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dérisoires se lassait, non sans raison il faut le reconnaître;
nous devions avoir recours à d’autres dessinateurs qu’on ne
trouvait pas aisément et qu’il fallait payer plus cher ; après
la troisième année, malgré nos 38o abonnés, nous accusions
une perte de plus de 1,000 francs.
Ce n'était guère encourageant !
Que nous restait-il à faire ? Augmenter le prix de l’abonne-
ment, c’était hasardeux, quoique ce prix soit encore fort infé-
rieur à celui de beaucoup de publications analogues. Réduire
le nombre de planches? Supprimer le texte, auquel les colla-
borateurs faisaient aussi souvent défaut? Cesser la publication?
Allons donc! Nous n’y pensions guère.
N ous nous mîmes à la recherche d’un éditeur ; la maison
Leys, successeur de la firme Simonau etToovey, dont la répu-
tation artistique méritée paraissait présenter une garantie
suffisante, nous offrit des conditions acceptables; nous trai-
tâmes avec elle, et le journal, financièrement parlant, marcha
relativement bien pendant quatre ou cinq ans.
C’est à cette occassion qu’apparut le nom de Société Coopéra-
tive d’Architecture qui étonna beaucoup de nos confrères et
dont nous croyons utile de vous dire quelques mots.
La Société Centrale, comme toute société ayant pour but
l’étude ou l’agrément, n’avait aucune personnification civile,
elle ne pouvait passer aucun contrat, poser aucun acte
susceptible d’être reconnu par la loi !
Force nous fut donc de constituer, dans son sein, une
société anonjmie dont les actes fussent valables en justice ;
elle prit le nom de Société Coopérative d’Architecture ; son capital
de 4,000 francs, cette garantie des administrateurs, composé
de 80 parts de 5o francs chacune, fut souscrit par une vingtaine
de membres,
Ce ne fut pas sans peine, sans de longs et vifs débats, que
ses promoteurs firent admettre cette idée de créer une société
commerciale — sans espoir de bénéfices cependant — au
sein d’une société artistique ; mais c’était une nécessité, il fal-
lait s’y résigner et nous aimons à reconnaître qu’après le vote,
où nous n’obtînmes qu’une faible majorité, les plus ardents
opposants furent les premiers souscripteurs. Ce résultat nous
permit non seulement de traiter avec M. Leys, qui nous
donna bientôt de nombreux motifs de mécontentement, mais
de confier, il y a quatre ans, l’édition de l'Émulation à la mai-
son Ch. Claesen, de Liège, dont nous avons tout lieu d’être
satisfaits aujourd’hui.
Notre Revue, qui a incontestablement une certaine influence
en Belgique et est très appréciée à l’étranger, compte actuel-
lement près de 5oo fidèles abonnés. Son avenir nous paraît
assuré et nous pourrons la léguer non sans quelque fierté à nos
successeurs, le jour où nous ne nous sentirons plus l’énergie
nécessaire, non seulement pour la maintenir au rang qu’elle a
su atteindre, mais pour la faire progresser encore.
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* *
L’institution des conférences n’a pas eu tout le succès que
nous en attendions ; parler en public n’est guère du goût des
architectes, — c’est peut-être un tort ; après quelques timides
essais tentés en 1878 avec le concours de M. l’ingénieur Bur-
ton, ces causeries durent cesser faute d’auditeurs.
Nous fûmes plus heureux dans l’organisation, de 1877 à
1881, de quelques expositions, d’abord limitées aux membres
de la Société, et de concours ouverts généreusement à tous les
jeunes architectes belges. Puis vinrent les concours plus im-
portants et les expositions triennales de i883 et de 1886, au
profit desquels nous supprimâmes les expositions intimes et
les petits concours annuels.
Quel qu’ait été leclat des expositions de i883 et de 1886,
on ne peut s’empêcher de regretter qu’elles aient produit des
déficits malgré les subsides importants que l’Etat, la province,
la ville de Bruxelles et la commune d’Ixelles, nous avaenit
accordés.
La suppression, à leur profit, des expositions et des concours
annuels, qui n’entraînaient, elles, que des dépenses modestes,
fut peut-être une erreur, et il y aura lieu, selon nous, d’exa-
miner s’il ne faut pas y revenir.
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Nous croyons vous avoir montré, Messieurs, que les diffé-
rents buts inscrits au programme de 1873 ont été atteints en
grande partie. Quant au bureau de renseignements, destiné à
faciliter aux uns la recherche d’un emploi et aux autres celle
d’employés capables, s’il n’a fonctionné officiellement que
pendant quelques années, il n’en est pas moins vrai qu’il a
produit officieusement des résultats heureux. Nous pourrions
citer bon nombre d’entre nous qui ont pu, à cause surtout des
relations qu’ils s’étaient créées par et dans la Société Centrale,
obtenir des positions honorables, dont ils n’auraient probable-
ment pas eu connaissance s’ils n’en avaient fait partie, si cette
source de renseignements, qui résulte du groupement des indi-
vidus, leur avait fait défaut.
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Indépendamment de la réalisation du programme élaboré
par ses fondateurs, la Société s’est occupée, durant les 191 as-
semblées générales qu’elle a tenues pendant ces quatorze ans,
de nombreuses questions d’intérêt général pour nos confrères ;
vous les connaissez, Messieurs ; cependant je crois nécessaire
d’en rappeler brièvement quelques-unes.
Les droits et les devoirs de l’architecte ont fait l’objet de
discussions intéressantes, qui nous ont amené à réclamer de
nos gouvernants l’institution d’un diplôme d’architecte et la
création d’une école supérieure d’architecture, et comme
corollaire, à rédiger officieusement le nouveau programme
d’études de l’Académie et de l’école des arts décoratifs de
Bruxelles. Nous avons eu la vive satisfaction de le voir
adopter récemment, sans réserves, par le Conseil communal.
Quoique l’on puisse estimer que la formation du nouveau
personnel de cette école eût dû faire l’objet de concours
publics, nous avons été heureux de voir parmi les nomina-
tions, celles de deux de nos membres : M. Jean Baes, appelé
aux fonctions de sous-directeur, et M. Maukels, à celles de
professeur à l’École des arts décoratifs.
N ous avons examiné aussi la question, si difficile à résoudre,
des honoraires de l’architecte. A défaut d’une solution plus
satisfaisante, nous avons admis, après la Société des Archi-
tectes liégeois et la Chambre syndicale des architectes de
Bruxelles, le tarif d’honoraires gradué des architectes alle-
mands, publié dans notre bulletin annuel de 1884.
Vous savez de quel intérêt nous avons entouré celle des
concours publics, au sujet desquels nous vous soumet-
trons tantôt le projet d’une requête réclamant, du pouvoir
législatif, une loi qui oblige l’Etat et les administrations
publiques à mettre au concours les plans de toute construction
élevée au moyen des deniers publics. Cette loi serait aussi bien
justifiée que celle relative à la mise en adjudication publique
des travaux de l’État.
En attendant, nous nous sommes efforcés d’en propager le
principe par la persuasion et nous avons obtenu quelques
succès : les administrations communales de Bruxelles, deSaint-
Josse-ten-Noode, d’Etterbeek, de Mouscron,de Charleroi ont
déjà mis ou nous ont promis de mettre au concours leurs écoles,
leur hôpital, leur hôtel de ville ; la province de Brabant met-
tra prochainement au concours le Palais de Justice de
Nivelles. On a parfois vivement critiqué les concours sans
primes ; ils sont certainement critiquables, cependant nous
estimons que le concours, même sans primes, vaut encore
mieux que le favoritisme déplorable qui règne encore dans
certains milieux.
Nous nous sommes aussi occupés des architectes provin-
ciaux et des moyens qu’ils emploient pour monopoliser
entre leurs mains les travaux communaux. Nos vives récla-
mations, nos démarches réitérées auprès des autorités pro-
vinciales du Brabant, ont amené la révision complète du règle-
ment qui les régit.
Le règlement nouveau de cette province défend formelle-
ment à ces fonctionnaires de s’occuper d’autres travaux que
ceux dont la députation permanente les charge ;fnos confrères
d’Anvers, auxquels nous serons heureux d’accorder l'appui et
la publicité de notre Revue, s’occupent d’obtenir le même
résultat. Nous sommes certains d’arriver sur ce point et sur
d’autres encore dont nous allons nous occuper, à des solutions
satisfaisantes dans toutes nos provinces, si nos confrères, nos
membres correspondants veulent bien justifier plus souvent
leur titre en nous signalant, avec pièces à l’appui bien en-
tendu, les abus dont ils ont connaissance. ;
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Voilà, Messieurs, quels ont été les nombreux travaux et les
quelques succès de la Société Centrale d’Architecture pen-
dant les 14 années qui viennent de s’écouler.
Au cours de ces travaux nos pertes ont été nombreuses :
Funck, président d’honneur, Pauwels, membre d’honneur,
Rzetkowski, Juris, Du Sausoy, Van Malderen, Vandernoot,
Schoy, Neute, membres effectifs, et tout récemment encore
De Vlamynck nous ont été enlevés par la mort.
Permettez-moi, avant de terminer, de vous rappeler encore
la grande part que prit à ces travaux l’un de nos membres les
plus actifs, les plus anciens, les plus dévoués, Charles Neuté,
Directeur de notre Revue l’Emulation, Secrétaire des exposi-
tions nationales d’architecture dei883 et 1886, mort le 2 avril
dernier. Nous avons cru ne rendre qu’un hommage justement
mérité à sa mémoire, en plaçant dans ce local, son portrait en
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L’ÉMULATION.
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