Full text |
35<
AXTEKS, ff Sfptomïirc.
C'lBifgisi&asc Aisïsée.
►rtwswesja
On s’abonne : à Anvers au bureau
du PRECURSEUR , Bourse Anglaise,
N.o 1040 ; en Belgique elà l’étranger
cher tous les Directeurs des Postes.
JOURNAL POLITIQUE
COMMERCIAL,
ET
Abonnement par iriüi&èit'é
Pour Anvers, 15francs; pour la pro-
vince, 18 1rs. ; pour l'étranger,20 fr*.
Insertions centimes 2» per Ugn*.
PAIX. — LIBERTÉ. — PROGRÈS.
f % Septembre*
liEXTRES PAMSIEÜOÏES. (*)
XLIX.
CORRESPONDANCE PRIVÉE DU PRÉCURSEUR.
Paris, 10 septembre.
Affaires d’Orient. — Ouverture des hostilités par le commodore
Napier. — Colère de Méhémet-Ali. — Intervention pacifique
de la France. — Importance de ce fait. — Mesures prises par
la Russie. — Notification de la France à la Turquie. Casus
helli. — Autre notification à Méhémet-Ali. —■ Proposition de
la France à l'Angleterre contre la Russie. — Note insignifiante
de lord Palmerston. — En quoi consisteront les mesures coer-
citives. — Ligne de conduite du gouvernement français. —
Condition de son intervention. — M. Thiers et les journaux
muets. — L’opinion publique et la comédie diplomatique. —
Résumé de la position.
Il faut que je vous parle un peu des affaires d'Orient. Tant que la
situation ne change pas, on peut se taire et laisser divaguer la polémi-
que des journaux. Mais il faut rompre le silence aussilôt que de nou-
veaux faits viennent à se produire et à modifier la marche nécessaire
des choses. C'est le cas actuellement. Récapitulons.
Un fait capital a eu lieu. Le commodore Napier a réuni son escadre
devant Beyrouth, port de Syrie. Il a sommé les autorités égyptiennes
de lui remettre la place, de lui restituer les soldats turcs pris à la ba-
taille de Nezib, de rendre aux insurgés du Liban les armes qui leur
ont été prises tout récemment.
Le commandant égyptien, Soliman-Bey, a répondu avec fierté, par
un refus, par une provocation. Le consul anglais a amené son pavillon
et s'est retiré à bord de l'escadre. L'émir Beschira transmis à Méhé-
met-Ali la sommation du commodore anglais, en renouvelant ses pro-
testations de dévouement. Ibrahim-Pacha, instruit de tout cela, a fait
avancer ses troupes vers Beyrouth ; il est resté en observation à quel-
ques heures de marche de cette place. Le commodore Napier voyant
sa tentative inutile, s’est retiré au large. Mais il a fait main basse sur
une douzaine de petits navires égyptiens chargés de munitions et de
quelques troupes. C’est-à-dire que n’avant pu se faire conquérant, il
s’est fait pirate. Tout cela se passait dès le 14 août, deux jours avant
la notification faite au pacha par Rifaat-Bey.
Quand le pacha a été informé de cette violation du droit des gens, il
est entré en fureur contre les Anglais, et il a persisté plus que jamais
à repousser le traité du 15 juillet. Son premier mouvement a été d’en-
voyer l’ordre à Ibrahim de franchir le Taurus. Heureusement, M. le
comte Walewski, envoyé du ministère français, se trouvait là. Sa
mission est de calmer le vieux pacha. Il l’a remplie, et le Taurus ne sera
pas encore franchi. Notons que pour la seconde fois la France inter-
vient pacifiquement auprès de Méhémet-Ali et sauve Constantinople
d’une conquête plus facile qu’on ne pense. Cela met la justice et le bon
droit de son côté. Dans la situation actuelle, ce fait a un poids immense
dans la balance politique de l’Europe. Nous allons voir comment les
puissances s’y prendront pour le reconnaître.
En attendant, la Russie rapproche ses troupes de la mer Noire, en-
tretient 30 mille hommes en Crimée, et fait partir de Cronstadtpour
la Méditerranée une flotte de 18 vaisseaux qui renforceront l’escadre
combinée des Anglais et des Autrichiens devant Alexandrie.
Tandis que la Porte notifiait le traité à Méhémet-Ali (le 16 août),
M. de Pontois notifiait à la Porte (mômedate), l'ultimatum de la France.
Le manifeste dont il était porteur se plaint vivement que le Divan ait
insulté le roi et la nation qu’il gouverne. Il y est déclaré quesi la Porte
ratifie le traité, la France soutiendra Méhémet, eî qu’elle interviendra
en sa faveur à l’instant môme où une armée russe violera le ter-
ritoire turc.
En même temps, le cabinet français signifiait à Méhémet-Ali, qu'il
ne pouvait approuver l’intention manifestée par ce prince d’appeler à
une guerre de religion toutes les populations musulmanes, parce que
le premier résultat d’une guerre semblable serait le massacre des chré-
tiens de Syrie. Les organes du gouvernement anglais accueillent cette
déclaration comme très honorable pour la France.
Cependant il paraîtrait que le cabinet des Tuileries se serait princi-
palement attaché à savoir si l’Angleterre voudrait donner à la France
une preuve d’union cordiale en prenant l’engagement d'agir de concert
avec elle contre la Russie, dans le cas où cette dernière puissance rom-
prait l’engagement qu’elle a pris de ne pas violer le territoire ottoman,
Il n'a point été répondu formellement à cette ouverture et la note pos-
térieure de lord Palmerston a été jugée trop peu satisfaisante, en gé-
néral, pour laisser espérer une réponse ultérieure dans un sens favo-
rable. Du moins tel est le terme où en sont les choses, d’après ce que
laisse conjecturer la correspondance du Globe.
Le cabinet français resterait donc en présence de la déclaration faite
par les puissances que les mesures coercitives auront pour effet non-
seulement le blocus de la Syrie, mais encore la prise de possession des
forteresses de la côte d'Egypte. A en croire toujours le môme journal,
« la France ne considérera pas ces mesures coërcitives comme un
» casus belli déterminé. Elle a indiqué d’autres éventualités comme
» devant forcer son intervention, et ces éventualités ayant été écartées
» on doit croire au maintien de la paix. »
Au milieu de cet entortillage de la presse anglaise tout ce qu’on
peut démêler, c’est que la France, comme l’a dit M. Thiers dans le
fameux article du messager d’avant-hier , souffrira une certaine
exécution du traité; c’est-à-dire quelle restera spectatrice de la lutte
individuelle de Méhémet-Ali contre le sultan appuyé par l’Angleterre,
l’Autriche et la Russie.
De quoi il faut conclure que la guerre avec la France est subor-
donnée à l’un de ces deux faits, l’entrée des Russes en Turquie, ou le
passage du Taurus par l'armée égyptienne, et à plus forte raison à
tous les deux réunis. Il paraîtrait, en effet, que telle est la ligne que
s’est tracée le cabinet français. Il compte assez sur les forces de Pdéhé-
tuet-Ali pour espérer que l’empioi du blocus et même les attaques con-
tre les forteresses ne suffiront pas pour amener un résultat définitif.
Alors de deux choses l'une, ou il faudra reprendre la voie des négocia-
tions, ou les puissances seront forcées d’appeler an secours de la Porte
l’intervention de l’armée russe qui amènera le passage du Taurus.
O Voir notre numéro d’hier.
Dans le premier cas, la France aura beau jeu pour se porter média-
trice dans de nouvelles négociations. Dans le second cas la guerre de-
venant générale, elle sera absoute du reproche de l’avoir provoquée,
puisqu’elle aura donné tous les gages de modération et de tolérance
compatibles avec son honneur.
Telle est la conduite politique que le cabinet français semble, pour
le moment, s'être tracée. Toutefois on est réduit à la conjecturer, car
il faut convenir qu’on trouverait difficilement dans ses organes le moin-
dre éclaircissement à ce sujet. C’est un des calculs de M. Thiers d’ac-
caparer les journaux pour les réduire au silence. Ceux même qui ne
lui appartiennent qu’en vertu d'un contrat désintéressé et tout de sym-
pathie, se prêtent, au grand étonnement de tout le monde, à ce sys-
tème de mutisme dont le premier effet est de laisser croire au public
qu’ils ne sont pas informés ou qu’ils sont induits en erreur. Un autre
reproche qu’ils méritent, et toujours par excès de dévouement béné-
vole, c'est de varier subitement du ton le plus résigné. Certes, il y a
une distance énorme des premiers manifestes publiés par le Consti-
tutionnel, le Temps, le Courrier , le Siècle , aux articles attiédis
et guindés que ces journaux publient depuis quelques jours et dans
lesquels ils s’évertuent à prouver que ia conduite du commodore Na-
pier est une surprise, une erreur, et ne peut être considérée comme
l'ouverture des hostilités.
Je viens de vous exposer le sens le plus favorable que l’on peut attri-
buer à la politique française, mais ne croyez pas que l’opinion publique
l’interprète ainsi. Il y a dans ce pays une vivacité d'impression, qui ne
permet pas d'envisager d’abord les faits du point de vue de la logique.
On juge au sentiment et tout d’abord. Aussi n'y a-t-il qu’un cri dans
Paris, c’est que la guerre est commencée et que le gouvernement laisse
faire. On est persuadé qu’il se joue cette fois, dans les régions diplo-
matiques, quelque comédie semblable à celles dont la Pologne et la
Belgique ont payé les frais. On s’attend donc à un dénouement pacifi-
que, et bien que tant d’intérêts soient menacés par la guerre, le mode
présumé de ce résultat mécontente et irrite au point que l’on entend
les plus grands partisans de la paix invoquer hautement la guerre.
Quoiqu’il en soit, je me résume en répétant que la paix et la guerre
ne dépendent plus de l'Angleterre ni de la France, mais uniquement
de la Russie et de l’Egypte. L'agression de l'une, la défense de l’autre,
voilà désormais les deux pivots sur lesquels roulent les destinées du
monde.
F1IMCE.
Paris, 10 septembre. — On lit dans le Moniteur Parisien :•
« La journée avait été fort calme avant-hier, mais dans la soirée, vers
six heures et demie, un rassemblement a commencé à se former rue du
Petit Carreau, et s’est dirigé vers la rue Mauconseil.
» Il était alors d’environ 50 individus, et a fait, le poignard àla main,
une attaque sur le poste de troupe de ligne établi dans cette rue, près
de celle Saint-Denis. Au milieu de ce premier désordre, les factieux sont
parvenus à désarmer le factionnaire et à prendre un autre fusil; mais
les soldats du poste étant sortis précipitamment, ont mis le groupe en
fuite et ont repris les deux fusils de leurs camarades.
» Dès la formation de ce rassemblement, plusieurs détachements de
la garde municipale avaient été dirigés de ce côté par l’autorité, déjà
avertie de quelques mauvais desseins pour la soirée. Us arrivèrent au
moment où les factieuxprenaient la fuite, et en arrêtèrent quelques-uns;
ils eurent bientôt dispersé aussi les rassemblements que cet incident
avait occasionnés.
» A peu près à la même heure, deux gardes nationaux de la 7* légion
furent désarmés, en passant dans la rue Brisemiche, par une autre
bande obéissant évidemment à la même direction.
» Sur ces entrefaites, quelques individus armés de fusils de chasse
parcouraient le quartier.
ii Mais ces désordres, comprimés dès le principe avec vigueur, n’ont
pas eu d’autres suites. De nombreux détachements de garde nationale,
de troupes de lignede garde municipale, arrivés instantaténement, ont
continué à parcourir les boulevarts Saint-Denis et Saint-Martin, et les
quartiers environnants, pour disperser quelques attroupements qui
s’étaient formés à la suite de cette tentative insensée ; ces rassemble-
ments ont été facilement dispersés, à neuf heures et demie, la tranquil-
lité, troublée dans ce quartier seulement, était entièrement rétablie.
ii Plusieurs des meneurs des plus importants ont été arrêtés avant-hier
soir et matin, et livrés à la justice.
h Un homme à cheval avait été remarqué donnant des ordres à sa trou-
pe au moment de l’attaque du poste ; signalé aux patrouilles, il fut re-
connu dans la soirée et poursuivi vivement par quatre cavaliers de la
ligne, mais il est parvenu à leur échapper. »
— Voici, sur l’événement de la rue Mauconseil, le rapport du sergent
Areez, qui était chef du poste. Ce rapport est adressé au colonel :
« A sept heures et demie, une quarantaine d’hommes sont venus se
jeter sur mon factionnaire placé devant le corps-de-garde et l’ont en-
levé malgré la vive résistance de sa part. Au même instant, un attrou-
pement d’individus débouchant par l’entrée de la rue Mauconseil, du
côté de la rue Saint-Denis, est venu pour enlever mon poste.
» Le caporal Armand s’est précipité sur la porteavec quatre hommes
et a fait croiser la baïonnette ; on a cherché à le désarmer, mais il a tenu
bon. J’ai fait charger les armes au reste de ma troupe ; le caporal a tou-
jours défendu l’entrée du corps-de-garde.
» Le factionnaire avait été enlevé, je me suis précipité avec mes
hommes pour le reprendre, et je suis parvenu à reprendre son arme et
à le délivrer de leurs mains en chargeant sur eux à coups de baïonnettes
sans être obligé de faire feu.
» La foule a emporté les individus qui ont été blessés par nos baïon-
nettes. Je n’ai pu enarrêter aucun.
» J’ai de suite envoyé meshommes àla Nouvelle-France, pour vous
prévenir; j’ai dissipé l’attroupement, placé des factionnaires à l’entrée
des rues qui se trouvent devant mon poste. Quelques gardes nationaux
sont de suite arrivés pour me prêter main fort.
» Plusieurs personnes soupçonnées d’avoir pris part à cette tentative
ont été arrêtées avant-hier au soir et hier. »
— Le sergent Areez est nommé membre de la Légion-d’Honneur.
— Des personnes ordinairement bien informées assurent que l’Autri-
che,peu soucieuse de courir les chances de la guerre.fait en ce moment
des ouvertures positives à la France, afin de prévenir tout conflit eu-
ropéen; mais elle insinue en même temps qu’elle désirerait que le
ministère renonçât à convoquer les chambres avant l’époque ordinaire
de leur réunion. A cela il aurait été répondu que notre gouvernement,
sans entendre repousser les bons offices d’aucun autre, voulait toutefois
rester le maître absolu de sa direction et des mesures qu'il croirait de-
voir prendre.
Il rie paraît pas certain que le commodore Napier ait capturé autant
de navires égyptiens qu’on le dit, mais il est positif qu’il en a pris quel-
ques-uns. Cette violation du droit des gens ne restera pas impunie, et
le gouvernement demandera sans doute satisfaction au cabinet anglais
d’un acte que l’on qualifie justement de piraterie. {Temps.)
S*§*5’Sâoss«&;îBâe «Se Sa presse Srssaaçaiise.
Les journaux de Paris s’occupent encore aujourd’hui des nouvelles
d’Orient; et tandis que les organes de l’opposition en font ressortir toute
la gravité, ceux du ministère tout en les rapportant seipblent vouloir en
atténuer la portée. Ils s’accordent néanmoins pour flétrir l’attentat du
commodore Napier, qui, en s’emparant de quelques navires égyptiens
avant même que le traité n’eut été signifié au vice-roi, a commis un
acte qu’on ne peut qualifier que de piraterie.
Le JOURNAL DES DEBATS. Les tentatives du commodore Napier
semblent prouver à ce journal que le traité de Londres n’est pour les
quatre puissances qu’un misérable chiffon ; que ces pompeuses délibéra-
tions sur les droits de la conquête, ce profond respect de la légitimité
ottomane et cette sainte horreur de l’usurpation, ne sont qu’une vraie
parodie, et qu’on veut pousser la mauvaise foi jusqu’à la fanfaronnade.
« Nous ne nous sommes, dit-il, rien dissimulé de ces objections; tous
ces doutes ont aussi leur gravité. Mais tons les raisonnements, toutes
les présomptions du monde ne détruisent pas les faits accomplis et te-
nus pour certains. Un officier supérieur de la marine anglaise a sommé
les Egyptiens d’évacuer la Syrie, et cela le 14 août! Et une escadre an-
glaise se met à capturer les vaisseaux égyptiens ! C’est-à-dire, que selon
les lois admises par tous les peuples civilisés, le commodore Napier a
tout juste autant de droits pour ordonner l’évacuation delà S>Trie, qu’en
aurait un amiral français pour sommer les autorités anglaises d’évacuer
Malte et Corfou, ou pour aller saisir des vaisseaux marchands à l’em-
bouchure de la Tamise.
Nous avons donc très justement qualifié les nouvelles d’Orient quand
nous leur avons attribué une immense gravité.»
Le Journal des Débats fait remarquer que le Constitutionnel, après
avoir jeté un cri lamentable et retentissant à la première nouvelle
de laj signature du traité de Londres, laisse tomber son enthousiasme
belliqueux alors que ce traité, dont la signature l’a tant ému, a reçu
un commencement d’exécution. Il s’étonne d’une pareille conduite de
la part des organes du ministère et se demande s’il faut redire avec le
personnage de la comédie : « Qui est-ce donc qu’on trompe ici ? »
Le COURRIER FRANÇAIS annonce que l’amiral Lalande est chargé
d’organiser l’escadre de réserve que l’on Complète en ce moment à
Toulon.
» Le gouvernement, dit-il, a voulu reconnaître les services de cet
officier, en lui donnant lin commandement aussi important. Ainsi tom-
bent les bruits de disgrâce que l’on avait répandus. Mettre le contre-amiral
Lalande à la tète de l’escadre de réserve, c’est le nommer de fait vice-
amiral. »
Ce journal s’émeut des efforts que le parti doctrinaire dirige contre
M. Thiers, mais il compte sur le patriotisme des hommes éminents de
l’ancien parti doctrinaire qui ne veulent pas, dit-il, prêter l’oreille à ces
intrigues dans un moment de crise qui peut mettre en péril l’hon-
neur ou l’existence de la nation.
Le NATIONAL et le COMMERCE s’élèvent vivement contre un article
du Journal des Débats qu’ils résument ainsi : « La nation est trop divisée
par les factions pour qu'elle puisse songer à faire la guerre. »
« Certes, dit le premier de ces journaux, nous devions nous attendre à
voir les conservateurs s’emparer de ce thème, mais nous avouons que
les développements qu’y ajoute le Journal des Débats passent ce que
nous pouvions imaginer.
h Les gouvernements étrangers, suivant ce journal, se rient de nous
quand nous parlons de nos années, de notre marine, de nos finances, et
cela parce que fréquemment il y a des émeutes dans nos rues et des
coups de fusil de tirés. Mais ces émeutes, pourquoi existent-elles, pour-
quoi respire-t-on si souvent l’odeur de la poudre dans les carrefours de
Lyon et de Paris, si ce n’est précisément parce qu’il y a en France une
énergie surabondante qui ne demanderait pas mieux que de s’employer
sur d’autres champs de bataille ! Les étrangers,croyez-moi, ne s’y trom-
pent pas.et. loin de rire de nos discordes civiles, ils voient un su jet sé-
rieux de réflexion dans cette ardeur quisi souvent fait de chaque Fran-
çais un soldat. »
«Essayez donc un peu. ajoute-t-il, de faire reluire le bronze de vos
canons ailleurs que sur le Carrousel et la Grève. Tournez-en la bouche
contre les étrangers qui nous insultent et se rient de nous, non pas à
cause de nos troubles, mais à cause des lâchetés que nous supportons.
Répondez aux agressions des Anglais qui enlèvent, sans déclaration de
f lierre, les vaisseaux île notre allié ; aux armements de la Russie, qui,
ans ce moment même, a peut-être jeté l’ancreàla pointe du sérail. Et
ne craignez pas d’être emportés dans le grand mouvement qui se fera
malgré vous s’il ne se fait pas avec vous. Du jouroù le gouvernement de
la France, quel qu’il soit, prendra une attitude digneau dehors, aucune
faction au dedans ne fera naître le trouble : car la France, nous en som-
mes sûrs, en face du danger commun, restera unie et ajournera toute»
les questions intestines. Il n’y aurait pour vous de péril quesi vous agis-
siez trop tard ou n’agissiez point; si vous laissiez pesersur vonsle soup-
çon de trahison, auquel le Journal des Débats ne songe qu’avec effroi,
dans votre intérêt comme dans lesien. En vous tenantee langage, nous»
avons droit d’être écoutés, car il est certain que nos paroles ne sont nul-
lement dictées par des intérêts de parti. Si nous n’étions animés, en
effet, que par des haines personnelles, ou par le désir de voir un chan-
gement de forme dans le gouvernement, nousne pourrions mieux faire
que d’appuyer les conseils du Journal des Débats. Nous serions sûr»
alors d’arriver promptement au but de nos Vœux, et de voir la France
rejeter bientôt avec dégoût les hommes du pouvoir avec leur système
de couardise. :>
Affaire de niaiimne LalfargCi
COUR D’ASSISES DE TULLE.
CORRESPONDANCE ENTRE M. ET !H"« LAFFARGE.
L’instruction a recueilli une correspondance très volumineuse. Eu
voici quelques fragments qui ne seront pas lus sans intérêt :
En 1859, les affaires de M. Laffarge étaient dans un état déplorable,
Veuf depuis quelques mois seulement, il voulut chercher dans un second
mariage les moyens de rétablir sa fortune. Perdu de crédit dans son
pays, il vint àParis, et s’adressa pour trouver un parti à différents agents
matrimoniaux. M. de Foy était le premier qu’il devait consulter. Ses rap-
ports avec lui sont attestés par cette lettre écrite à M. Laffarge:
M. de Foy à M. Laffarge.
« 25 juillet,
« Monsieur, je suis resté aujourd’hui dans la plus fausse position dec>
que vousn’êtes ni venu nin’avez répondu à mes lettres. Je vOussauraigré
quellesque soient vos raisons, de ne pas mam pierde vous rendre demain,
mercredi, avant huit heures du matin, chez moi, ayant promis formel-
lement de rendre une réponse avant neuf heures. Je m’y suis engagé
d’honneur et je compte sur vous. »
L’intervention de M. de Foy, à ce qu’il parait, ne Suffisait pas à l’impa-
tience de M. Laffarge, qui en "même temps s’était, mis en rapport avec ia
comtesse de Chant perey, dont la correspondance a êié trouvée dans les ■
papiers du défunt.
LETTRES DE »,A COMTESSE DE flIIAMPEREY.
1» A Mad. IJieureux de Fonlavanm.
h Si juillet 1839. .
« Madame, je désire que M. Laffarge puisse convenir à votre amie ; je
ne doute pas deson bonheur d’après tous les renseignements que j’ai
eus sur la moralité de ce jeune homme. Je me trouverai heureuse, ma-
dame, de pouvoir vous être agréable, et je vous prie de croire, etc. >>
‘F A M, Laffarge.
« 54 juillet 183».
« Monsieur, je m’empresse de répondre à votre billet, pour vous dire
que je suis peinée que vous ne soyez pas venu ce matin ou hier. Je suis
allée voir Mad. Lhetireux, amie de l'Anglaise. Elle vous attendait à trois
heures chez elle. Je viens de lui écrire que votre visite sera pour de-
main. A cet effet, je joins un mot que vous lui porterez de deux à trois
heures. N'allez pas ia faire a! tendre. Arrangez-vous pour être à l'heure.»
9» A M. I.affnrge.
■« 31 janvier 1839.
« Monsieur, dans tout votre bonheur, je vous' prie de ne point égaféé
ma demande que je vous ai confiée, seul titre qui me donne l’klée cl# |