Full text |
Le défenseur de l’accusé, M. Lagrange, major d’état-major ,
a demandé qu’on entendit de nouveaux les témoins à décharge. On
croit généralement que l’avocat Brofferioa travaillé à la défense de
l’accusé. — Le général Ramorino a été transféré de la Citadelle au
palais du conseil de guerre en voilure, précédé et suivi de huit gen-
darmes à cheval : la foule était nombreuse sur son passage.
Le3mai, le bruit courait à Turin que les négociations pour la
paix allaient s’ouvrir prochainement. Le ministre Brüch avait reçu,
disait-on, de nouvelles instructions, et l’on ajoutait que le gouverne-
ment Piémontais accéderait à l’occupation d’une partie de son terri-
toire et des deux forts de Gênes par les Autrichiens. Mais cette
nouvelle paraissait mériter d’auu.nt plus confirmation que le gou-
vernement s’occupait avec aclivjlé de la réorganisation de l’armée
pour recommencer les hostilités en cas de besoins.
ESPACEE.
Madrid, 2 mai. — 11 y a eu aujourd’hui, selon l’usage, procession
et défilé de cortège dans les rues encombrées de curieux.
La reine Isabelle et le roi doivent venir à Madrid, le 5 de ce mois,
pour assister aux courses de chevaux qui auront lieu le 6 et le 7.
Leurs majestés repartiront sur le champ pour Aranjuez.
La commission du budget a enfin donné lecture de son rapport.
On dit qu’il y aura deux votes particuliers ou opinions isolées de com-
mission. On ne sait pas si ces votes particuliers seront discutés préa-
lablement, ou si M. Mon, ministre des finances, se bornera à deman-
der l’autorisation pure et simple de continuer à toucher les revenus.
Les derniers bulletins de Catalogne sont toujours favorables. Les
Carlistes ont entièrement disparu des provinces de Lerida et Gironne.
Le 2 mai, fête nationale, il n’y a pas eu de bourse à Madrid. — Au
Café où l’on traite les affaires, les jours fériés, le 3 p. c. est resté
faible à 2b J/8.
ALLLUÀGVE.
Berlin, 6 mai. — On lit dans le Moniteur prussien :
Le régiment de grenadiers empereur Alexandre a été expédié au-
jourd’hui pour Dresde par le chemin de fer pour aider les troupes
royales saxonnes à maintenir l’ordre et la tranquillité. Des forces
considérables sont prêtes pour suivre immédiatement ce régiment en
cas de besoin.
Les nouvelles de Dresde et de Leipsig occupent exclusivement l’in-
térêt public. Un voyageur arrivé de Dresde est porteur d’un manifeste
du gouvernement provisoire qui invile les troupes et l’autorité civile
à l’obéissance et promet de maintenir sévèrement l’ordre.
Les troupes parties ce matin pour Dresde sont fortes de 2,000 hom-
mes.
Le ministre Slruve est arrivé de Hanoyrecn qualité de plénipoten-
tiaire pour prendre part aux conférences sur la question allemande.
(Correspondance générale.)
Nous empruntons l’article suivant à la Gazette d'Augsbourg :
Les événements se pressent d’une manière inouïe; l’heure décisive
approche à grands pas. Des plans tenus longtemps secrets se dévoi-
lent : la Prusse, le Hanovre, la Saxe ont dissous leurs secondes
chambres, à came de leur altitude dans la question allemande.
La Bavière fera-t-elle de même? Les ministres y regarderont sans
doute à deux fois avant de se charger d’une telle responsabilité ;
car, à en conclure par les symptômes qui se produisent, un tel ajour-
nement de la décision, dans un moment comme celui-ci, aurait de
graves conséquences. La révolution allemande est évidemment en-
trédans sa seconde phase, et, de même que l’année dernière le but
général était la représentation du peuple allemand au siège de feu
la diète germanique, c’est aujourd’hui la reconnaissance de la consti-
tution.
La majorité du peuple ne s’inquiète pas des dispositions de la con-
stitution en particulier, mais il veut voir le principe reconnu, et en-
trevoit derrière le refus de reconnaissance, d’autres intentions toutes
réactionnaires. Que les ministères se défendent tant qu’ils veulent
contre ces craintes du peuple, cela ne leur servira de rien, car on ne
peut combattre de telles convictions, surtout dans un moment de dé-
cision comme celui-ci. Les ministres ne peuvent se dissimuler, qu’ils
sont moralement sur un terrain défavorable, car sur eux pèse la dé-
fiance qui s’est assemblée contre tous les gouvernements dans les 30
dernières années. Il ne sert à rien de dire : Ce sont de nouveaux
hommes, étrangers aux anciennes fautes.
Aucun d’eux ne s’est détaché, par un acte bien marqué de l’ancien
système, de l’esprit de particularisme, et c’est ce qui fait leur faiblesse
dans l’opinion publique. Qu’on ne s’abuse pas à cet égard, et qu’on
se garde surtout de l’illusion fatale de croire que l’on pourra résister
à l’opinion publique, surtout si elle est soutenue par les représen-
tants légaux de la nation. Le moment est défavorable. Le gouverne-
ment autrichien est sur le point de faire la démarche la plus grave,
en invoquant contre ses sujets les secours des Russes, et le gouverne-
ment prussien est soupçonné de ne pas rester étranger aux mouve-
ments des Russes, car la dissolution de la seconde chambre prus-
sienne et la déclaration contre le parlement de Francfort arrivent
en même temps que ces mouvements.
Malheur à nous, si le soupçon, si la conviction mûrit en Allema-
gne que des princes allemands sont d’accord avec la Russie pour ré-
tablir l’ancien étal de choses ? Alors la guerre civile s’allume,et nous
n’avons pasle moindre doute sur son issue Mais à quel prix rempor-
terait-on la victoire ? Nos armées, forcées de s’opposer à des ennemis
intérieurs et à des troubles, feraient-elles cause commune avec l’en-
nemi de l’empire contre leur propre pays ? Et qu’arriverait-il alors ?
Nous sommes au bord d’un précipice, et un langage, qui, dissimule
tout ce qu'il y a de désagréable ne sert ici de rien. Croit-on, dans de
telles circonstances, pouvoir rester dans les limites de la constitution?
Cette question dépasse de beaucoup les limites des Etais en particu-
lier, et quiconque n’agit pas d’apres ses propres lois, mais d’après la
manière d’agir des autres, s’est placé sur un terrain où il peut à cha-
que instant se trouver dans Je cas de manquer à la constitution. Et
sur qui retombera la responsabilité ? Qui demandera-t-on compte ?
Aux ministres responsables, sans la signature desquels il n’est pas
d’acte politique légalement valable.
Voici les détails que donne la Gazette universelle allemande, sur
les événements de Dresde :
Dresde, 3 mai. — Une heure de relevée. — Plusienrs détache-
ments d’infanterie entrent dans le palais. Six canons ont été placés
dans la caserne de la cavalerie sous l’escorte de l’infanterie, et plu-
sieurs autres canons dans l’arsenal. L’artillerie a traversé le pont,
marchant derrière ses canons, au milieu des hourrahs. Toutes les en-
trées du palais royal sont fermées et barrées en dehors par la foule.
Une foule considérable parcourt les rues ; plusieurs orateurs pronon-
cent des discours. En plusieurs endroits on commence à obstruer le
passage.Les délégués de la ville se réunissent en ce moment en séance
extraordinaire, pour délibérer sur la formation d’un comité de dé-
fense. La garde communale a été rassemblée par la générale. On
avait forcé les portes des églises, on sonnait le tocsin. Un rassemble-
ment attaque 1 arsenal ; la troupe le défend; on fait feu fréquem-
ment et l’on a vu porter sur le Nouveau-Marché plusieurs personnes
tuées.
Quatre heures et demie. — Le peuple vient de faire une première
attaque sur l’arsenal, et le bataillon prince Albert, qui y est resté,
vient de faire feu à trois reprises contre les assaillants. Cinq tués et
plusieurs blessés sont les premières victimes. On emmène les tués
dans des voitures au milieu des cris de vengeance. Le peuple s’est
emparé de l’Hôtel de ville, sur le balcon duquel flotte le drapeau tri-
colore allemand. Une foule immense réunie devant le palais royal,
jette des pierres aux fenêtres de l’appartement du roi, deux fenêtres
sont brisées. -
De cinq à six heures — On réunit quatre canons, accompagnés
de plusieurs escadrons de cavalerie légère, sur la Rruckenplatz, de-
vant le palais du roi. On entend des coups de canons de l’arsenal. Le
3“ bataillon de la garde communale, accueilli par un feude mitraille
compte plusieurs tués et blessés. On élève des barricades. La Schloss-
gasse est encombrée de barricades, il en est de même du Nouveau-
Marché, au bout duquel s’élève une barricade qui atteint le premier
étage des maisons environnantes. Le pavé de cette rue est arraché,
pour mettre obstacle aux manœuvres de la cavalerie.
De sixàsept heures.—On a enfoncé la porte de l’arsenal. Mais au
moment où elle cède, un coup de canon parti de l’intérieur se fait
entendre, et de nouveau tombent des tués et des blessés. Le collége
des délégués de la ville et une partie du conseil communal se sont
déclarés en permanence et tiennent leurs séances en ce moment. La
foule demande les armes à grands cris ; le docteur Minkwilz, le lieu-
tenant-colonel Heinlze. l’ex-député Tzschirner paraissent au balcon
de l’Hôtel de-Ville, exhortant à la patience, en promettant de se
procurer des armes et des munitions. Le collége des délégués de la
ville et le conseil communal envoient au roi une députation qui trou-
ve S M. très émue et n’en obtient qu’un refus. On semble avoir or-
ganisé une sorte de gouvernement provisoire et avoir chargé M.
Tzschirner de la direction de l’insurrection.
Toute la vieille ville et quelques faubourgs sont au pouvoir des
masses ; l’insurrection a changé de caractère; ce n’est plus la ques-
tion allemande qui occupe la foule, et des tendances républicaines
semblent de plus en plus se produire.
De sept à neuf heures du soir. — Il semble qu’on exerce dans
l’intérieur de la ville une sorte de terrorisme, et que le parti républi-
cain démocratique veut seul continuer la lutte. La fusillade cesse, ce
qui fait présumer qu’on a consenti des deux parts à une petite trêve.
A dix heures, on entend de nouveau battre la générale et faire feu.
L’armistice est donc déjà terminé.
4 mai, cinq heures et demie du malin. — Le combat a recom-
mencé à trois heures dans la Schlossgrasse. On entend le tocsin et la
fusillade. Les troupes ont pris deux barricades dans la Schlossgrasse.
Il n’est pas entré à Dresde de troupes étrangères. (Gaz.univ. allem.)
Voici ce que dit la Réforme allemande :
« Le mouvement, commencé le 3 mai, aurait fini par un combat
entre les troupes royales, d’une part, et les membres de la sociélé
républicaine de gymnastique (Turner), les élèves de l’école techni-
ci de la garde communale, d’autre part. Les troupes dont le nombre
ne s’élevait qu’à 1.800 hommes, se sont maintenues en possession
d’une partie de l’arsenal, de la terrasse de Brühl et du château Le
roi, protégé par les troupes, a passé à pied, avec la reine, le pont de
l’Elbe et s’est rendu au KOnigstein. Dans la matinée du 4, les troupes
renforcées par quelques compagnies venues de Leipsick, s’étaient re-
tirées dans la Neusladt, mais en se maintenant sur le pont de l’Elbe,
et après avoir pris deux barricades dans la rue du Château. Le tocsin
sonnait et on entendait des feux de mousquelerie sur plusieurs points.»
Une correspondance de Berlin, adressée à la Gazette Cologne,
ajoute les détails suivants :
• Lesnouvelles.de Dresde et de Leipsick absorbent à elles seules
toute l’attention publique. La nouvelle de la prochaine arrivée de
troupes prussiennes avait déjà augmenté l’effervescence des habi-
tants de Dresde, lorsque l’on sut qu’en effet deux régiments prussiens,
arrivés par le chemin de fer, venaient d’occuper le quartier de la
ville, dit t’AHsladt.On sonna le tocsin, et le peuple, précédé par une
partie de la garde communale, se porta en foule à l’arsenal, où des
forces militaires considérables avaient été réunies et accueillirent les
assaillants à coups de mitraille qui tuèrent ou blessèrent un grand
nombre de personnes. Le 3 mai, à 7 heures du soir, le combat durait
encore ; la plus grande partie de la ville était au pouvoir de l'insur-
rection.Un gouvernement provisoire fut institué et le député Tzschir-
ner fut chargé de la direction ultérieure du mouvement. 11 promit
desarmes; et un manifeste, signé de MM. Tzschirner, Heubner cl
Todt, réclama le concours des troupes et des autorités civiles pour
maintenir l’ordre et la tranquillité.
HONGRIE.
On écrit de Vienne, le 3 mai :
Le bruit court que Raab est occupée par les Hongrois, que ceux-ci
sont également à trois lieues de Presbourg. 11 est surprenant que le
gouvernement garde un silence absolu. (Gaz. constitut.)
Bem est déjà en possession de tout le Banat et il s’est mis en mesure
d’opposer de grands obstacles à l’entrée des Russes en Transylvanie
par les défilés des montagnes. 11 se confirme aujourd’hui que le corps
d’arméede Jellachich a été entièrement anéanti près de Peterwardein
et sur le bas Danube.
Aujourd’hui encore sont arrivés ici des transports considérables de
malades et de blessés du transport de la guerre.
Les Russes doivent arriver aujourd’hui à Gôding et prendre la
route de Presbourg. Il doit être formé provisoirement un camp à
Schlosshof dans le voisinage de cette ville. Le quartier-général du
commandant en chef a été transféré d’OEdenbourg à Luxembourg,
premier relai de poste en quittant Vienne.On parle d une bataille dans
les parages d’OEdenbourg, mais malgré le voisinage de ce champ de
bataille, on manque de toute espèce de renseignemens dignes de foi.
D’après les journauxséini-officiels de Vienne,Bem se serait emparé de
Temeswar. (Gaz. de Cologne.)
D’après les dernières nouvelles de Peslh, il commence à y régner
un terrorisme terrible. Il suffit de désigner aux Szikes une personne
comme appartenant au parti autrichien, pour qu’ils l’assassinent en
pleine rue avec leurs haches.
Les communications entre Pesth et Bude qui avaient encore lieu
au moyen de nacelles, ont été entièrement rompues. Bude avec sa
faible garnison paraît entièrement coupée, car il est certain que les
Hongrois occupent aussi la rive droite du Danube entre Pesth et Co-
morn. Raab est très probablement en leur pouvoir.
Le général russe de Berg est parti aujourd’hui pour Presbourg
avec le prince Schwarzenberg, président du conseil, pour avoir une
entrevue avec le général en chef Welden.
Le corps auxiliaire russe entrera en Hongrie en deux colonnes. La
première forte de 45,000 hommes occupera la contrée depuis
Tyrnau jusqu’à la rive gauche du Danube et formera l’aile droite de
l’armée sur cette rive. L’autre colonne forte de 40,000 hommes
entrera par Farnspel. (Rêf. allemande.)
MEUNIERES NOUVELLES.
Francfort, 6 mai.— Les nouvelles de l’agitation du Palatinat, et
des tristes événements de Dresde, ne font qu’accroître l’agitation qui
règne à Francfort. On voit dans les rues une .foule considérable, qui
s’y entretient partout vivement et bruyamment. Les autorités mili-
taires semblent être sur leurs gardes. Les soldats qui se sont rendus
aujourd’hui pour monter la garde sont au nombre de 300 hommes
d’infanterie, 40 et quelques chevaux et quatre canons.
Par suite des nouvelles arrivées du Palatinat, le bataillon du 6»
régiment d’infanterie bavaroise, en garnison ici. est parti ce matin
pour le théâtre du mouvement et a été suivi plus tard par l’escadron
de chevau-légers bavarois.
On dit que le pouvoir central a envoyé dans le Palatinat un com-
missaire del’empire et que,à la sollicitation desdéputés du Palatinat,
il a choisi pour cette mission M. Eisentuck, vice-président de l’assem-
blée nationale et membre de la gauche.
P.-S. — L’extrême gauche vient de publier une proclamation. La
ville est donc une grande excitation, mais tranquille, à l’exception
de! quelques attroupements, occasionnés par les soldats bavarois de
garde, qui ont arraché des coins de rues cette proclamation.
(Gaz. de Cologne.)
HESSE-DARMSTAD.
Darmstad, 6 mai.— Les esprits sont agités ici au plus haut dégré.
Les associations démocratiques, dans une réunion tenue hier, ont
décidé la formation d’un corps franc destiné à entrer dans les rangs
de ceux qui veulent défendre la constitution de l’empire.Un régiment
d’infanterie bavaroise est arrivé ce malin de Francfort par un con-
voi spécial.
SAXE.
Dresde, 5 mai.— La famille royale se trouve à Konigstein, où elle
est arrivée hier avec tous les ministres sans avoir été le moins du
inonde inquiétée en route.
Les minisires MM. de Beust etRabenhorslsont actuellement de re-
tour à Dresde.
Par suite d’un armistice conclu hier, les troupes ont évacué la
vieille ville à l’exception du palais, de la place du Palais, de la ter-
rasse de Bruhl et de l’arsenal qu’elles occupent encore, de même que
les ponts et la nouvelle ville restée parfaitement tranquille. Les ar-
quebusiers de Leipsig sont arrivés hier matin.
Le gouvernement provisoire a publié hier après-midi la proclama-
tion suivante :
« Concitoyens 1
» Le roi et les ministres se sont enfuis, le pays est abandonné à
lui-même sans gouvernement, la constitution de l’empire est réniée I
» Concitoyens, la patrie est en danger, lia été nécessaire de for-
mer un gouveinement provisoire ; le comité de sûreté de Dresde et
les députés du peuple ont nommé les citoyens soussignés pour former
le gouvernement provisoire. La ville de Dresde a donné à la patrie
l’exemple le plus glorieux et elle a juré de vivre et de mourir avec
la constitution de l’empire. Nous plaçons la Saxe sous la protection
des gouvernements de l’Allemagne qui ont reconnu la constitution
de l’empire.
Nous exigeons l’obéissance la plus rigoureuse aux ordres du gou-
vernement provisoire et du commandant en chef le lieutenant-colo-
nel Heinlze.
» Concitoyens, l’heure décisive est arrivée, maintenant ou jamais !
La liberté ou l’esclavage ! choisissez.
Le gouvernement provisoire,
Tzschviner, Huebne, Tadt.
Une autre proclamation adressée aux soldats, les exhorte à tendre
au peuple une main fraternelle et à concomir avec lui à la mise à
exécution de la constitution du pays et de celle de l’empire.
PRUSSE.
Brkslad, 3 mai. — Suivant tes nouvelles parvenues aujourd'hui
de Cracovie, les Russes n’y étaient pas entrés à la date d’hier soir ; il
semble presque.d’après les bruits en circulation, qu’ils n’y entreront
pas. Le bruit se répand que l’intervention russe en Hongrie a été
ajournée par suite d’une note menaçante de l’Angleterre contre cette
intervention. Avant-hier est arrivée de la cour impériale d’OIlrautz à
Cosel le prince Lobkowitz, qui se rendait à Sl.-Pélersbourg.
(Gazelle de Silésie )
HONGRIE.
Les dernières nouvelles mandent que le général Wohlgemuth se
trouve avec son corps dans les contrées de la Waag et que le géné-
ral Schlick s’avance vers Comorn avec des forces considérables. On
évalue à 60,000 hommes le gros de l’armée qui se trouve près de
Presbourg. (Moniteur prussien. )
FRANCE.
Paris, 7 mai. — Les clubs et les sociétés secrètes, voulant profi-
ter de l’émotion causée dans le camp îles invalides par l’insuhordina-
tion d’un certain nombre de soldats du 7« léger, envoient des ouvriers
rôder autour du camp. L’autorité redouble sa surveillance sur les
mouvements de ces rôdeurs : il devient très-urgent que la nouvelle
assemblée se réunisse.
L’arrestation du sergent Boischot , du 7» léger, est présentée au-
jourd’hui par les feuilles démocratiques et sociales sous les propor-
tions giganlestes d’un grave événement. Comme on est accoutumé
à toutes ces exagérations de l’esprit de parti à qui il est interdit de
faire un exposé impartial et véridique des faits, sous peine de se dis-
créditer, on ne se laisse pas abuser par des récils que la passion et le
désii d’égarer l’opinion ont seuls dictés, il s’agittout simplement d’un
de ces actes d’insuboidination qui, sous tous les régimes et dans tous
les régiments éclatent et sont aussitôt vigoureusement comprimés.
Des soldats mutinés ont voulu délivrer ce sous-officier Boischot déte-
nu pour des motifs sérieux ; ce militaire a été maintenu en prison ;
les lois de la discipline ont été énergiquement rétablies, et il ne sera
pas permis d’y déroger.
On assure que le gouvernement va retirer le commandement de
l’expédition à M. Oudinol et le donner au général Bedeau.
Deux personnages qui ont joué un très-grand rôle dans la révolu-
tion de Février ne reparaîtront probablement pas à l’Assemblée lé-
gislative; M. de Lamartine et M. A. Marrast; j’ai hâte de dire que M.
de Lamartine ne le désire pas, bien qu’il soit encore porté sur la liste
préparatoire des Amis de la Constitution. Si je suis bien informé,
M. de Lamartine, qui comprend tout le néant de la popularité politi-
que, serait résolu à demander aux lettres cette illustration qu’elles
savent faire pour lui impérissable. La réélection de M. Marrast, plus
que compromise à Toulouse où il n’est porté ni sur la liste rouge,
ni sur la liste modérée, est impossible. En ce moment, il souffle con-
tre M. Marrast des quatre points cardinaux de la publicité, un vent
de réprobation. .
Expédition frauçaiise h Rome.
On lit dans le Moniteur :
«D’après une dépêche télégraphique qui est parvenue au gouverne-
ment,le général Oudinol se serait mis en marche sur Rome,où,suivant
tous les renseignemens, il était appelé par le vœu de la population.
Mais ayant rencontré de la part des étrangers qui occupent Rome,
une résistance plus sérieuse qu’il ne s’attendait à ia trouver, U a pris
position à quelque dislance de la ville, où il attend le reste du corps
d’expédition. >
On lit dans la Sentinelle de Toulon, du 4 mai :
• Nous avons reçu des nouvelles de Rome par le Vèloce, parti de
Givila-Vecebia le 1» mai Nous avons annoncé que l’armée s'étai1
mise en marche le 28; malgré les entraves qu’elle a rencontrés sur
la route, elle est arrivée le 30 sous les murs de Rome. Le général en
chef a envoyé le capilaineOudinot en parlementaire,qui a été retenu.
Nos soldais se sont avancés, mais ils ont été accueillis par des coups
de feu partis des maisons où s’étaient retranchés des italiens et des
Lombards. Nos troupes ont riposté ; mais du moment qu’on élait dé-
cidé à résister, le général rn chef a fait retirer ses troupes vers Cas-
telgimlo, à quatre lieues de Rome. Il ne se serait peut-être pas avancé
s’il avait pu prévoir la moindre résistance delà partdesltaliens.il
ne compte faire aucune nouvelle enlreprise avanl d’avoir reçu les
renforts de France et surtout les pièces de siège. — Le bruit s’est ré-
pandu ici que nous avions permit 600 hommes; ce fait est inexact.
Nous avons eu un seul homme tué et 23 blessés. »
On lit dans le même journal ;
Par la frégate VOrénoque, arrivée ce soirdeCivita-Vecchia, qu’elle
a quitté le 2 mai à midi, nous recevons de nouveaux détails sur la
situation de l’armée expéditionnaire. Il paraît que nos troupes,
réunies en grand nombre, ont essayé de nouveau de pénétrer dans
Rome, et qu’elles auraient rencontré une vive résistance. Une com-
pagnie des tirailleurs de Vincennes s’étant trop avancée dans une
rue, on a cherché à la dégager, mais ce n’a pas été sans perte. Une
compagnie de voltigeurs du 20«ya été entièrement écrasée par un feu
bien nourri qui partait des fenêtres. On a aussi à regretter la mort
d’un capitaine d’artillerie, aide de camp du général Oudinot. En ré-
sumé, nous comptons 180 morts et environ 400 blessés. Notre armée
s’est retirée à Sainl-Paolo, à une lieue et demie de Rome.
Des lettres de Toulon confirment la triste nouvelle de l’échec es-
suyé par le corps expéditionnaire d’Italie, à son arrivée dans les fau-
bourgs de Rome. Le fils du général commandant l’expédition, en-
voyé en parlementaire, aurait été retenu par les triumvirs. Un capi-
laine d’artillerie, son officier d’ordonnance aurait été tué. On appré-
cie différemment le nombre des soldats tués ou blessés ; les uns le
porlenl à huit cents ; suivant les autres il ne dépasse pas 280 à 300.
L’expédition a dû rétrograder en attendant son artillerie.
C’est une guerre de barricades que nos soldats ont eu à soutenir,
et les principaux organisateurs de la résistance paraissent être MM.
Laviron, Pelhes, et autres insurgés de juin, réfugiés à Rome depuis
plusieurs mois.
Les journaux semi-officiels du soir publient la note sui-
vante :
« Les journaux socialistes font grand bruit de l’arrestation du
sergent-major Boischot, molivée, disent-ils, par la présence de son
nom sur la liste des candidats du parti rouge ; ils donnent aussi (ou-
ïes les proportions d’une insurrection à une échaffourée dont se son!
rendus coupables, dans la soirée de vendredi dernier, quelques sol-
dats pris de vin.
» L’imagination et la lionne foi habiluelledu Peuple et de ses con-
frères se retrouvent dans l’exagération de ce récit.
» Les faits réels sont beaucoup moins dramatiques; les voici :
» Le sergent-major Boischot était depuis plusieurs jours déjà aux
arrêts pour avoir tenu de propos contre la discipline , quand son
nom a figuré tout à coup sur la liste des candidats socialistes.
» Dans la soiréede mercredi, quelques soldats revenant de la bar-
rière, ont tenté de le mettre en liberté; mais l’énergie de l’officier
supérieur commandant le poste les a empêchés de pousser jusqu’au
bout l’accomplissement de leur coupable dessein.
» Une certaine agitation, entretenue par des meneurs bien con-
nus, ayant continué à se manifester parmi quelques soldats du 7«
léger, l’autorité supérieure a fait transférer le sergent Boischot à
Vincennes.
« il n’y a là dedans, on le voit, rien autre chosejqü’une affaire
de discipline à laquelle la politique est complètement étrangère »
— « P. S. Nous apprenons, au moment de mettre sous presse,
qu’à l’instant où se sont présentés les gendarmes chargés de conduire
le sergent-major Boischot à Vincennes, quelques mutins ont voulu
s'opposer à son enlèvement. Mais l’intervention des officiers a suffi
pour mettre fin a ce commencement de désordre, et le départ de Boi-
schot pour Vincennes s’est effectué sans nouvelle opposition. »
Trouilles à Dijon.
Voici les détails reçus sur les trouilles qui ont éclaté à Dijon a l’oc-
casion de la célébration de la fête du 4 mai.
Voici les faits :
Au moment où M. le préfet se rendait à l’hôtel de ville, une dixaine
d’artilleurs île la garde nationale, appartenant à la compagnie ré-
cemment dissoute par arrêté du président de la république, affectaient
de se montrer, revêtus de l’uniforme, sur le passage du cortège. Le
préfet les fit avertir, par le capitaine de gendarmerie, qu’ils eussent
à se retirer. La moitié d’entre eux tint compte de cet avis ; l’autre
partie resta, résistant à toutes les observations : cinq des plus mutins
furent arrêtés et conduits à l’hôtel de ville.
La revue de la garde nationale et des troupes, pendant laquelle ils
s’étaient obstinés à paraître en uniforme, se termina sans autre inci-
dent. M. James Demontry élait dans les rangs, comme colonel de la
garde nationale. On sait que M. James Deinontry, représentant du
peuple, membre de la Montagne, a élé élu colonel, il y a quelques
semaines ; il a été reconnu en celte qualité à cette revue. Au milieu
de» cris de : Vive la Montagne ! Tire la république démocratique
et sociale ! vive le colonel 1 le défilé eut lieu sur la place d’armes en
face de l’hôtel de ville.
Quelques hommes, caporal en tête, se détachèrent des rangs et
furent au bureau de police où se trouvaient quelques gendarmes avec
leur capitaine, réclamer impérieusement la mise en liberté des cinq
artilleurs arrêtés.
Le brigadier de gendarmerie requit l’assistance du poste des trou-
pes de ligne, composé de 25 hommes, commandés par un officier, et
sous la garde duquel deux détenus se trouvaient déjà placés. L’officier
fit mettre sa troupe sous les armes, au moment où une masse dé gar-
des nationaux, qu’on évalue à douze cents, se précipita dans la cour
de l’Hôtel-de-Ville ; et alors commença une scène déplorable.
On menaça les gendarmes et la troupe de ligne, puis, voyant leur
insistance à se mainlenir dans le devoir, les éineutjers les frappèrent
à coups de crosse de fusil et les maltraitèrent gravement. Le capitaine
de gendarmerie a reçu plusieurs coups très violents, et sa vie a élé
en péril.'
Le poste de la ligne a été assailli à main armée et a repoussé deux
assauts qui lui ont été livrés à la hayonnelle. tiiipiiissaul à résister
longtemps, l’officier de la ligne fit rentrer ses hommes au poste et se
borna à en défendre l’entrée, conservant toujours ses deux prison-
niers.
Dans celte lutte, plusieurs des insurgés ont été blessés. Les trois
autres artilleurs arrêtés se trouvaient au bureau de police, et les in-
surgés demandaient avec violences et menaces leur mise en liberté.
M. Demontry crut devoir appuyer cette demande en déclarant au
commissaire de polieequ’il en prenait la responsabililé.Ce fonctionnai-
re consentit à faire droit à sesjréclamations.sur l’avis du capitaine de
gendar merie, alléguant qu’un substitut du procureur de la Républi-
que avait conseillé la mise en liberté.
Les trois artilleurs relâchés ont dft être repris hier 5. sur mandai
d'amener du parquet, pour rendre toute son autorité à la loi. Les
promoteurs de ces troubles regrettables n’ont pas élé reconnus. La
cour d’appel de Dijon a évoqué l’instruction de l’affaire, sur le ré-
quisitoire du procureur-général.
ZACHARIE.
Avance I
Est-ce vrai qu’en nos rangs tu venais t’engager ?
oberthal, à part.
Laissons-lui son erreur ! seul moyen, je le pense,
De pénétrer plus tard à Munster sans danger I
TRIO.
OBERTHAL,
Sous votre bannière
Que faut-il faire ?
* Je veux le savoir I
JONAS ET ZACHARIE.
Tu veux le savoir ?
Puisque tu persistes,
Des anabaptistes.
Voici le devoir ;
(Jonas va chercher au fond de la tente un broc et des verres qu’il
place sur la table).
ZACHARIE.
Le paysan et sa cabane.
En tout temps tu respecteras I
OBERTHAL.
Je le jure I
ZACHARIE.
Abbaye ou couvent profane
Par le feu tu purifieras !
OBERTHAL.
Je le jure I
JONAS.
Ou baron, ou marquis ou comte,
Au premier chêne tu pendras !
OBERTHAL.
Je le jure 1
ZACHARIE.
Toujours et quel que soit leur compte,
Leurs beaux écus d’or tu prendras !
OBERTHAL.
Je le jure !
JONAS.
Du reste, en bon chrétien, mon frère,
Saintement toujours tu vivras !
Zacharie et jonas, allant à la table et versant du vin
dans trois verres.
Versez, versez, frères.
Le doux choc des verres
Fait les cœurs sincères
Et les vrais amis !
A part.
Prudence et mystère...
Est-il bien sincère ?
Si par un faux frère
Nous étions trahis !
oberthal, à part.
Infâme repaire !
Race sanguinaire,
Au ciel et sur terre
Soyez tous maudits 1
AUX ANABAPTISTES.
J’y consens, mon frère.
Oui, le ciel méclaire :
Sous votre bannière
Je dois être admis !
JONAS.
Pour prendre Munster l’invincible,
Avec nous à l’instant tu marcheras 1
OBERTHAL.
J’irai I
JONAS.
Et son gouverneur si terrible...
OBERTHAL.
Qui?
ZACHARIB.
Le vieil Oberthal I
oberthal, à part.
Mon père I...
jonas, lui versant à boire.
Juste ciel !,„
Massacré !
oberthal, à part.
JONAS.
Et son fils, si nous pouvons le prendre,
Aux créneaux des remparts par nous sera pendu I
Tu le jures ?...
oberthal, avec indignation.
Qui ? moi ?
zacharie, avec colère.
Par la Bible, veux-tu
Jurer avec nous de le pendre !
OBERTHAL.
Je le jure !...
JONAS ET ZACHARIE.
C’est bienl... c’est entendu 1
ENSEMBLE.
JONAS ET ZACHARIE.
Verse, verse, frère,
Puisque Dieu t’éclaire ;
Sous notre bannière
Tu seras admis !
Embrassons-nous, frères.
Le doux choc des verres
Fait les cœurs sincères
Et les vrais amis ! .
OBERTHAL.
Verse, verse, frère,
Oui, le ciel m’éclaire ;
Sous votre bannière
Je dois être admis !
(A part.)
O Dieu tutélaire,
Ta juste colère
, Châtiera, j’espère,
De pareils bandits.’
JONAS.
Mais pourquoi dans l’ombre
Demeurer ainsi ?
Chassons la nuit sombre
Qui nous couvre ici.
(Tirant desa poche un briquet qu’il se met à battre.)
La flamme scintille.
Et grâce à ce fer,
Du caillou pétille
Et jaillit l’éclair.
(II allume une lampe qui est sur ia table.)
O douce rencontre.
Qui sans doute ici
L’un à l’autre montre
Les traits d’un ami !
(A la lueur de la lampe qui vient de s’allumer, tous trois se recon-
naissent.)
ZACHARIB.
O ciel !
JONAS.
C’est lui !
OBERTHAL
Brigand l
ZACHARIE.
Oberthal I
JONAS.
Cet infâme 1
OBERTHAL.
Mon sommellier,fils de satan!
JONAS.
Mon ancien maitre, mon tyran !
OBERTHAL.
Vous ! que tous deux l’enfer réclame 1
ZACHARIB.
Toi qui fis couler notre sang !
ENSEMBLE.
JONAS ET ZACHARIE.
Le ciel nous éclaire !
Réjouis-toi, frère, . *
A notre bannière,
Que tu vois d’ici.
O destin prospère.
Tu seras, j'espère.
Pendu par un frère
Et par un ami I
OBERTHAL.
O Dieu tutélaire !
Ta juste colère
Châtiera, j’espère.
De pareils bandits i
. Infâme repaire,
Race sanguinaire.
Au ciel et sur la terre
Soyez tous maudits !
(Les soldats qui étaient en sentinelles à la porte de la fente sont ac-
courus au bruit et entraînent Oberthal.)
zacharie, à Jonas.
Qu’on le mène au supplice t...
(Réfléchissant.)
Ah ! qu’un moine l’escorte 1
JONAS.
Sans consulter le prophète ! .
zacharie, avec impatience.
Il n’importe !
(Apercevant Jean qui entre dans la tente par la droite.)
C’est lui 1... va-t-en.
(Jonas sort par ie fond. Jean entre par la droite, l’air pensif et la
tête baissée.)
SCÈNE VII.
Zacharie, Jean.
zacharie , s’approchant de Jean.
Quel air pensif et soucieux.
Quand le guerrier prophète, inspiré par les cieux,
Apparaît dans sa gloire à l’Allemagne entière,
Comme l’ange vengeur que fa France révère I,.»
jean.
Jeanne d’Arc sur ses pas fit naître des héros,
Et je n’ai sur les miens traîné que des bourreaux 1
ZACHARIE.
Dans le sang des tyrans ils vengent nos injures!
jean , se parlant à lui-même et portant la main à son cœur.
Alors donc, ô mon cœur, d’où vient que tu murmures,
Et pourquoi sous mes pieds cet abîme de ffeu ?
(A Zacharie.)
Oui, je doute de vous, de moi-même et de ümi*.
Je n’irai pas plus loin !
ZACHARIE.
Qu’oses-tu dire î |