Full text |
ront cette autorité que commande seule la certitude que les
juges connaissaient ce qu’ils avaient à juger.
*
* *
Eesie la diffculté de choisir ces architectes expérimentés
et autorisés, qui auront la difficile mission de juger les œu-
vres de leui's confrères. Trois systèmes sont tour à tour em-
ployés : la désignation directe des jurés par l’administration;
la délégation par des corps compétents ; l’élection par les
concurrents.
Cette dernière méthode paraît la plus libérale ; mais elle
présente une très grande difficulté : on ne voit guère, en effet,
le moyen d’obtenir pour ces élections une majorité absolue ;
il faudrait que les concurrents fussent tous présents à un pre-
mier et à un second tour de scrutin. Cela n’est guère possible
pour un concours anonyme, et devient irréalisable lorsque
les concurrents habitent au loin. On se contente donc d’un
vote par correspondance et de la majorité relative, ce qui
laisse, à coup sûr, maîtresse de l’élection une minorité qui a
su et pu se concerter.
La désignation directe des jurés par l’administration est
évidemment contraire aux principes; le jury doit être neutre
et impartial, au-dessus de toute suspicion, pleinement indé-
pendant. Certes, ces qualités peuvent se rencontrer en fait,
et se rencontreront ordinairement chez les jurés ainsi dési-
gnés; mais leur honorabilité personnelle elle-même ne les
mettra pas à l’abri de la suspicion qui s’attache à l’origine
défectueuse de leur nomination. Ce mode de composition du
jury doit donc être écarté comme contraire à l’essence même
du concours.
Quant à la délégation par des corps compétents, elle pré-
sente toutes les garanties désirables. On a demandé ces délé-
gations à l’Académie des Beaux-Arts, au Conseil général des
bâtiments civils, au jury de l’Ecole des Beaux-Arts, à la
Société centrale des architectes français, quelquefois à l’un ou
l’autre simultanément. C’est évidemment, de tous les modes
possibles de nomination des jurys, celui qui soulève le moins
d’objections et qui mérite le plus d’être recommandé.
*
* *
Tel est l’exposé général des idées théoriques que fait naître
la question des concours publics. On voit par là combien
cette question a été, en réalité, peu étudiée ; on se guide par
le hasard des bonnes intentions, on tâtonne, et il n’y a guère,
dans la pratique des concours, que confusion et contradic-
tions. Et cependant, les concours publics répondent à une
même pensée, découlent d’un principe constant ; il y a évi-
demment une méthode qui est la meilleure et qui devrait être
appliquée partout, par toutes les administrations ; il ne leur
manque, pour cela, que de la connaître. Tel serait le résultat
très utile d’une action du gouvernement, unifiant et codifiant
les règles qui doivent régir la préparation, l’exécution et le
jugement des concours publics.
L’étude qui précède permettra de dégager d’une façon plus
concrète les règles à proposer dans ce but.
J. Guadet.
(L'A rchitecture .J
Le nouveau mobilier de la salle du Conseil
communal à Ixelles
n sait combien était défectueuse l’ancienne
installation du Conseil communal d’Ixelles.
Les discussions se passaient dans une salle
nue, étroite, mal planchéiée, autour d’une
longue table couverte d’un tapis vert fauve ;
les conseillers étaient assis sur de mauvaises
chaises, peu commodes et d’un luxe douteux.
On a reconnu la nécessité de donner aux conseillers le
confort qu’exigent les assemblées délibérantes, souvent rete-
nues en des séances longues et fatigantes ; on a voulu aussi
maintenir à ces séances le décorum et le prestige qu’elles
méritent.
Dans ce but, l’Administration a décidé le renouvelle-
ment du mobilier de la salle du Conseil.
Ce nouveau mobilier comprend vingt sièges de conseillers
disposés sur quatre rangs, dont deux à droite et deux à
gauche, de façon à laisser un large espace entre les deux
premières rangées de pupitres; de plus, sur une estrade
surélevée de deux marches, se trouvent, au fond, les places
destinées au bourgmestre et aux quatre échevins.
Le motif dominant de cet ensemble, c’est le triple siège
du bourgmestre et de deux des échevins, qui, par son impor-
tance et ses détails décoratifs, met en relief l’autorité qui pré-
side aux séances du Conseil et donne au magistrat qui
procède aux cérémonies du mariage un cadre absolument
prestigieux.
Ainsi que certaines chaires de magistrats florentins ou
siennois de la Renaissance, le siège du bourgmestre est cou-
ronné d’une sorte de dais en forme de fronton à la coquille
rayonnante, abritant un élégant cartouche italien, timbré de
l’arbre traditionnel (Elsene), emblème de la commune; en
haut, en guise de fleuron, l’urne électorale dont émane
l’assemblée, et dans la frise, des guirlandes de myrte symbo-
lisant le mariage.
Le style de la Renaissance italienne du xve siècle, adopté
pour ce mobilier, ainsi que pour les tables, chaises et tabou-
rets qui le complètent, s’harmonise bien avec l’ordonnance
corinthienne de la salle.
Quant à la décoration pierre blanche et or, elle s’allie dans
une même gamme monochrome avec la tonalité générale du
meuble où n’entrent que le chêne légèrement teinté et doré
et le cuir de porc jaune que sertit un galon historié.
Chaque place de conseiller comprend, comme à la Cham-
bre, un siège basculant à accoudoirs et un pupitre à tiroir, le
tout présentant des conditions de confort qui ne nous
paraissent pas exister au même degré ni à Bruxelles, ni à
Saint-Gilles.
Au dos des sièges se trouve inscrit le nom de chacun des
conseillers.
Pour la célébration des mariages, les deux premiers rangs
de pupitres amovibles s’enlèvent et laissent libre un large
espace réservé aux chaises des mariés et des témoins.
Ce dispositif a été nécessité par les dimensions restreintes
de la salle, mais rien n’empêche d’en concevoir un autre, le
jour où il faudra agrandir la maison communale, le mobilier,
paraît-il, ayant été étudié en prévision d’un autre emplace-
ment.
On reconnaît difficilement l’ancienne salle aux tons som-
bres et au plancher maculé.
Une intelligente restauration a remis au jour le superbe
parquet du pavillon Malibran.
Les portes en bois de citronnier ont été remises en état et
c’est la seule critique que nous ferons à l’ensemble de ce
magnifique mobilier. Il eût fallu, à notre sens, remplacer
ces portes qui jurent avec la teinte claire du chêne.
Les affreux plâtres anonymes qui déc... paraient la salle
ont fait place aux superbes bustes du Roi et de la Reine,
sculptés par Vinçotte, et ces bustes jettent une note d’art
dans cet ensemble de goût sobre et châtié.
L’auteur des dessins de ce mobilier absolument réussi, est
M. Brunfaut, architecte à Ixelles.
(L'Eclair, d’Ixelles.)
Les arts décoratifs
illiam Morris est ce poète tapissier
qui a monté à Londres une exposi-
tion permanente d’art décoratif. C’est
lui aussi qui écrivit il y a quelque
temps News front Nowhere, une uto-
pie, toute pleine de projets artisti-
ques, rénovation sociale basée sur
l’amour de tout travail devenu
désormais un art.
Dans la Société nouvelle du mois de
mai dernier nous trouvons de très
belles pages de Morris sur les arts mineurs, « espérances et
craintes de l’art ». C’est, épars dans tout l’article, les élé-
ments d’une intéressante synthèse d’art industriel populaire.
Morris se préoccupe avant tout de cet art à l’aide duquel
les hommes ont de tous temps cherché à embellir les choses
familières à la vie de tous les jours, la peinture, la menuiserie,
la charpenterie, la ferronnerie, la poterie, le tissage et beau-
coup d’autres. Cet art-là est de la plus grande importance
pour le public en général, mais surtout pour les artisans qui
façonnent tout ce qui a trait au bâtiment et qui doivent con-
sidérer ces choses comme inachevées tant qu’il n’y a en elles
un motif de décoration.
L’artisan a une tendance innée à la décoration. Mais il a
besoin de culture pour lui donner un emploi et une signifi-
cation. Toute chose faite par la main de l’homme a une forme
qui doit être belle ou laide, laide si elle est en désaccord avec
la nature, si elle la contrarie. Cette forme ne peut nous être
indifférente, car nos yeux sont aptes à se fatiguer de cette
quantité de formes dans les objets que nous contemplons tous
les jours, et il faut que la décoration intervienne pour aiguiser
nos sens émoussés en cette matière. « C’est à cette fin que
sont emmêlés ces modèles compliqués, que sont inventées ces
formes étranges en lesquelles les hommes ont trouvé plaisir
depuis si longtemps, formes et complications qui ne doivent
pas nécessairement arrêter la nature, mais dans lesquelles la
main de l’artisan est guidée au travail dans le chemin qu’elle
lui indique ; jusqu’à ce que le tissu, la coupe et le couteau
semblent aussi naturels, sinon aussi beaux, que le champ vert,
le bord de la rivière ou les roches de la montagne.
« Faire prendre plaisir aux gens dans les choses qu’ils sont
forcés d'employer, voilà le grand devoir de la décoration ; faire
135
L’ÉMULATION.
136 |