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514 LA BELGIQUE.
Van Dyck, dans le reste de sa carrière, a glorifié en accents plus pathétiques la grande
désolation du Crucifiement. Je ne vois à lui comparer, parmi les autres tableaux d’un
même sentiment que possède le pays, que le « Christ en croix » de Saint-Michel de Gand,
icf-d'œuvre aussi, dont le temps a malheureusement noirci les blondes colorations
un pur cl
sans rien enlever toutefois de la souffrante solennité du drame.
originelles,
X
La Dendre. — Passages de bateaux. — L'eau ouvrière et messagère. — Les ports en miniature, — Aspect d’Alost. — Le
Beffroi et Saint-Martin. — Un chef-d'œuvre de Rubens.— Grammont.— Fête des Fous. — L’Oudenberg et le « Tonnekenbrand »,
in amont de la Dendre, les prairies recommencent : c’est la continuation du grand
paysage vert que nous avons vu se dérouler autour de Gand. La bête et l’homme y fleurissent
d'une santé grasse, alimentée par l'ampleur des pâturages. Là, perdu à mi-corps dans les
hautes herbes où plongent à pleins fanons les bestiaux, on
goûte mieux qu'ailleurs les apaisantes sensations de la
nature. Au-dessus de soi les vapeurs humides forment, dans
les fluides argentins du ciel, de flottants archipels, et de
l'eau monte une brise fraiche qui fait onduler le paysage.
La présence constante de la rivière, qu'on peut suivre de
Termonde à Grammont et qui multiplie à travers la contrée
ses sinueux serpents, anime d’ailleurs, de ses passages de
bateaux, de ses cris de bateliers, de ses gaités de grand
route qui marche, le pays qui, sans celte vie silencieuse
à la fois et active, pourrait paraitre à la longue monotone.
De loin, par-dessus les herbages, on voit venir à soi des
pointes de mâts qui dépassent l'horizon plat et ont l'air
de s'avancer à travers les terres; puis brusquement, aux
tournants, les mâts, dont on ne distinguait d'abord que la
flèche à une grande distance, s’apercçoivent dans toute leur
hauteur, et le bateau apparaît, cheminant de son train lent
de grosse tortue.
Ces surprises sont fréquentes dans une région qui, comme
L'ÉGLISE SAINT-MARTIN,
celle-ci, est partout sillonnée par la rivière. De même que
la Lys à l'ouest de la Flandre, la Dendre est vraiment, à l’est, la grande artère du pays. Dès 1555,
Louis de Maele s'occupe de la canaliser entre Grammont et Alost, et, au siècle dernier, Charles
de Lorraine achève l'œuvre commencée en la canalisant d'Alost à Termonde. Elle traverse à
présent la grande plaine agricole, fertilisant la campagne de ses eaux et mettant entre les villes
et les villages groupés sur ses bords la facilité et la rapidité de ses moyens de communication.
Aux abords des agglomérations urbaines, l'approche des fabriques et des usines lui donne pour
un instant quelque chose du mouvement des rivières industrielles ; mais bientôt elle reprend sa
paisible physionomie de petit fleuve rustique, ses allures somnolentes de cours d’eau flânant sans
se presser à travers le paysage. Si vous en avez le loisir, montez à bord d’un de ces flottants
véhicules qui sont les diligences des rivières et des fleuves : de l’étambot, comme de la plateforme
d'un observatoire, vous verrez alterner avec le tranquille aspect des interminables prairies |