Full text |
TABLETTES DU PRECURSEUR.
AMVEHg , VENDREDI 3 JANVIER f §40.
comte
ienne,
r5,7G0
nberg
er aux
iité de
isulter
jlaise,
fils ou
ement
ge en
[ués à
uiront
ié aux
qu’ils
1149)
utilité
ICHE
it être
est à
lucuno
jtègée,
bonté
rocédé
et eu
ie ; de
:asion-
»l dans
és par
:ncrier
>ur six
te. 37,
252)
re*
, dédié
ior.
e favo«
s et de
nt pa-
nards ,
ïte.
fille en
•Melle,
EUS
reau en
ndu.
rné de
e quel-
à la se-
Î2 3[«6
74
) 3[i6 P
) A
; i5j,6A
) À
I À
85 P
! 07*/jp
» */4 A
*.*/3 à
>0 P
M4 J
lidi.
"vT73
[ «i» 314
■/a
i MB *'g
i|> 29
14.118
! «I»
L'ÉCOLE DES JOURNALISTES,
COMÉDIE EX 5 ACTES,
PAR
MADAME ÉMILE DE GIRARDIN.
(Suite. — Voir le supplément d'avcint-hier.)
Scène V.
EDGAR, VALENTINE.
VALENTINE.
A nous deux maintenant. Vous avez vu ma sœur ?
EDGAR.
Oui, je viens de la voir.
VALENTINE.
Ah ! comme elle est grandie •
EDGAR.
11 faut la marier.
VALENTINE.
Elle est trop étourdie.
Non, monsieur, c’est finir trop tôt votre roman,
Et vous devez languir pour elle encore un au.
EDGAR.
Un au 1 mais c'est trop long; vous êtes bien sévère !
VALENTINE.
Songez donc qu’elle doit vivre loin de ma mère.
Malgré l’attacbement qu’elle ressent pour vous.
Elle pleure en songeant qu’il faut nous quitter tous.
Se séparer déjà de ma mère, à son âge 1
J’aimais bien mon mari, mais s’il avait osé
Mc dire ; Quittez-la, je l’aurais refusé.
edgar, lui prenant la main.
(A part.}
Chère sœur I Voilà donc cette famille unie
Qu’un monde corrompu soupçonne et calomnie !
Elle mériterait un destin plus heureux !
VALENTINE.
Pourquoi lever au ciel des regards langoureux ?
edgar à part.
Je tremble qu’un hasard fatal ne lui révèle.
Les propos que l’on tient sur sa mère et sur elle.
Un soupçon troublerait toute sa vie.
VALENTINE.
Eh bien ?
Je vous parle, monsieur; vous ne répondez rien.
EDGAR.
Mais je suis inquiet, je réfléchis, je pense
Au nouveau choc qui peut troubler votre existence.
Si jeune, avec vos goûts, vivre d'ambition?
VALENTINE.
Je n’ai guère l’esprit de ma position.
EDGAR.
Aux soupçons de l'envie être toujours en butte,
Toujours craindre un revers et prévoir une chute.
VALENTINE.
Qui? moi! ces craintes-là ne sont pas mes tourmens.
Non, les jours de revers sont mes plus doux momens.
Je regretterais peu ces honoeurs qu'on nieuvie ;
Dans mes affections j’ai mis toute ma vie ;
Et loin de m’effrayer, j’attends avec plaisir
Un revers qui permet de s’aimer à loisir.
Dans les pompeux salons de ce beau ministère
Je ne vois presque plus mon mari ni ma mère.
Le pouvoir les enivre, ils ne pensent qu’à lui.
Ils en ont tout l’honneur, moi j’en ai tout l'ennui.
edgar, riant
Ah! vous vous occupez des affaires publiques!
C’est vous qui décidez nos destins politiques?
valuntine, avec impatience.
Je ne dis pas cela; que vous êtes moqueurl
Je dis qu’au ministère il faut briser son cœur.
Et que j'aimerais mieux dans une humble retraite
Avec tous ceux que j'aime etqu’ici je regrette,
Vivre éternellement sans plaisirs, sans espoir.
EDGAR.
Il est pourtant très doux pour une jeune femme
De faire l’importante et d'être grande daine.
VALENTINE.
Pas pour moi : je n'ai pas du tout de vanité.
edgar, affectueusement.
Ils appellent cela de la légèreté !
VALENTINE.
Vrai, je ne comprends rien aux ruses de l'intrigue.
Mon rôle, si brillant, m’attriste et me fatigue.
Ce monde de bavards m’ennuie au dernier point.
Et malgré mes efforts, je ne le cache point.
Ma figure s'allonge, et je bâille, je bâille 1
EDGAR.
Qooi, vous bâillez chez vous ?
VALENTINE.
Jusqu'à ce qu’on s'en aille.
EDGAR. •
C'est mal.
VALENTINE.
Vous ignorez cet horrible devoir.
Ce supplice flatteur qu'on nomme recevoir !
Le premier jour j’ai cru que j'en deviendrais folle.
Je ne pouvais trouver une seule parole.
Et puisje me perdais dans tous ces députés.
A dîner, j'en avais d’affreux à mes côtés :
Les deux plus laids. r,
EDGAR.
Sans doute, et c'est l'usage en France.
A table vous devez donner la préférence
Toujours au plus infirme, au plus grave, au plus vieux.
VALENTINE.
Oui, c'est de très bon goût, mais c’est très ennuyeux.
Je n'aime pas non plus ces brillantes coquettes
Qui de leur protégé se faisant interprètes,
Viennent à mon mari glisser des billets doux.
J'ai peur: une audience est presque un rendez-vous.
EDGAR.
Vous jalouse I
VALENTINE, vivement.
Ah !... chassons cette idée importune.
Non, je n’ai de rivale encor que la tribune ;
Mais la cruelle sait mieux que moi le charmer.
Uu ministre aujourd’hui n'a pas le temps d’aimer.
Fa rapport du budget, le vote de l’adresse.
Sont des événements qui troublent la tendresse;
Et le plus vif amour a des distractions
Uans les jours orageux d'interpellations.
EDGAR.
N'accusez pas Dercourt ; vous êtes son idole.
Vous avez tout crédit.
VALENTINE.
Oui, cela me console.
D'obliger nos amis il a plus d’un moyen.
Je l’aide quelquefois à faire un peu de bien.
EDGAR.
Vous pourriez donc me rendre un immense service ?
VALENTINE.
Ah! dans l’art d'intriguer je suis encor novice.
EDGAR.
Aussi votre crédit ne court aucun danger :
C’est un très grand talent que j’ose protéger.
VALENTINE.
Quel est ce grand talent que l’on me recommande?
Allons, voyons, monsieur, faites votre demande.
Nous penserons au sort de votre protégé.
EDGAR.
Vrai?
VALENTINE, riant.
Si nous n'avons pas ce soir notre congé.
EDGAR,
On décore en peinture une nouvelle église.
Et la grande coupole....
VALENTINE.
llélas 1 elle est promise.
EDGAR.
Vous croyez?
VALENTINE.
C'est monsieur Jardy qui l’obtiendra.
EDGAR.
(A part.)
Ah ! ce pauvro Morin ! que faire ? il en mourra.
VALENTINE, souriant.
Quoi 1 c'était donc pour lui ?
EDGAR.
Sans doute, pourquoi rire ?
VALENTINE.
Ah ! c'était pour Morin, ce peintre de l’Empire,
Qui fait des Adonis dont on se moque tant ?
EDGAR.
Les tableaux de Morin sont bien connus pourtant.
Sod talent....
VALENTINE.
Son talent, tout le monde le nie.
EDGAR.
Morin n’en est pas moins un homme de génie.
VALENTINE.
Lui donner ce travail, je vous le dis tout bas,
Les journaux crieraient trop, on ne l'oserait pas !
EDGAR.
Les journaux ! voilà donc l’éternelle réponse I
Il faut qu’un grand talent à tout espoir renonce
Lorsque dans les journaux il n’a pas un soutien,
Car pour lui le pouvoir désarmé ne peut rien t
Madame, pardonnez si j’ose vous déplaire.
Mais je ne puis cacher ma trop juste colère.
Je m'idignede voir ces journaux isolens
Accabler sous leurs coups de sublimes talents,
Et je ne comprends pas qu’écoutant leur malice,
Un ministre éclairé se fasse leur complice.
VALENTINE.
Ne vous emportez pas, je parlerai pour lui.
EDGAR.
Ah ! protégez ses droits, faites-vous son appui !
A vous il appartient de prendre sa défense,
De venger noblement un vieillard qu’on offense !
Mon pauvre maître, hélas ! il est si malheureux i
VALENTINE.
Oui, je veux seconder vos désirs généreux.
Je ne vous promets pas la victoire complète,
Mais j'obtiendrai... C’est lui,je cours à ma toilette.
(Elle sort )
EN LAQUAIS,
C'est monsieur le baron Morin.
EDGAR.
Bien, on l’attend.
Scène VI.
EDGAR, MORIN.
MORIN.
Chez un ministre, moi i Norval, es-lu content ?
Je fais ce que tu veux, mais j'ai peu d'espérances,
EDGAR.
Pourquoi cela?
MORIN.
Je crains de basses concurrences.
A force d’injustice, ils m’ont découragé.
Je doute de moi-même. Ah ! je suis bien changé !
Je le sens, mon enfant, la blessure est mortelle.
Mais madame Dercourt...
EDGAR.
Elle vient et c’est elle
Qui doit très chaudement prendre vos intérêts.
MORIN.
Soit, Je t’avais promis que je lui parlerais,
Me voici. Mais quel temps est-ce donc que le vôtre ?
Que ce temps misérable est différent du nôtre !
Quand on voulait de nous on venait nous chercher.
Ah ! lui , ne laissait point nos palettes sécher !
Mais nous sommes vaincus, et notre régne expire.
On nous a proclamés ganaches de l'Empire 1
Quand je songe aux affronts dont ils m’ont abreuvé I
Les journaux m'ont proscrit, je suis un réprouvé I
Dans les arts, comme en tout, le journalisme règne.
Ils ont dit que j’étais un grand peintre... d'enseigne,
Que mes tableaux n’avaient ni dessin ni couleur,
Et bientôt mes tableaux n'auront plus de valeur.
Ils déclarent déjà ma palette caduque,
Ma crinière d'argent ils la nomment perruque!
Percé de mille traits, enivré de poison.
Je n’y peux plus tenir... Ah ! j’en perds la raison !
EDGAR.
Ne vous affligez pas I
MORIN.
A toi j'ose me plaindre,
(Il regarde autour de loi.)
Jeledis mon secret... c’est... je ne peux plus peindre.
J’ai peurde mes pinceaux, de mes yeux, de mon goût,
Leurs Jugements cruels me poursuivent partout.
Je les entends sans cesse... Ah I l’Euménide antique
N’était point le remords... non... c’était la critique.
Fantôme, vision, qui me remplit d’effroi,
Je la trouve toujours entre ma toile et moi !
EDGAR.
Ah! calmez-vous, déjà votre destin se change :
Un démon yous poursuit, Dieu vous envoie un ange.
Regardez... tant d'éclat présage un ciel serein.
(Montrant Valentine, qui vient d'entrer.)
Scène VII.
^DGAR, MORIN, VALENTINE en grande parure.
edgar, à Valentine.
Je veui vous présenter mon vieil ami, Morin.
_ VALENTINE.
Ce vieil ami, monsieur, est un illustre maître
Que depuis très longtemps je désirais connaître,
Et que vous auriez dû plus tôt nous amener.
EDGAR.
Ah! mon ami n’est pas facile à gouverner.
morin, souriant avec mélancolie.
C'est qoe souvent je fais un triste personnage.
Ah! madame, on devient très timide à mon âgel
valentine. à Edgar, qui prend son chapeau.
Vous nous quittez?.,,
EDGAR.
Je vais prendre congé du roi,
Car je reste à Paris plus que je ne le doi.
MORIN.
Tu repars donc déjà?
EDGAR.
Je retourne en Afrique.
Notre uniforme est beau, n’est-ce pas?
MORIN.
Magnifique.
VALENTINE.
Dans un de vos tableaux il ne ferait pas mal.
morin, soupirant.
Ah!
valentine, à Edgar,
Nous nous reverrons?
EDGAR.
Oui, tout à l'heure au bal.
(Il sort.)
Scène VIII.
VALENTINE, MORIN.
MORIN.
Je crains de vous gêner, madame, un jour de fête...
VALENTINE.
Non. non, vraiment ; restez, pour le bal je suis prête.
Personne ne m'attend, et je trouve très doux
De passer ma soirée....
MORIN.
Avec moi ?
VALENTINE.
Près de vous.
Ignorez-vous combien votre nom m’intéresse ?
Au Salon j’ai souvent blâmé votre paresse.
Quoi I pas un seul tableau qui soit signé Morin.
MORIN.
Qu’attendre d'un vieillard iuutile et chagrin,
Que les doctes journaux condamnent et méprisent,
Et qui n'a jamais eu de talent.... ils le disent 1
VALENTINE.
Qu'importent les journanx ? il faut lutter contre eux.
(A part.)
Pour un peintre, en effet, je les crois dangereux ;
L’artiste qui travaille a besoin qu’on le loue.
(Haut.)
Vous les craignez donc bien ? pour moi je vou*avons
Queje brave gatment leur terrible pouvoir.
MORIN.
Madame, en triompher serait notre devoir.
Ne nous abusons point, leurs forces sont extrêmes.
Fatalement pour nous, sans profit pour eux-mêmes,
Ces tyrans inconnus gouvernent le pays
Et le perdent; par eux nous sommes envahis.
C’est en vain qu’on les fuit, c’est en vain qu’on les brave ;
lis dominent nos chefs, la Chambre est leur esclave ;
Les ministres du roi se courbent devant eux...
Et la France supporte un tel joug... c’est honteux I
Et l’on voit chaque jour des soldats, des artistes,
Des magistrats... trembler devant les journalistes !
Des juges, menacés de leur ressentiment.
Faire, par lâcheté, mentir leur jugement !
Cela se voit, madame, et c’est un beau spectacle !
Les journaux mènent tout; leur voix est un oracle :
S’ils disent d’un acteur qui les a mal reçus
Qu’il est mauvais... soudain on ne l’applauditplus.
S’ils ne disent d’un roman, œuvre d’un grand poète,
Qn’il est sans intérêt... personne ne l’acbète ;
Mais s’ils disent aussi d’un vieux fat important
8ue c’est un beau génie... on le croit à l’instant.
ue de sots empaillés dont ils font des grands hommes !
Ah ! madame, aujourd'hui bien candides nous sommes ;
J'étais loin de penser jadis qu’il fût écrit
Qu’on dût nous asservir sans gloire et sans esprit.
VALENTINE.
Le pouvoir des journaux est nuisible peut-être
Pour celui qui le craint et veut le reconnaître ;
Mais quand on le méprise, on échappe à sa loi.
MORIN.
Madame, ils font trembler de plus puissants que mol.
Vous ignorez encor jusqu’où va leur audace.
VALENTINE.
Leurs injures d’un jour laissent si peu de trace.
Dans leur malignité je ne vois point d’affront ;
Us peuvent contre moi dire ce qu’ils voudront :
Que je suis intrigante, insolente, coquette ;
Que je ne sais parler que chiffons et toilette,
Queje n’ai pas d’esprit, que j’ai trés mauvais goût,
Ces épigrammes-là ne me font rien du tout.
N’est-ce pas leur métier ? une petite injure.
Un bon mot leur fournit deux jours de nourriture,
Eh bien ! je me résigne à cette charité ;
Je livre mes défauts à leur triste gaîté ;
Sur moi je leur permets de frapper sans scrupule ;
Je me sens généreuse en étant ridicule.
Et d'ailleurs chaque siècle a ses mauvais penchants,
Il faut faire en ce monde une part aux méchants.
MORIN.
Que de raison, madame I
VALENTINE.
Ah! je veux vous apprendre
A rire de leurs coups, pour mieux vous en défendre.
Il faut les détourner par des succès nouveaux.
En peinture, on prépare encor de grands travaux.
morin, avec joie.
Jele sais...
VALENTINE.
Il s’agit d’orner une coupole.
Si mon mari n'a pas engagé sa parole,
Si... demain... cêtravail dépend encorde nous,
J'espère, avec vos droits, qu’on l'obtiendra pour vous.
MORIN.
Ah! quel espoirl madame. Hélas! j'ai peu de chance.
VALENTINE.
Un chef-d’œuvre serait une belle vengeance.
Et puis, je veux encor... ceci est mon secret.
Je veux vous demander de faire mon portrait.
MORIN.
Quand puis-je commencer un si charmant ou vrage ?
valentine, après avoir hésité un instant.
Mardi..,.
MORIN.
Vous me rendez la vie et le courage.
Avec empressement j'accepte un tel honneur. y
Puisse taut de bouté vous valoir du bonheur.
Scène IX.
VALENTINE, seule.
Le pauvre homme a raison : aujourd'hui si l'on n'ose
Lui donner ce travail, les journaux en sont cause.
Ils font tant que partout on se moque de lui.
Voici ma mère.... On dit que le bal d’aujourd’hui
Sera charmant... et puis ma robe est si jolie 1
(Elle prend son éventait et son bouquet.)
Scène X.
VALENTINE, MADAME GUILBERT.
madame guilbert, très agitée.
Ah! l’on n'y comprend rien, et c’est de la folie!
Le Président n'a pas daigné nous recevoir.
VALENTINE.
Vraiment.... par quel motif ?
madame guilbert, avec ironie.
Il est souffrant ce soir I
Mais cet accueil n’a rien qui puisse nous surprendre.
Ses collègues et lui sont jaloux de mon gendre ;
Ils devaient s’emparer de cette occasion ;
Ils viennent d’envoyer tous leur démission.
Dercourt n'est pas ici ?
valentine.
Non.
MADAME GUILBERT.
Quelque espoir noos reste.
Contre la trahison notre parti proteste.
Cette confusion peut même le servir
Et doubler le pouvoir qu’ou cherche à lui raTir.
VALENTINE.
Nous n'irons pa9 an bai ?
MADAME GUILBERT.
11 faut nous y montrer;
Et dis que ton mari...
UN LAQUAIS.
Monsieur vient de rentrer.
Le ministre de Prusse est près de lui.
(Le laquais sort.)
MADAME GUILBERT.
N’importe,
Je cours le prévenir, de crainte qu'il ne sorte.
Je veux lui faire part d'un avis important.
Valentine, attends-moi, je reviens à l'instant.
(Elle sort.)
Scène XI.
VALENTINE.
Que d'agitations ! Je m’afflige pour elle
De tous ces embarras. La fâcheuse querelle !
Quel supplice 1 Voilà mon bal bien attristé 1
(Elle s'approche de la table.)
Que faire en attendant... Lisons... La Fcrité.
C’est ce nouveau journal que protégeait mon père...
Qui vient de renverser ce pauvre ministère.
(Elle parcourt le journal,)
Voyons donc... quel pathos ! Passons au feuilleton.
Il est d'Edourd Martel, homme d’esprit, dit-on.
C’est par la poésie et la gaité qu'il brille.
(Elle lit.)
a Le ministre et l’amhnt, ou la mère et lafille. »
Ce titre est singulier, et je ne sais pourquoi
Ces seuls mots dans mon cœur ont jeté de l’effroi I
(Elle lit.)
o Madame de Lorville aimait à la folie,
a Comme on aime à trente ans. quand on n'est plus jolie,
< Un préfet... qui rêvait chambre et conseil d'état,
a Comme on rêve à trente ans, quand on est magistrat.
« De la dame en crédit l’adresse peu commune
a Servit habillement sa rapide fortune,
a Mais un soir le mari, trouvant un billet doux,
a S'endormit inquiet... et s’éveilla jaloux
a II sentit le besoin, pour rassurer son àme,
d De chasser au plus tôt ses soupçons... ou sa femme l
a Mais elle, sans pâlir, lut le brûlant écrit,
« A quoi donc servirait d'être femme d’esprit,
a Si l’on ne savait point, par instinct ou par ruse,
» Trouver pour un grand crime une innocente excuse ?
a Mais elle répondit sans le moindre embarras
a Que ce billet d'amour ne la regardait pas,
a Qu’il était... pour sa fille, et qu'il fallait très vite
a Au ministre amoureux accorder la petite.
a Le père fut crédule, — et très honnêtement
a La mère a marié sa fille à son amaDt;
o Et l'enfant fut vendu sans trop de résistance.
a Tous trois mènent en paix une grande existence.
a Ils s'aiment à loisir, et le monde enchanté
a Bénit de leur amour l'henreuse trinité 1 »
Oh ! le méchant article ! Oh ! je suis indignée !
Dans ce honteux portrait ma mère est désignée.
Un ministre... un ancien... préfet... c’est évident.
Quel mensonge odieux I ma mère !... Cependant...
Je crois me rappeler,.. Oh 1 non, c’est impossible...
A r’instant je grondais Morin d'étre accessible
Aux propos des journaux, et voilà que j’y crois...
Mon mari !... tous les jours., il venait autrefois
Chez ma mère... Grand Dien ! quelle lumière affreuse !
(Elle reprend le journal.)
Oui... cette histoire,., c'est.,, la mienne I Ah ! malheureuse
Cet hommeest mon mari... Cette épouse sans foi...
C’est ma mire... et l'enfant qu'on a vendu... c'est moi !
ACTE IV.
Scène première.
EDGAR, seul.
(Il se promène à grand pas et semble inquiet.)
EDGAR.
Valentine m'écrit de me rendre chez elle;
Voudrait-on m’annoncer quelque triste nouvelle?
Hier a-t-elle lu ce journal ?... Je le crains 1
Ah ! s’il en est ainsi, pour nous que de chagrins !
Comment calmer jamais cette tête exaltée.
Par d’infâmes soupçons sans cesse tourmentée?
Pourquoi n’ai-je pas lu cet article odieux ?
On aurait pu du moins le soustraire à ses yeux !
Et Martel est l'auteur d'une telle infamie 1
La main qui nous déchire est une main amie !
Scène II.
EDGAR , MARTEL sortant de chez Guilbert.
edgar , apercevant Martel.
Votre présence ici !. |