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LA DEMOCRATISATION DE L’ENSEIGNEMENT
ET LA LECTURE PUBLIQUE
Le présent exposé n’a pas la prétention d’apporter, dans le domaine de la lecture
publique, une contribution originale qui puisse révolutionner les techniques et les métho-
des. La seule ambition est de rassembler un certain nombre de données, que chacun peut
trouver au hasard de ses études et de ses lectures, d’en tirer quelques comparaisons, et
de conclure, en pratique, par l’énoncé des exigences de l’éducation populaire, conçue
dans le cadre belge, en faveur de l’expansion de la lecture publique.
J’ai tenté de condenser en quelques lignes, que je reprendrai immédiatement l’esprit
même qui m’a animé au cours de l’élaboration de ce travail : “L’Histoire nous enseigne
que chaque guerre a su apporter, à côté de souffrances considérables, une contribution
valable à l’évolution de l’humanité. Au cours des cent dernières années, le caractère
social de cet apport s’est précisé. C’est ainsi que, dans la seconde moitié du XIXe siècle,
sous l’impulsion d’Henri Dunan, les Nations ont admis qu’il importait de protéger les
prisonniers et les blessés par une convention internationale. C’est ainsi qu’au lendemain
de la 1ère guerre mondiale s’est développé un vaste mouvement international de lutte
contre l’analphabétisme. Dans notre pays, cette campagne s’est traduite, en même temps,
par l’application de l’obligation scolaire votée en 1012, et par l’institution, dans le cadre
de la loi Destrée, votée en 1921, d’un Service des Bibliothèques publiques. Ce service
avait pour ambition de suppléer à la carence passée de l’enseignement primaire et, par
surcroît, entendait apporter, dans l’avenir, une collaboration totale à l’école. Avec le
recul du temps, cette intention de collaboration de la bibliothèque et de l’école, exprimée
par le législateur, se dégage encore mieux si l’on se souvient que, dans T entre deux
guerres, l’instituteur a été, presque toujours, le bibliothécaire du village. Au terme de
la seconde guerre mondiale, l’Etat s’est davantage encore préoccupé de la démocratisation
de l’enseignement. Si la prolongation de la scolarité avait, avant tout, un caractère social,
la mise de l’enseignement secondaire et supérieur à la disposition des meilleurs éléments
de toutes les classes de la population répond d’abord à des préoccupations économiques.
Nos industriels, notre enseignement se plaignent régulièrement du manque dé techni-
ciens, de la faiblesse numérique de nos élites intellectuelles. Les efforts tentés par les
pouvoirs publics en vue d’améliorer l’accessibilité de l’enseignement secondaire et univer-
sitaire ont été marqués, essentiellement, par la création d’un grand nombre de nouvelles
écoles. Mais, alors que le législateur, en 1921, avait tenu à établir un parallélisme entre
l’enseignement primaire et la lecture publique, rien n’a été réalisé, depuis 1045, qui
aligne les bibliothèques sur le développement de l'enseignement. En fait, il eut fallu
que les étudiants trouvent à côté de chaque école secondaire, qu’elle soit technique ou
d’enseignement général une bibliothèque répondant à leurs besoins culturels.
Or, et il faut le dire très brutalement, il n’en est rien : à l’heure actuelle, le nombre
des bibliothèques dites du 2d degré est infime à côté de celui des établissements d’en-
seignement moyen, normal ou technique. Une première étape devrait nous conduire à
créer des bibliothèques importantes dans tous les chef-lieux de province d abord, dans
les chefs-lieux d’arrondissement ensuite, et, enfin, au niveau de toutes les localités impor-
tantes qui possèdent un établissement d’enseignement secondaire. Je m’efforcerai, dès
lors, de justifier ce point de vue en le précisant dans toute la mesure du possible.
Il importe cependant, pour nous replacer au cœur du problème, que nous nous effor-
cions de définir plus exactement le cadre du débat, en nous attachant aux buts et moyens
de la démocratisation de l’enseignement. En 1957, MM. Marcel Busieau et Abel
Dubois,’ écrivaient à la page 18 de leur ouvrage : Démocratie et 'Enseignement : “La
démocratisation de l’Enseignement postule une réorganisation de la Société j§ sur le
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