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1813. - JS.o 10.
AUTWÆHS, Manti 10 Jamici* 1.
(ISiiiÜèiuc Aimée.)
LE PRÉdJRSEL
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du PRECURSEUR, Bourse Anglaise
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PAIX. — LIBERTÉ. — PROGRÈS.
fi O Janvier.
COffSElL COlVIMIJjllL.
séance du 9 junvlcr.
Aussitôt après la lecture du procès-verbal de la séance pré-
cédente, Al. le secrétaire donne lecture :
1° De l'arrêté royal en date du 28 décembre par lequel M.
Gérard Legrelle est continué dans ses fonctions de bourgmestre
de la ville d’Anvers, ainsi que du procès-verbal de la prestation
de son serment entre les mains de Al. le gouverneur ;
2° De l’arrêté royal qui continue dans leurs fonctions S1M. les
échevins Van Pelt, Loos et de Backer ;
3° Dn procès-verbal des élections communales.
MM. les échevins, les conseillers réélus et les nouveaux mem-
bres du Conseil, prêtent ensuite le serment prescrit par la con-
stitution.
Al. Hermans propose devoter au nom du Conseil Communal
des remercimeuts aux conseillers sortants et de leur adresser
individuellement un extrait du procès-verbal, contenant l'ex-
pression de gratitude de l’assemblée pour les services qu'ils ont
rendus à la ville. — Cette proposition est adoptée à l'unanimité.
Al. le président donne lecture de la décision du Conseil Pro-
vincial, qui approuve le budget de 1843.
Les conclusions favorables de la commission chargée de l’exa-
men du cahier des charges pour la construction d’une caserne
d’artillerie sont adoptées, après une courte discussion sur quel-
ques détails du plan général.
On renvoie devant une commission, une demande de con-
struction, faite par la fabrique de l’église de St.-André.
La liste des enfants pauvres qui doivent recevoir l’instruction
gratuite pendant 1843, est arrêtée.
On approuve le rôle supplémentaire de la taxe des chiens.
La séance publique est levée et le Conseil continue ses déli-
bérations à huis-clos.
PRUSSE ET IiE NTSTÈME PROIUIUTIF.
— Premier article. —
Nous l’avons dit plus d’une fois : la Prusse actuelle offre aux
yeux des nations européennes, aussi bien sous le rapport poli-
tique que sous le rapport commercial et industriel, un specta-
cle permanent dont l’intérêt s’augmente graduellement. Les
laits qui se passent aujourd'hui de l’autre côté du Rhin, sont de
nature à préoccuper tous les gouvernements, et ce qui plus est,
à servir d’exemple à plus d’un d’entre eux La constitution du
Zollverein, entre autres, qui est l’œuvre de la Prusse, restera
comme un monument colossal de la politique éclairée de cette
puissance, et comme une protestation éclatante contre cet es-
prit étroit, mesquin, sorti de la coalition de quelques intérêts
privés, et qui cherche à faire prévaloir son système inepte par-
mi les peuples travailleurs.
On aura beau scruter la pensée du gouvernement prussien ;
on aura beau mettre au creuset les principes de sa conduite
politique et commerciale; il est une chose que l’on ne saurait
nier : c’est que la marche de cette monarchie est toute progres-
sive, bien entendu dans le sens véritablement rationnel, et
qu’elle obéit aux lois de la civilisation, mais sagement, mais
prudemment. Nous n’en voulons pour preuve que l’ascendant
acquis, à l’heure qu’il est, par la Prusse dans la balance des in-
térêts européens.Cet ascendant n’est ni vain, ni bruyant; il est
fort, positif.
Voyez l’autorité du Zollverein! La position qu’il occupe dans
le monde commercial est toute tracée et, disons-le, toute puis-
sante. Ses tendances et ses décisions éveillent leplus vif intérêt,
parce que l’Europe voit s’avancer le moment où l’influence de
cette vaste association réagira d’une manière sensible sur ses
intérêts matériels. C’est surtout en parlant de ce point de vue
FEUILLETON DU PRÉCURSEUR.
THÉÂTRE ROYAL.
le baiser LaraoureUc. — UCKSCi: BORGIA. — LE VOYAGE A
POVroiSE, comédie eu trois actes, de iVI9I. Uiistnve Vnëz et
Alphonse noyer.
Après bien des vicissitudes, la scène a repris ses jeux. Grèce à mon-
sieur Nicodème,ainsi qu'à monsieur Chrysostôme,le théâtre a fait dispa-
raître son visage de bois et s’est montré bien vite dans tout l’éclat de ses
oripeaux. Espérons qu’il ne lui prendra plus fantaisie de retourner à sa
position morose. C’est si triste de se voirbaloltéau milieu de toutes
sortes de turlupinades qui n’ont par elles mêmes absolument rien de
récréatif, qui vous découragent le public, et qui vous mettent quelques
douzaines d’artistes sur les dents! Maintenant, à moins qu'uneaéro-
lithe ne vienne déranger l’équilibrequi a été rétabli, tout ira bien jus-
qu’à la fin de l’année théâtrale. Ce résultat, tout naturel qu’il vous pa-
raisse, n’a pas été obtenu sans peine, je vous le jure!
On sait la crise qui est survenue, il y a un peu plus de huit jours, par
suite de la décision prise par les artistes de ne plus reparaître sur la
scène avant d’être fixés sur leur position vis-à-vis de M. Francis-Cornu.
Pas d’argent, pas de suisse! vous connaissez cela. C’est tout naturel.
Aussi nul n’a pu blâmer raisonnablement les artistes d’avoir refusé leur
concours à celui qui avait fini par dire : —Nenni! —quand il s’agissait de
soulever le couvercle du trésor. Outre le dommage qui résultait néces-
sairement pour les intéressés de cet état de choses, les plaisirs du public
se trouvaient forcément suspendus. Heureusement, des personnes in-
lluentes ont bien voulu remplir l'office de médiateur; des pourparlers,
«les négociations très actives ont eu lieu, et tout le monde a fini par s’en-
tendre. bien entendu sous la réserve de certaines conditions.
Maintenant, les arüsles sont réunis en société sous la direction no-
minale de M. Francis-Cornu. Une commission de trois membres, choi-
sis parmi les artistes, ont droit de contrôle sur tous les actes de l’admi-
nistration. M. Francis-Cornu est descendu des hauteurs delà royauté
absolue, au rôle plus modeste de monarque constitutionnel. Qu’il le
conserve jusqu’à la fin de la campagne : — ce sera un autre règne de
cent jours!
Le spectacle a repris vendredi dernier par la Favorite et Indianaet
Charlemagne. Pendant tout l’opéra, k«s artistes semblaient contraints,
mal à leur aise, sous le poids de quelque chose d’indéfinissable «pii ailli-
geait. Le public, de son côté, paraissait bien maussade, d’une humeur
bien spleenétique.Cette double disposition a,sans doute, réagi surla re-
présentation, car elle était divertissante comme la face d’un pendu. Ce
«est que le dimanche suivant, que la confiance s’esl réciproquement
rétablie. Cependant, pour ne rien passer sous silence, il faut vous dire
«|ue le vaudeville un peu grivois de M. Bayard,a eu le talent de jeter un
petit rire dans la salle, un deces rires brusques, galvaniques,tranchants,
que l’exposé de principes économiques, adressé par le gouver-
nement prussien au congrès douanier de Stuttgardt, et que le
Précurseur a publié dans son numéro du 8 janvier, mérite d’ê-
tre pris en sérieuse considération. Pour que nos lecteurs com-
prennent bien toute la portée de cet important document, nous
donnerons ici un léger aperçu descausesqui ont provoqué celte
détermination officielle de la part du gouvernement prussien.
La législation prussienne de 1818, très modérée, très libérale
même dans son expression, a servi de base au tarif du Zollve-
rein. La Prusse, comme fondatrice eten quelque sorte le chef
de l’union douanière allemande, a conservé «ne influence mar-
quée sur celle-ci, quoique différents Etats en fassent partie in-
tégrante. Cette influence toute naturelle, a permis à la Prusse
de maintenir à peu de choses près, le tarif du Zollverein à la
hauteur des principes libéraux de son institution primitive. Ce-
pendant, les progrès récents de l’industrie allemande, ont
donné naissance à des manifestations contraires à l’esprit delà
législation existante dn Zollverein. Ces manifestations prove-
naient principalement des industriels des Etats du Sud, lesquels
ayant à combattre à l’intérieur, la concurrence étrangère, se
sont insurgés et ont demandé à grands cris la libre exploitation
du marché national. On voulait la prohibition des produits si-
milaires de l’étranger, ou, ce qui revient au même, on récla-
mait une augmentation de tarif qui équivalait à une bonne et
complète mesure prohibitive.
L’intérêt particulier qui est tenace de sa nature et, par con-
séquent, persévérant dans ses réclamations, a, malgré les re-
présentations les plus conciliantes, continué la lutte contre les
intérêts généraux du Zollverein. Il est parvenu enfin à susciter
une opposition assez forte dans le sein de l’Union elle-même,
opposition qui ne vise à rien moins qu’au renversement du
système maintenu jusqu’à ce jour par la Prusse, puissamment
secondée en ceci par la Bavière.
Le Congrès douanier réuni à Stultgardt, était naturellement
appelé à servir de terrain où cette opposition, représentée par
les délégués de Saxe, de Bade et de Wurtemberg, devait for-
muler ses récriminations.
Dans ce conflit d’intérêts divergeants, la presse allemande,
comme on le pense bien, ne pouvait rester indifférente : quel-
ques-uns de ses organes, égarés ou soudoyés par la coalition
qui s'agitait sous le drapeau d’un étroit mercantilisme, prirent
fait et cause pour elle, et accusèrent hautement le gouverne-
ment prussien de sacrifier les intérêts du Zollverein à ceux de
l’étranger et surtout de l’Angleterre. Pareilles accusations sont
parties du sein du Congrès de Stuttgardt, en s’appuyant sur la
prétendue nécessité pour la Prusse de favoriser les intérêts de
la Grande-Bretagne, d’un côté, parce qu’elle tendrait à s’en
faire un allié politique, et de l’autre, parce que son égoïsme
commercial ne songerait qu’à se débarrasser chez celte nation
de ses bois et de ses céréales. Eh bien ! malgré toutes les cla-
meurs, malgré toutes les agitations, mises en œuvre pour cul-
buter le système libéral qui a guidé jusqu’ici le Zollverein,
toutes les propositions ayant une tendance prohibitive ont été
rejetées, en principe, parle Congrès douanier de Stuttgardt.
Ces modifications qui ont eu lieu, n’allèrent en l ien les bases
du tarif.
Cet état de choses n’a pas empêché le gouvernement prussien
d’adresser une note au Congrès de Stultgardt, dans le but d’ex-
pliquer aux populations du Zollverein, l’unique et invariable
pensée qui l’anime, et de se disculper à leurs yeux des violents
et injustes reproches qui lui avaient été adressés à l’égard de
sa politique commerciale.
Le manifeste du gouvernement prussien est significatif. C’est
une profession de foi économique qui ne peut laisser aucun
doute sur ses intentions. La Prusse le déclare hautement et
franchement : — Elle est hostile, par système, à toute idée de
qui franchissent au galop le larynx surpris. — Mad. Poppe et M. Neveu
I ont joué Jndiana el Charlemagne avec une désinvolture de poses etde
gestes tout-à-fait Palais-Royal, comme il convient de jouer ces sortes
de pochades. S’il fallait lésiner sur les détails qui demandent du relief, il
vaudrait mieux, selon nous, laisser toule la pièce tranquillement de-
bout sur les rayons du bibliothécaire du théâtre.
Lucrèce Borgia et le Voyage à Pontoise avaient attiré un auditoireas-
sez nombreux! L’opéra a été représenté avec un ensemble qui formait
un joli pendant avec Lucie de Lammermoor. — Lucrèce renferme,quoi-
qu’on en dise, de bien belles parties. A part les souvenirs qui viennent
vous assaillir presque à chaque instant, des souvenirs d’une vivacité
inouie, il est des passages qui ont un mérite incontestable d’originalité.
Telle est, par exemple, la slrelte au commencement du premier acte,
dont le motif est plein d’animation el le rhylhme plein de franchise. Tel
est encore le finale du premier acte, morceau d’une facture largeet ha-
bilement conduite,d’une harmonieuseénergie et rendant parfaitement le
sens âpre de la situation dramatique. Nous citerons encore le beau trio
du deuxième acte commed’un effet saisissant par l’heureuse disposition
des voix qu’on ya ménagée. Viennenlensuile les délicieux couplets du
dernier acte, chantés pur Orsini, dans lesquels respire une mélodie
pleine de fraîcheur et de verve. Le caractère général de Lucrèce est
animé sans rien perdre de sa force dramatique.
Mme Dorsan chante le rôle de Lucrèce avec beaucoup de passion et
d’énergie. Plus tard, quand sa belle voix aura reçu plus de développe-
ments, elle chanlera ce rôle difficile et long avec "une remarquable dis-
tinction.Mnle Dorsan ne possède pas encore assez l’intelligence de la scè-
ne pour nerien laisser a désirer dans plusieurs parties de son jeu. Le
temps qui est un grand maître, la volonté et la patience aidant, il est à
présumer que cette artiste saura mettre à profit ses incessantes leçons.
En attendant que M« Dorsan soit placée au rang où l’appellent un jour
les moyens dont la nature l’a douée, le public Anversois en a fait son
enfant chéri 11 lui prodigue les applaudissements enguisede bonsbons.
M. Grosseth a déployé pendant toute la soirée un talent vraiment re-
marquable,surtout comme chanteur.Il sait être tour-à-lour chaleureux
et sensible, emporté par les élans de la joie et accablé par une morne
tristesse. Le sentiment, l'âme dominent toujours chez cet artiste ,
et le rôle de Gennaro est un de ceux où il se produit avec le plus d’a-
vantages. — M. fiommy est fort beau de tenue, et le rôle d’Orsini est
marqué d’un entraînement qui rentre bien dans l'esprit du personnage.
— Le rôle du duc de Ferrare est rempli par M. l’oppe qui sait s'en tirer
avec honneur.il y a chez lui une puissance vocale plutôt âpre que moel-
leuse, à laquelle certains rôles de son emploi, tels que Marcel, Bertraui
et autres,empruntent souvent des edels très dramatiques et très vrais;
mais qui n’est pas également favorable à d’autres rôles lesquels.comme
celui d’Alphonse d’Est, par exemple, ne peuvent que se relever à l’aide
d’une teinte gracieuse. Cette observation n'altère en rien les éloges que
nous avons à donnera M. Poppe. lia très bien chanté la cavalinedti
I deuxième acte, et le public a eu tort, ce nous semble, de ne pas avoir
J suffisamment encouragé, après ce morceau, les efforts de l’artiste.
prohibition ; — elle repoussera toujours avec énergie toute
tentative d’isoler le Zollverein des autres peuples travailleurs;
— elle ne souffrira jamais que la concurrence étrangère soit
écartée, premièrement, parce que ce serait exposer l’industrie
nationale à des crises inévitables et désastreuses, et seconde-
ment, parce que les consommateurs ne doivent pas être mis à
la merci d'un odieux monopole ; — elle veut maintenir, autant
que possible, l’équilibre entre la production et la consomma-
tion, parce que les intérêts de l’une et de l’autre lui sont éga-
lement chers ; — et finalement, elle n’entend pas, par des me-
sures exclusives et, ce qui plus est, parfaitement inopportunes,
s’attirer 1 inimitié des nations étrangères.
Le droit de visite est encore aujourd’hui le sujet des
réflexions de quelques-uns des journaux de Paris. — Le
Commerce reproche aux journaux ministériels d’essayer d’obte-
nir ce qu ils désirent à ce sujet par l'intimidation dont ils usent
en pareil cas; mais il penseque, pour qui veulse donner la peine
d’examiner l’état des choses, il est impossible de n’être pas
convaincu que la guerre que l’Angleterre semble disposée a
soulever,ue pourrait avoir lieu qu’au grand détriment de celle
puissance. Qu’il est donc hors de sens de supposer que l’Angle-
terre, ordinairement si bien inspirée pour ce qui touche à ses
intérêts politiques, veuille les compromettre sans avoir la pres-
que certitude de ne pas recevoir un échec.
Quant au Constitutionnel, il pense qu’avant toute autre
résolution, la Chambre devra prendre celle de dégager la ques-
tion des difficultés insurmontables que lui crée la présence de
Al. Guizot aux affaires. Sans ce précédent, il lui paraît difficile
de parvenir à l’abolition des funestes conventions de 4831 et
1835 qui pèsent sur la France.
Le Globe, lui, a toujours foi dans le maintien du ministère ;
il compte sur la fermeté du parti conservateur pour éloigner le
danger d'une crise qui empêcherait le ministère d’accomplir
les grandes mesures qu’il a proposées et qu’il doit proposer
encore.
COTIMEKUE DE M CHICORÉE.
La fièvre des prohibitions commence à miner la plupart des
branches de l'industrie et de l’agriculture. Aussi douloureux
que soit ce fait pour les intérêts généraux de la Belgique, lions
ne désespérons cependant pas de l’avenir. Le jour viendra, et
nous espérons qu’il n’est pas fort éloigné, où nous assisterons à
une heureuse réaction qui ramènera les populations dans le
chemin des véritables principes de l’économie, bases uniques
de la prospérité d'un pays. ■
Voyant que les sommités de la féodalité industrielle ne ces-
saient de harceler le pouvoir,dans le but de provoquer des aug-
mentations etdes exclusions dans les questions de tarif ; s'aper-
cevant, d’un autre côté, que là où ces idées étroites devraient
rencontrer une barrière invincible, il se manifestait, au con-
traire, des tendances déplorables vers un système subversif de
toute richesse nationale ; l’agriculture, grande et petite, s’est
émue et, à son tour, elle a réclamé sa part de prohibitions.
La culture de la Chicorée, entre antres, vient de s’adresser à
la législature. Représentée par une partie des cultivateurs de nos
polders, elle demande l’abolition de la loi du 7 avril 1838, pour
iui substituer un régime capable, voyez la lucidité de son rai-
sonnement ! non-seulement de léser gravement les intérêts con-
sidérables du commerce et de l’industrie de la Chicorée, mais
de ruiner par-dessus le marché, la production indigène elle-
même !
Devant celle manifestation, quelqu'absurde qu'elle fût d'ail-
leurs, de la culture de la Chicorée, le commerce et l’industrie
ne pouvaient rester impassibles. Voici la pétition qui a été
M. et Mad. Lucien-Clair exécutent au quatrième acte un boléro, el
Jaleo de Xérès, d’un dessin très élégant et d’un caractère très expressif.
Les deux artistes, vêtus avec une coquetterie charmante et originale,
dansentee pas avec grâce et chaleur. Voilà du moins ce qui sort un peu
de la coupe banale de ces sortes de divertissements.
En général, tous les artistes qui ont coopéré à l’exécution de cet ou-
vrage, ont rivalisé de zèle,et l’on peut dire hardiment que Lucrèce Bor-
gia a obtenu un succès complet.
Mais le Voyage à Pontoise nous attend.
Deux frères, Léonard et Albert Thierry, sont gens de talent, le pre-
mier commecomposileur de musique, le second comme ingénieur civil.
Mais ils sont pauvres, et partant de là, une foule degens ne leur accor-
dent qu’un talent purement négatif. Il leur faudrait, à Léonard et à Al-
bert, un protecteur riche qui pùt les aider, l’un à faire représenter un
opéra qu’il a en portefeuille, l’autre à faire exécuter le plan d’un
rail-way. Il va sans dire que les oeuvres des deux jeunes gens sont deux
chefs-d'œuvre. Mais ce protecteur est un mythe pour eux, et Léonard
qui est doué d’une imagination riche et spirituelle, s’aperçoit bientôt
du défaut de leur cuirasse, et songe sérieusement à se retirer, lui et son
frère, de l'impasse où ils se trouvent.
Un moyen est bientôt arrangé. On simule devant le monde, la scène
se passe à Paris, la mort d’un oncle très riche qui résidait sops le ciel
boréal des Busses. Des préparatifs de départ sont faits à la hâte, les fu-
turs millionnaires sont accablés de félicitations — déjà la réaction com-
mence ! — tous ceux qui les ont méconnus, s’empressent de leuraccor-
der toute espèce de génie. Les roubles en perspective opèrent des pro-
diggs,
Vous sentez bien que Léonard et Albert ne vont pas s’enterrer en Rus-
sie. Ils ne prétendent pas pousser l'illusion jusque-là. Ils s’arrôlentlout
bonnement à Pontoise, où ils se cachent pendant six mois, écrivant
leurs impressions de voyage en vertu de l’adageqn’on ne décrit jamais
bien les pays que quand on ne les a pas vus. Ils reviennentun beau jour
à Paris, ménaut un train de véritables boyards,grâce aux.strictes éco-
nomies du séjour à Pontoise. A présent, on veut bien faire représenter
à l’envi l’opéra de Léonard, el les capitalistes accourent en foule pour
emporter d’assaut les actions du chemin de 1er d’Albert.ils sont riches,
du moins tout le monde les croit tels, donc ils sont considérés! Bref,
tout finit comme cela aurait dû commencer
C’est sur cette donnée que MM. Gustave Vaëz et Alphonse Royer ont
construit une comédie un peu invraisemblable, mais on ne peut plus
spirituelle. Durant tout le cours de la pièce, pas un instant où l'action
est traînante; partout vive, alerte, d’un comique achevé, elle soutient
l’attention sans la fatiguer. ,
Le Voyagea Pontoise a été on ne peut mieux accueilli sur notre scène;
il est fort bien joué, du reste.- Mcsd. Honorine Poncelet et LucileGer-
main, ainsi que MM. Kicquier, Beaugean, LaliLte et Rouff, concourent
surtout au succès de cette production de notre compatriote.
HENRI DE RUÉS. |