes : allez.»
Le pauvre jeune homme n’avait point d’asile que chez une vieille pa-
rente avare qui ne l’aurait pas reçu, quoiqu’elle fût fort riche et sans
enfants; il renferma sa douleur dans son coeur et il demeura. J’étais le
favori de M. Beaumont, il m’aimait, il avait toujours en réserve de pe-
tites pièces blanches qu’il medonnait toutes les fois qu’il me rencontrait.
De mon côté, je le quittais le moins que je pouvais, je le suivais à la
chasse, je rabattais pour lui, toujours prêt à faire ses commissions, à
porter sa poudre, son plomb, sa chasse ou son fusil. Cependant M. Le-
noir, le mari de Paris, était arrivé; c’était, comme je vous l’ai dit. un
homme de quarante ans; il me semble le voir encore, la taille élevée, le
visage brun, les favoris noirs. Vous dire quelles relations s’établirent
entre mademoiselle Vallière, M. Lenoir et M. Beaumont me serait im-
possible; tout ce que je sais, c’est que le mariage fut fixé au 15 septem-
bre et qu’on organisa au château une grande partie de chasse pour le
14. Le matin, à peine le jour était venu que M. Beaumont courut chez
M. Vallière. .
<i Mon cher parent, lui dit-il, en lui montrant une lettre qu’il venait
de recevoir, je suis heureux, je suis riche, j’ai vingt mille livres de rente,
tenez, lisez vous-mème; noire cousine, madame d’Arbois, vient <4 mou-
rir : elle me nomme son unique héritier.
M. Vallière lut la lettre qu’on lui donnait, et il la rendit froidement à
son parent. ,
« Oui, lui dit-il, vous voilà riche, recevez-en mes compliments ; mais
il est trop tard, je ne puis pas retirer la parole que j’ai donnée à M.
tude belliqueuse du gouvernement, qui flaite singulièrement l'orgueil
national, a beaucoup contribué à maintenir les esprits turbulents et à
éloigner loule pensée de troubles el de révolte. Si les gouvernements
étrangers savaient à quel point ce peuple est avide de se ruer sur
l'Europe et de la mettre, en feu, et quels efforts il a fallu pour le conte-
nir depuis dix ans. ils y regarderaient à deux fois avant de risquer
une guerre dont les inconvénients pour eux sont certains, et dont l'issue
ne saurait se prévoir.
Je finis, comme j’ai commencé, et je répété qu’il ne s’agit pas.jusqu’à
nouvel ordre, d’une lutte armée entre les étals Européens, niais bien
d une lutte ardente mais pacifique entre les cabinets de Londres el de
Paris. Chacun espère en finir par la chute de l’autre. 1! ne peut y
avoir de danger pour la paix qu’autant que cette lutte se prolonge, et
que les médiateurs naturels s’y fassent acteurs passionnés. En atten-
dant, les choses ne sont pas si avancées qu’on pourrait le croire. La
convention de Londres n’est qu’à l’état d'embryon. Pour être un traité
consommé il faut quelle soit ratifiée expressément par les cabinets
contractants, et ceux-ci peuvent revenir sur les stipulations consenties
par leurs représentants. D’un autre côté les réclamations et les protes-
tations de la France ne peuvent être mises de côté. « On a pu lui ca-
cher les préliminaires de la convention, mais aujourd’hui qu elle sait
tout, on lui doit compte de ce qu’on a fait sans elle el contre elle. Vous
avez donc bien fait de dire :« rien n’est fini, tout commence. »
AISGEETEISRE.
Londres, 30 juillet. — Le duc de Cambridge, accompagné dès prin-
cesses Augnsta et Mary de Cambridge, ont rendu visite hier à la Reine
au palais Buckingham, pour prendre congé de S. M. avant leur départ
pour le continent.
Le duc et la duchesse de Nemours se proposent de partir vendredi dé
Brighton pour le continent. LL. AA. RR. ont loué le paquebot Dart qui
les transportera à Dieppe, d’où elles se rendront directement à En. Elles
ont déjà pris congé de la Reine et de la famille royale.
— Le Globe annonce d’une manière positive que la prorogation du
Parlement aura lieu le 11 et non le 13 août.
— Le général Espartero vient d’être honoré de ia grand’eroix de l’or-
dre du Bain.
— M"'" Mason a été choisie comme garde de la Reine Victoria pendant
ses couches. Elle recevra 31)0 liv. sterl. (7,500 fr.) pour le mois, et de plus,
une liv. sterl. (25 fr.) par jour tout le temps qui suivra le premier mois.
Elle aura deux gardes sous ses ordres. Jl“ Mason doit cette faveur à la
recommandation de la duchesse de Bedfort.
— La plus grande détresse règne en ce moment parmi les gens de la
campagne à l'Ouest de l’Irlande et principalement dans les comtés de
Galway et de Mayo. Plusieurs seigneurs ont alloué des sommes consi-
dérables pour remédier à ce triste état de choses. Heureusement que
les prix des vivres commencent à baisser sur les marchés. (Globe.)
— M. Collins a fait dans Birmingham une entrée triomphale. Plus de
100,000 personnes étaient accourues pour voir défiler le cortège. M.
Collinsa harangué la multitude, exprimant tout le bonheur qu’il éprou-
vait à respirer l’air delà liberté au milieu de nombreux amis. Les au-
torités avaient pris des précautions et les troupes avaient été consi-
gnées, mais il n'a pas été besoin de recourir à la force armée. Un grand
banqueta eu lieu dans un vaste terrain de Loveday-street; 800 convi-
ves y assistaient, c’étaient des ouvriers; les toasts suivantsont été por-
tés : A la souveraineté nationale ! La reine, ses droits et rien de plus!
Le peuple, ses droits et rien de moins ! La charte et rien de moins,
quoique nos prisons regorgent de victimes ! La délivrance de M. Frost !
La mise en liberté de tous les prisonniers chartistes ! La glorieuse révo-
lution de 1850 ! Tout s'est passé dans te plus grand ordre. La commission
du banquet s'était concertée avec le commissaire de police; elle en
avait reçu l’assurance que si tout se passait bien, il n’y aurait pas in-
tervention de la police. (Moming Chronicle.)
FRANCE.
Paris, 31 juillet. — Des lettres écrites dé Londres par une personne
très haut placée dans la diplomatie et reçues aujourd’hui annoncent
que loin de diminuer, l’aigreur augmenté entre les deux cabinets an-
glais et français.
— M. le comte Walewsky vient de partir pour Alexandrie. On ledit
chargé par M. Thiers d’une mission secrète auprès du pacha d’Egypte.
— Une dépêphe télégraphique, datée de Perpignan, le 28 juillet 1840,
à 9 heures du matin, porte :
« Depuis le 22, Tordre n’a pas été troublé à Bareelonnc.
« Le 20, l’ambassadeur de France a présenté à la reine ses lettres de
créance.»
— Une lettre de Vienne porté que ta querelle récente du comte de
Mensdorf a eu lieu avec le jeune duc de Blacas, et nullement avec un
membre de l’ambassade française.
Lenoir, il épousera ma fille. »
M. Beaumont eut encore recours aux prières, au supplications; tout
fut inutile. Bien plus. Si. Vallière exigea que la nouvelle de la mort dé
madame d’Arbois fût tenue secrète et qu’aucun deuil ne vint troubler
la noce du lendemain.
« Je vous défends de rien apprendre à ma fille, lui dit-il, et vous prié
de vouloir bien ne prendre le deuil que dans trois jours, n
SI. de Beaumont ne tint pas compte de Tordre, il obéit seulement à là
prière; il courut chez sa cousine.
« Sla chère Hortense, lui dit-il, l’obstacle qui nous séparait n’existe
plus ; je suis riche, et, malgré cela, votre père veut tenir sa parole en-
vers SI. Lenoir, c’est-à-dire qu’il veut vous sacrifier et vous donner à un
homme que vous n’aimez pas. Unissez vos efforts aux miens, donnez-
moi du temps, un jour, deux, la semaine, ce n’est pas long; feignez d’ê-
tre malade, s’il le faut; adressez-vous à M. Lenoir lui-même pour obtenir
quelque répit; je verrai les amis de votre pèré, je' ferai agir les miens,
et, sans doute, nous viendrons à bout de changer la résolution de M.
Vallière, surtout si vous avez le courage de montrer toute la répugnance
que vous inspire M. Lenoir.
Il parait que, dans cette entrevue, M. Beaumont so laissa aller à quel-
«ues menaces contre Son rival. Mademoiselle Vallière prbmit tout, et
son amant alla rejoindre lés chasseurs, à la tête desquels étaient déjà M.
Lenoir et M. Vallière lui-même. Je n’avais garde de manquer une si
belle occasion ; je joignis M. Beaumont dans la cour, et je m’attachai à.
ses pas. L’histoire que je voué raconte, M. îe vicomte, a aujourd’hui 4<r
ans; eh bien ! les moindres détails de cette malheureuse journée, me
sont aussi présents que s’ils s’étaiënt passés hier ; si j’étais sur les lieux,
je pourrais marquer tùus mes pas, je me souviens de toutes mes paroles,
de tous les pas, de tous les gestes de M. Beaumont. U suivit d’abord la
chasse, puis il prit un petit sentier à gauche du ehemin et je le suivis.
Il marcha ainsi longtemps, la tête penchée sur sa poitrine et le fusil sur
l’épaùte ; nous entendions les coups des chasseurs, et moi, quand je
voyais quelque gibier à notre portée, je criais, selon mon habitude :
n Ùn lièvre, monsieur. Monsieur; gare à vous ; votre chien est en ar-
rêt. a
î! ne tirait pas, il marchait toujours ; enfin, je vis s’abattre une com-
pagnie de perdrix, je la signalai aussitôt à M. Beaumont. Son chien la
| fit lever ; il tira ; lui, qui était bon chasseur, manqua un des plus beaux
1 coups possibles ; toutes les perdrix échappèrent. |