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CONCOURS
La mise au concours des monuments publics
La Société Centrale d’Architecture a reçu de la Députation
permanente du Brabant la lettre suivante, qui nous paraît
devoir faire faire un nouveau pas au principe de la mise au
concours public de tous les édifices élevés avec les deniers
publics :
Bruxelles, le 12 avril 1888.
Messieurs,
J’ai l'honneur de vous faire parvenir le rapport qui a été
présenté au Conseil provincial par M. Hanssens (1), au sujet
de votre demande du 10 juillet dernier tendant à ce qu’il soit
érigé, en principe, que les plans des constructions pour l’exé-
cution desquelles la province alloue des subsides fassent l’ob-
jet d’un concours public.
Les conclusions de ce rapport ayant été adoptées, la
Députation permanente a été chargée de l’examen de l’affaire.
Ce Collège, en séance du 4 de ce mois, a décidé que chaque
fois qu’il s’agira d’un travail subsidié par la Province et d’une
réelle importance, les administrations publiques seront enga-
gées à ouvrir un concours pour l’élaboration des plans des
bâtiments à ériger.
Agréez, Messieurs, l’assurance de ma considération distin-
guée. Le Gouverneur,
Aug. Vergote.
A la Société Centrale d’Architecture de Belgique.
Si l’on rapproche cette lettre de la mise au concours par le
Gouvernement de la prison de Verviers, on peut conclure
que nous sommes en bonne voie. Nous félicitons vivement et
nous remercions la Députation permanente de sa décision
qui sera pour la Société Centrale d’Architecture un puissant
appui lorsqu’elle réclamera des administrations communales
du Brabant, la mise au concours public des constructions
qu’elles voudront élever ; nul doute que l’exemple de la
Députation permanente du Brabant ne soit bientôt suivi par
les autres provinces auxquelles la Société Centrale va adres-
ser des requêtes dans ce but.
Concours pour l’agrandissement de l’hôtel provincial
à Gand.
La Société Centrale d’Architecture a adressé, le 26 janvier
dernier, à la Chambre syndicale des Arts Industriels de
Gand, une longue lettre relevant toutes les lacunes que pré-
sente le programme de ce concours et réclamant le change-
ment de ces conditions défectueuses.
Voici les changements réclamés.
Nous citons textuellement les conclusions de la lettre :
« Pour nous résumer, nous espérons, Messieurs, que vous
voudrez bien, dans l’intérêt de votre concours, faire les quel-
ques réformes que nous vous demandons.
« Il suffirait, pour cela, de publier une circulaire complé-
mentaire de votre programme, qui répondrait aux desiderata
que nous venons de vous énumérer, en disant :
« I° Que le projet classé premier sera exécuté et que son
auteur recevra comme honoraires 5 p. c. du montant de son
devis ;
« 2º Que le concours sera à deux épreuves, et que la
somme allouée comme prime sera divisée entre les six meil-
leurs projets de la première épreuve ; la seconde ayant lieu
entre ceux-ci et sans autre prime que l’exécution du projet
classé premier.
« Les dessins à 0,01 par mètre ne devraient être demandés
que pour la deuxième épreuve.' Pour la première, des esquisses
à o,oo5 seraient seules demandées ;
« 3° Que les projets seront exposés avant et après le juge-
ment ;
« 4º Que le jury sera composé de sept membres, désignés
comme suit :
« Trois par la Chambre syndicale des Arts Industriels ;
« Trois par les concurrents ;
« Un délégué par la Société Centrale d’Architecture;
« 5° Que le jury fera un rapport détaillé sur ses travaux,
et que ce dit rapport sera livré à la publicité. »
Le 2 février suivant, la Chambre syndicale des Arts Indus-
triels, organisatrice du concours, accusa réception de la lettre
de la Société, en l’informant qu’elle en a pris connaissance et
qu’elle l’a transmise à la Députation permanente, qui a été le
promoteur du concours.
Depuis ce temps, l’affaire en est restée là, malgré une lettre
de rappel en date du 20 février.
Nous avons cru devoir publier ces faits pour prémunir les
concurrents.
Concours pour une prison cellulaire à Verviers
L’exposition des projets envoyés à ce concours a été ouverte
le 15 mai, dans les locaux de l’ancien palais de justice, rue de
Ruysbroeck; elle durera jusqu’au 15 juin.
(1) Voir Emulation, année 1887, col. 169.
Depuis 1859, c’est le premier monument que le Gouverne-
ment a mis au concours. M. le Ministre de la Justice, à qui
l’initiative en est due, doit se féliciter du résultat. Trente-six
concurrents ont répondu à son appel et l’on peut dire que
tous ont des qualités. Bien peu d’entre eux ont été éliminés
lors du premier examen.
Aussi, en présence de l’importance des envois et du travail
considérable que devait nécessiter la recherche des meilleurs
projets, M. le Ministre nomma au sein du jury une section
technique, composée de MM. Englebert, inspecteur des con-
structions des prisons; Stevens, directeur de la prison de
Saint-Gilles ; J. Brunfaut, architecte, président de la Société
Centrale d’Architecture, et V. Dumortier, architecte, nommé
par les concurrents. Ces messieurs eurent pour mission d’exa-
miner les 36 projets, tant dans leur ensemble que dans leurs
détails et de désigner au jury ceux qu’ils auraient trouvé les
meilleurs. Ils consacrèrent à cet examen huit séances et, le
11 mai dernier, présentèrent leur rapport en séance générale
du jury qui, outre les quatre membres précités, se composait
de :
MM. Gautier de Rasse, administrateur de la Sûreté publique,
president;
Henri Beyaert, architecte désigné par M. le Ministre de
la Justice;
Prins, inspecteur général des prisons ;
Pirenne, échevin de la ville de Verviers, délégué par
l’administration communale de cette ville ;
M. Neef, délégué de la commission administrative de la
prison de Verviers s’était fait excuser.
M. Stas, chez de division du département de la justice,
remplissait les fonctions de secrétaire, sans voix délibérative.
Après un sérieux examen des projets présentés, le jury,
dans une seconde séance, se ralliant aux propositions de sa
section technique, choisit pour prendre part à la seconde
épreuve du concours les projets portant pour devise (1) :
Le chiffre 7 entouré de trois cercles;
On ne passe pas;
Pas de déblai. Hoc opus, hic labor;
Quand même;
Vert et vieux.
Une mention honorable a été décernée au projet portant
pour devise : Carcer.
Les auteurs des cinq projets primés recevront une première
indemnité de 1,000 francs et devront remettre au ministère de
la Justice, avant le Ier novembre 1888, les dessins exigés par
le programme pour la deuxième épreuve du concours.
Le même jury désignera alors le projet à exécuter ; l’auteur,
outre une nouvelle prime de 5,000 francs, recevra des hono-
raires calculés à 5 p. c. de la dépense totale, et une somme de
5,ooo francs sera partagée entre les quatre autres concurrents.
Le jury a ensuite décidé que les concurrents auront à tenir
compte des observations suivantes :
I° En vue de prévenir l’humidité des parties de l’édifice
exposées aux vents d’ouest, il est recommandé de faire emploi
de doubles murs raccordés par des crochets en fer inclinant
de l’intérieur vers l’extérieur ;
2° Les plans prescrits sous le n° 2 du litt. B de l’article 4
du règlement pourront être produits à l’échelle de omoo5 par
mètre, sauf à les accompagner de plans à l’échelle prévue de
omoi par mètre pour les parties de l’édifice qui exigeraient le
plus de détails, notamment pour le centre ; il est toutefois
recommandé de ne pas dépasser pour ces derniers plans les
dimensions prescrites de Imoo X om8o ;
3° Le nombre de feuilles de plans indiqué à l’article 4 ne
constitue qu’un minimum ; chaque concurrent pourra l’aug-
menter pour développer, s’il y a lieu, toute sa pensée ;
4º Chacun des concurrents primés pourra faire retirer au
ministère de la justice, par une personne munie du reçu de
son projet et d’un pli renfermant les dix premiers mots du
mémoire descriptif qui l’accompagnait, la note des observa-
tions auxquelles son étude a donné lieu de la part du jury.
Cette note sera délivrée du 21 au 26 mai, de 10 heures du
matin à 4 heures de relevée, rue Ducale, n° 2, à Bruxelles.
Par son organisation, l’importance des primes et la netteté
de son programme, le concours pour la prison de Verviers
peut servir de modèle pour les concours futurs.
Le jugement de ce concours peut être discuté, mais on devra
reconnaître qu’il n’a pas été rendu sans que le jury ne se soit
livré à un examen attentif : chaque projet a son dossier où sont
consignées toutes les observations et les critiques auxquelles
il a donné lieu de la part du jury; la configuration du terrain,
les profils de nivellement, les rampes, le terrassement ont été
vérifiés ; en un mot, chaque élimination a été précédée d’une
étude complète des qualités et des défauts de chacun d’eux.
On comprendra que la présence au sein du jury de deux
de nos collaborateurs nous porte à approuver le jugement sans
réserve. C’est du reste l’opinion d’un très grand nombre d’ar-
chitectes. Toutefois l'Émulation, conformément à ses principes,
ouvrira largement ses colonnes à ceux de nos confrères qui
jugeraient bon de le discuter. Mais ce qu’on ne pourra contes-
ter, c’est que l’essai que vient de faire M. le Ministre de la
Justice a donné les meilleurs résultats et que le principe du
concours public triomphe une fois de plus.
(1) Les devises sont indiquées dans l’ordre alphabétique.
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L’ÉMULATION.
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