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116 LA BELGIQUE.
de sapins dont le noir feuillage troue durement la monotonie de la plaine. La Campine
Li se révèle déjà dans cette aridité; la charrue a beau défoncer la terre, celle-ci ne produit
qu'une récolte avare, et ce maigre rapport va s'éclaircissant
encore, à mesure qu'on s'écarte du potager verdoyant qu'on
a laissé derrière soi. Nous sommes dans le Hageland.
Des souvenirs se réveillent à ce nom : on pense aux
farouches paysans révoltés qui choisirent cet endroit désolé
pour refuge, dans leur lutte contre les soldats de la Répu-
blique française. Avant eux, les drapiers, proscrits par
Wenceslas, avaient également habité ces tourbières et de là
ravageaicnt tout le pays voisin.
Arrétez-vous à Acrschot, le temps d'examiner l'église,
d'un beau style ogival primaire à sa partie antérieure, et
le remarquable jubé archi-
fouillé qu'elle renferme,
ensuite la fameuse tour
LE JUBÉ DE L'ÉGLISE D'AERSCHOT. d'Aurélien, qui défendait
autrefois les remparts de
la ville, puis encore les restes d'une halle témoignant d'une
prospérité ancienne, enfin le pittoresque vite, dit les
Grands-Moulins : vous aurez tout vu. C'est l'irrémédiable
| décadence d'une petite cité que les luttes religieuses du
seizième siècle ont dépossédée de ses énergies. Telle autre
n'existe plus qu'à l'état d'humble village, Sichem, par
Her exemple, la plus vieille ville du
Brabant, selon le dire populaire, et
qui n'a plus, pour échapper à l'oubli
définitif, qu'une tour isolée, vestige
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de ses anciens remparts, jadis haute ÉGLISE SAINT-SULPICE.
de trois étages, avec
des salles à chacune d'elles ; une seule, encore visible,
développe une voûte en ogive, ornée, à la retombée des
nervures, de consoles sculptées à figures d'anges.
C'est la première étape vers cet autre « pardon »
célèbre, le pèlerinage de Montaigu. Hal et Montaigu, lieux
d'humanité souffrante et de foi dardée vers les glaives
dont fut transpercé le cœur de Marie! Quand, à Montaigu,
dans le soir, sous sa tour pareille à la tiare pontificale,
s'embrase, à l'incendie des cierges et des lampes, le sanctu-
aire de la mère divine, la secourable et propitiatoire église
vers laquelle convergent toutes les douleurs de la contrée,
al semble, au branle des multitudes processionnaires gravis-
ÉGLISE DE MONTAIGU, sant la butte sacrée et s'enfournant sous les porches ardents,
que se soient soudain ouverts, par-dessus l'effrayant remous
des afflictions terrestres, les seuils lumineux de l'espoir des résurrections. Montaigu est la
piscine miraculeuse dont les eaux vives stimulent les forces déclinantes de la créature.
Du fond des horizons elles accourent, les humbles âmes menacées de sombrer aux naufrages |