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Fig. I.
Fig. II.
I
SAINT-NICOLAS-EN-GLAIN
se rejoignent en trois groupes distincts, dont la réunion forme
le nœud de la racine, d’où prennent naissance les trois bran-
ches de l’Art. Celles-ci sont d’abord rapprochées comme en
une tige unique, représentant les cours communs à tous les
élèves, jusques et y compris la troisième année d’études;
puis vient la séparation des trois branches : peinture, sculp-
ture et architecture, avec les industries qui en dérivent. A ces
trois branches et leurs ramifications, sont fixées les mentions
des cours qui leur sont spéciaux, des années d’études aux-
quelles ces cours correspondent, des matières qui y sont ensei-
gnées.
L’emploi d’une coloration distincte pour chacune des
trois branches, permet d’en suivre sans peine la filiation.
Les études sont complètes en sept années. Nous avons
adopté ce nombre, pour permettre à tout élève d’avoir par-
couru entièrement son programme, vers l’âge de vingt ans.
C’est en effet à cet âge que la plupart des élèves, disons les
trois quarts, quittent l’Académie, soit que le service militaire
ou des obligations de famille les y contraignent, soit que
l’attrait des plaisirs les y sollicite trop souvent.
Nous ne prétendons pas que les élèves aient pu acquérir,
en un laps de temps relativement aussi court et à un âge si
peu avancé, une éducation artistique absolument complète ;
mais celle-ci sera en tout cas assez développée, pour qu’ils puis-
sent appliquer, dans la suite, avec beaucoup de profit, ce
qu’ils auront appris pendant leurs études.
Il y aurait utilité, croyons-nous, à ce que chaque école
publie un programme de cours conçu d’après ce modèle, en
faisant subir à celui-ci toutes les modifications que nécessite-
raient les différences des milieux.
CONCLUSION.
Une étude consciencieuse des industries artistiques, de
leurs progrès et de leurs besoins, nous a permis d’émettre les
idées que nous avons exprimées, les opinions que nous avons
défendues, les propositions auxquelles nous avons conclu.
Depuis plusieurs années, nous suivons d’un œil attentif la
marche et le développement de ces industries, nous analy-
sons les facteurs de leur prospérité ; nous considérons la lutte
économique, universelle et incessante, qui se livre pour leur
extension et leur perfectionnement.
Nous devons à la vérité de dire que, si nous avons pu
constater partout des élans vigoureux, une activité sans trêve,
notre pays n’est plus, bien entendu, pour quelques-unes de
ses industries, à la hauteur des perfectionnements artistiques
et des découvertes scientifiques modernes réalisés chez les
nations rivales, y compris les Etats d’Amérique.
La preuve de son insuffisance réside, indéniablement, dans
l’infériorité de son exportation artistique, comparée à l’im-
portation qui s’y fait de produits étrangers.
C’est la cause du malaise général dont il souffre. C’est l’in-
dice d’une situation économique anormale, d’une décadence
matérielle de nos industries si nombreuses et si variées.
Ces symptômes graves se compliquent d’un manque absolu
d’équilibre dans la répartition de nos forces artistiques. D’une
part, nous déplorons l’absence de capacités, d’érudition et
d’expérience, chez nos artistes industriels ; d’autre part, nous
constatons une véritable pléthore de peintres, de sculpteurs
et d’architectes, tous adeptes de ce qu’on est convenu d’appe-
ler le grand Art, mais généralement peu aptes à utiliser leurs
facultés dans les arts appliqués.,
Tandis que, chez nos voisins, les industries d’art sont
entourées ostensiblement d’une considération qui rejaillit sur
ceux qui y déploient leurs talents, nous nous traînons encore
sous le joug d’un vieux préjugé, qui frappe de déchéance
l’artiste s’adonnant à la pratique de l’art appliqué.
Il appartient à l’enseignement des arts du dessin de porter
remède à cet état de choses, dont nos artistes sont les pre-
miers à souffrir. Il peut réagir contre des idées invétérées et
pernicieuses. C’est à lui de guider nos jeunes gens vers les
voies larges et rémunératrices, que les industries artistiques
demandent à grands cris, et ouvrent à leur initiative, à leur
talent, à leur science, à leur énergie.
Que l’on ne nous taxe point d’exagération, quand nous
attribuons cette toute-puissance à l’influence de l’enseigne-
ment des arts du dessin. Que l’on prenne seulement en con-
sidération le nombre énorme d’individus, qui passent annuel-
lement par les cours de nos académies et écoles de dessin ;
que l’on tienne compte du fait qu’une seule académie, celle
de Bruxelles, par exemple, est fréquentée par des élèves
appartenant à environ quatre-vingts catégories de métiers
différents.
Peut-on douter encore de l’étendue du pouvoir que possède
l’enseignement artistique, pour modifier le cours général des
idées de nos futurs artistes et pousser ceux-ci vers des car-
rières nouvelles ou trop longtemps négligées ?
Il entre dans l’ensemble des missions si intéressantes de
nos écoles de dessin, d’éclairer ceux qui viennent y chercher
des connaissances, que ne peuvent leur donner l’étude per-
sonnelle ou la pratique à l’atelier, sur les voies à suivre pour
acquérir des notions artistiques. D’autre part, elles doivent
les rendre aptes à perfectionner, chacun dans la branche
d’activité particulière qu’il se sera assignée. C’est par l’accom-
plissement de cette double fonction que les établissements
d’enseignement des arts du dessin mériteront surtout la con-
fiance du pays et la protection des pouvoirs publics.
Dans le but de mettre l’enseignement artistique à la hau-
teur de ce rôle, nous demandons qu’il soit basé sur l’applica-
tion des méthodes intuitives en donnant, dès le début de
celle-ci, une adaptation directe aux besoins industriels, tout
en permettant à l’élève d’acquérir, au cours même de cette
étude, une solide instruction artistique, technique et histo-
rique.
Par cette méthode, si l’élève ne présente que des disposi-
tions ordinaires, il n’en deviendra pas moins un artisan plus
habile et mieux instruit. S’il est doué du feu sacré et du cou-
rage qui caractérise les grands artistes, il trouvera, malgré
tout, en dépit des plus difficiles obstacles, l’occasion de don-
ner libre cours à ses inspirations et ses aptitudes artistiques
pour la réalisation d’une œuvre d’importance, voire même un
chef-d’œuvre capable d’illustrer son nom.
Bruxelles, le 15 janvier 1891.
Jean Baes,
Sous-Directeur de l’École des Arts décoratifs de Bruxelles,
Membre du Conseil de perfectionnement des arts du dessin
ARCHITECTURE
Deux églises romanes aux environs de Liège
Un journal bruxellois attirait récemment l’attention de
M. le Ministre de l’Intérieur sur la chapelle de l’ancien
prieuré de Saint-Nicolas-en-Glain, près Liège; il affirmait
« qu’il serait possible, à très peu de frais, de rétablir très
convenablement » ce rare spécimen de l’architecture du
xiie siècle.
L’auteur de cet article a lu XHistoire de l'Architecture en Bel-
gique, de Schayes, — qu’il cite d’ailleurs, — mais à coup sûr
il n’a pas vu, depuis plusieurs années, l’édifice dont il parle.
Schayes, dans l’ouvrage bien connu que nous venons de
mentionner, représente déjà l’église comme passablement
dégradée. Le dessin qu’il en donne (t. I, p. 356), et d’après
lequel est exécuté notre croquis (fig. I), montre le monument
en assez triste état ; or, ce dessin n’est lui-même que la repro-
duction de celui qui accompagnait une notice publiée par
M. Lavalleye en 1839 (1).
A cette époque, et même quelques années plus tard, il eût
cependant été possible encore de sauver l’église d’une des-
truction complète.
En 1845, lorsque la Commission des monuments signala
au Gouvernement l’intérêt archéologique de cette construc-
tion, l’état dans lequel elle se trouvait était encore assez satis-
faisant pour qu’une somme de 2,000 francs fût jugée suffisante
pour faire face aux travaux les plus urgents.
Le propriétaire offrait de céder l’édifice, avec le terrain suf-
fisant pour établir les dégagements nécessaires, pour 2,5oo fr.
La dépense eût donc été fort minime ; mais une condition
sine quâ non posée à la vente, par le propriétaire, était que
l’église serait rendue au culte. Ce fut là, sans doute, ce qui
empêcha de donner suite au projet de restauration ; en effet,
les autorités diocésaine et provinciale ne se montrèrent pas
disposées à souscrire à cette condition.
Il est à noter que la chapelle, rendue au culte, fût devenue
bientôt insuffisante : la population de Saint-Nicolas-en-Glain,
qui était de 1,600 habitants en 1845, se trouvait presque dou-
blée vingt ans plus tard, et son accroissement nécessitait, en
1873, la construction d’une église nouvelle; la chapelle de
l'ancien prieuré resta donc à son propriétaire, qui ne trouva
sans doute aucun intérêt à la faire restaurer et se contenta
de la couvrir tant bien que mal, afin de l’utiliser comme
grange ou comme hangar ; les fragments les plus intéressants
de l’ornementation furent transportés au Musée de l’Institut
archéologique de Liège ; ils ne sont donc pas entièrement
perdus pour l’archéologie. Quant au monument, il en arriva
peu à peu à un état de délabrement tel qu’il faut abandonner
aujourd’hui toute idée de restauration.
(1) Messager des sciences historiques de Belgique, 183g, p. 413.
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L’ÉMULATION.
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