Full text |
147
L’ÉMULATION.
148
passa peu de temps après aux Taye, puis aux Oudart et, par
mariage, aux De Borchgrave. A cette époque, Steen fut plus
d’une fois transformé en place de guerre ; par sa situation il
protégeait les alentours de Vilvorde contre les attaques diri-
gées par les Malinois, hostiles aux Brabançons. En 1356,
lorsque les premiers embrassèrent la cause de Louis de Mâle,
comte de Flandre, contre la duchesse Jeanne et son mari
Wenceslas, duc de Luxembourg, Giselbert Taye, qui était
bourgeois de Bruxelles, occupa « sa maison d’Elewyt » avec
vingt-huit hommes à pied ou fantassins, et recevait de ce chef
une allocation s’élevant à un vieil écu par jour. En 1585, pen-
dant les guerres de religion, messire Thierri De Borchgrave
fut quelque temps chargé, au nom du prince de Parme, d’y
tenir garnison avec des soldats, mission dans laquelle il fut
ensuite remplacé par Paul de Carondelet, seigneur de Maulde.
Le 10 juillet 1586 les De Borchgrave transférèrent la pro-
priété de Steen à Marie-Christine d’Egmont, veuve d’Oudart
de Bournonville, premier comte de Hennin, qui se remaria au
comte de Mansfeld, vaillant guerrier, dont l’épée se mit au
service de plus d’une cause. Le fils de Marie-Christine,
Alexandre, premier duc de Bournonville, céda le château, en
1622, à messire Jean de Cools, seigneur de Corbais, et ce fut
celui-ci qui, chargé de dettes, menacé de prise de corps, en
fit abandon à Rubens pour g3,ooo florins carolus, le 12 no-
vembre i635. Steen constituait alors une propriété remar-
quable; au château proprement dit, qui mesurait 4 1/2 bon-
niers, étaient annexés une tour, une ferme, des fossés que l’on
ne traversait qu’au moyen d’un pont-levis ; dans ses dépen-
dances on trouvait un parc ou garenne (warande) et un
vignoble. Les parties principales de la seigneurie étaient
tenues en fief des Grimberghe-Nassau. Il existe à Londres,
dans je ne sais quelle collection, un paysage d’automne de
Rubens, où le maître a reproduit la vue de son séjour favori.
A travers les arbres, on en aperçoit la porte d’entrée avec
le bâtiment dans lequel elle était pratiquée et dont les murs
latéraux se terminaient par un pignon à angles rentrants et
sortants ; au-dessus de la porte, une fenêtre à meneaux de
pierre éclaire chacun des deux étages, et une troisième,
s’ouvrant dans un petit pignon crénelé, éclaire le grenier. A
gauche s’étendent les dépendances, n’ayant qu’un rez-de-
chaussée ; à droite on voit un grand corps de logis, ayant de
plus un premier étage et allant aboutir à une tour carrée et
crénelée. Toute cette architecture semble attester une recon-
struction au xve ou au commencement du XVIe siècle.
La seconde femme de Rubens, Hélène Fourment, se rema-
ria à Jean-Baptiste de Broeckhoven, comte de Bergeyck, qui
donna l’hospitalité à Steen, le 21 décembre 1659, au gouver-
neur général, marquis de Caracena. Des Broeckhoven Steen
passa par achat, en 1731, au comte de Mastaing; en 1734 aux
Wynants. L’un de ceux-ci, le conseiller Jean-Baptiste Gosuin,
comte de Wynants, vendit le château, le 5 novembre 1773, à
l’architecte Laurent-Benoît Dewez, qui apporta de grandes
améliorations à son domaine. Dewez se retira ensuite à
Grand-Bigard, où il a reçu la sépulture, et son château est
devenu la propriété de la famille des barons Coppens (1).
De grands travaux, commencés en 1875 et qui ont été
dirigés par M. Carpentier, architecte à Belœil, ont considé-
rablement transformé l’aspect du château de Steen, dont
on reproduit ici la façade vers le jardin. Le pignon à la
gauche du dessin appartient à la partie ajoutée ; une loge en
avant du donjon est nouvelle et, à droite, l’aile comprenant
les dépendances a été reconstruite; les châssis des fenêtres
sont la reproduction exacte des anciens et la vieille serrurerie
a été conservée. A l’intérieur, comme souvenir du passé, on
ne trouve rien à citer, si ce n’est de vieilles cheminées. Mais
un nom immortel reste associé à cette belle villa, coquette-
ment assise au milieu de pelouses et de bouquets d’ormes. En
se trouvant dans ce castel féodal, on oublie volontiers les luttes
homicides dont Steen a été le témoin ; on se reporte de préfé-
rence à cette époque où le manoir était le rendez-vous de
toute une pléiade d’artistes ; on voudrait y retrouver vivant
le souvenir de ces hommes éminents, qui ont porté si haut la
réputation de notre école de peinture.
Alphonse Wauters.
Notes archéologiques
n vient de découvrir dans l’église de Nieuport,
sous une épaisse couche de badigeon, des pein-
tures murales du plus haut intérêt. Elles repré-
sentent des personnages au tiers de la grandeur
naturelle, entourés de motifs d’architecture ogivale ; elles
semblent avoir recouvert la majeure partie des piliers et des
colonnes du transept. Une inscription reproduit le credo
en langue flamande et porte la date 1400..., le chiffre des
années est effacé.
Il est fort probable qu’on parviendra sans trop de difficulté
à retrouver les peintures qui, à en juger par les spécimens
déjà mis au jour, appartiennent à la belle époque de l’école
flamande.
On a commencé à placer dans la section des antiques, au
Musée de Londres, des bas-reliefs en pierre provenant du
soubassement des barrières du Parthénon. Bien qu’usés par
le temps, les sujets gravés sur ces pierres, représentant des
animaux, des lutteurs et autres sujets empruntés à l’histoire
ou à la mythologie, ont pu être reconstitués en leur entier.
La statue colossale de Ramsès II, qui fut offerte à l’Angle,
terre au commencement de ce siècle, en même temps que
l’Aiguille de Cléopâtre, et qui gît encore enterrée à Memphis,
sera transportée à Londres l’année prochaine et érigée près
de l’Albert Hall. Les frais de transport sont évalués à
125,000 francs.
Les dernières fouilles entreprises à Athènes ont fait décou-
vrir à l’Acropole une tête de marbre archaïque d’un beau tra-
vail, des débris de statue, des morceaux de vases aux couleurs
bien conservées et quelques statuettes de bronze. Ces objets
appartiennent à l’époque antérieure aux guerres médiques.
Les fouilles pratiquées à Mycènes ont fait retrouver une
partie d’un beau monument que l’on suppose être le palais
des Atrides.
La Société archéologique de Saint-Pétersbourg se propose
d’organiser un musée d’antiquités chrétiennes. Il y a en Rus-
sie un grand nombre de vieilles églises et de couvents qui
gardent dans leurs sacristies et leurs trésors une foule d’anti-
quités : objets du culte, manuscrits et livres imprimés anciens,
sans en faire aucun usage. Un grand nombre de ces objets
présente un vif intérêt artistique ou scientifique ; c’est en les
réunissant que la Société archéologique se propose de former
le premier noyau de son musée.
(1) Voir, pour plus de détails, l'Histoire des environs de Bruxelles, t. II,
pp. 683 à 688. |