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PRÉFACE.
l’'éminent écrivain. Il n’est pas un de ces livres où ne se retrouvent
les qualités maîtresses de notre auteur, la sobriété et la sûreté du goût,
l'élévation des sentiments, la parfaite distinction et la rare élégance
du style.
Mais on ne sera pas fâché de savoir comment la critique contempo-
raine accueillait les œuvres de M. Marmier. Voici ce qu'en 1865 un
écrivain honorablement connu, M. Émile Chédieu, disait, dans le
journal la Nation, des Mémoires d’un orphelin qui venaient alors
de paraître :
«S'il faut juger du mérite deslivres par l'impression qu'ils nous laïs-
sent après les avoir lus, et si nous devons accorder nos préférences à
ceux qui nous rendent meilleurs en n’excitant que des émotions douces
et bienveillantes, sans faire appel aux mauvaises passions de l’âme,
Je nouveau livre de M. X. Marmier, les Mémoires d'un orphelin, doit
occuper, à côté des œuvres charmantes et pures de Bernardin de
Saint-Pierre ou de Xavier de Maistre, un des premiers rangs dans Ja
bibliothèque de l’homme de goût.
«Quoiqu'il n’écrive qu’en prose, M. X. Marmier appartient à la grande
et brillante famille des poètes descriptifs (1); amant passionné de la
nature, il l’adore sous toutes ses formes si variées et si mobiles, tan-
tôt gracieuses et douces, tantôt sévères et terribles; mais il réserve
ses préférences pour le spectacle grandiose des scènes alpestres, pour
les vertes prairies que surplombent les roches séculaires, pour Ja
fraicheur des vallées qui se cachent à l'ombre des hautes monta-
gnes et des forêts de pins. Les grands lacs de l'Amérique du Nord,
les forêts profondes que n’a point encore attaquées la hache de
l'homme, les grands fleuves qu'elles recèlent et que l’Indien parcourt
(1) À l’époque où M. Chédieu écrivait cela, M. Marmier n'avait point encore publié de
vers. — On ne connaissait donc point un volume qui a paru chez Lahure sous ce titre :
Prose et Vers. L'ouvrage est à notre avis, le bijou de la collection des œuvres de M. Mar-
mier, celui qui gardera le mieux la mémoire de l'écrivain et qui vivra tant qu’on aimera
en France les bonnes et grandes pensées exprimées dans une noble et forte langue.
Le volume se compose moitié de « pensées et réflexions » où la justesse et la force des
idées le dispute à la vigueur et à la saveur du style, moitié de morceaux détachés, stances,
ballades, sonnets, où l’auteur tantôt s’inspirant de poètes étrangers, tantôt puisant dans son
propre fonds, nous donne un vrai régal de délicate et fraiche poésie.
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